Forum de fansub, de traductions et de discussions françaises autour du groupe japonais Arashi. |
| Mer 17 Avr - 17:13 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
Age : 44
Localisation : Osaka!!! enfin!!!!
Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| Rappel du premier message :Bonjour! Aujourd'hui, je commence à reposter Jinsei ici. Je suppose que certaines d'entre vous l'ont déjà lu (peut-être sur l'AnF). Sachez que depuis cette première diffusion, certaines modifications ont été apportées. Cette fiction est classée MA car il y a dans certains chapitres des scènes coquines explicites C'est avec plaisir que je lirai toutes vos remarques, commentaires, impressions, suppositions, questions, ou simples encouragements. L'écriture de cette fiction a commencé suite à deux rêves faits par ma meilleure amie. Elle m'a fait tomber dans les mangas, les animés et c'est moi qui lui ai fait découvrir Arashi. A l'époque elle était fascinée par Ohno, son chant et sa danser. Elle nous a quitté depuis plus de 6 ans et depuis terminer cette histoire est un challenge. J'aime et déteste cette histoire mais je me satisfais pas de la laisser inachevée sachant que j'ai encore sur mon ordinateur certains passages écrits par Carine et encore inédits. Je souhaite finir cette histoire afin de lui rendre hommage. Merci pour votre soutien. - Personnages Originaux en ordre d'apparition:
Miura Teruki (dit Teru): c'est un ami d'enfance de Sho. C'est même son meilleur ami. Il est devenu ami avec tout le groupe peu de temps après la formation de celui-ci. c'est un bourreau de travail.
Lucie Bergevin : C'est la meilleure amie de Cécile. Elle est e se remet d'un syndrome de Guillain Barré, c'est pourquoi quand il faut rester longtemps debout elle est en fauteuil roulant. Son hobby est le piano. Elle joue très bien. Elle est ingénieur du son et travail principalement dans des studio d'enregistrement. Au début de l'histoire, elle travaille dans un studio d'enregistrement de Strasbourg.
Cécile Miura (née Bianchi): C'est la femme de Teru. Dans les premiers chapitres Cécile s'appelle déjà Miura car Teru et elle se sont déjà mariés en France. Il ne reste que la fête au Japon. Lucie est sa meilleure amie. Elle est interprète-plurilingue.
Airi Storck (née Miura) (appelée Nee-chan )(surnommée The FG ou The FanGirl par Arashi quand elle n'est pas là):Sœur aînée de Teru. Elle est mariée à un viticulteur alsacien (Thierry) avec qui elle a un enfant (Thomas/Toma) âgé de moins d'un an.
Thierry Storck : C'est le mari d'Airi. C'est un viticulteur alsacien pur souche. Il n'est pas allé au concert d'Arashi parce qu'il s'était porté volontaire pour babysitter son fils.
Thomas Storck : Premier enfant de Thierry et Airi. Il a entre 6 mois et 1 an mois au début de cette histoire.
Benjamin Bianchi (dit Ben) : C'est le petit frère de Cécile. Il considère Lucie comme ça seconde sœur.
Mme Miura : C'est la mère de Teru. Elle est maître chado, c'est à dire une professionnelle de la cérémonie du thé
Chapitre 20: Astrid Liévin : Femme de Christian, elle est l'élève de la mère de Teru. C'est Cécile qui l'a introduite auprès de sa belle-mère et c'est avec Astrid que Cécile pratique la calligraphie. Le 11 mars elle est avec Cécile.
Christian Liévin : Mari d'Astrid, il fait partie du personnel de l'ambassade de France
Léna Streuber : C'est une jeune journaliste allemande qui a été envoyé par sa "rédaction" au Japon et plus précisément en stage à Nippon Térébi. Au chapitre 20 elle découvre les activités des journalistes de news zero et elle a été confié au bons soins de Sho (qui l'appelle Müller)
Marie Bianchi : C'est la mère de Cécile, elle est infirmière
Antonio Bianchi : C'est le père de Cécile. Il est militaire (à la retraite).Ses parents étaient des immigrants italiens, il est français
Chapitre 52: Anna Bergevin : C'est la mère de Lucie. Elle est éducatrice spécialisée. Elle est d'origine suédoise
William Bergevin: C'est le père de Lucie. Il est ingénieur. Il a fait une grande école supérieur.
Xavier : C'est le meilleur ami de Lucie. Ils se rencontrer pendant leur études supérieurs. Il est ingénieur du son comme Lucie mais a étendu son expérience à la prise de son lors de tournage. C'est ainsi qu'il a rencontré Nino la première fois.
Miura Rinoka: C'est la cousine de Teru.
- Code des Polices d'écriture:
Dialogues en italique: Les personnages parlent en français Blabla en Edwardian Script ITC: c'est la police du journal de Lucie et celui de Cécile Blabla en Vivaldi : C'est de l'italien Dialogues en Tempus sans ITC :C'est de l'anglais Dialogues enBerlin Sans FB: c'est de l'allemand
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Lun 23 Sep - 3:27 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| Bonjours à toutes! C'est lundi et me revoilà! ... donc.... un nouveau chapitre Depuis le chapitre précédent, on a abandonné la narration au jour le jour. On va faire des sauts dans le temps, micro ou macro (on reste au micro pour cette fois). - Chapitre17:
28 janvier 2011 Cher journal, Me voici dans le train qui me ramène à Strasbourg. Un froid de loup m’a enveloppée en arrivant sur la France. Benjamin a été adorable comme toujours me laissant pleurer contre son épaule quand Son image s’est imprimée derrière mes paupières dans l’avion. Sa simple présence m’a fait craquer. Ce que je n’avais dit à personne depuis cette horrible nuit je l’ai formulé en quatre mots : « J’ai vu Nino ». Puis j’avais fermé les yeux et mes larmes avaient coulé malgré mes paupières closes. J’avais senti son bras passer derrière mon dos pour m’attirer contre lui et c’est comme ça qu’après avoir trempé sa chemise je m’étais endormie jusqu’à l’arrivée ou presque… malheureusement pour mes tympans. … J’y crois pas Cécile vient de me contacter par MSN . Ce type était devant chez eux quand ils sont revenus de l’aéroport. Son alibi : me parler parce qu’il ne comprend pas pourquoi je l’ai ignoré depuis ce jour. Non mais j’y crois pas. Grrrrrrrr. J’ai vraiment envie de hurler mais là c’est pas possible. Et quelque chose me dit que les chansons de mon i-pod ne vont pas m’aider…
************************** ++Cécile++
Quelqu'un s'excitait sur la porte d'entrée. En fait, alternativement sur la porte et sur la sonnette. Je n'étais pas particulièrement peureuse, mais vivre à Paris quelques années m'avait rendue prudente. Et même si Teru me répétait souvent que Tokyo était une ville plus sûre et que je n'avais pas à m'en faire, je n'étais pas très rassurée d'entendre un tel acharnement à une heure pareille (il était presque minuit). D'autant que j'étais seule, Teru m'ayant dit qu'il passerait certainement la nuit au travail comme ça lui arrivait parfois (pourquoi avais-je épousé un acharné du boulot ?!). Je tentais d'analyser calmement et rapidement la situation. Il y avait bien un code et un interphone en bas de l'immeuble, mais la porte était souvent entrebâillée à cause des enfants qui entraient et sortaient à toute heure de la journée. ...Mais nous étions la nuit. Donc la porte devait être fermée, à moins que quelqu'un ne se soit faufilé derrière un des voisins. Autre possibilité, c'était un des voisins justement, qui venait me demander... du sel ? Drôle d'heure et drôle de méthode ! Dernière solution, il y avait le feu dans l'immeuble et on prévenait tout le monde en catastrophe. Oui, ça, c'était plausible. Et il ne me restait qu'une seule chose à faire, ouvrir et me préparer à sortir, malgré le pyjama que j'avais déjà enfilé. J'attrapai Nuit qui semblait à la fois plus curieuse et plus effrayée que moi, et m'apprêtai à ouvrir quand j'entendis une voix derrière la porte. - Cécile, si tu es là, ouvre ! Temps mort. Miaulement de la crapule qui voulait soudain se réfugier dans mon cou. Cette voix nasillarde... Je déposai le chat au sol, fis tourner la clé et entrouvris le battant. - Jun ? Qu'est-ce que tu fiches ici à cette heure ? Et c'est quoi ces manières ? J'explique comment à mes voisins que mon mari a des amis aussi barbares ? Il avait arrêté de frapper sur la porte, mais son doigt restait sur la sonnette. Je dégageai complètement l'ouverture et lui attrapai la main pour l'éloigner du mur. - Non mais ça va pas ? Tu te rends compte du bruit que tu fais ? Il me regarda d'un air bizarre, les yeux pas très fixes et le corps étrangement caoutchouteux. Il me faisait penser à une plante un peu trop souple à laquelle on aurait retiré le tuteur qui la soutenait jusque-là. - T'en as mis du temps à ouvrir ! J'allais finir par défoncer la porte... Je jetai un coup d'œil vers les autres appartements. Heureusement, personne ne s'était manifesté. Et aucune porte n'avait de judas. Je ramenai mon attention vers l'homme en face de moi dont j'avais lâché la main. Il n'avait pas bougé mais regardait par-dessus mon épaule. - Qu'est-ce que tu veux ? Si c'est pour voir Teru, il bosse. - Laisse-moi entrer. - Pourquoi je ferais ça ? Donne-moi une seule bonne raison. - Si tu ne me laisses pas entrer, je fais un strip-tease, je sonne à toutes les portes et je m'installe devant la tienne. Il était sérieux là ? A attendre que l'heure soit raisonnable pour chatter avec Lucie, j'avais dû m'endormir devant mon écran et j'étais en train de cauchemarder, je ne voyais pas d'autre explication. Mais la vision devant moi avait ouvert son manteau et commençait à déboutonner sa chemise en la sortant de son pantalon. Cauchemar ou non, il était hors de question que quelqu'un voit ça devant chez moi. Je savais l'attachement qu'avaient les Japonais pour l'absence de vagues et jusqu'à présent nos relations avec le voisinage étaient bonnes. Je m'écartai donc de la porte pour lui laisser le passage. - Ah ! quand même... grommela-t-il en entrant. Je refermai la porte après avoir lancé un dernier coup d'œil dans le couloir. Apparemment, pas de réaction de ce côté-là. Soit, ils avaient eu peur, soit, ils dormaient comme des souches. Je me retournai vers mon visiteur impromptu. Il s'était assis (ou laissé tomber ?) et tentait de retirer ses chaussures. Vu l'acharnement qu'il mettait à défaire des lacets inexistants, associé à la sonnette et au strip-tease, j'en vins à la seule conclusion possible. Je le forçai à retirer son manteau, récupérai le bonnet, l'écharpe, les gants et mis le tout sur la patère et la tablette prévues pour. Me penchant vers lui, je lui glissai que j'allais lui préparer un thé à ma façon en lui indiquant l'emplacement des chaussons. Puis je me dirigeai vers la cuisine après avoir enfermé dans sa pièce une Nuit qu'il ne me paraissait pas raisonnable de laisser seule avec un homme qui empestait autant l'alcool. Une fois le thé lancé, je revins dans le couloir pour constater qu'il était toujours à la même place. Il avait abandonné la bataille et contemplait maintenant la porte d'un air vague. - Jun. Laisse tomber les lacets et vire tes chaussures. Allez ! Il obéit, me laissa le relever et le conduire dans le salon. Je le déposai sur le canapé où la façon dont il s'installa pouvait vaguement passer pour une manière de s'asseoir. Entendant la bouilloire siffler, je repartis dans la cuisine pour revenir quelques instants plus tard avec une théière fumante et un bol. Je n'avais aucune illusion sur le fait que pour ramener son taux d'alcool à un niveau raisonnable, il allait falloir plusieurs heures. Mais l'hydratation par l'eau ne lui ferait aucun mal. - Dis-moi, tu es venu ici comment ? - ...Taxi, finit-il par répondre. Bon, au moins, je n'avais pas à craindre qu'on ne découvre une voiture plantée dans les buissons de l'entrée de l'immeuble d'en face. Je le regardai un moment, hésitant sur ce qu'il fallait faire. Il ne m'avait pas l'air d'être un alcoolique patenté, donc s'il avait tant bu et s'était pointé chez moi, c'était qu'il y avait une bonne raison. Et je n'étais pas sûre d'avoir envie de la connaître. Je lui servis un bol que je lui calai dans les mains en lui ordonnant de boire puis partis chercher Nordy pour avancer dans ma traduction en attendant qu'il se décide à parler. Ou à s'endormir, parce qu'il m'avait l'air bien amorphe. J'envoyai un mail à Lucie pour lui dire que j'étais décidément trop fatiguée pour attendre qu'elle soit sortie du boulot et qu'on pourrait papoter le lendemain. Je préférais savoir de quoi il retournait avant de lui parler de mon visiteur surprise. J'avais traduit deux pages lorsque mon voisin reposa la tasse vide sur la table basse. - T'en as parlé à Teru ? Sa voix était basse, un peu pâteuse, et il ne me regardait pas. Je lui répondis du tac au tac tout en fermant et posant mon ordinateur. - T'en as parlé à Satoshi ? - Oui. Sa réponse me laissa sans voix. - Je lui ai dit que je les avais vus. J'ai pas parlé de toi et je sais pas ce qu'il a dit à Teru. Je ne savais pas quoi dire. Le simple fait d'évoquer le sujet me faisait mal au cœur. Pourtant je savais qu'il ne fallait pas que je garde tout ça pour moi parce que ça finirait par me rendre folle. Et il était certainement le seul avec qui je pouvais parler. - Il a dit quoi ? demandai-je timidement. Jun eut une sorte de rictus. - Ça l'a scié. Je sais pas comment il voulait me le dire, mais j'avais compris qu'il était venu pour rompre. Alors je lui ai balancé ça. - Rompre ? m'écriai-je effarée. Il se tourna enfin vers moi. - Ouais. Il m'a quitté. Comme ça. Jeudi, on faisait l'amour en se disant qu'on s'aimait et dimanche il m'a largué. Il répéta cette phrase plusieurs fois en semblant se recroqueviller sur lui-même. Leur couple m'avait paru si... solide. Ils avaient l'air complices et complémentaires, accordés sur bien des points et laissant à l'autre la liberté dont il avait besoin. Mais j'étais bien placée pour savoir qu'on ne quittait pas toujours l'autre pour des raisons évidentes. Et que parfois même l'amour n'était pas suffisant pour conserver cette entité "à deux". Je ne pensais pas que Jun me considérait comme une amie. D'autant moins que l'homme de discorde était mon mari. Alors pourquoi était-il venu chez moi ? Car c'était bien moi qu'il était venu voir, pas Teru. - Vos amis ne savent pas ? Il me jeta un regard lourd. - T'as vraiment envie que j'aille dire à tout le monde que mon mec se tape le tien ? J'inspirai un bon coup. Il était ivre. Il était malheureux. Il disait la vérité. Mais il me faisait mal. J'étais malheureuse aussi, mais j'étais sobre et je devais donc réussir à calmer les choses. Parce que sinon, on ne ferait que s'enfoncer tous les deux. Et dans ce cas, je ferais aussi bien d'aller tout de suite chercher les bouteilles en réserve dans ma cuisine. - Je parle de vous deux. Ils savent que vous n'êtes plus ensemble ? Il haussa les épaules, et ramenant ses genoux contre lui en les enserrant de ses bras, il enfonça sa tête dedans. Je crus entendre un marmonnement qui pouvait passer pour un oui. Je soupirai, jetant un vague coup d'œil à la table, puis me levai pour rapporter la théière et le bol vides dans la cuisine. Quand je revins, je vis qu'il me suivait des yeux. - Je suis pas venu pour que tu te casses ! Tu pourrais au moins rester là... - Oh ! c'est bon. Désolée si je ne sais pas comment réagir. Tes amis sont au courant, nous on ne s'entend pas, mais c'est moi que tu viens voir. Ça peut expliquer que je sois paumée, non ? Alors je m'occupe les mains comme je peux, c'est tout. - Ils sont ensemble. Je m'apprêtai à me rasseoir, mais sa phrase me stoppa net. Je le regardai longuement, bien consciente que ma tête devait me donner l'air d'une idiote. - Pardon ? - Toshi et Teru. Ils sont ensemble. Ce soir. Enfin, cette nuit quoi. Je m'assis et me sentis commencer à trembler. Une désagréable sensation de picotement dans les oreilles et de sueurs froides dans la nuque me cria que non seulement je ne mettais pas sa parole en doute, mais qu'en plus, je m'y attendais. - Comment...? - Comment je sais ? Je les ai vus. J'étais... Il se mit à pleurer. Son discours devint confus, pas totalement incohérent, mais très embrouillé. De tout ça, je finis par comprendre qu'il avait voulu faire un tour en sortant de leur studio. Et qu'il les avait aperçus. Il les avait suivis un temps, cherchant à être sûr de lui, et les avait vus monter ensemble dans la voiture de Teru. Et s'y embrasser avant de démarrer. Pas besoin d'être grand clerc pour deviner la suite. Et l'heure qu'il me donna correspondait à peu près à celle à laquelle Teru m'avait appelée pour me dire qu'il ne rentrerait pas. Je ne savais plus quoi faire, ni quoi penser. Jun continuait de verser toutes les larmes de son corps, secoué de sanglots. Teru ne m'avait parlé de rien. Le lendemain du mariage, il avait utilisé l'excuse que je lui avais fournie, n'avoir pas réussi à échapper à ses amis autrement qu'en s'enfermant dans une chambre où il s'était endormi de fatigue. Et j'avais fait semblant de le croire. Je prétendais vouloir faire le brave petit soldat qui poursuivait le combat sans se soucier de savoir si ses chefs savaient pourquoi il combattait encore. Un écart. Ce ne pouvait être qu'un écart, quelque chose d'unique qui ne se reproduirait plus. Mais Satoshi avait quitté Jun. Et il savait que Jun savait pourquoi. Et cette nuit, ils étaient ensemble. Comment trouver le courage de lui demander d'être franc, de choisir clairement ? J'avais tant couru après un bonheur fragile que je ne me sentais pas la force de tout briser maintenant. Même si je savais que c'était lâche. - Cécile... Il avait pris ma main, s'était accroché à mon bras. - Cécile, reprends ton mari. Garde-le. Emmène-le loin d'ici. Je veux qu'il revienne. Je l'aime... Je l'aime tellement ! Il me lâcha et se recroquevilla à nouveau. - Ça fait si mal... Je le contemplai un instant. Il ressemblait à un petit garçon dont le cœur est trop gros pour son chagrin. Mon premier mouvement me poussait à le prendre dans mes bras pour le consoler. C'était plus fort que moi. Et je me souvenais de la chaleur apaisante qu'il m'avait offerte au mariage. Mais bien que très souvent tactile, je n'osais jamais approcher trop les gens dont je ne pouvais anticiper les réactions, ni ceux que je savais pudiques. Je me relevai et entrai dans ma chambre. Je comptais lui prendre une couverture. De toute façon, il passerait la nuit ici, c'était une certitude. Quand je revins, je vis qu'il avait disparu. Inquiète, je le cherchais vers les toilettes, la dose d'alcool qu'il avait ingérée pouvant y mener rapidement. Mais il n'y était pas. Pas plus que dans la salle de bain ou la chambre d'amis. Par contre, ses affaires étaient toujours dans l'entrée et la porte toujours fermée à clé. Je revins vers le salon en passant par la cuisine, mais là non plus, personne. Puis je me rendis compte que la fenêtre était ouverte. Craignant qu'il n'ait fait une bêtise, je me précipitai vers le balcon. Il était là, planté dans le froid, une cigarette à la main, la contemplant d'un air perplexe. - Tu n'as pas de briquet ? demandai-je en claquant des dents. Il leva le nez vers moi, me regarda de travers et fondit en larmes. Je lui pris le poignet et le fis rentrer dans l'appartement. Fermant soigneusement la fenêtre, je le traînai à ma suite vers la chambre. - J'ai pas envie de coucher avec toi. Même pas pour les rendre jaloux. Je le poussai sur le lit et me plantai devant lui. J'essayai de mettre dans mon regard tout l'instinct maternel que je pouvais avoir. - Je suis même pas sûre que ça marcherait. Mais t'en fais pas, tu ne m'intéresses pas non plus. On va juste dormir. Tu as besoin de cuver ton vin... - Mouu!... C'était de la bière et du saké ! - Peu importe, fis-je en lui retirant la chemise qu'il avait à moitié enlevée tout à l'heure pour qu'il puisse la remettre le lendemain. Tu restes dormir ici, et tu ne discutes pas. Il était toujours assis sur le bord du lit, me regardant d'un air un peu bovin. - Et tu dors avec moi ? Je parvins à le pousser à s'allonger. - Oui. - Pourquoi ? demanda-t-il alors que je m'installai à côté de lui. - Parce que tu as mal. ...et parce que j'ai mal aussi... Je pris sa tête et ses épaules dans mes bras et les serrai contre moi en lui caressant les cheveux. - Pleure Jun, pleure autant que tu veux. Et pleure pour moi aussi. Parce que je n'ai plus de larmes. Je sentis qu'il m'avait écoutée et que même s'il n'avait pas compris ce que j'avais dit en français, il avait saisi l'idée. Il pleura longtemps avant de s'endormir enfin, toujours secoué de petits sanglots. Quelque part, peut-être que j'espérais que Teru nous trouve ainsi, enlacés dans le même lit. Peut-être que ça l'aurait rendu jaloux. Peut-être qu'il se serait posé des questions sur ce qu'il faisait et qu'il m'aurait donné des réponses. Peut-être. De toute façon, il ne rentra pas cette nuit-là.
*********************** ++Jun++
- C'est froid ! - Evidemment que c'est froid ! Je vais pas te mettre de l'eau chaude, tes yeux ne dégonfleront jamais ! - Mais tu pourrais prévenir ! C'est lâche d'attaquer un aveugle. J'étais torse nu, la tête renversée sur le dossier du canapé où était étendue une serviette éponge, et cette femme si brusque était en train de recouvrir mon visage d'une serviette humide. Humide et froide. Elle avait mis des glaçons dans son eau ou la serviette avait passé la nuit dehors ? - Arrête de faire ta chochotte en sucre, ça va pas te tuer. Tu voudras manger ? J'avais l'impression que beaucoup de choses se résolvaient pour elle en passant par l'estomac. Pas étonnant qu'elle ne soit pas filiforme. Mais quand je m'étais réveillé ce matin, la tête calée contre sa poitrine, je ne nierais pas que je m'étais senti comme rassuré, à l'abri, protégé par ce moelleux et la chaleur qui s'en dégageait. Et, très vite parce que c'était une chose à laquelle je ne voulais pas trop penser, je m'étais dit que si ça avait été quelqu'un de plus mince, j'aurais pu la prendre pour Toshi et je me serais sûrement mis à pleurer. Alors qu'avec elle, aucun risque de confusion. Puis je m'étais demandé comment j'avais atterri là, dans ce qui était manifestement SON lit. Et le film de ma soirée était repassé rapidement. Comment j'avais suivi Toshi, comment je l'avais vu retrouver Teru puis l'embrasser dans cette voiture. La façon dont mon cœur avait voulu s'échapper de ma poitrine et se jeter à ses pieds pour le supplier de ne pas faire ça. Ensuite, il y avait un blanc, puis la vision d'un barman inconnu me servant des verres les uns après les autres. J'avais dit vouloir tester toute sa réserve de bières et de sakés. Je crois bien avoir réussi à aller au bout. Mais après ça, il m'avait mis dans un taxi et j'avais donné une adresse qui n'était pas la mienne. Je ne donnais jamais mon adresse aux taxis. Je me faisais toujours déposer un peu plus loin dans le quartier, pour éviter les problèmes. Et quand la voiture avait disparu, je faisais le reste du chemin à pied. Sauf que cette fois, j'avais bloqué en voyant l'immeuble où ils habitaient. Pourquoi avait-il fallu qu'ils achètent près de chez moi ? Lui bossait près de chez Nino pas loin d'Akihabara, et elle devait travailler dans le coin des ambassades, à Minato, non loin d'où vivait Sho. Il y avait quand même plus proche que Shibuya ! J'avais dû tenir la porte pour un homme qui sortait promener son chien, et j'en avais profité pour monter. Je voulais entrer chez elle, lui parler. Je ne savais plus exactement ce que je voulais lui dire, mais je me souvenais que j'avais cette idée en tête. J'avais dû me montrer persuasif pour être à présent dans son lit. ...Dans son lit !! Mais qu'est-ce que je foutais là, moi ? La dernière femme dans le lit de laquelle j'avais dormi, c'était ma sœur, chez mes parents, et parce que ceux-ci avaient refusé que Toshi utilise la chambre de leur fille et auraient préféré nous faire dormir dans le jardin plutôt que dans la même pièce. Et ma sœur n'était pas là puisqu'elle s'était mariée six mois plus tôt. Depuis, ils avaient accepté ma relation avec mon leader même si je sentais bien qu'ils étaient gênés lorsque l'on se montrait trop proches. Mais ça n'avait rien à voir avec l'hostilité de ses parents à lui. Ils n'avaient jamais pu se mettre en tête que leur fils n'aimait que les hommes. Tout comme moi, il n'avait jamais touché à une femme. Ça ne le répugnait pas, c'était juste que ça ne l'intéressait pas. Ce qu'il aimait se trouvait entre les jambes d'un homme, c'était tout. Encore heureux que ses géniteurs n'aient pas connu la vie sexuelle totalement débridée de leur fils avant qu'il ne se stabilise avec moi... Et donc là, je venais de passer la nuit dans les bras d'une femme... L'épouse de l'homme à cause duquel j'avais perdu celui que j'aimais. Et cette femme était en train de faire en sorte que je puisse sortir aujourd'hui sans avoir l'air bouffi que donne une nuit de larmes. Bizarrement, je n'avais pas la gueule de bois. Quand je l'avais remarqué à voix haute, elle avait souri presque naturellement et m'avait dit qu'elle avait des recettes récoltées au cours de ses nombreuses expériences personnelles avec l'alcool. Pas moyen de savoir lesquelles, mais en tout cas, c'était efficace. - Alors Jun, tu voudras manger ? me demanda sa voix depuis une station éloignée. - T'es où ? - Dans la cuisine, c'est mieux pour préparer le repas. J'ai plus de choses sous la main. Sauf si tu veux manger des plantes vertes. Ah ! y a pas moyen que je fasse rôtir le chat, elle est trop petite, y aurait rien à grignoter. - Comment tu fais pour plaisanter ? - Je me force, dit-elle en se rapprochant. Mais honnêtement, que je pleure ou que je rie, ça va changer quoi ? La Terre va pas s'arrêter de tourner et y a des gens plus malheureux que moi. Toi par exemple. On dirait que t'as dormi dans une ruche et que les locataires n'étaient pas d'accord. - Hey ! C'est pas si dramatique quand même !! - Si si ! Je passai les doigts sous la serviette, tâtant mes paupières et estimant qu'elle devait exagérer quelque peu. - Laisse la fraîcheur agir, Jun, me dit-elle en attrapant mon poignet. Il y avait plusieurs choses qui m'agaçaient chez elle. Sa facilité à être tactile (même si je ne me plaignais pas pour cette nuit), sa désinvolture avec les règles nippones de bienséance qu'elle semblait pourtant connaître, sa manie de nous appeler par nos prénoms... - Arrête de m'appeler Jun ! Le silence fut la seule réponse que je récoltai. Pourtant, malgré mes yeux fermés et ma main qu'elle avait lâché, j'avais l'impression qu'elle était encore à côté de moi. J'étendis le bras et heurtai effectivement son épaule. Je la saisis pour m'assurer qu'elle ne s'esquiverait pas comme elle semblait avoir l'intention de le faire et ôtai le tissu qui m'aveuglait avant de tourner la tête vers elle. - Garde ça Jun. T'as meilleure mine que tout à l'heure, mais c'est pas encore ça. - Ça ira pour le moment. Ça me gonfle que tu m'appelles par mon prénom. Pourquoi t'écoutes pas ce qu'on te dit ? Lucie-chan m'appelle Matsujun, t'as qu'à faire pareil. Ou au moins, ajoute un kun si tu tiens à Jun. - C'est si gênant que ça pour toi ? - On n'est pas si proches. - Comment je fais pour devenir plus proche de toi si t'ouvrir mon lit ne suffit pas ? Je vis bien qu'elle plaisantait, mais je devais reconnaître qu'elle n'avait pas totalement tort. - Pourquoi t'aurais envie d'être proche de moi ? Et puis, c'est pas seulement moi. Y a Aiba-chan que seule sa famille appelle Masaki. Et Kazu aussi. A part sa grand-mère, personne ne l'appelle Kazunari ! Pourquoi t'insiste autant ? - Je vous l'ai dit, finit-elle par lâcher après un long silence, dans ma famille on appelle les amis par leur prénom. J'eus l'impression que sa voix tremblait un peu. Que l'on tienne tant chacun à notre position ne nous permettrait pas d'aller bien loin. Et si ma raison était le savoir-vivre, la sienne me paraissait toujours obscure. Surtout venant de quelqu'un qui semblait pouvoir s'adapter à son environnement. - Cécile-chan... Elle m'interrompit en se levant pour ouvrir la porte du séjour au chat qui miaulait derrière. La bestiole à ressort lui bondit dans les bras et se frotta contre elle en ronronnant. Elle gratouilla le petit corps en se déplaçant vers la fenêtre et en lui parlant dans une langue étrangère sur un ton que j'imaginais plus adapté aux bébés. Devant ce spectacle affligeant, je préférai remettre la serviette sur mes yeux et me réinstallai contre le dossier du canapé. - Je croyais que tu avais du mal avec les chats ? - J'adore les chats. Leurs poils ont tendance à me faire éternuer, mais j'adore ces petites bêtes. Elles sont câlines à outrance quand elles veulent, et y a pas besoin de s'en occuper comme d'un chien qui a toujours besoin qu'on le sorte. J'aime leur indépendance. - Ce sont des profiteurs. - Aussi. Mais si ça marche, pourquoi s'en priveraient-ils ? J'avais vraiment du mal à suivre son fonctionnement. - Les chiens sont fidèles. - Gagner la confiance d'un chat est infiniment plus agréable. A taille égale, sa voix est beaucoup moins déplaisante que celle d'un roquet. Et je préfère que Nuit me saute dans les bras plutôt que le rottweiler de ma tante et ses soixante kilos. - Dis pas ça à Aiba-chan, il serait trop triste que tu fasses tant de distinctions. Il a une telle ménagerie chez lui qu'il embauche quelqu'un pour s'en occuper quand il n'est pas là. Elle rit avec légèreté et je l'entendis se rapprocher de moi. - Pourquoi ça ne m'étonne pas de sa part ? Je soulevai un instant un coin de serviette pour voir qu'elle s'était assise en tailleur au bout du canapé, le chat sur les genoux. - Tu es déjà allé à l'étranger ? - Oui, plusieurs fois. - Longtemps ? J'avais le sentiment que la conversation était devenue bizarrement sérieuse alors que le ton restait le même. - Moins que Lucie-chan, répondis-je en pensant aux semaines que cette dernière venait de passer au Japon. Elle prit une grande inspiration avant de la bloquer quelques secondes puis de poursuivre. - Je ne sais pas si tu peux comprendre alors. Une grande partie de ma famille vit dans la même région, en Alsace. J'ai fait mes études à la fac à Paris. Il y a environ cinq cents bornes et quelques heures de train de distance, et au fil des mois, je ne rentrais plus tous les week-ends. Mais il y avait pas loin quelques oncles et des amies de ma mère. Je me suis rapidement fait des connaissances, et même quelques amis. J'ai vécu en foyer une année avec des filles venant du monde entier, puis une amie m'a proposé de prendre une colocation avec elle. - Lucie ? - Non, une autre qui s'est mariée depuis. Comme beaucoup de mes connaissances de l'époque, je suis repartie dans ma région d'origine où j'ai trouvé du travail. Nous étions tous éparpillés, mais nous sommes restés en contact. Elle se tut. Je me redressai dans une position plus civilisée et posai la serviette qui n'était plus si froide sur le tapis. En lui jetant un coup d'œil, je vis qu'elle n'était plus vraiment avec moi. - Cécile ? appelai-je doucement. Elle frissonna et son regard sembla capter ma présence. Elle eut un sourire triste et poursuivit. - Tout ça pour dire que je n'ai jamais été si éloignée de ceux que j'aime. Je suis venue habiter au Japon et y faire ma vie. Ici, je ne connais que Teru et ses parents. Je vais rencontrer des gens au travail, je ne compte pas rester enfermée chez moi toute la journée, mais je me sens isolée malgré ces deux mois de présence. Je crois que j'ai eu envie de garder quelques repères pour ne pas me sentir totalement perdue. Vous appeler par vos prénoms était ce que j'avais de mieux sous la main mais je ne vous ai pas demandé votre avis... Je suis bête, hein ? Je la comprenais un peu mieux, en effet. Et l'idée fugace me revint que, si Teru avait décidé de faire comme sa sœur et s'était installé en France, Toshi serait toujours dans mes bras. Et elle ne partagerait pas son mari. Parce que de toute évidence, Teru n'avait pas envie de faire un choix. - Tu as meilleure mine maintenant, fit-elle sans transition. Un peu de maquillage et on ne verra plus rien. Elle se leva avec un petit sourire forcé et se dirigea vers sa cuisine. - Tu veux manger quelque chose, Matsujun ? - Je prendrai la même chose que toi, dis-je en me levant à mon tour pour la suivre. Je vis qu'elle avait préparé un petit-déjeuner purement traditionnel et je sortis les poissons grillés du feu pendant qu'elle garnissait un plateau qu'elle apporta dans le séjour. Nous mangeâmes en silence et je finis par prendre congé, mes obligations se rappelant à moi par le biais de la douce voix de mon manager. Elle m'accompagna jusqu'à la porte en tenant le chaton sur son épaule. - Tu vas continuer d'éternuer. - Mais elle si câline... Et puis, si je la pose, elle va vouloir se sauver quand tu sortiras. - Mmm. Merci pour cette nuit, Cécile. Je suis désolé que tu m'aies vu dans cet état. Je n'ai aucune excuse pour avoir débarqué comme ça chez toi. Pas plus qu'elle, je ne voulais aborder la raison de mon enivrement. Pourquoi jouions-nous à l'autruche à ce point ? Ce qu'elle vivait était différent de ce que je traversais, mais je me sentais vraiment proche d'elle. Et c'est très naturellement que je me penchai vers elle pour coller mes lèvres à sa joue, comme j'avais vu sa mère et Lucie le faire, avant de lui dire, la main sur la poignée : - Continue à m'appeler Jun. Maintenant que je sais pourquoi, ça me va. Je vis que je l'avais scotchée sur place et me doutai que bientôt elle pleurerait si je ne me sauvais pas très vite. Je sortis donc rapidement et quittai l'immeuble sans croiser personne. Quand j'arrivai à la JE, mon manager m'embarqua d'autorité pour une destination que j'avais oubliée. Nous étions presque arrivés quand il exprima enfin le fond de sa pensée. - Matsujun, qu'as-tu encore fait hier soir ? Heureusement que tu vas juste passer un essai, pas faire des photos. - Uehara-san, ils la connaissent ma belle gueule. Et je pense pas que ça les intéresse. - Et tu crois que ton jeu d'acteur va être au top si tu passes ta nuit à faire des galipettes avec Ohno-san ? Vous n'avez jamais été raisonnables, vous deux. La nuit est faite pour dormir ! - T'inquiète pas pour ça, dis-je en retenant une grimace. Il avait toujours eu du mal avec notre libido et j'avais toujours pensé que sa femme ne devait pas s'amuser souvent, avec lui. J'espérais que, au moins, sa double maternité la rendait heureuse. - Oh ! Au fait, repris-je en fermant la portière par laquelle je venais de descendre, tu vas devoir admettre qu'il y a d'autres raisons à ma fatigue. - Mmm ? demanda-t-il en me faisant entrer dans le bâtiment. D'autres raisons que des heures à faire des folies de vos corps ? - Ouaip : désormais, l'homme que tu as devant toi est célibataire. - Pardon ? Il s'était arrêté net et je vis en me retournant que l'incrédulité s'appelait aujourd'hui Uehara Saiichi. - Dis, c'est pas parce que t'es marié depuis dix ans que tu as oublié ce qu'était le célibat ? - Le célibat, c'est quand on est libre de mettre qui on veut dans son lit sans avoir de compte à rendre. Cette définition très directe venait de nous être donnée par un assistant qui arrivait juste après nous. - Bonjour Ginta-kun, fis-je en m'inclinant légèrement devant mon kohai. Tu sembles savoir de quoi tu parles. Fais quand même attention à ce que tu dis. Il est un peu coincé, mais ça m'embêterait d'avoir un manager à l'hôpital pour cause de choc psychologique. - Je suis certain que je pourrais tout à fait le remplacer, Matsumoto-san. - Oi ! Ne sois pas si sûr de toi, Fujiwara-kun ! Etre le manager de Matsumoto-san n'est pas à la portée du premier venu. Ça demande de l'expérience ! - Vous aviez mon âge quand vous avez commencé... - Et moi, interrompis-je en souriant aux deux, j'étais plus jeune et moins connu. Uehara-san a raison, ça ne s'improvise pas. Mais c'est une bonne chose, d'avoir de l'ambition. Et maintenant, si nous nous occupions de ce pour quoi nous sommes là ?
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Cécile dit (20:05): Coucou la belle ! Alors, pas trop dure, la reprise du boulot ? L'appart ne fait pas trop vide ?
Lucie dit (12:08): Konnichiwa ! Ah ! non pardon, pour toi c'est Konbanwa. T'as déjà fini ta journée alors que je n'en suis qu'à la pause déjeuner... Le boulot va bien. La cathédrale n'a pas changé de place non plus. Tu sais quoi ? Toi qui voulais toujours faire un bonhomme de neige dans le jardin sous nos fenêtres ? Ben, on est parties l'année où ça aurait été possible. C'est ballot, ne ?
Cécile dit (20:08) : Trop bête ! Je réserve pour l'an prochain alors ! ^@^
Lucie dit (12:08) : Voilà. Fais donc ça. Comme ça, je suis sûre de te voir.
Cécile dit (20:09) : Hey ! Tu reviendras me voir avant ! En plus, tu as deux bonnes raisons, non ? (Je parle de Kazunari.)
Lucie dit (12:10) : Attends, j'ai un appel. Lucie dit (12:18) : Trop cool ! C'était New York ! Ils me re-veulent, je pars là-bas le mois prochain !!
Cécile dit (20:18) : C'est bien, les voyages forment la jeunesse !
Lucie dit (12:20) : Bon allez, et toi ? Comment s'est passée ta première semaine seule au milieu des Japonais ? Pas trop paumée ? (j'avoue que ne plus entendre parler que français et allemand, ça fait tout bizarre...)
Cécile dit (20:23) : Tu vas rire, mais j'ai passé ma semaine à causer français à l'ambassade. Il y a là-bas un jeune attaché culturel très dynamique qui a des tas de projets. Et il ne semble pas vouloir se satisfaire des francophones...
Lucie dit (12:25) : C'est bien, ça te fait du boulot ! Et tu vas rencontrer des gens comme ça !
Cécile dit (20:25) : Voui voui. Si je suis pas devenue aphasique d'ici-là.
Lucie dit (12:26) : Pour une interprète, ce serait bête...
Cécile dit (20:28) : Hai ! Oh ! j'ai aussi rencontré la femme d'un obscur fonctionnaire administratif (bon, il doit pas être si obscur que ça, mais je ne l'ai encore pas vu). Elle venait se renseigner sur les maîtres chadô parlant français...
Lucie dit (12:29) : Miura-san va être ravie d'avoir une rombière en plus! lol
Cécile dit (20:31) : C'est pas une rombière, elle est plus jeune que nous ! Mais je lui ai évidemment indiqué ma belle-mère. Si ça ne colle pas entre elles, elle lui trouvera quelqu'un d'autre. Et...
Lucie dit (12:31) : Oui ?
Cécile dit (20:31) : La p'tite dame m'a convaincue de faire de la calligraphie avec elle... Bon, je reconnais qu'elle n'a pas eu à pousser très fort, ça fait un moment que ça me tentait. Mais je me suis dit que c'était l'occasion à ne pas rater. Bon, elle, elle en fait depuis plus d'un an... Mais j'ai confiance en moi !
Lucie dit (12:35) : Ça c'est cool ! Et puis, tu pourras commencer à fréquenter la bonne société consulaire de Tokyo. Tu vas devenir une de ces Môdames, tu vas voir ça ! J'oserai plus te parler... :-p Lucie dit (12:47) : ...Bon, manifestement, t'es occupée. Et moi faut que je file. Bye bye et à la prochaine !
Cécile dit (21:13) : Hum ! Désolée, ma belle-mère a été plus bavarde que prévu. Et je pense que tu es repartie au turbin. Donc tu n'auras ce blabla qu'en rentrant ce soir. Lucie, si tu as besoin de quelque chose, n'hésite pas à demander à mes parents. Ça leur fera plaisir. Et puis... tu obligeras mes petits vieux à sortir. C'est une œuvre salutaire ! Surtout que Ben repart pour Rodez après-demain. A bientôt, et prends soin de toi !
Voilà ... Qu'est-ce que ce chapitre vous inspire? | | | Mer 25 Sep - 17:49 | | | Manue33 Carnival Night part 2 Messages : 466
Age : 42
Localisation : Cenon / Lacanau
Humeur : endormie
| J'avais oublié cette illustration | | | Jeu 26 Sep - 11:22 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
Age : 44
Localisation : Osaka!!! enfin!!!!
Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| Bonjour! Manue, si cette illustration te fait cet effet, comment as-tu pu l'oublier? En attendant, voici un nouveau chapitre. - Chapitre 18:
++Sho++
- Moshi, moshi ? grognai-je en ouvrant mon téléphone. - Sakurai-san ? Ici le patron du bar Storm. Pourriez-vous venir chercher Ninomiya-san et Matsumoto-san s’il vous plait. - Pourquoi ? - Ils sont… heu… ils ne sont pas en état de rentrer chez eux par eux même, et vous êtes leur deuxième nom à appeler. - Très bien. J’arrive… En raccrochant, je baillai et jetai un coup d’œil à mon réveil. Je m’étais couché il y avait moins d’une demi-heure, et il fallait maintenant que je me relève et me rhabille pour m’occuper de nos deux benjamins. Pourquoi s’étaient-ils saoulés en chœur ces deux-là ? Qu’arrivait-il à Nino ? Parce que, si je pouvais imaginer la raison de la future gueule de bois du plus jeune, je ne voyais pas pourquoi son aîné de deux mois l’avait imité alors que, jusque-là, il l’avait au contraire protégé. Le geek se noyait rarement dans l’alcool tout simplement parce que ça ne lui réussissait pas vraiment. Ensuite, on évitait de le faire dans des lieux publics, même si le Storm était plus un refuge pour nous qu’un bar anonyme. Quand j’arrivai devant l’enseigne, celle-ci était éteinte et l’éclairage avait été réduit au minimum. Le patron devait être en train de m’attendre pour fermer son rideau, ou plutôt, d’attendre que je récupère mes amis. Une fois à l’intérieur, il me salua, et m’indiqua le coin où nous avions l’habitude de nous installer quand nous voulions passer une soirée tranquille. C’était un box composé de deux banquettes encadrant une table. J’y découvris les deux sales gosses, chacun affalé sur une banquette. Le patron m’expliqua qu’il n’avait réussi à leur faire quitter le zinc qu’une fois qu’ils étaient trop imbibés pour le contredire, qu’avec un habitué, il les avait déplacés jusqu’à cet endroit discret, et qu’il avait préféré ne m’appeler qu’après le départ de la plupart de ses clients. J’appris aussi que Nino fréquentait assidument l’endroit depuis quelques jours, mais que, jusqu’à ce soir, il était resté suffisamment lucide pour repartir en taxi. Le patron du Storm m’aida à embarquer mes deux ivrognes comateux dans la voiture, et sur le trajet entre le bar et chez moi, je priai qu’aucun des deux ne ressente le besoin d’alléger son estomac de son contenu alcoolisé. S’ils épargnèrent mon véhicule, Nino s’exprima sur les chaussures du veilleur de nuit venu à mon secours. Non seulement j’avais dû payer leurs ardoises au Storm, mais en plus il fallait que je m’excuse maintenant pour l’incident. Quand Jun se mit à son tour à verdir, je réussis miraculeusement à le convaincre que ma salle de bain serait plus adéquate pour qu’il se vide que l’ascenseur ou le hall d’entrée de l’immeuble. Coucher les deux ivrognes dans le canapé, après les avoir fait mettre en sous-vêtements, finit de m’achever. Je me couchai et m’aperçus qu’il ne restait plus que quatre heures avant de commencer la nouvelle journée de travail. A cause d’eux, la nuit avait été trop courte et peu reposante, et quand mon réveil beugla, c’est d’une humeur noire que je me levai pour filer sous la douche. Quand j’en sortis, ce fut pour trouver les deux idiots ronflant en chœur. Jun s’était sagement allongé sur le dos au centre du lit et Nino s’était blotti le dos contre lui. S’ils ne m’avaient obligé à écourter mon repos, j’aurais pu les trouver attendrissants ; en fait, même comme ça je les trouvais mignons, mais il n’était pas question qu’ils en profitent. Enfin j’allais leur laisser un peu de répit le temps de déguster mon premier repas de la journée… au sky lounge où on m’apporta café, journal, et un délicieux petit déjeuner. Je n’étais pas le seul à y manger mais ici chacun respectait son voisin et mangeait en silence ou lisant. Quand je redescendis vingt minutes plus tard, j’étais remonté à bloc pour réveiller, soigner et engueuler mes deux collègues. En entrant dans le salon, je constatai que les deux marmottes n’avaient pas bougé d’un pouce. Enfin si… En partant, j’avais ouvert les rideaux et allumé le lampadaire situé du côté du geek, espérant que la lumière éveillerait doucement les deux ivrognes. Elle avait immédiatement éclairé le visage du geek qui avait alors grogné et enfoncé la tête dans le matelas. Ce dernier sans doute gêné par la luminosité grandissante de l’ampoule à économie d’énergie s’était retourné et cachait à présent son visage dans les côtes du plus grand. - Debout les gars ! La sieste est finie. Un double grognement me répondit suivit d’un gémissement du geek. Il s’était retourné et avait tenté de se redresser avant de s’effondrer sur le matelas. - Je veux mourir… Mes deux cadets avaient prononcé ces mots d’une seule voix. Je souris avant de leur répondre. - Pas ce matin les gars, vous avez une heure pour redevenir humains. Alors la première étape du programme, c’est douche, aspirine et café. Ensuite il va falloir m’expliquer comment et pourquoi vous vous êtes rendus aussi… minables hier soir.
***************** ++Jun++
J’avais commencé à émerger en sentant le chat blotti contre mon côté se retourner. Le chat ? Naann trop gros. J’avais voulu ouvrir les yeux mais je me sentais trop mal. J’avais… une gueule de bois comme j’en avais rarement eu. Je n’avais même pas besoin de lever le petit doigt pour sentir la douleur me vriller le cerveau. Alors au lieu de bouger je tentai de rassembler les derniers souvenirs que j’avais. D’abord le boulot et le fait que pour la première fois depuis CE jour, j’avais dû travailler avec Toshi, juste Toshi. Enfin il y avait bien sûr le journaliste, le photographe, et les managers n’étaient jamais loin, mais c’était la première fois que je rebossais avec Riida sans les autres. Quand nous avions fini, il était déjà plus de 21h et j’étais épuisé physiquement et mentalement. Alors j’avais fait le numéro de Nino. Quand il avait décroché, il m’avait dit qu’il était parti en direction du Storm et je l’y avais rejoint. En arrivant, je m’étais aperçu qu’il avait de l’avance sur moi mais je l’avais vite rattrapé. Après tout l’autre jour, il m’avait bien proposé de prendre une cuite en duo alors… Ensuite… euh... j’avais comme un trou. Puis le visage de Sho s’imprima dans mon cerveau. Pourquoi… ah si! Logiquement, si Nino était aussi fait que moi, alors, eh bien le patron avait appelé Sho. Et… donc… - Debout les gars ! La sieste est finie ! Outch !! Sho n’était pas particulièrement d’humeur câline ce matin et le couinement à côté de moi me fit comprendre que Nino était au moins dans le même état que moi. Entrouvrant les paupières, je tentais d’apitoyer maman-Sho, mais un éclair de lumière me foudroya une nouvelle fois et je laissai échapper un « Laisse-moi mourir » qui en cet instant était la pensée la plus cohérente que je pouvais émettre. Mais le bourreau qu’était notre aîné reprit la parole. - Vous avez une heure pour redevenir humains. Alors la première étape du programme, c’est douche, aspirine et café. Ensuite il va falloir m’expliquer comment et pourquoi vous vous êtes rendus aussi… minables hier soir. Respirant à fond, je m’obligeai à faire refluer la nausée qui m’avait submergé quand je m’étais redressé. J’entendis Nino se lever précipitamment. Ouvrant les yeux, je le vis se diriger droit vers la salle de bain. - Nino ? ça va ? Maman-Sho ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter et avait suivi notre geek. Mais je savais qu’il ne faisait que lutter contre les conséquences d’une cuite jumelle à la mienne. Bientôt la chasse fut actionnée et je supposai que mon ami n’allait pas tarder à filer sous la douche. Deux pas et je vis Sho sortir de la salle de bain. Il me dévisagea, soupira et entra dans la cuisine. Il revint avec deux comprimés et un verre d’eau et me mit le tout dans les mains. - Jun, avale et lève-toi. Va rejoindre Nino sous la douche et interdiction de verrouiller la porte. - Oui maman… Mais tu sais, on est pas malades. On risque pas de s’évanouir. - Je m’en fous… autrement je vois pas comment je vais pouvoir vous apporter des serviettes. Au fait vos fringues sont dans le sèche-linge, ajouta-t-il au moment où je fermai la porte pour me déshabiller. J’entrai quelques minutes plus tard dans la salle de bain. Nino était sous la douche. Enfin la douche coulait sur lui et quand je voulus en profiter, je glapis. Cet abruti était en train de se doucher à l’eau froide. - Baka, tu veux chopper la crève ? Je tournai le mitigeur pour obtenir une eau à une température acceptable puis me mouillai avant d’attraper le gel douche de Sho et lui en mettre sur le crâne. Cela suffit à faire reprendre vie à mon collègue qui grimaça avant de commencer à se laver. Dix minutes plus tard, nous nous essuyions avant de plonger dans le séchoir récupérer nos jeans et nos vestes. Sho-chan nous avait laissé, en plus des serviettes, boxers, chaussettes et T-shirts, et cela allait nous permettre d’éviter d’avoir à repasser chez nous ou alors de rester avec nos fringues pendant trente-six heures d’affilées. A notre retour dans la pièce, le canapé avait été refermé, un pot de café fumant nous attendait. Par contre, il n’y avait rien à manger… et… j’aurais bien avalé euh… Un morceau de baguette fraîche ? Oui c’est ça, j’avais envie de pain. - Bon maintenant les gars, je veux savoir pourquoi j’ai dû aller vous récupérer dans cet état.
***************** ++Nino++
Pourquoi je m’étais déchiré comme ça ? Bonne question. Pourquoi est-ce que tous les soirs depuis une semaine, je ne supportais plus la solitude de mon appartement après la journée de travail ? Même mes chers jeux ne suffisaient plus ; alors pour tromper mon ennui et échapper au vide qui m’envahissait, j’avais fini par atterrir au Storm. J’y avais bu une bière tout en jouant avec mes cartes, faisant des tours de magie, amusant les autres clients avec. Ces soirées s’étaient répétées, les bières multipliées et les tours de magie avaient diminué avant de disparaître. Les réveils, le matin, étaient de plus en plus pénibles et je retrouvais mes clés dans des endroits surprenants comme un tiroir de cuisine ou le fond d’une chaussure, et ce matin je n’étais même plus dans mon lit. Je me souvenais plus ou moins de l’appel de J hier soir, mais je ne me rappelais même pas qu’il m’avait rejoint. Alors quelque part… ça ne m’étonnait pas d’être ici. Autrement, j’aurai sûrement fini chez Jun dans un lit ou sa baignoire. - Baka, tu veux chopper la crève ? Je levai les yeux pour voir la main de Jun tourner le mitigeur et l’eau qui frappait ma peau se réchauffa doucement. Quand je sentis les mains de Jun sur mon crâne, je me décidai à réagir et commençai à me laver les cheveux tout seul. - Sho-chan a fait la lessive. - Maman veillera toujours sur ses enfants… - Ouais… mais on n’échappera pas à la leçon de morale… - … avant on sera nourris, blanchis et soignés. - J’ai déjà eu mon aspirine… - … veinard… j’ai hâte… - Je suis sûr que t’auras ton comprimé en revenant dans le salon. - Oui mais le tien est déjà en train d’agir. - Oï ! Les gosses, on accélère ! On n’a pas toute la matinée. - Oui maman… répondons-nous en chœur. Un quart de plus tard, propre et aspirine avalée, je dégustai le café que Sho m’avait servi. Quand nous eûmes terminé de boire, le refrain sur la consommation excessive d’alcool et ses conséquences sur notre santé et nos carrières commença. Si Jun fut excusé pour son excès d’hier soir, je fus mis sur la sellette parce que le patron avait été trop bavard. Puisque c’était comme ça, j’éviterai d’aller quelque temps là-bas et quand je voudrai boire, je n’aurai qu’à le faire chez moi… Sho ne me lâcha qu’après que j’eus promis, à défaut de m’expliquer, de ne plus me mettre dans cet état sans bonne raison. Je l’avais fait puisque ma conclusion était assez proche de la sienne. Une semaine de cuite n’avait pas été suffisante pour me remettre les idées en place et une seconde ne serait sûrement pas plus efficace, alors pourquoi continuer tant que je n’aurais pas compris ce qui me mettait dans cet état ? Si je ne voulais pas rester seul, je pouvais au pire aller chez maman ou Aiba-chan…
***************** ++Ohno++
Quand j’ouvris la porte, je constatai tristement que le canapé était déjà occupé par nos deux benjamins. Tête-bêche et une serviette mouillée sur la figure, ils ne devaient pas être bien en forme surtout que je constatais que ni l’un ni l’autre ne portait ses lentilles puisque les deux paires de lunettes trônaient sur la table basse près d’eux. - Ohayô Riida! - … Yô, Sho-chan. Qu’est-il arrivé à ces deux-là? Ils sont malades ? En posant la question je me rendis compte que je connaissais la réponse mais Sho me la confirma. - Cuite. Et une bonne. Ils ne tournent pas très rond en ce moment, mais comme d’hab’, Nino ne dit pas grand-chose pour s’expliquer. Quant à l’autre… - … Ecoute Sho, le coupai-je. J’ai pris une décision et je suis certain que c’est la meilleure donc je ne reviendrai pas dessus même si c’est dur… J’avais prononcé mes dernières paroles dans un souffle et m’assis sur une chaise avant de sortir un magazine. J’allais bientôt avoir un jour de repos avant mon départ pour l’Inde et je comptais bien en profiter pour aller pêcher puisqu’on m’en avait donné l’autorisation. Aiba-chan arriva avec son enthousiasme habituel et bientôt le staff frappa à la porte. Nino et Jun émergèrent de dessous leurs linges avec difficultés et quand ils mirent leurs carreaux de taupes, je compris que les maquilleurs allaient avoir du pain sur la planche pour donner un visage enjoué et naturel à ces deux-là. Nous n’aurions pas deux VSA à enregistrer, ils auraient pu jouer un duo de zombies. Je sentis un pincement au cœur en sachant que c’était sûrement de ma faute si Jun s’était mis dans cet état-là… Son teint gris me faisait presque regretter ma décision tout comme la distance émotionnelle et physique qu’il avait mise entre nous pour se protéger. Ce que j’avais redouté au début de notre histoire s’était produit avec un moindre impact. En quittant Jun, j’avais fait frémir la base qui soudait notre groupe : notre amitié. Si Jun n’avait pas accepté ma décision, ce frémissement aurait fait plus de dégâts que le séisme de 95 à Kobe. Il me suffisait de capter l’un des regards, plein de reproches, de Nino et d’Aiba quand Jun se réfugiait dans leur giron ou qu’il faisait mine d’ignorer ma présence quand nous étions en privé. Je n’avais qu’une chose à faire pour le moment : profil bas. Sho, lui, s’était contenté de m’asséner un « je t’avais pourtant prévenu » par mail, en réponse à celui que je lui avais envoyé après son dernier passage aux informations. Nous étions en train de choisir sur nos portants l’une des tenues que les stylistes nous proposaient quand je m’aperçus que notre MC regardait Kazunari les sourcils froncés. Ce dernier était verdâtre et il disparut précipitamment en direction du cabinet de toilette qui jouxtait notre loge. Quand il revint, le teint un peu moins maladif il grommela à l’intention de ceux qui attendait son retour. « J’aurais pas dû boire de café tout à l’heure… » puis il s’habilla avant de prendre sa place sous les mains du maquilleur. La journée s’achevait en même temps pour chacun d’entre nous et l’occasion était suffisamment rare pour que nous la marquions habituellement en allant boire un verre tous ensemble, mais aujourd’hui l’ambiance ne s’y prêtait pas et Sho, qui n’avait pas lâché Nino et Jun de la journée, avait demandé à Masaki de ramener le second puisque c’était presque sur sa route. Nino s’approcha de moi et pour la première fois depuis le mariage me proposa de rentrer avec lui. Je savais cependant que c’était plus par souhait d’éviter une confrontation avec notre journaliste que pour le plaisir de ma compagnie.
***************** ++Aiba++
Ce matin était magnifique, j’étais arrivé pile à l’heure au studio et c’était avec le sourire aux lèvres que j’avais pénétré dans notre loge. Sho-chan m’avait gratifié d’un beau sourire en réponse à mon bonjour, j’avais entendu Riida me retourner ma salutation et j’avais perçu un grognement en provenance du canapé. Sur ce dernier gisaient nos deux benjamins. Jun avait sa tête des lendemains de cuite. Pour le réconforter, je me glissais entre sa tête et le coussin, lui offrant mes genoux en guise d’oreiller. J’avais aussi récupéré les pieds de notre gamer qui tentait de récupérer (du moins je le croyais à ce moment-là) quelques minutes de sommeil qu’il avait consacrées dans la nuit à ses jeux. Franchement, j’étais bien content que Lucie soit partie sans demander d’explication à Nino, parce que, vue comment il se comportait maintenant, ma petite Française ne valait pas plus à ses yeux que toutes les autres filles qu’il avait eues ou pour lesquelles nous nous étions défiés. Et cette fois, j’avais gagné la compétition parce que c’était moi qui avais eu SON numéro et SON adresse mail avant son départ. C’était encore moi qui discutais trois soirs par semaine avec elle sur MSN et c’est encore moi qu’elle avait promis de prévenir pour que nous fassions une sortie la prochaine fois qu’elle reviendrait au Japon. Alors, puisque pour lui elle avait disparu de son esprit quand il s’était aperçu qu’elle était repartie en Europe, eh ! bien, c’était la preuve qu’il ne méritait pas les larmes qui avaient mouillé ma chemise au mariage de Cécile-chan et Teru. Le staff de l’émission était entré dans notre loge avec les portants de fringues. Nous nous étions tous levés pour choisir nos tenues dans la sélection mise à notre disposition, quand je fus bousculé par un Nino qui avait viré au verdâtre avant de disparaitre dans la salle de bain. J’allais trouver Sho-chan et il m’expliqua que Nino avait, tout comme je l’avais deviné pour Matsujun, une mega gueule de bois. Si Kazu avait bu, alors il n’avait pas passé sa nuit à jouer, et je demandai à mon informateur s’il connaissait les raisons de cet excès de boisson. Malheureusement, Sho l’ignorait; mais je me demandai soudain si notre dragueur invétéré n’avait pas été perturbé par la fuite de Lucie plus qu’il ne l’avait montré jusqu’à présent. En découvrant que celui avec qui (j’en étais quasiment certain) elle avait dû passer une nuit torride à Fukuoka, s’amusait quarante-huit heures plus tard dans un couloir avec une autre, Lucie avait pris une décision radicale. Elle avait choisi de couper les ponts avec son amant pour moins souffrir. Mais malgré sa décision, elle ne pouvait s’empêcher de parler de lui lors de nos conversations. La première fois, ça avait été juste après son retour. Elle était littéralement furieuse en me racontant que notre gamer compulsif avait osé se pointer à la porte de son amant. Là, je lui avais redis que je ne croyais vraiment pas à l’association Teru-Nino. Lucie-chan m’avait convaincu pour Nino, mais je ne pouvais vraiment pas envisager que ce soit avec Teru que ce dernier avait joué à la bête à deux dos dans un couloir. Nino avec une autre fille sans problème ; avec un mec impossible ! Et puis franchement je ne pouvais pas imaginer pourquoi Teru-kun déciderait de tromper sa toute nouvelle femme, encore moins pendant sa nuit de noce. Il était bien trop bien élevé et amoureux d’elle pour ça. Et puis, c’était aussi à ma connaissance un hétéro à 100%.
********************************** ++Cécile++ quelques jours plus tard
Pour une fois qu'on était tous les deux à la maison à une heure raisonnable, il avait fallu qu'il les croise en sortant du boulot et qu'il les ramène chez nous tous les cinq. J'étais contente de voir Jun malgré nos prises de bec perpétuelles. Quelque part, ça me rassurait que ça, au moins, ça n'ait pas changé depuis le mariage. Un petit point de repère dans ma vie trop nouvelle. Les trois autres... bah, je les trouvais plutôt sympas, pleins d'entrain et d'idées loufoques. J'avais plus de mal avec Satoshi. J'évitais un maximum de repenser à ce que j'avais vu dans le spa. Je n'avais jamais eu l'estomac particulièrement sensible, pourtant le simple fait d'évoquer ce souvenir me rendait nauséeuse. Et du coup, je ne savais pas trop comment être face à lui. Puisque j'avais décidé de ne pas en parler à Teru tant qu'il ne dirait rien ou ne se montrerait pas plus explicite envers Satoshi ou moi, je me devais d'agir le plus normalement possible. Le pire étant qu'à la base, le plus âgé était certainement celui du groupe avec lequel j'avais le plus d'atomes crochus. Ils étaient donc tous dans le salon, squattant l'écran télé et la console qui allait avec. Tenant mes rôles de maîtresse de maison et de parfaite petite femme d'intérieur d'une main de fer, j'avais passé un tablier et m'affairait dans la cuisine. Jun était venu proposer ses services, mais je l'avais renvoyé dans le séjour. Seule avec mes casseroles à chantonner des airs de colo, voilà le remède parfait pour contrôler mes nerfs. La posologie préconisant au moins une heure de traitement pour garantir un sourire à mon retour dans le monde des joueurs que j'entendais s'exciter dans l'autre pièce, je me laissais le temps de réfléchir à un menu. Nous étions en plein hiver et il faisait froid. Leurs appétits étaient solides. J'aurais bien fait une choucroute ou un baeckeoffe, mais je n'avais pas les ingrédients que je voulais. Et la perspective d'un appartement embaumant le chou ne m'emballait que moyennement. Un nabe de légumes et des spaghettis bolognaise. Voilà qui devrait leur convenir. Je fis le point sur les réserves de légumes. Globalement, ça pouvait aller, mais il me manquait du fromage pour les pâtes et du chou chinois que je voulais en salade. Je passai donc signaler aux garçons que je sortais faire des courses. Mon apparition provoqua quelques réactions motivées par le tablier. - Hey ! fit Sho. Tu nous prépares vraiment un repas ? Ne t'en sens pas obligée, on est passés à l'improviste. Des plats tout prêts iraient très bien. - Toi, répliqua mon époux, tu as déjà oublié le séjour à Fukuoka. Cécile a fait l'intendance pour des colonies de vacances et elle a eu un petit ami cuistot. Ça laisse des traces... Il m'adressa un clin d'œil complice. Je souris timidement. Il savait pourtant que je n'aimais pas parler de mes ex... Heureusement, Masaki enchaîna vivement. - C'est génial ça ! T'en as de la chance Teru. Lundi tu auras des chocolats faits maison. C'est trop cool ! - Pourquoi des chocolats ? demandai-je, perplexe. C'est ce que tu veux en dessert ? - Ben... lundi, c'est la Saint-Valentin ! - Et ?... Ah ! Oh... Ça y était, j'avais compris où Masaki voulait en venir : cette fameuse tradition accommodée à la sauce japonaise. - Désolée, mais c'est trop commercial pour moi. Bon allez, je sors. A plus! Je fis demi-tour sans plus de cérémonie, laissant des points d'interrogation plein les yeux de Masaki. Otant le tablier pour attraper mon manteau tout en enfilant mes chaussures, je prenais les clés et mon sac dans l'entrée quand je sentis une présence dans mon dos. - Cécile ? Tu veux de l'aide ? Ça va aller ? Je soupirai doucement avant de me retourner. - Ça ira Teru. Je vais juste au combini chercher ce qui me manque. Par contre, demain je vais faire des courses. Si tu veux m'accompagner, c'est pas de refus. Je lui offris un sourire presque vrai et m'apprêtai à sortir quand je le sentis me prendre dans ses bras. - Je suis désolé ma chérie. Vraiment. Je... - Chut, lui intimai-je. Je t'ai déjà dit que je n'accorde aucune espèce d'importance à ce genre de fête. Allez, j'y vais. Il me serra un peu plus fort contre lui et ne me relâcha qu'après avoir glissé un "je t'aime" dans le creux de mon cou.
***************** ++Sho++
Etre chez Teru-kun et Cécile-chan avec tout le groupe me faisait une impression curieuse. Je me sentais comme le spectateur d'un match de tennis dangereux. C'était la première fois depuis leur rupture que Riida et Jun-kun passaient la soirée ensemble avec tout le groupe. Finalement, le fait d'être en terrain neutre avec un "public" n'était peut-être pas plus mal. Je ne pourrais pas faire un tour dans les réserves d'alcool de notre gamer, mais ça ne pouvait pas dégénérer en bataille rangée. Pas devant Cécile-chan, ce serait déplacé. Et je crois bien que personne n'avait prévenu Teru de la séparation de nos deux amis. Peut-être, comme l'avait suggéré Aiba-chan en l'apprenant, faudrait-il l'informer puisqu'il était le seul à être dans le secret. Ça faisait longtemps qu'il ne m'avait plus parlé du désir que lui avait inspiré Ohno quand il l'avait rencontré, et maintenant qu'il était marié, la question ne se posait plus. De toute façon, il avait fait une croix sur lui depuis longtemps, incapable de faire face à Matsujun qu'il avait lui-même reconnu plus déterminé que lui. Jun... Je l'avais plusieurs fois senti au bord des larmes. Et l'avoir récupéré avec Nino l'autre soir, aussi bourrés l'un que l'autre, m'avait laissé un drôle de goût. Personne en dehors du groupe n'avait pu noter le moindre changement dans l'attitude des ex-amants, ces deux-là étaient pros jusqu'au bout des ongles. Mais Aiba-kun et moi avions pensé qu'il fallait faire quelque chose pour resserrer les liens du groupe. En sortant du studio d'enregistrement aujourd'hui, nous avions proposé de squatter chez Nino pour une soirée jeux. Nous étions devant son immeuble lorsque nous avions croisé Teru qui quittait son propre boulot. Il n'avait pas fallu longtemps pour que notre destination change. Teru avait envoyé un mail à Cécile-chan pour la prévenir. A notre arrivée, elle avait décrété qu'elle s'occupait de la cuisine et nous abandonnait le salon et les jeux. Quand Matsujun avait annoncé qu'il allait lui proposer de l'aide, Nino avait dit préférer rester loin du champ de bataille... C'était vrai que ces deux-là passaient leur temps à se chamailler. A Fukuoka, au mariage... Mais notre benjamin était revenu en haussant les épaules. - Je me suis fait virer... Et nous avions entamé une partie endiablée de Mario kart. J'avais presque réussi à rattraper Teru lorsque celui-ci avait mis sur pause, au grand dam de Nino qui grogna. - Je sors faire quelques courses. Soyez sages. Nous levâmes tous le nez, à l'exception de mon ami qui avait déjà vu qu'elle était là. Son tablier me fit nous sentir un peu fautif. Mais Teru avait balayé mes scrupules d'un revers de main. Je m'étais rappelé des séances de cuisine collective. Au final, ça avait été plutôt amusant. Quand je tournai à nouveau la tête vers Cécile-chan, celle-ci avait disparu. Et Aiba demandait à Teru : - J'ai dit une bêtise ? - Non, c'est moi qui en ai fait une. Bougez pas, je reviens. Il se précipita vers l'entrée. De mon côté, j'interrogeai les autres. - J'ai raté quoi là ? - Ben, je sais pas trop, me fit Aiba-chan. J'ai dû dire une bêtise en parlant de la Saint-Valentin. Ou alors c'est qu'elle n'aime pas le chocolat ? - Vous auriez cru vous, qu'elle avait un ex ? - Nino !! grondèrent Riida et Matsujun avec un bel ensemble. Surpris, ils restèrent un instant à se regarder en silence. C'est Teru revenant dans la pièce qui détourna notre attention. Mais Nino ne put s'empêcher de poursuivre : - Dis Teru, si elle avait un cuistot sous la main, pourquoi elle t'a épousé ? Je vis mon ami fixer le gamer avec perplexité puis sourire tristement. - C'est lui qui l'a quittée parce qu'il ne pouvait pas avoir d'enfant. Et le sujet est clos. Je n'aurais même pas dû en parler. Alors faites comme si vous n'aviez rien entendu. - Et le chocolat ? demanda Aiba. - C'est pas le chocolat. C'est moi. Je ne serai pas là lundi, on a un congrès de trois jours à Kanagawa et je pars dimanche soir. - T'assures pas un radis, ne put se retenir de lui lancer Nino. C'est important cette fête. Comment tu peux rater votre première Saint-Valentin ? - D'accord avec Nino, renchérit notre baka préféré. C'est nul ! Nous, personne ne nous fera de chocolat, mais toi, t'es marié. Pourquoi t'en profites pas ? Evidemment, il y aurait des fans pour nous offrir des friandises, mais ce n'était pas la même chose. Et je n'étais pas loin de penser comme eux. Teru nous prit en traître en relançant la partie. Naturellement, nous y replongeâmes immédiatement.
Le thème des chocolats et de la Saint-Valentin ne revint sur le tapis qu'à la fin du repas. Nous n'avions pas entendu Cécile-chan rentrer, mais elle vint nous informer au bout d'un temps indéterminé que le repas était prêt et que la table n'attendait plus que nous. Nous commencions à demander à avoir un plateau histoire de poursuivre la partie quand Teru nous mit tous en pause. Nino et Jun firent mine de râler jusqu'à ce qu'ils se rendent compte que Cécile s'était dangereusement rapprochée de la prise de la console. - Un repas, ça se prend à table ! Sinon, je coupe le courant et ce sera aux chandelles. Il n'y avait rien à répliquer à cela, et nous nous étions retrouvés assis autour de la table dressée. Je crois qu'une fois nos ventres remplis, personne ne trouvait à redire à la chose, même si la méthode avait été un peu expéditive. - J'ai un petit frère et des cousins. Et un grand-père plus que pointilleux sur l'heure du repas... Moi je veux juste que les gens mangent ensemble. - Et tu n'avais pas tort, fit Riida. C'aurait été dommage de manger tout ça froid ! Le repas s'était terminé sur une fondue au chocolat. Et cela nous avait ramenés au lundi qui venait. - Cécile-chan, dit Aiba en souriant. Puisque ton mari t'abandonne lundi, je propose que tu passes la soirée avec nous. Comme ça tu seras pas toute seule. ...Et nous, on déprimera moins ! J'éclatais de rire. Sacré Aibaka ! J'étais sûr qu'il avait une autre idée derrière la tête. - Et pourquoi vous voudriez passer la soirée avec moi ? - C'est vrai ça, fit Jun surpris. - Ben, ce sera pour te remercier pour ce bon repas, et pour tes chocolats, pardi ! Il y eut un blanc. Je savais bien qu'il allait tenter de replacer les chocolats quelque part... Cécile le fixa un moment, l'air concentré. Puis elle inclina la tête sur le côté. - Tu veux dire que vous m'invitez dehors pour me remercier de ce repas et des chocolats que je vais devoir vous offrir, c'est ça ? - Ouip ! Elle soupira. - Masaki, je n'aime pas ce genre de manifestation commerciale. Je fête Noël parce que je suis chrétienne, pas parce qu'il y a un bonhomme en rouge qui apporte des cadeaux. Et la Saint-Valentin, pour moi, ça ne veut rien dire. - Mais c'est la Fête des amoureux ! - Tu veux dire que tu es amoureux de moi, Masaki ? demanda-t-elle avec un petit sourire en coin. - Hein ? euh... non, non! Mais c'est que je... comment dire... Je décidai de voler au secours de mon baka. - Cécile-chan, ce serait surtout pour te remercier pour tes talents de cuisinière et un peu pour nous faire oublier qu'on sera tous seuls ce jour-là. Et quand je dis "nous"... Je lançai un regard lourd à Teru. - ...tu es comprise dedans. Elle sembla hésiter un peu, puis nous regarda tous à tour de rôle. - Et vous voudriez tous passer cette soirée avec moi ? J'encourageai tout le monde à opiner du chef. Et Nino renchérit. - De toute façon, quand Aiba a une idée, il ne la lâche pas. Alors il te tannera avec jusqu'à ce que tu cèdes. - Pfff, comment je suis censée dire non avec tout ça ? Bon, si vous y tenez tant que ça, ok. - Youpi !!! On aura une vraie soirée avec une fille, pas besoin de chercher de fausse excuse pourrie cette année ! - Euh... Masaki, je te signale qu'on sera six. Et puis, tu veux t'excuser pour quoi ? Je me penchai vers elle. - Pour dire à ses potes qu'il n'est pas tout seul pour ce soir-là. Cherche pas, il a envie de les faire bisquer, pour une fois. - Mmm. Et je suis une bonne excuse, donc. Allez, ça peut être marrant. - Mouais... fit l'homme marié. Je sais pas si je vais te laisser seule avec ces cinq-là... - Ah ! non, trop tard Teru-kun, fallait te décider avant. Maintenant, si tu veux voir ta femme, faudra venir avec nous, on est inclus dans le pack ! Cécile regarda Aiba avec des yeux ronds, puis se mit à rire. Elle nous dit ensuite que nous pouvions retourner à notre chère console si on le voulait, mais avant de commencer à débarrasser la table, elle fit les quelques pas qui la séparaient du baka, se pencha et lui fit une bise sur la joue. - Merci Masaki. T'es vraiment adorable.
***************** ++Teru++
Je quittais ma boîte et retournais vers ma voiture lorsque j'avais aperçu mes amis devant l'immeuble où habitait Nino. Eux aussi m'avaient vu et après avoir échangé quelques mots, j'appris qu'ils se préparaient une soirée console chez le gamer. Très tenté par le dernier jeu sorti, je l'avais acheté aussitôt mais n'avais pas encore eu l'occasion de le tester. C'est pourquoi je leur proposai de venir en faire l'essai avec moi puis avais envoyé un mail à Cécile pour la prévenir. Sur le chemin, je m'étais demandé ce qui m'avait le plus influencé : jouer avec mes amis, voir Satoshi, même avec d'autres personnes et notamment Jun, ou ne pas rester seul toute une soirée avec ma femme ? Parce qu'elle ne voudrait certainement pas se coucher tout de suite et que je redoutais de me couper dans mes mensonges sur les deux nuits où j'avais découché et les quelques moments où j'avais été injoignable. Tout ce temps que j'avais passé à aimer Sato ces deux dernières semaines. Etrangement, le fait de faire l'amour à cet homme que j'adorais ne changeait rien à l'affection que j'avais pour mon épouse. Ça n'avait tellement rien à voir... Peut-être aussi parce que je me disais que Sato avait toujours Jun, que ce dernier continuait à le faire hurler de plaisir et que mon amant était comme moi, trouvant des satisfactions différentes avec chacun. Cette idée me rendait parfois jaloux. J'avais envie d'être l'unique objet des pensées de Sato-chan. Mais je n'étais pas assez égoïste pour le lui demander en sachant que je ne pourrais pas moi-même n'appartenir qu'à lui.
La partie était bien lancée quand j'avais vu Cécile sortir de la cuisine où elle s'était enfermée peu après notre arrivée et nous annoncer qu'elle allait faire quelques courses. Je salivais d'avance sur le repas qu'elle nous préparait mais la question d'Aiba-kun m'avait rappelé la petite discussion que nous avions eue en tout début d'année lorsque je lui avais annoncé mon séminaire. Elle avait paru très sincère en me disant qu'elle n'accordait aucune importance à cette fête, qu'elle n'avait pas besoin de ça pour être amoureuse de moi, et qu'elle avait d'autres moyens pour me le prouver. Nous avions ensuite fait l'amour comme chaque nuit depuis que nous nous étions mariés en France, prenant juste garde à ne pas réveiller Lucie qui dormait dans la pièce à côté dans la maison de mes grands-parents où nous avions passé le Nouvel An. Mais ce soir, en voyant le regard un peu fatigué qu'elle avait posé sur nous, je m'étais senti coupable. La tenir contre moi dans l'entrée de notre appartement m'avait inspiré une tendresse que je lui montrais rarement. Pour une fois, c'était elle qui était la plus rigide. Peut-être après tout n'aurais-je pas dû lui imposer la présence de cinq hommes en plus... Je restai un peu inutile dans l'entrée à regarder la porte qu'elle avait fermée en sortant quelques instants plus tôt. Puis je me décidai à rejoindre mes amis et la partie en suspens. Mais avant, je fis une pause technique devenue indispensable. Je finissais de me laver les mains lorsque le grincement de la porte des toilettes à côté de moi me fit me tourner et je me retrouvai face à mon amour secret. - Oh ! fit-il en rosissant. Je... je voulais juste aller... Ses yeux fixaient le fond de la pièce mais je ne le laissai pas finir sa phrase, hypnotisé par sa bouche si attirante que je rejoignis dans l'instant. Ses lèvres avaient un petit goût de tabac qui me creusa le ventre. Une fois les miennes posées dessus, je ne parvins pas à m'en détacher, et ce qui devait n'être qu'un léger effleurement devint un baiser torride, l'une de mes mains tenant l'arrière de sa tête tandis que l'autre glissait dans son pantalon pour caresser ses fesses. Les siennes, qui avaient semblé dans un premier temps chercher à m'éloigner, s'étaient arrimées à mes épaules et collaient nos corps l'un contre l'autre. Je me sentais tellement bien que j'en oubliais tout ce qui nous entourait. Jusqu'à ce que j'entende le miaulement du chat venant se frotter contre ma jambe. Je lâchai alors Satoshi, le fixant d'un air un peu égaré. Qui devait assez se rapprocher du sien en ce moment. Ses lèvres rougies, ses joues rosées, ses bras qui s'étaient précipitamment remis le long de son corps, tout me donnait faim. Et je me penchai pour me rapprocher de ses lèvres. - Arrête ça ! chuchota-t-il en détournant la tête, me laissant seulement atteindre son oreille dont je m'écartai aussitôt. Teru, comment peux-tu faire ça alors qu'ils sont juste à côté ? Alors qu'on est chez toi ! - Pardon, dis-je contrit en reconnaissant mon imprudence. Il ramena son regard sur moi et je dus faire un effort phénoménal pour ne pas reprendre ses lèvres. - Tu es si tentant, tellement sexy... - Sors ! Les autres risquent de venir ici, alors va-t'en ! Son murmure était si impérieux que j'obéis et rejoignis les quatre autres en train de discuter des avantages et inconvénients des divers modules du jeu qu'ils exploraient en attendant notre retour.
Après le retour de Cécile, nous nous étions mis à table. J’avais eu l’occasion de pratiquer les repas chez les grands-parents de ma femme, et je savais qu’elle n’avait fait qu’appliquer la conception très familiale qu’ils en avaient. Mais Cécile avait fait l’effort d’expliquer le pourquoi de son attitude un brin autoritaire et mes amis avaient compris. Ils semblaient l'apprécier, ce qui me réjouissait, mais la proposition de Masaki-kun m’avait surpris. Et que ma tigresse ait accepté m’avait paru encore plus bizarre. Nous nous étions remis à jouer et j’avais surveillé l’horloge plus ou moins régulièrement. Je n’étais pas le seul à travailler demain et je me souvenais parfaitement des soirées et des nuits que nous passions quelques années plus tôt à jouer pendant des heures. Je nous savais capables de rester devant l'écran jusqu’au petit matin. Bon, généralement, au bout de deux heures Sato-chan s’endormait sur un coin de canapé, Sho-kun déprimait dans son coin, et les deux benjamins étaient lancés dans un combat à mort supporté par Aiba-kun pendant que j'arbitrais. Mais ce soir, il valait mieux ne pas nous croire revenus à ces temps pourtant pas si lointains. Quand je vis les deux aiguilles se rejoindre sur le 12, je me séparai de ma manette pour chercher ma femme du regard. J’étais certain qu’elle n’était pas passée à côté de nous pour aller se coucher. Je ne l’imaginais pas rester toute la soirée en cuisine. Etait-elle dans son « bureau » ? Je laissai les autres poursuivre leur partie et allai vers les portes coulissantes de la pièce aux tatamis. Les ouvrant doucement, je la vis devant son ordinateur, l'air concentré, ses yeux faisant des allers-retours entre un petit fascicule et l'écran. Je me glissai dans la pièce et vins m'agenouiller à côté d'elle. - Chérie, murmurai-je en caressant sa joue de mes lèvres, tu n'es pas obligée de rester debout. Elle me regarda rapidement. - Je me promène en chemise de nuit devant tes amis pour rejoindre la chambre ? - Non ! Hors de question qu'ils la voient. - ...la rouge ? - Mm mm, opina-t-elle. C'est celle que tu préfères, non ? Elle me connaissait. C'était effectivement ma préférée, et pas juste parce que c'était moi qui l'avais choisie. Elle lui allait vraiment bien, faisant ressortir sa peau pâle et me donnant l'envie de libérer son corps de ces voiles. - Je vais les convaincre qu'il se fait tard. Ce qui ne posa pas de réel problème, la majorité étant déjà en train de piquer du nez. Même le gamer officiel admit qu'il ne pouvait pas rester plus longtemps. Pendant que j'éteignais les appareils, j'entendis Satoshi demander à Sho de le ramener chez lui et Jun accorda son hospitalité à Nino. Ma-kun sembla hésiter un instant à aller loger chez notre presque voisin, mais sa ménagerie personnelle l'emporta une fois de plus. Après les salutations et leur départ, je revins sur la promesse qu'elle leur avait renouvelée à la demande de Masaki-kun de passer la soirée avec eux. - Tu vas vraiment y aller ? - J'ai promis. Mais je pense qu'ils ne vont pas déçus de leurs chocolats... Le sourire qui flottait sur ses lèvres m'inquiéta un instant avant qu'elle ne me regarde en se serrant contre moi. - Serais-tu jaloux ? - Un peu quand même. - Juste un peu ? C'est trop ou pas assez, mon amour. Elle me planta un baiser sur la joue en souriant et partit se changer dans la salle de bain. Elle avait une certaine tendance à y laisser ses vêtements de nuit et, parfois même, la tenue qu'elle ne choisissait pas le matin quand elle hésitait entre deux. Je me déshabillai dans la chambre et m'apprêtai à me glisser sous la couette quand elle revint dans sa fameuse nuisette. Nous avions eu une longue discussion sur la couleur de celle-ci, elle prétendant que c'était du magenta alors moi j'y voyais du framboise. Nous avions fini par nous mettre d'accord sur le rouge après l'intervention salutaire de la vendeuse. Ce sur quoi je n'avais aucun doute, c'était qu'elle la rendait encore plus désirable. Je m'assis sur le bord du lit pour la regarder approcher avant de l'attirer contre moi, la gardant debout entre mes jambes écartées. Je posai une main à plat dans son dos et calai ma tête sur sa poitrine, goûtant sa chaleur et son odeur douce. Ma main libre remonta jusqu'à sa tête pour libérer la masse de cheveux qu'elle gardait attachée toute la journée et je la sentis couler le long de mon bras, cascadant jusqu'au creux de ses reins. Mes doigts migrèrent doucement vers le bord du vêtement pour le relever petit à petit jusqu'à me laisser toucher du bout des lèvres son ventre puis ses seins. Je laissai le tissu léger recouvrir ma tête puis, tout en embrassant avec avidité sa poitrine généreuse, j'incitai mon épouse à mettre ses genoux de chaque côté de mes hanches. Quand elle commença à geindre sous mes caresses, je nous relevai et nous installai au milieu du lit. Je remontai la nuisette le plus haut possible pour m'en libérer et vins tout à la fois embrasser sa bouche et envahir son corps, lui arrachant un gémissement qui s'acheva dans un soupir. Nous nous fîmes l'amour avec volupté, prenant notre temps pour nous ressentir, laissant nos mains dire à l'autre à quel point il nous était précieux. Et quand je vis le plaisir fleurir sur son visage, je me laissai accoster moi-même sur cette rive paradisiaque. - Je t'aime Teru, me chuchota-t-elle en se lovant contre moi avant de s'endormir. - Moi aussi je t'aime, Cécile, lui répondis-je sur le même ton. Oui je l'aimais, je n'avais aucun doute là-dessus. Mais cet amour était-il aussi puissant que celui que j'éprouvais pour Satoshi ? Même si elle ignorait ce qu'il se passait, ne risquait-elle pas de souffrir de la situation que nous provoquions lui et moi en nous voyant en cachette ? Je me souvenais de la boutade de l'un de ses ex qui m'avait mis en garde contre sa capacité à ne pas voir ce qu'elle avait devant le nez alors qu'elle devinait ce qu'on ne lui disait pas. Etais-je capable de la protéger ? Pouvais-je la rendre heureuse ? Continuerait-elle de m'aimer si elle savait que je laissais les mains d'un homme parcourir mon corps, son sexe me pénétrer, sa bouche me posséder ? Parviendrai-je à ne pas devenir fou entre ces deux êtres que je voulais chérir ? Je m'endormis en laissant ma main caresser doucement ses cheveux tandis que je cherchais une réponse à ces questions.
Voilà pour aujourd'hui. Mais avant d'oublier je vous mets le plan de l'appart de Sho まった来週 | | | Jeu 26 Sep - 20:05 | | | Manue33 Carnival Night part 2 Messages : 466
Age : 42
Localisation : Cenon / Lacanau
Humeur : endormie
| ... la vieillesse... | | | Dim 6 Oct - 13:25 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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Localisation : Osaka!!! enfin!!!!
Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| Bonsoir!!! Car ici c'est le soir.Il est exactement 20h20 à l'heure où je tape ces mots.20h21 maintenant... Voilà le chapitre de la semaine... - Chapitre 19:
++Aiba++
Une fois la porte de son appartement refermé, nous l’avions aidé à atteindre le canapé. - Nino, tu m’avais promis de ne plus te mettre dans cet état ! - Nan j’ai promis de ne plus faire n’importe quoi… Là c’était une compétition. - Ouais, celle de l’ivrogne le plus stupide et je crois que t’as remporté la palme. Nino avait vraiment trop bu ce soir et maintenant il geignait, calé contre le dossier et un des accoudoirs du sofa, ses bras entourant ses genoux. C’était d’ailleurs à cause de lui que nous étions partis du bar, il était vraiment devenu ingérable… - Dis-moi Sho. Pourquoi je suis tout seul ce soir hein ? - T’es pas tout seul je suis là et Aiba-chan aussi. - Mais c’est pas pareil… Z’êtes pas elle… - Pas qui ? Nino qu’est-ce qu’il t’arrive ? demandai-je. - …cie-chan, hoqueta-t-il. - Lucie-chan ? L’amie de Cécile ? demanda notre journaliste. - Mm. On s’amusait bien. On s’entendait bien. Puis soudain elle a disparu. Partie. Pfuit ! Envolée ! Elle a joué avec moi et quand elle a eu ce… En entendant cet imbécile parler, une juste colère m’avait possédé. Je m’étais levé et l’avais frappé. Une gifle avait retenti à travers l’appartement de mon imbécile d’ami. La seconde allait partir quand je me sentis tiré en arrière. - Sho, laisse-moi lui remettre les idées en place, dis-je froidement. C’est tout ce qu’il mérite quand il dit des choses pareilles ! Nino ! Tu crois vraiment être la victime dans cette histoire ? Non, mais je rêve. T’es qu’un… - Aiba ! Calme-toi ! Qu’est-ce qu’a fait Nino pour que tu te mettes dans un état pareil et que tu prennes partie pour cette Française ? J’inspirai profondément et me rassis au fond du fauteuil que j’avais quitté quelques instants avant. Je pris le temps de plonger mon regard dans celui de Nino. Celui-ci avait l’air hébété mais moins ivre que quelques secondes plus tôt. La marque de ma main se dessinait en rouge sur sa peau pâle du menton jusqu’à son oreille gauche. Ayant la certitude que j’avais son attention et sans trop réfléchir je lâchai. - Lucie-chan t’a vu. La nuit du mariage, elle t’a vu t’amuser avec… Je mis une de mes mains sur ma bouche. Je venais de trahir la promesse que j’avais faite à Lucie. - M**** ! La cousine. - Hein ? Quelle cousine ? demandai-je. - Ben… Nino nous expliqua alors qu’il avait eu un moment d’égarement selon son propre terme. Il n’aurait pas vraiment compris ce qu’il lui arrivait jusqu’à ce qu’il réalise qu’il s’apprêtait à allonger la fille dans un couloir. - Tu plaisantes là ? Tu n’as pas fait ça ? demanda Sho.
*********************** ++Sho++
Entre la réaction brutale de Masaki et les révélations de Nino, je commençais à prendre la mesure de l’histoire entre la petite Française et notre gamer favori. Les insinuations de Jun le matin de l’anniversaire de la mariée et leur disparition pendant la matinée le jour du mariage ; si je ne me trompais pas, je devinai qu’ils n’avaient pas joué à la belote… Aiba semblait sous le choc depuis les révélations de Nino ; quand je le vis serrer les poings sur ses genoux, je ne pus que demander. - Tu plaisantes là ? Tu n’as pas fait ça ? Tu te rends compte ELLE t’a vu ! C’est bien ça Aiba-chan ? Ce dernier hocha la tête. - Elle m’a vu. Tu dis qu’elle m’a vu. Aiba ! Elle m’a vu quand ? A quel moment ? Qu’est-ce qu’elle a vu ? Nino s’était à son tour levé et agenouillé devant le fauteuil d’Aiba pour le supplier. Ce dernier le regarda avec pitié. - Elle m’a pas dit grand-chose de plus et d’ailleurs elle ne s’est pas attardée. Elle n’avait pas vu le partenaire de notre Don Juan mais elle l’avait reconnu LUI et avait fui le plus vite possible jusque de l’autre côté de la planète, alors maintenant il devrait lui ficher la paix. C’est ce qu’Aiba cracha à la figure de notre cadet, puis il se leva et se dirigea vers la porte. Juste avant de partir, il se retourna. - Ah oui. Ne répétez à personne ce que je viens de dire ; j’ai déjà trahi ma promesse, j’ai pas envie de me sentir encore plus mal. Bonne nuit, Sho-kun. Sur ces mots Aiba quitta l’appartement, me laissant seul avec un Nino qui tentait d’encaisser les dernières révélations de notre ami. Il était toujours à genoux devant le fauteuil maintenant vide. - Nino ? … Kazu-kun ? Il ne me répondit pas. Je le rejoignis et découvris qu’il pleurait. Pas bruyamment mais silencieusement, les larmes coulaient sans interruption le long de ses joues. Je le secouai, le redressai avant de l’envoyer dans le fauteuil que Masaki avait quitté quelques minutes auparavant. - Nino si tu as conscience de ta bêtise, c’est une bonne chose. Maintenant tu n’as plus que deux choses à faire : d’abord cuver, ensuite réfléchir à ce que tu veux faire. Alors maintenant vas dormir. Nino se redressa et tangua jusqu’à sa chambre. Mais arrivé là il se retourna. - Merci, Sho-chan. Oyasumi nasai.
*********************** ++Nino++
Je me réveillai brusquement, en proie à un horrible malaise. J’avais mal à la tête et la nausée m’envahit quand je me redressai. J’eus juste le temps de me précipiter dans la salle de bain et quand je me regardai dans le miroir dix minutes plus tard je grimaçai : j’avais une tête de panda, les autres n’allaient pas m’épargner. Décidément les lendemains de cuites étaient toujours aussi douloureux… Apprendrai-je un jour ? Non. Parce que quand je me noyais dans l’alcool, c’était pour justement me noyer et fuir les problèmes. Me regardant une nouvelle fois dans le miroir, je remarquai ce que je n’avais pas vu la minute précédente : un énorme bleu en forme de main sur mon profil gauche. Cette soirée semblait avoir eu des conséquences inhabituelles. Je m’étais déjà réveillé dans les bras d’une inconnue, dans ceux de Jun la fois où il m’avait soigné ou sur les différentes surfaces de sol de mon appartement… mais encore jamais avec un hématome me mangeant la moitié du visage. Le touchant du bout des doigts, une scène de la veille me revint, la douleur déclenchant le retour de mes souvenirs : Aiba, la gifle, Lucie, Sho… … LUCIE ! Elle m’avait vue ! C’est ce que Masaki avait dit. Et c’était la raison pour laquelle selon lui elle refusait tout contact avec moi depuis le mariage. Mais quel imbécile ! Moi, qui d’habitude suis vif d’esprit, j’avais raté le coche. En même temps, si elle m’avait engueulé, frappé, injurié au lieu de disparaître, j’aurai compris plus vite. Pourquoi n’a-t-elle rien dit ? Cette fille est la plus étrange que j’aie jamais rencontrée. …Peut-être devrais-je poser des questions à Cécile pour essayer de mieux la comprendre… Alors que je sortais de la douche et m’emballais dans une serviette, l’image de Cécile, le regard lourd de menace la veille de son mariage, me revint : Non. Je ne pouvais pas lui demander conseil sans risquer une partie de mon anatomie et devenir ad vitam aeternam le fausset du groupe si j’étais encore de ce monde. Il allait falloir me débrouiller seul pour le moment pour démêler cet écheveau de sentiments, et de malentendus qu’était cette histoire. Mais d’abord une aspirine et ensuite j’irai faire le point au seul endroit où j’arrivai à penser avec une gueule de bois : sous la douche. Le lendemain de l’anniversaire de Sho, Jun m’avait annoncé qu’il rentrait chez lui, et quand après l’avoir reconduit chez lui, je m’étais arrêté chez les jeunes mariés, ça avait été pour découvrir que la miss s’était enfuie sans un adieu. Alors vexé, j’avais repris le soir même mes habitudes et me réveillais systématiquement aux premières heures du jour dans des love hôtels avec dans les bras des filles certes mignonnes mais qui me laissaient étrangement insatisfaits. J’avais alors changé de méthode en tentant de trouver la clé du problème au fond d’un verre. Une grosse semaine de ce régime m’avait fait me réveiller dans les bras de Jun chez Sho et à la suite de ça, je m’étais accordé une pause dans mes fréquentations féminines et alcoolisées jusqu’aux révélations de Masaki. En réfléchissant je ne voyais qu’une chose à faire dans l’immédiat : avant de reprendre ou non mes habitudes, je devais clore proprement mon histoire avec la petite Française. Et pour cela, il me fallait réussir à la contacter... et donc dans un premier temps, récupérer mon téléphone. Je sortis de la douche une serviette autour des reins et me dirigeai vers ma chambre. En repassant par la cuisine je frissonnais et m’aperçus que la porte fenêtre entre le salon et le balcon était ouverte. J’étais sûr d’une chose j’étais bien trop frileux pour laisser ouverte cette fenêtre en plein mois de février. Je réduisais même ma consommation de cigarettes en hiver pour avoir moins à sortir et je n’avais pas encore grillé la première de la journée. Alors que je me dirigeai vers le salon pour aller refermer cette aberration, Sho rentra par celle-ci, la refermant derrière lui. - J’espère que t’as bien mal au crâne ! me salua-t-il. M**** ! C’est la main de Masaki ? - Ohayô à toi aussi Sho-chan. Pour la marque… oui je suppose que c’est elle. En tout cas si mes souvenirs sont exacts et qu’il a bien dit que Lucie-chan m’avait surpris dans une situation compromettante pendant le mariage de Teru. En disant ces mots, j’avais fait demi-tour et avais ouvert mon congélateur pour en sortir un des deux packs de froid que j’avais toujours en prévision d’une blessure. - L’autre doit être quelque part dans ton lit, m’informa mon ami dont j’avais senti le regard peser sur moi. Ça avait déjà commencé à gonfler quand tu es parti te coucher… Dis-toi que ce matin ça aurait été encore pire autrement, mais vu comment c’est encore, je suppose qu’il va falloir mettre au courant ton manager pour réorganiser ton emploi du temps d’aujourd’hui. Même le meilleur des maquilleurs ne pourra cacher cette trace. C’est vrai que j’étais sensé avoir un photo-shoot et une interview pour un magazine pour ado aujourd’hui… il allait falloir faire ce que je détestais le plus : reporter ou annuler un engagement parce que je n’étais pas présentable. Comme je ne pouvais pas, et tenir ma compresse, et préparer le café de l’autre, Sho-chan s’en chargea pendant que j’appelai le manager en chef. Celui-ci voulut savoir comment je m’étais blessé et j’invoquai la malchance et une porte qui s’était malheureusement ouverte au moment où je passais. Cette excuse ne durerait que le temps pendant lequel je ne le rencontrerais pas. Mais j’espérais qu’il imaginerait que je voulais sauver la face après m'être fait gifler par une fille déçue, plutôt que par l’un de mes meilleurs amis.
*********************** ++Jun++
- Désolé Cécile, mais va vraiment falloir que tu fasses un effort pour avancer, parce que je ne vais pas te porter ! La jeune femme tenait mon bras du bout des doigts et, si ça semblait lui suffire pour maintenir son équilibre, ça me paraissait un peu léger pour servir de béquille. J'avais dû faire le tour de la voiture pour la faire sortir et maintenant, je voulais pouvoir prendre l'ascenseur qui nous déposerait à mon étage. Rien que des choses très simples, sauf que les envisager avec une personne totalement ivre leur donnait un petit je-ne-sais-quoi de beaucoup plus improbable. En fait, je pouvais déjà m'estimer heureux qu'elle n'ait pas eu envie de vomir durant le trajet... Nous l'avions retrouvée dans le restaurant où Sho avait réservé une table. Elle nous avait offert les chocolats réclamés par Ma-chan et qu'elle avait faits elle-même. Ce n'était pas aussi emballé de dentelle et de froufrous que ce que nous avions déjà pu recevoir de co-actrices ou de filles du staff, mais c'était joliment présenté dans une petite boîte en carton sur laquelle elle avait tracé le premier kanji de chacun. Riida avait eu la décence de paraître ému et un peu mal à l'aise quand elle lui avait tendu son paquet. Les autres l'avaient chahuté en lui rappelant qu'il ne fallait pas draguer une femme mariée et j'étais intervenu en entraînant ladite femme mariée vers la table, au bout de laquelle je m'étais installé avant de la faire asseoir à ma gauche, en faisant signe à Nino de se mettre de l'autre côté d'elle. Sho s'était assis à ma droite, puis Aiba et enfin Ohno en face de moi. Je sentais que Sho surveillait ma consommation d'alcool, et, entre ça et l'enthousiasme de Ma-chan, il s'était rendu compte beaucoup trop tard, tout comme moi, que mes voisins de gauche s'étaient lancés dans un défi stupide. Nous avions compris que Cécile-chan et Nino tentaient chacun d'écraser l'autre par sa supériorité à descendre les verres, de saké pour elle et bière pour lui, au moment où Teru nous avait rejoints en prétendant avoir trouvé une excuse en or pour fausser compagnie à son séminaire pour la soirée. Quand le mari infidèle était arrivé, il était déjà bien tard. Aiba-chan avait suggéré que Nino lui laisse sa place, mais notre gamer était déjà bien imbibé et au lieu de laisser son siège, il s'était rapproché de Cécile-chan en lui tenant la taille d'une main tandis que l'autre lui servait un nouveau verre. Elle semblait tout à fait claire, mais j'étais surpris qu'elle laisse Nino l'approcher ainsi, et c'était ce qui m'avait mis la puce à l'oreille. Je m'étais mis à surveiller leurs faits et gestes et avais réalisé que son verre était toujours vide alors que la serveuse nous apportait régulièrement des bouteilles que la jeune femme confisquait deux fois sur trois. J'avais demandé à la serveuse combien de bouteilles elle nous avait servies, et quand elle avait annoncé le détail, j'avais eu un blanc. Sachant que Riida, Aiba, Sho et moi en étions à moins de deux bières et un saké chacun, le reste se trouvait forcément dans les estomacs de nos deux idiots. Sho, qui m'avait entendu, avait tenté de récupérer la dernière bière de Nino, mais Cécile lui avait servi du saké et ils s'étaient tournés l'un vers l'autre pour sauver leurs deux derniers flacons, buvant carrément au goulot. Je m'étais levé pour les prendre à revers et avait constaté sans rien en dire que les deux roués avaient planqué des bouteilles en réserve à leurs pieds. Ils voulaient vraiment s'enivrer. Quoique à ce stade, ce n'était plus de l'enivrement... Ils avaient ensuite promis d'être sages et j'avais attendu qu'ils ramènent leur attention aux desserts bien entamés pour revenir récupérer ce qu'il y avait par terre. C'était comme ça que j'avais vu une chose qui m'avait assez énervé pour que j'oublie d'être discret dans mon opération anti-poivrots. Teru-kun n'ayant pu s'asseoir à côté de Cécile, il s'était retrouvé sur une chaise ajoutée en bout de table à côté de celle de Riida. Et penché sous la table, j'avais une vue parfaite sur l'entrejambe de ce dernier caressée doucement par la main du trader. Oh-kun savait ne rien laisser paraître sur son visage, j'étais bien placé pour le savoir, mais à la façon dont ses cuisses se croisaient régulièrement pour emprisonner la main de son amant, je n'avais aucun doute sur le fait qu'il aimait ça. La salle était relativement mal éclairée (douceur cosy de Saint-Valentin), le geste était plutôt discret et l'ambiance assez animée à notre table et aux voisines, dont nous étions séparés par des paravents, pour que personne n'ait vu ce geste fait sous la table. Mais j'avais senti une rage puissante m'étreindre le cœur. Depuis quand Riida faisait-il si peu attention ? Comment Teru pouvait-il faire ça, un tel soir, à deux chaises de sa femme ! Je n'avais pu retenir le grognement qui montait dans ma gorge, et cela avait fait se retourner Nino. Me voyant prêt à subtiliser leur réserve, le gamer s'était mis à râler, se levant à moitié pour se tourner vers moi. Teru avait lâché la cuisse qu'il tenait pour attraper le gamer par les épaules et l'obliger à se rasseoir. Nous avions obtenu quelques minutes de répit, mais l'agitation de Kazu nous convainquit qu'il fallait quitter les lieux rapidement. Hélas, quand nous nous étions levés de table, Nino avait recommencé son numéro et nous avions entendu un "Arashi" résonner dans la salle. Le brouhaha se calma quelques instants avant de reprendre de plus belle. Sho avait envoyé Aiba, Teru et l'Ohmiya dehors avant de m'aider à faire se lever Cécile-chan qui semblait décidée à vider son verre jusqu'à la dernière goutte, puis nous sortîmes rejoindre les autres. Dehors, il n'y avait déjà plus que Nino et Aibaka qui nous avait fait un grand sourire. - Oh-chan est parti avec Teru-kun. Y avait que lui qui pouvait faire "garde du corps" et qu'était pas connu. Ils ont couru jusqu'à la voiture de Teru. Moi je suis resté planqué avec Nino. Et à l'évidence, ce dernier était incapable de courir. Les quelques groupies qui les avaient suivis en sortant avaient tenté la course, ce qui avait permis aux deux autres de se cacher. Tant mieux pour eux, me direz-vous, mais cela signifiait que les deux amants s'étaient enfuis ensemble. Et je sus que Cécile n'était pas assez soûle pour ne pas le comprendre quand elle planta ses ongles dans ma main. - Comment fait-on ? avais-je demandé à Sho. Il avait réfléchi rapidement avant de nous dire de nous séparer aussi. J'avais jeté un coup d'œil à ma voisine et conclu qu'il valait mieux que je la ramène, laissant les trois autres se débrouiller. Et c'est ainsi que je m'étais retrouvé dans mon parking, après avoir hésité le temps du trajet. Mais je ne me voyais pas larguer une Cécile dans cet état au pied de son immeuble et sans savoir si les deux abrutis ne seraient pas chez elle. Même si j'espérais qu'ils n'étaient pas assez stupides pour faire ça. Quand j'étais encore avec lui et que la soirée commençait comme ça, je savais que Toshi ne s'endormait qu'après avoir, au moins un peu, apaisé sa soif de sexe. Et elle était quasiment inextinguible... Il me fallut beaucoup de patience et un peu de force pour obliger ma passagère à me suivre jusqu'à l'ascenseur puis jusqu'à la porte de chez moi. Une fois à l'intérieur, je n'eus aucun mal à lui faire quitter ses escarpins, mais elle mit beaucoup de mauvaise volonté à me suivre jusqu'au salon. Je la posai dans le fauteuil et entrepris d'ouvrir mon canapé, qui avait l'avantage d'être déjà fait, contrairement au lit de ma chambre d'ami. Et puis, cette dernière était à l'opposé de ma propre chambre, derrière la cuisine, alors que mon salon était contigu à la pièce dont j'avais isolé les murs et le sol (j'habitais au dernier étage) lorsque j'avais emménagé. Il me suffirait de garder les portes ouvertes pour pouvoir surveiller l'ivrogne qui somnolait devant moi. Je renonçai à la faire se changer, ne me voyant pas lui faire ôter sa robe, mais je lui apportai une bassine que je posai à côté de la tête du couchage. Elle me regardait avec un demi-sourire ironique. - Tu trouves pas ça stupide ? - Mm ? grognai-je en l'obligeant à se lever pour la mener vers le canapé. - Ton amant t'a quitté, et tu t'occupes d'une bonne femme que son mari trompe avec ton ex. C'est ironique et stupide, non ? - Cécile-chan... soupirai-je. ...Couche-toi et dors, c'est ce que tu as de mieux à faire. - Pourquoi tu t'occupes de moi ? demanda-t-elle en se penchant en arrière et en se laissant pivoter sur ses talons. Je la rattrapai et la redressai avant de la faire asseoir. - Parce que tu l'as fait pour moi l'autre soir. ...Tu es sûre que tu ne veux pas vomir ? Je lui avais déjà posé la question avant de monter dans la voiture, dans l'ascenseur et en la déchaussant. - T'insistes, hein ? C'est Kazi... Kazanu... Kazunari, le petit joueur qui tient pas l'alcool. Je vais trèèèès bien, je te l'ai déjà dit. - A part que tu pues l'alcool, oui ! - Ça m'empêche pas de te paaarler ! T'es pas un mec marrant, Machujuuun... - Sans doute parce que je ne vois rien de drôle. Maintenant couche-toi et dors ! Elle se laissa tomber en arrière et je remontai le drap et la couverture sur elle. Puis je passai dans ma chambre enfiler mon pyjama et donner un coup de fil. J'hésitai un instant sur le destinataire de l'appel, mais me décidai finalement pour Riida. Autant qu'ils sachent bien tous les deux que je ne les avais pas loupés, et il y avait plus de chance que Oh-chan décroche dans la mesure où demain, il devait partir pour l'Inde. Mais je supposai qu'il était trop pris dans ses ébats et dut me résoudre à ne laisser qu'un message sur le répondeur. Un message très bref. - Riida, c'est Jun. Tu diras à Teru, si jamais il se rappelle encore un peu qu'il est marié, que sa femme est chez moi. Une fois le téléphone raccroché, je repartis vers la cuisine me servir un grand verre d'eau. Et j'enchaînai avec une cigarette que je fumai pensivement sur le petit balcon malgré le froid. Pourquoi m'étais-je astreint à m'occuper d'elle ? Sans le vouloir et par sa simple présence, elle me renvoyait pourtant en pleine figure le fait que Toshi m'avait quitté à cause de son mari. Et qu'en plus, cet abruti, sans doute parce qu'il ignorait que Cécile-chan savait tout, profitait des deux. Et je ne pouvais pas croire que Toshi se contentait de ça. Teru rendait tout le monde malheureux. Pourquoi l'homme que j'aimais, et que j'admirais autant que je l'aimais, acceptait-il une chose pareille ? Croyait-il vraiment pouvoir être heureux ainsi ? J'aurais tellement fait n'importe quoi pour lui... j'avais fait n'importe quoi. Parce que ça lui plaisait, parce que je voulais être à lui, je l'avais laissé faire ce qu'il voulait de moi, même si je m'étais parfois forcé, surtout au début. Mais j'avais passé tellement de temps à l'observer que j'étais parvenu à deviner ce qui l'excitait, ce qui au contraire le refroidissait, et j'avais appris à en jouer pour obtenir ce que je voulais : entrer dans son lit, puis dans son cœur. Quand Sho nous avait annoncé le mariage de Teru, une partie de moi avait soupiré de soulagement, rassuré que mon seul rival soit désormais totalement inaccessible. Et en même temps, je m'étais mis à en vouloir à cette inconnue qui privait celui que j'aimais de la personne qui faisait battre son cœur. Je savais que c'était absurde, mais ça avait été plus fort que moi. Et l'attitude de Cécile-chan dans les coulisses ne m'avait pas aidé à revenir à de meilleurs sentiments. Cécile... Si j'avais laissé Sho ou Ma-chan la ramener, elle aurait pu risquer de parler des deux autres. Je n'avais même pas envie d'imaginer ce qu'il en serait résulté. Et donc je l'avais ramenée chez moi. Enfin, j'étais sûrement celui avec lequel elle risquait le moins. Même si Aiba-kun semblait bien trop occupé par sa Lucie-chan. Quant à Sho, à l'évidence celui qui lui plaisait le plus, il n'aurait pas osé abuser de la situation. Pour plusieurs raisons : elle était la femme de son ami ; il faisait rarement le premier pas ; il semblait avoir trouvé quelqu'un pour faire baisser la tension due à son célibat. Mais il n'y avait rien d'officiel, sans doute juste une fille de passage, parce que sinon il ne nous aurait pas tenu compagnie ce soir. A moins qu'il ne se sente réellement investi du devoir de nous surveiller (raté pour Nino...) ou... Ou bien, Cécile lui plaisait vraiment. Si c'était le cas, il aurait intérêt à placer ses billes plutôt que jouer le grand timide. Je me mis à frissonner. Il faisait froid dehors. Nous étions en plein hiver quand même. Et il était... presque minuit, si ma montre fonctionnait bien. Et ma clope était finie depuis longtemps. Je décidai de rentrer me coucher. En plus, d'ici, il m'était impossible de savoir si mon invitée était malade ou non. Avant de laisser la cuisine derrière moi pour entrer dans ma chambre, je jetai un coup d’œil à la porte de gauche, vers le salon. Pas de mouvement notable dans le canapé et je faillis me détourner quand un léger bruit me parvint. Faible, mais continu. Des sanglots. Elle pleurait. Tout bas. J'hésitai un court instant, puis m'approchai d'elle. Je m'assis sur le bord du canapé et passai ma main sur la bosse qu'elle formait sous la couverture. Elle se recroquevilla sous mon geste et je restai sans trop savoir quoi faire. Puis, pris d'une inspiration soudaine au souvenir de ce qu'elle avait fait pour moi deux semaines plus tôt, je repoussai les draps et me penchai sur elle. - Cécile-chan, ne pleure pas toute seule. - Teru !... Son gémissement était déchirant. J'avais eu l'air aussi pitoyable quand j'avais débarqué chez elle ? D'une main, j'écartais les mèches brunes qui cachaient son visage. Puis je lui pris les épaules pour la redresser et la mettre contre moi, la tenant d'un bras tandis que l'autre lui caressait les cheveux. - Cécile-chan, maintenant tu peux pleurer autant que tu veux. Et après, on ira dormir. D'accord ? J'avais l'impression de m'adresser à une enfant. Une petite fille qui m'offrit une crise de larmes sans retenue. Je la laissai faire, espérant juste que l'alcool ne la rendrait pas malade en plus. Mais elle semblait avoir raison : elle "tenait" vraiment très bien et si son alcool était triste, il ne la perdit pas complètement. Au bout de quelques minutes, elle parut s'apaiser et je passai un bras sous ses jambes pour la soulever. - J'ai pas envie de dormir dans mon canapé, alors tu viens avec moi. Mais... poursuivis-je en me levant, bon sang, t'es pas légère ! Je l'emmenai dans la pièce voisine en espérant ne pas la lâcher avant d'y arriver. On m'avait parlé d'un butai pour lequel il me faudrait étoffer ma musculature, et je me rendais compte que pour parvenir à celle de Teru, il me manquait de longues séances en salle de sport. Lui l'avait soulevée sans problème à leur mariage en France... Elle s'accrochait à moi. Je ne savais pas trop si elle dormait déjà ou si elle était simplement trop soûle pour réagir, mais elle ne protesta pas quand je la couchai dans mon lit où je m'allongeai contre elle pour la prendre dans mes bras. Avant d'éteindre la lumière, j'essuyai d'un revers de manche l'eau salée qui avait inondé son visage.
(...)
Je m'étais endormi comme une masse et le réveil fut assez brutal. La sonnette de mon interphone fonctionnait en continu. Et tout en ouvrant les yeux, je n'associai ce bruit qu'à une seule chose possible : Teru venait chercher sa femme. Et je ne me voyais pas lui expliquer ce qu'elle faisait dans mon lit, même si j'estimais qu'en plus de n'avoir rien à nous reprocher, c'était plutôt à nous d'exiger des explications. Laissant le carillon résonner encore quelques minutes - j'avais bien le droit d'avoir le sommeil profond, non ? - je fis se lever la jeune femme qui grommelait contre mes côtes. Elle n'avait pas ouvert les yeux, les paupières manifestement soudées par les larmes qu'elle avait versées jusque dans son sommeil, et ses sourcils se fronçaient en rythme avec le bruit de l'entrée. Tant bien que mal, je parvins à l'emmener jusqu'au salon où je la déposai dans le canapé que je lui avais fait quitter à peine quelques heures plus tôt. Je la recouvris alors que, d'une main mal assurée, elle semblait chercher quelqu'un dans le lit. - Désolé Cécile-chan, chuchotai-je, il vaut mieux que tu aies l'air d'avoir dormi là. Puis je me redressai et allai répondre à l'interphone. - Qui que vous soyez, vous avez vu l'heure ? - Jun... Toshi. Ils étaient venus tous les deux... - ...Teru a eu ton message... - Montez ! coupai-je. Mais je doute qu'il puisse la ramener maintenant. Je m'adossai à la cloison qui séparait la porte de ma chambre, que je refermai prudemment, à celle de mon salon où j'avais allumé la lumière, bien que cela ne paraisse pas déranger la locataire du canapé. Au bout de quelques minutes, la porte que j'avais laissée entrouverte fut poussée par une main que je connaissais par cœur et Toshi entra, suivi de Teru. Les deux étaient visiblement lavés et rasés de frais. Riida portait le petit sac qu'il prenait toujours quand il partait pour quelques jours. - Oh ! ton amant va même te déposer chez ton manager... Tu as de la chance d'avoir un homme qui prend soin de toi comme ça. Quel dommage qu'il n'en fasse pas autant avec sa femme ! Je vis Teru rougir et Oh-chan grimaça d'un air las. - Matsuura-san vient me chercher chez toi. C'est pour ça que j'ai monté mon sac. Jun, ne rends pas les choses plus dures, s'il te plaît. Son regard était humble, mais je n'avais aucune envie d'avoir pitié d'eux. - Elles sont dures pour qui, Riida ? Pour ceux qui s'envoient en l'air, ou pour celle à qui vous manquez même juste de respect ? - Jun... - Non Toshi. Moi je ne compte pas. Tu m'as aimablement jeté, alors je n'ai pas la possibilité de me plaindre. Mais au moins, moi, je sais à quoi m'en tenir. Qu'est-ce que vous croyez que je pense quand je vous vois vous tripoter sous la table pendant que ta femme, tu sais Teru, celle à qui tu as passé une bague au doigt, est en train de vider la réserve de saké du restau où tu as réussi à venir nous rejoindre alors que tu n'aurais pas pu libérer ta soirée pour la passer juste avec elle ! Je repris mon souffle tout en regardant les deux idiots devant moi. Oh-chan semblait vraiment mal à l'aise et Teru lançait des regards affolés autour de moi. - T'inquiète, elle est dans mon canapé à dormir. Au moins, pendant ce temps-là, tu peux pas lui faire de mal. Et j'avais réussi à maintenir le ton de ma voix suffisamment bas pour qu'elle n'entende rien si jamais elle ne dormait plus. Je leur en voulais, à tous les deux, de nous faire autant souffrir. - Je peux te poser une question, Teru-kun ? Tu comptes lui dire un jour ? Ou tu vas la laisser ignorer toute sa vie qu'elle sert de façade respectable à un type incapable d'assumer sa sexualité ? - Je l'aime ! Les mots cinglants que j'avais préparés pour me moquer de sa réponse restèrent dans ma gorge. Et en même temps que mon cerveau enregistrait ces trois mots, je vis Toshi fermer les yeux avec un pli amer au coin de la bouche. Ce que Teru disait était vrai et son amant le savait ! - Je l'aime, Matsujun. Elle n'est pas une façade. Je l'aime, mais j'aime aussi Sato...shi. Sato ? Il lui avait même donné un surnom différent du mien ? - On ne peut pas aimer deux personnes ! Il soupira en fermant les yeux. Quand il les rouvrit, je les trouvai plus vagues. - C'est pourtant le cas, dit-il lentement. Tu n'imagines pas comme je t'envie d'être aussi entier, Jun-kun. Tu as toujours su ce que tu voulais... - Et je me suis donné les moyens de l'obtenir, contrairement à toi ! J'avais raison de t'empêcher d'approcher Toshi. Même quand Sho t'a tendu une perche avant de nous laisser sortir ensemble, tu n'as pas osé la saisir. T'as juste trouvé que les conditions étaient dures. ...Tu t'imaginais à ma place, n'est-ce pas ? Il me regarda, éberlué. Il avait vraiment cru avoir réussi à cacher les regards qu'il jetait à Toshi à l'époque ? Je n'eus pas le loisir d'épiloguer, une musique se fit entendre dans mon dos. J'entrai dans la pièce pour donner un peu plus de lumière et voir d'où venait le son, et constatai que les deux autres avaient suivi. Toshi était resté à côté de la porte alors que Teru s'était avancé vers la forme qui s'agitait sous la couverture. Une main émergea, puis une tête ébouriffée aux yeux encore fermés que la main frotta aussi vigoureusement que maladroitement. - Cécile ? Je... je suis venu te chercher. - Téléphone ! marmonna la jeune femme. Où est mon téléphone ? - Dans ton sac ? suggérai-je. Je le ramassai et le posai sur la couverture. Elle plongea la main dedans. - Cécile... - Désolée Teru, c'était la sonnerie de Lucie et elle n'appelle jamais sur ce truc. Donc c'est important. Et... rhaaa ! pourquoi y a une forge dans mon crâne ?!! Elle avait attrapé l'appareil qui émettait un petit bip annonçant sûrement un message, mais venait d'enfouir sa tête dans ses genoux. Elle devait tenir une sacrée gueule de bois. - Sans doute parce qu'il y a connivence entre les forgerons et les marchands de saké ? - J'adore l'humour, Jun, mais pas à cette heure-ci. Et pas avec une tête dans cet état. ... Lucie ? Tout en se plaignant, elle avait composé le numéro de son amie et l'avait manifestement en ligne. La conversation dut se faire en français parce que je n'y compris goutte. Je n'osais pas regarder les deux autres. Je réalisais que j'avais lâché quelques bombes et je n'étais pas sûr que Toshi les apprécie... Quand elle raccrocha, elle inspira profondément. - Bien, maintenant, au tour de l'autre enfoiré. - Cécile ? demanda Teru en la regardant composer un numéro d'un pouce rageur. Elle leva les yeux en portant l'appareil à son oreille et j'eus l'impression qu'elle allait shooter son mari sur place. Celui-ci se figea d'ailleurs. Mais l'objet de sa colère se trouvait au bout du combiné et nous le comprîmes dès qu'elle ouvrit la bouche pour commencer à engueuler son interlocuteur. Je lui pris le bras pour lui glisser rapidement d'aller téléphoner dans la pièce à côté. Ma chambre, elle, était isolée phoniquement...
*********************** ++Teru++
Ces cuisses qui enserraient ma taille, ces doigts qui s'enfonçaient dans mes bras, cette gorge qui se tendait, offerte à ma bouche haletante, les gémissements qui s'en échappaient, tout en cet homme sous moi me chantait le plaisir que nous partagions et combien il aimait ce que je lui faisais. Je tenais dans mes poings serrés les draps que nous avions malmenés au cours des dernières heures et m'y cramponnais de toutes mes forces. Dans moins de deux heures maintenant, son manager viendrait chercher mon amant pour l’emmener à l'aéroport d'où ils décolleraient pour l'Inde. Il serait absent toute une trop longue semaine. Et cette perspective faisait monter en moi l'envie de nous faire profiter l'un de l'autre jusqu'au bout. Je me plongeai encore quelques fois dans son corps si excitant avant de me sentir envahi par une plénitude absolue, grognant mon plaisir comme il gémissait le sien. Quelques minutes plus tard, allongé sur le dos à ses côtés, je laissai mes pensées errer. Avec Cécile, je ne ressentais pas la même exaltation, il n'y avait pas tant d'étoiles. Elle était ma paix et mon repos, elle avait la force que je n'avais pas. Elle savait se faire amante et je n'avais aucun mal à l'aimer. Je ne pouvais pas rêver meilleure compagne. Et pourtant, j'avais besoin de Satoshi. Même en sachant que ce n'était pas satisfaisant de rester dans cette situation bancale, je ne parvenais pas à me résoudre à choisir l'un d'eux. - Tu es un homme plein de surprises, Teru. Je ne t'aurais jamais cru si fougueux... - Tu vas partir loin. Je voulais être sûr que tu ne m'oublies pas. Il rit doucement et se blottit dans mes bras un instant avant de se redresser pour lécher la sueur que je sentais sur mes joues. - Aucun risque que je t'oublie. Deux nuits de suite à être pris dans toutes les positions possibles et dans toutes les pièces de mon appartement... Aucun risque, vraiment ! - Quand tu dis ça comme ça, j'ai l'impression d'être un obsédé. - Et tu l'es sûrement. Invoquer ton séminaire pour découcher alors qu'il a été annulé samedi... - Je le dirai tout à l'heure à Cécile. Ce ne sera qu'un demi mensonge... - Et une demie vérité seulement. Teru... Il se leva et voulut prendre une cigarette mais je lui posai la main sur le bras. - Sato-chan, je peux lui dire que j'ai discuté avec des fumeurs, mais autant que je ne sente pas trop... - Teru ! fit-il en soupirant. Je suis chez moi, laisse-moi quand même faire ce que je veux ! J'ai pas envie de rester dans l'ombre. C'est si grave que ça, qu'elle sache que tu couches avec moi ? Ou alors, c'est elle qui ne compte pas assez pour toi ? Pourquoi tu n'es pas plus honnête avec elle ? - J'ai peur de la perdre. Je sais que ce n'est pas agréable pour toi... - Pas agréable ? Tu peux le dire, oui ! Tu imagines comme je me sens mal face à elle ? Tu as une petite idée de combien je me trouve misérable et malhonnête ? Cette femme est gentille, ça m'écœure de lui mentir comme ça ! - Pourtant tu le fais... Il lâcha son paquet et me repoussa brusquement pour se mettre à cheval sur moi. - Je le fais parce que tu m'y forces. Parce que je t'aime et que je ne rêve que de tes bras. Mais je voudrais tellement qu'elle sache pour nous pour qu'on n'ait plus à se cacher ! Parle-lui Teru ! Dis-lui que tu m'aimes ! Le leader d'Arashi était un excellent acteur. Mais l'homme désespéré qui me dominait à cet instant ne jouait pas. Il y avait tant de douleur dans ses yeux... - On leur ferait trop de mal... - Leur ? Leur !? C'est qui "leur" ? J'ai quitté Jun, moi ! Je n'ai plus que toi, Teru ! Et te voir mentir à ta femme devant lui qui sait tout, ça... ça me file la nausée ! Il se releva aussi brusquement qu'il m'avait enjambé, récupérant son paquet de cigarettes avant d'en glisser une entre ses lèvres d'une main tremblante et de sortir de sa chambre. Sa colère se sentait dans chacun de ses gestes. ...Il avait fait quoi !!? Il avait quitté Jun ? Son Jun ? Cet homme qu'il couvait du regard avec tant d'orgueil il y a encore juste un mois ? - Attends ! m'écriai-je en le rejoignant dans le salon. Tu l'as quitté quand ? Pourquoi tu ne m'as rien dit ? Et pourquoi t'as fait ça ? Il arrêta de faire les cent pas et me fixa d'un regard lourd de reproches. - Parce que je l'aime assez pour ne pas vouloir lui faire du mal. Parce que je ne pouvais pas me partager entre vous deux. Parce que la vie, c'est faire des choix, et que je t'ai choisi toi. Et je ne t'ai rien dit avant parce que j'espérais réussir à te faire faire le même genre de choix. Mais tu n'en as manifestement pas envie. Tu m'aimes, mais je ne suis qu'un mec, je ne suis pas "présentable" en société. Pas dans TA société. Je n'eus pas la possibilité de lui répondre, son téléphone sonna à ce moment-là. De ce que je compris, c'était son manager qui lui fixait l'heure pour partir. N'ayant rien à dire là-dedans, je décidai de prendre ma douche, tourmenté par ses derniers mots. Il avait mis le doigt où ça faisait mal. Parce qu'il avait raison, quelle que soit la profondeur de mon amour pour lui, je n'oserai jamais braver ma famille et mon milieu pour m'afficher avec lui. Et je le savais depuis le début. Vivre notre passion, cachés, m'allait parfaitement. Et je croyais que ça lui irait aussi. Il ne s'était jamais affiché avec Jun. Ils avaient joué au fan-service, mais il en avait fait davantage avec Nino-kun. Je le savais parce qu'en privé, Matsujun disait assez combien ça le frustrait. Et aussi... je ne pensais pas qu'il avait rompu une relation de dix ans... pour moi... Et il lui avait dit pour nous. Je comprenais mieux pourquoi Nino était collé à son ami à Disney. ... Ça faisait si longtemps ? Ils s'étaient séparés alors... alors que Sato et moi ne nous étions même pas encore revus ? Et qu'il ne pouvait donc pas savoir que je ne l'ignorerais pas ? Je me sentis soudain misérable avec mes sentiments hésitants. Satoshi était quelqu'un d'entier et de droit. Il méritait quelqu'un d'aussi droit et entier que lui. Je n'aurais jamais dû l'arracher à Matsujun. Quand je sortis de la salle de bain, je vis qu'il m'attendait, son portable à la main. - J'ai un message de Jun. Je pense que tu devrais l'écouter. Il mit l'appareil en marche et je pus entendre la voix grave et un peu hachée. "Riida, c'est Jun. Tu diras à Teru, si jamais il se rappelle encore un peu qu'il est marié, que sa femme est chez moi." Je fixai les yeux sur Satoshi. Des yeux inquiets. Pourquoi était-elle chez lui ? - J'ai rappelé Matsuura-san. Il me prend chez Jun dans une heure, après être passé chez Hamada-kun. Je vais prendre ma douche et tu m'emmènes là-bas. J'acquiesçai machinalement. Quand il passa près de moi, je l'attrapai par la taille et déposai un baiser dans son cou. - Je t'aime Sato-chan. Crois-moi. - Je te crois, dit-il après un léger silence et tout en se dégageant. Je te crois, et c'est pour ça que ça fait si mal.
*********************** ++Cécile++
J'étais contente d'être avec eux ce soir, mais ils n'étaient pas Teru. Et quand mon voisin, qui me regardait jouer avec mon verre de saké, m'asticota sur ma capacité à le boire cul-sec, je retrouvai mes vingt ans et relevai son défi stupide. En reposant mon verre, je le fixai avec un petit sourire narquois qui lui fit comprendre que c'était mon tour de douter de ses capacités. Jun avait tenté de me garder le plus loin possible de Satoshi. Mais quand Sho avait lu le message envoyé par Teru pour dire qu'il nous rejoignait à la faveur d'une session terminée plus tôt que prévue (le caster avait lu le message à haute voix alors qu'à la fin Teru indiquait qu'il voulait me faire la surprise...), j'avais senti venir les choses gros comme une maison. Et je ne m'étais pas trompée. Teru n'avait pas cherché à écarter Nino qui me collait de trop près, et il s'était assis à côté de son amant. Sans voir ce que mon voisin de droite commençait à deviner, à savoir que le défi stupide dans lequel le gamer et moi étions lancés commençait à virer à la noyade. Pourquoi m'étais-je laissée couler dans cette bêtise ? Sans doute parce que j'étais avec des gens à qui je faisais confiance. J'étais sûre qu'ils ne me laisseraient pas faire quelque chose d'idiot, quoi qu'il arrive. Et pour une fois, j'avais besoin d'ouvrir les vannes et d'extérioriser mon désespoir. Chaque jour, chaque nuit, je sentais Teru s'éloigner davantage. Je ne savais pas comment le retenir. C'était une chose que je ne savais pas faire. Même Amaury, mon premier amour, je n'avais pas su lui dire que sa stérilité ne nous empêcherait pas d'être heureux et je l'avais laissé me quitter après trois années si belles. En fait, au fil du temps, je me sentais de plus en plus maudite en amour et cette impression me coupait tout élan. C'était sans doute pour cela que j'avais foncé tête baissée dans les bras que Teru m'ouvrait si largement. Il avait si facilement brisé les barrières de méfiance que j'avais dressées autour de moi que je m'étais dit qu'il était le bon, et qu'avec lui, j'avais trouvé un être à chérir qui me rendrait ma tendresse. Si j'avais su qu'il était amoureux d'un homme, de Satoshi, j'aurais sûrement insisté pour que l'on s'installe en France. Mais je l'avais ignoré et une suite de hasards les avait rapprochés. Et à présent, j'avais le rôle détestable et ridicule de l'épouse trompée. Et je me sentais tétanisée dans cette position bâtarde. Que me fallait-il, bon sang, pour réagir ? Pourquoi n'étais-je jamais capable d'imposer mes vues quand les sentiments de quelqu'un d'autre étaient dans la balance ?
(...)
Le bruit de la sonnette était vraiment désagréable. Mais le corps contre moi n'avait pas semblé s'en soucier et avait bougé lentement. Il m'avait prise dans ses bras et m'avait portée dans une autre pièce où curieusement le bruit était un peu moins audible. C'était quand il s'était penché sur moi pour me murmurer quelques mots que j'avais reconnu le propriétaire de la voix nasillarde. Pourquoi Jun s'était-il occupé de moi ? Teru était parti avec Satoshi, ça je m'en souvenais, mais pourquoi étais-je ici, moi ? Pendant un moment, je n'avais entendu que de vagues chuchotements, puis mon téléphone avait sonné. Essayer de le chercher m'avait demandé des efforts monumentaux. Je n'avais pas eu une telle gueule de bois depuis au moins... douze ans ? La voix de Teru m'avait rappelé pourquoi j'avais bu, mais l'association sonnerie et Lucie venait de se faire dans ma tête et je m'étais focalisée dessus. Et j'avais eu raison. - Lucie ? - Allô, Cécile ? Je suis désolée de te déranger. J'ai laissé un message sur le répondeur, je ne pensais pas que tu rappellerais tout de suite. Tu ne dors pas avec ton téléphone, habituellement. - Pas de problème, t'inquiète. Qu'est-ce qu'il t'arrive ? - Ok, je vais faire court. Tu sais que j'ai gardé la ligne de téléphone fixe que tu avais ? - Oui merci, j'ai le numéro en tête. - Eh ! bien, tu n'es pas la seule. Ton cousin Fabio aussi, et il laisse beaucoup de messages. Il appelle n'importe quand et dans le dernier, il dit vouloir venir ici ce soir. - T'en as parlé à mon père ? - Non ! Il serait capable d'aller le frapper ! - Et il aurait pas tort. Mais tu as bien fait de m'appeler, je m'en occupe. Il t'embêtera plus, promis. - Merci ! - Autre chose ? - Non non, je te laisse dormir. - Oh! Lucie ! - ...Oui ? - J'ai vu Nino hier soir. Il n'a pas l'air en forme. Tu as gardé contact avec lui ? - ...T'en fais pas pour ça, Cécile. Et reste calme quand même, hein ? Avec ton cousin... - Oui oui, t'en fais pas. Il aura jamais autant apprécié le fait que qui dit téléphone, dit distance. Bonne soirée ma belle. - A plus. Rester calme ? A d'autres ! Il se moquait du monde à insister autant. Parce que je savais très bien qu'il ne voulait pas s'excuser pour son attitude d'avant le mariage. Ce petit cafard ne faisait que chercher les embrouilles. Il oubliait juste à qui il avait affaire. Remontée comme une pendule, je m'étais faite envoyer téléphoner dans la pièce voisine où j'avais hurlé ma rage sans retenue. Ce n'est qu'en raccrochant que je me rendis compte que mon cousin avait écopé de tout ce que je n'arrivais pas à dire à Teru, et que j'avais sûrement réveillé une partie de l'immeuble. Mais je me sentais tellement mieux que je n'en éprouvais qu'un faible remord. Et un intense mal de crâne. Je revins doucement dans l'autre pièce, mais m'arrêtai en entendant la voix de Satoshi. Teru me tournait le dos et je ne voyais pas mon rival. Seul Jun me faisait face et s'aperçut de mon retour. Mais mon index sur mes lèvres lui demanda de garder le silence. J'avais trop besoin d'entendre ce qui se disait... - ...dis toi-même qu'elle ne buvait pas autant ! Tu la rends malheureuse, Teru. Et tu es incapable de me rendre heureux. C'est juste du gâchis, et j'en peux plus. Je ne supporte plus de t'entendre me dire que tu l'aimes, même si ce n'est pas comme moi. Teru semblait figé. - Tant qu'elle ne sait rien, tant que tout n'est pas cassé entre vous, fais en sorte de tout recoller. Je ne veux plus que tu m'approches. Reprends ta femme, rentrez chez vous, faites l'amour, fais-lui les enfants dont tu as tant envie, et oublie-moi. Surtout, oublie-moi ! La voix de Satoshi était chargée d'une douleur indescriptible, mais il semblait ferme. - Sato-chan, je ne voulais pas... - Peu importe ce que tu voulais. C'est ce que je veux moi. Va t'en avant de tout détruire ! Je reculais jusqu'à la porte de la pièce que je venais de quitter et fis du bruit en baissant la poignée. Puis je réapparus dans le salon où Teru se tourna vers moi. Je fis semblant de ne pas voir son regard brouillé, je niai son teint blafard. Je m'excusai juste auprès de Jun pour le bruit et lui demandai un verre d'eau. Il m'emmena dans la cuisine et quand nous fûmes hors de vue des deux autres, je lui pris la main pour lui demander si j'avais bien entendu. - Ils avaient dû commencer à se disputer avant d'arriver et voir l'inquiétude de Teru pour toi a dû faire déborder le vase de Toshi. Tu vas pouvoir récupérer ton mari... - Et toi ?... - Quoi moi ? - Satoshi va te revenir ? - Ça m'étonnerait. J'ai dit trop de choses. Mais t'occupes pas de ça. Sois heureuse Cécile-chan. Et si jamais il te fait des misères, dis-le-moi. Je ne pus rien lui répondre, trop perdue face à ce retournement inattendu. - Au fait, ma chambre est insonorisée, donc t'inquiète pas pour les voisins. Je m'inclinai. Quand nous sortîmes de la cuisine, nous vîmes Teru qui m'attendait dans le couloir. Il prit ma main et salua Jun, le remerciant encore de s'être occupé de moi, puis nous rentrâmes chez nous. Enfin !
*********************** ++Ohno++
Comment avais-je pu croire que j'oublierais cette sensation si facilement ? Ses lèvres sur les miennes, sa langue dans ma bouche, ses mains sur mes épaules, son étreinte à la fois douce et impérieuse... Tout était si familier, si... - Ça suffit Jun ! Arrête ça tout de suite !! Mes mains l'avaient repoussé brutalement même si je restais bloqué contre le mur où il m'avait acculé. Je savais, rien qu'en lisant les réactions de mon corps à ce simple baiser, que si je le laissais faire, je me retrouverais nu à gémir sous ses assauts en moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire. Après le départ de Teru et de sa femme, à peine la porte fermée, Jun m'avait redit qu'il m'aimait, qu'il était prêt à tout pour moi et qu'il ne voulait que moi. Encore plongé dans la tension qu'avaient provoqué mes paroles envers Teru, je n'avais pas répondu, ni réagi quand il s'était approché pour m'embrasser. Je savais que ma libido était trop élevée et que si Jun avait pu rester avec moi toutes ces années, c'était parce qu'il était toujours prêt à me satisfaire. Mais après ce qu'il avait avoué tout à l'heure, je me posais des questions sur ce qu'il était capable de faire pour moi. - Jun, réponds-moi franchement, dis-je en haletant doucement pour reprendre mon souffle perdu juste avant contre sa bouche. Depuis quand savais-tu que je plaisais à Teru ? Je le vis se raidir un instant avant de sembler abandonner quelque chose retenu longtemps. - Depuis que Sho nous l'a présenté. - Et depuis quand savais-tu qu'il me plaisait ? - ...Depuis que tu as posé les yeux sur lui en le saluant. Avant même que je m'en rende compte, donc. - Et tu savais que c'était réciproque ? - Oui. - Pourquoi m'as-tu séduit alors ? - ...Pour qu'il ne t'approche pas. - Tu voulais l'écarter de moi ? Pourquoi ? Ma voix se faisait de plus en plus froide et coupante. Ses réponses faisaient monter en moi une colère sourde. Que de temps nous avions perdu à cause de lui ! - Parce qu'il ne te méritait pas. - Et de quel droit te permets-tu de juger de ce genre de chose ? J'étais à la limite de l'explosion. - C'était évident. - Ah ! oui ? grondais-je. - Oui. D'ailleurs il n'a pas cherché à m'empêcher de devenir ton petit ami. Il n'en avait pas le cran. Je devais reconnaître que du cran, lui n'en manquait pas. Oser m'avouer cela avec autant de calme alors que j'étais près de laisser éclater la pire des fureurs me paraissait surréaliste. Tout ce temps perdu où nous aurions pu nous aimer, tous ces gens que nous n'aurions pas fait souffrir, toutes ces choses idiotes que nous n'aurions pas faites. Si seulement il nous avait laissé nous approcher. S'il ne s'était pas mis en travers de notre amour. - Tu t'es toujours cru plus fort que tout le monde, Matsujun. Tu pensais quoi ? Que j'allais te remercier de me l'avoir fait perdre ? Tu te rends compte du gâchis que tu as causé ? Des années que nous avons perdues ? Je ramassai mon sac. J'attendrai mon manager devant son immeuble, pas moyen que je reste chez lui une minute de plus. - Jun, on va continuer à bosser ensemble pour Arashi. Mais ne compte pas sur moi pour te pardonner de m'avoir fait perdre l'homme de ma vie. Et prie pour que cette semaine en Inde me permette de me calmer suffisamment pour ne plus avoir envie de te coller mon poing dans la figure. Je quittai son appartement sur ces mots sans un autre regard pour lui. Mon esprit était plein de rage et il me fallut bien tout le trajet jusqu'à l'aéroport puis en jet privé pour réussir à apaiser un tant soit peu la colère qui m'habitait. Et quand celle-ci laissa un autre sentiment lui tenir compagnie, ce fut une peine immense qui m'envahit. Quel gâchis !
Voilà, c'est fini pour cette semaine sauf si vous en voulez un second mercredi par exemple. Si c'est le cas dites le moi en comm' A bientôt | | | Lun 14 Oct - 13:56 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
Age : 44
Localisation : Osaka!!! enfin!!!!
Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| Je sais nous sommes lundi et pas dimanche; mais ici ce jour est férié car c'est la fête du sport! Et ce week end il y avait aussi la fête de la bière dans le parc du château d'Osaka. Bon je suis tombée dessus par hasard hier alors que j'allais au Starbucks. Bonne lecture à toutes PS : Petites précisions de lecture : L'anglais est en Tempus sans ITC L'allemand en Berlin Sans FBLe français en italique Le journal de Lucie en Edwardian Script ITC - Chapitre 20:
++Nino++
- Nino-kun, vous avez une demi-heure avant la prochaine interview. Je remerciai Manager-san et rejoignis la loge. Une fois rafraichi, je plongeai la main dans mon sac pour en extirper mon téléphone. J’allais tenter de joindre la demoiselle pour la énième fois de la journée. Evidemment, je n’eus pas plus de succès que les fois précédentes, et je laissai un nouveau message sur son foutu répondeur. Cela faisait plus d’une semaine que je me ruinais en communications internationales et que Lucie m’ignorait. Je pensais même qu’elle avait mis mon numéro en indésirable car, à présent, je tombais directement sur sa messagerie sans même passer par la case sonnerie. Ma décision était prise, j’allais devoir me déplacer en personne si je voulais avoir une chance de lui parler. Si je faisais le voyage jusque là-bas, elle n’oserait sûrement pas me claquer la porte au visage sans écouter un minimum mes explications. J’en étais sûr. Ce n’était pas dans son caractère. La difficulté pour moi était de trouver quelques jours libres de tous engagements. En attendant et en prévision de cette absence, j’avais demandé à mon manager de remplir le moindre trou de mon emploi du temps. Du coup, je faisais des journées de quinze heures et quand je retrouvais mon appartement bien aimé, j’avais tout juste la force de me glisser sous la douche avant de m’effondrer sur ma couette. L’avantage, c’était que ça m’évitait de trop penser aux dernières semaines : celles entre l’anniversaire de Sho et le moment où je m’étais réveillé avec l’empreinte de la main de Masaki en travers du visage. Ce matin-là, j’avais convaincu Sho-chan de m’aider à récupérer le numéro de téléphone de Lucie via Teru. Trois jours plus tard, il me l’apportait et je commençais à appeler la demoiselle.
***************** ++Lucie++
Aiba dit : Kombawa Lu-chan.
Lucie dit : Ohayô Aiba-chan.
Aiba dit : On est plus le matin Lucie. Il est 22h passé.
Lucie dit : Chez toi peut-être mais là où je suis il est 8h …
Aiba dit : Il est tôt en France, c’est vrai j’ai encore oublié le décalage horaire…
Lucie dit : Et en plus je n’y suis pas…
Aiba dit : Et t’es où aujourd’hui ?
Lucie dit : A New York. En Amérique.
Aiba dit : J’y suis allé il y a longtemps. T’es allée à la Statue de la liberté ?
Lucie dit : Oui il y a deux ans mais pas cette fois-ci. Comment vas-tu ?
Aiba dit : Ça va. On est tous overbooké. Moi je jongle entre Bartender, les émissions et puis bientôt on va commencer les réunions pour la prochaine tournée. Enfin ça c’est d’abord le boulot de Matsujun, Sho-kun et Nino-chan.
Lucie dit : Et Oh-chan ?
Aiba dit : Riida est parti en Inde la semaine dernière, il nous a rapporté des Gandhi. Ah oui, juste avant qu’il ne parte, on a passé la soirée de la St Valentin avec Cécile. Elle nous a même offert des chocolats.
Lucie dit : Vraiment ? C’est surprenant de sa part… je croyais qu’elle considérait cette fête comme une grosse arnaque commerciale ?
Aiba dit : Peut-être mais on en a tous eu, même Matsujun ! Au fait tu vas être en Amérique combien de temps ?
Lucie dit : Je suis arrivée hier soir et je repars dans trois jours.
Aiba dit : Tu voyages tout le temps mais tu viens jamais au Japon.
Lucie dit : Je vais là où on me propose du boulot et cette fois c’est à NYC.
Aiba dit : Je devrais peut-être parler de toi à notre ingénieur du son.
Lucie dit : Aiba-chan, si je devais un jour travailler à la Jimusho, j’espère que ce sera parce que la lettre que j’ai envoyée en décembre, sera arrivée sur le bon bureau et que mon profil aura intéressé quelqu’un. En aucun cas parce que j’aurais été pistonnée. Bon, je vais devoir te laisser parce qu’il faut que j’aille bosser. Bisou Aiba-chan.
Aiba dit : Yatta !!! j’ai eu un bisou !!! Moi aussi je t’embrasse Lu-chan.
Je me déconnectai d’msn afin d’aller aux studios où j’étais attendue. Une longue journée m’attendait, sans oublier le dîner de ce soir. Ce dernier n’avait rien à voir avec le boulot mais je ne savais pas exactement dans quelle mesure ce rendez-vous allait faire remonter de bons ou mauvais souvenirs.
(…)
Quelques heures plus tard je me retrouvais dans un petit restaurant sympa en compagnie d’Eleonor. - Lucie comment ça va ? - Très bien. Et toi ? Toujours dans le même service ? - Oui. La médecine générale me convient parfaitement. Eleonor était une infirmière de mon âge, avec laquelle j’avais sympathisé quand j’étais tombée malade et m’étais retrouvée dans son service, avant d’être rapatriée vers Paris. A l’époque, elle m’avait donné son numéro et son mail en me faisant promettre de l’appeler quand je reviendrai ici et c’est pourquoi nous dînions ensemble ce soir. Nous avions entre-temps échangé quelques mails mais ce soir il s’agissait de notre première rencontre amicale. - Au fait Lucie, je vais enfin avoir le temps et l’argent pour visiter la France… Tu serais toujours partante pour me faire visiter ? - Bien sûr, pour ce qui est de l’Alsace au moins… dès que tu as une idée de la période où tu comptes arriver, préviens-moi que je bloque moi aussi quelques jours et surtout que je reste là-bas. Oui, il valait mieux qu’elle me prévienne un peu à l’avance. A mon retour du Japon, j’avais passé vingt-quatre heures à dormir, puis j’étais rapidement retournée travailler. Je m’étais aperçue de deux choses : primo, oublier le geek n’était pas une chose facile loin de là…; secundo, cet appartement était affreusement vide avec le départ de Cécile et je détestais ça. Conclusion, en attendant de trouver un ou une colocataire, je fuyais et me réfugiais dans le travail le plus possible, prenant tout ce que l’on me proposait puisque, la tête dans les consoles, je ne pensais à rien d’autre. Je parlais à mes amis par internet quand ils étaient loin, et ils me permettaient de garder un minimum de contact avec le reste de l’humanité. - Alors dès que je sais quand je peux poser mes congés, je t’appelle ! A bientôt Lucie, prends soin de toi. Eleonor et moi, nous nous étions quittées devant la station de taxis sur une accolade et ces derniers mots.
(...)
23 février 2011 Cher journal, Ce type me pompe l’air ! Voilà une semaine qu’Il me harcèle à coup d’appels 50 fois par jour. Dire qu’ils sont censés avoir des emplois du temps over-bookés. Je n’en pouvais tellement plus que j’ai fini par craquer tout à l’heure avec Cécile. Dire que je n’appelais que pour souhaiter un joyeux anniversaire à Teru. Pour finir, je lui ai raconté ce que j’avais vu dans ce couloir, omettant cependant mes suppositions erronées à propos de Teru puisque Aiba-chan m’a assuré que ce n’était pas lui le partenaire de l’autre Geek. Elle m’a engueulée. Me reprochant d’avoir gardé tout ça pendant autant de temps et j’ai essayé, sans trahir la conversation que j’avais surprise entre Sho et Teru, de justifier ma réaction. Cécile m’a conseillé de bloquer les appels du Geek ou de changer de numéro. J’avais déjà mis son numéro en indésirable depuis quelques jours mais le second conseil était impossible puisque mon téléphone était aussi mon numéro professionnel. Je devrais donc supporter son baratin saturant ma messagerie et perdre des moments précieux à le supprimer.
***************** ++Cécile++
Fallait-il vraiment tant de monde pour une simple conférence sur le développement ? Bien sûr, c'était un ancien ministre qui avait parlé ; évidemment, l'ambassade, organisatrice de l'évènement, avait fait les choses bien. Mais ça ne m'empêchait pas de ne pas me sentir à l'aise au milieu de cette foule hétéroclite et bien habillée. Heureusement qu'avec la diversité des invités présents à la réception qui suivaient la conférence, on me demandait de traduire les questions et les réponses des uns et des autres. Mais ce n'était que pour des points de détails, ces têtes pensantes sachant toutes s'exprimer dans un anglais acceptable, au contraire des personnes qui avaient assisté à la conférence. Et lorsque je n'avais rien à traduire, je ne me sentais vraiment, mais vraiment pas à ma place. - Cécile-chan ? Je ne me retournai pas immédiatement, doutant que mes oreilles aient vraiment entendu quelqu'un m'appeler comme ça ici. C'était tout bonnement impossible. - Ano... Excusez-moi, mais je suis sûr de vous connaître... Je fis face à l'homme qui venait de toute évidence de m'adresser la parole. Et étouffai un soupir de soulagement en constatant qu'il ne se trompait pas. - Si vous pensez connaître une personne qui vous a offert du chocolat au piment, vous avez raison d'être sûr de vous, fis-je en m'inclinant légèrement devant Sho. Je l'avais vouvoyé par ironie, mais il poursuivit de même, estimant avec justesse que la familiarité aurait entraîné trop d'explications superflues à ceux qui auraient pu nous entendre. - Du piment ? Oh ! c'était ça ce goût ? Mais ce n'était pas désagréable, ajouta-t-il en m'offrant un sourire qui semblait à la fois professionnel et sincère. - J'espère bien, mon but n'était quand même pas de vous empoisonner. Comme ils me l'avaient demandé, j'avais préparé des chocolats "normaux" et sucrés, mais je n'avais pu m'empêcher de glisser au milieu quelques exemplaires un peu particuliers au piment, au poivre ou autres saveurs moins douces. J'avais même tenté le wasabi... Histoire de marquer ce que j'avais dit sur ce que je pensais de cette fête. - Vous êtes ici en tant que traductrice ? - A votre avis ? Sachant que je n'aime pas les mondanités... Il rit doucement. C'était si agréable. - En effet. Moi, je suis là en partie pour l'intérêt du sujet, et en partie par obligation familiale. Oh ! mais j'y pense... Vous parlez allemand, non ? - Oui ? - Nous avons une stagiaire à la rédaction, mais son anglais est assez... difficile à comprendre. Peut-être que vous pourriez me sauver la vie et la convaincre qu'elle n'a pas besoin de me suivre pour faire son reportage ? Je ne travaille pas ce soir, et... Il s'approcha de moi pour me dire d'un ton confidentiel : - Et honnêtement, c'est assez difficile d'approcher du buffet avec quelqu'un d'aussi collant. Je penchai la tête mais ne vis personne près de lui. - Où l'avez-vous cachée, alors ? - Sakurai-san ! interpela une voix féminine et légèrement gutturale. Où étiez-vous parti? Il y a trop de monde ici ! Oh ! bonsoir mademoiselle. Lena Streuber, enchantée. La main que me tendait la jeune femme était tout ce qu'il y avait de plus franc et naturel, aussi la pris-je en souriant avant de corriger en allemand. - Madame. Je m'appelle Cécile Miura et mon mari est un ami de Sakurai-san. - Vous parlez allemand ? Quelle chance j'ai ! Je ne comprends rien à leur anglais, et mon japonais est trop faible pour tenter une conversation ! Vous vous en sortez vous ? - J'essaie... Sakurai-san me disait justement que vous travailliez avec lui ? Elle acquiesça avant de m'expliquer la raison de sa présence ici. Voyant que Sho en avait profité pour s'éclipser vers le buffet, je décidai de l'aider vraiment et accompagnai Fraülein Streuber auprès de l'un des attachés culturels qui était venu avec nous à la station de ski de Fujiten quand nous y étions allés une journée au début de février pour préparer l'arrivée d'un groupe géré par l'ambassade. Il avait passé une grande partie de la journée à me vanter les mérites des stations de ski autrichiennes. Leur conversation se lança sans problème et j'envisageais sérieusement de prendre le chemin du retour lorsqu'une jolie jeune femme me fit signe de la rejoindre. - Madame Miura, je vois que vous pensez à partir. Avant de vous laisser vous sauver, je tenais à vous présenter quelqu'un. Elle se tourna vers l'homme à ses côtés. - Christian, voici Cécile Miura, la bru de mon maître chadô dont je t'ai parlé. Madame Miura, je vous présente Christian, mon époux. Il est conseiller à l'ambassade. Nous échangeâmes les salutations d'usage. Astrid était celle que j'avais orientée vers ma belle-mère pour la cérémonie du thé et qui m'avait convaincue de me lancer dans la calligraphie. Elle était aussi discrète qu'il était charmant et ils formaient un couple sympathique. Le genre de personnes que j'aurais invitées à dîner chez moi sans hésitation si j'avais été un peu plus sûre de ma propre vie de famille. Mais ça ne faisait pas deux semaines que Teru était venu me chercher chez Jun, et je préférais profiter de nos soirées pour qu'on se réapprivoise mutuellement. D'ici quelques semaines peut-être... Lorsque je quittai enfin l'ambassade, après avoir salué toutes les personnes indispensables, je rentrai chez nous avec un soulagement à peine dissimulé. J'avais dit à Teru de ne pas m'attendre pour manger, et je le trouvai dans le salon, confortablement installé sur le canapé. La télé était allumée sur une série quelconque et il jouait avec Nuit qui semblait adorer ça. Toutefois, quand elle me vit, la crapule vint se jeter dans mes jambes et ne sembla contente qu'après que je me sois arrêtée et baissée pour la gratouiller longuement derrière les oreilles et sur le ventre. Repue de caresses, elle se sauva dans sa pièce tandis que je me relevais. Je ne pus que tenter de maintenir un certain équilibre lorsque Teru vint me coller à la porte donnant sur le couloir qu'il en profita pour fermer avant de m'embrasser. Je me perdis rapidement dans son baiser, passant les bras autour de son cou, caressant ses cheveux et ses épaules, cherchant à l'attirer davantage contre moi. Ses mains s'aventurèrent dans mon dos pour défaire ma robe avant de descendre le long de mes hanches. Il releva mes jambes en me soulevant et nous écarta de la porte. - Tu m'as manqué, murmura-t-il contre ma bouche. J'espère que tu n'as pas faim, parce que la seule chose que je vais te laisser manger, c'est moi. - Mon estomac va bien. Mais... j'ai très faim. Nos lèvres se caressaient doucement et il m'emmena dans notre chambre en me promettant une nuit de festin.
*********************** ++Sho++
Je rentrais chez moi à pied tout en repensant à ma soirée. Rencontrer Cécile-chan à l'ambassade de France avait été surprenant, même si j'aurais pu m'y attendre. Elle m'avait sauvé la vie avec Müller-san. C'était une jeune femme très enthousiaste et qui posait beaucoup de questions. Sauf que comme on ne la comprenait pas très bien, lui répondre relevait toujours du défi. De plus, il y avait des amis de mon père à cette conférence. Avec leurs épouses. Et je ne savais que trop bien à quel point le réseau des épouses fonctionnait vite. Si on m'avait vu toute la soirée avec une jeune femme à mes basques, j'aurais été bon pour passer à l'interrogatoire maternel. J'approchais doucement des trente ans, et ma mère ne manquait jamais de me le rappeler. Mes parents avaient fait comme beaucoup d'invités au mariage de Teru : ils avaient dormi sur place. Et je ne savais s'ils m'avaient vu eux-mêmes ou si on le leur avait rapporté, mais le fait que Rinoka-chan et moi étions sortis de la même chambre était parvenu aux oreilles de Kaa-san. Comme nos deux familles cherchaient depuis longtemps un moyen de se rapprocher (le mariage de Mai avec Teru avait même été envisagé quelques années plus tôt, mais les deux concernés avaient éclaté de rire à cette annonce, anéantissant le projet), loin de provoquer un scandale dans nos chaumières, ce fait avait rendu la génération précédente extrêmement bienveillante envers cette histoire, qui n'en était pourtant pas une. Pour la forme, mes parents m'avaient glissé qu'attendre le mariage eut été une bonne chose, mais qu'après tout, notre époque tolérait ce genre de coup de canif dans le contrat. Et je ne m'étais pas permis de dire que le coup de canif avait été donné il y a longtemps pour les deux parties. J'étais certain que si mes parents savaient que ma première aventure datait d'une bonne décennie, ceux de Rinoka-chan n'imaginaient même pas de quoi leur fille était capable. En y repensant, je me demandais si Mai était aussi délurée que la cousine de Teru. Non, ma petite Mai ne pouvait pas être comme ça. Je l'avais vue grandir, elle. Il faudrait que je demande son avis à Teru. D'ailleurs, il faudrait que je l'appelle tout court, parce que, encore une fois, j'avais manqué son anniversaire. Ou je passerai le voir ? Mmm, je n'étais pas sûr d'en avoir le temps. Je venais d'arriver dans mon appartement quand mon téléphone sonna. M'attendant à entendre mon manager me dire qu'il m'avait envoyé mon emploi du temps de demain, suite à la dernière ultime modification, je fus surpris par la voix féminine qui me parla. - Kaa-san ? - Sho. Je viens d’apprendre une bonne nouvelle. Rinoka-chan a trouvé un poste d’enseignant. C’était normal puisqu’elle était dans les premières de sa promotion mais avec la crise actuelle, il faut s’en réjouir non ? - Bien entendu, Kaa-san. Mais tu ne m’appelais que pour ça ? Parce que c’est une bonne nouvelle mais... - Autrement j’espère que tu passeras bientôt à la maison avec Rinoka-chan pour dîner, afin que nous fassions tous plus ample connaissance… Appelle-là rapidement pour la féliciter, d’accord ? A bientôt mon grand. - A bientôt Kaa-san. Discuter avec ma mère sur le sujet ne mènerait à rien, c'était une cause perdue d'avance. Et ce n'était pas parce que nous avions l'assentiment de tout le monde avant même d'avoir eu l'idée d'envisager quelque chose que ça rendait l'affaire plus sûre. Je ne considérais pas Rinoka comme une histoire sérieuse. Les deux nuits que nous avions passées ensemble depuis le mariage avaient certes été plaisantes, mais sa façon d'être entreprenante me laissait une impression légère de malaise. Nino m'aurait sûrement dit de prendre mon pied sans me poser de question, et avoir une main attachée au montant d'un lit aurait certainement convenu à Riida, mais j'avais du mal à me projeter dans l'avenir aux côtés d'une femme comme elle. Et si autrefois nous discutions parfois de ces choses avec Aiba-chan, depuis que sa copine l'avait quitté et qu'il ramassait les miettes de Nino, je n'arrivais plus à évoquer ce genre de sujet avec lui. Pourtant, suivant les conseils de ma chère maman, je composai le numéro de Rinoka-chan pour la complimenter d'avoir trouvé un poste avant la fin de son cursus. - Merci Sho-chan pour ton appel et tes félicitations. Même si je me doute que c'est Sakurai-san qui t'en a parlé. Maman m'a dit avoir prévenu toutes ses amies. Je rougis et bafouillai une vague excuse. Son rire léger tinta à mon oreille et elle me coupa en me disant qu'elle acceptait de ne pas m'en vouloir pour ça si j'honorais ma promesse de l'inviter chez moi. - Tu m'avais dit qu'on voyait la Tour de Tokyo depuis ton balcon... J'avais laissé échapper ça, tout comme la fameuse promesse qu'elle m'avait arrachée sur l'oreiller, lorsqu'elle m'avait comparé à cette fameuse tour. "On la jurerait dressée pour l'éternité. Elle a l'air si solide et si dure. ...Tout comme toi Sho-chan." Evidemment que j'étais dur, puisque tout en me parlant, elle caressait mon sexe qu'elle faisait glisser entre ses seins. Je n'étais qu'un homme après tout. Et elle savait utiliser ses arguments. Pourtant, je la trouvais bien jeune malgré ses vingt-quatre ans et j'avais parfois envie de rencontrer une femme de mon âge avec qui je pourrais passer une soirée à discuter sans que cela finisse forcément en partie de jambes en l'air. Je me rendis compte que mon pantalon me paraissait soudain plus étroit et voulus écourter la conversation. Je sentais que j'allais devoir remettre la main sur l'une de mes vieilles cassettes pornos, et quitte à me vider la tête, autant le faire le plus rapidement possible. - C'est d'accord, Rinoka-chan, tu pourras venir admirer la Tour depuis mon balcon un de ces jours. - Quand je voudrais ? - Oui, quand tu voudras. Pourquoi faire durer cette conversation, franchement ? - A tout de suite alors. - ... Pardon ? J'avais dû mal comprendre. - J'arrive tout de suite. J'ai envie de voir la Tour cette nuit. Je me sentis obligé de la prévenir que là tout de suite... - Je m'en doute, Sho-chan, dit-elle en riant. C'est pour ça que je viens. Oh ! dis-moi, tu préfères la fraise ou le chocolat ? - ... - Bon, je prends les deux. Bye. Elle avait raccroché depuis quelques instants que je me demandais encore ce que venaient faire les parfums dans cette conversation. Ne voulant pas en savoir trop, je partis me prendre une petite douche avant l'arrivée de mon invitée et hésitais sur le menu à commander lorsque la sonnette retentit. En ouvrant la porte, je me préparais à lui expliquer que moi et la cuisine, nous formions un duo détonant, mais elle ne me laissa pas finir ma première phrase, fermant la porte d'un coup de pied pour me repousser contre le mur au fond de l'entrée en s'attaquant vigoureusement à mes lèvres. Ma main glissant dans son pantalon me confirma ce que je savais déjà : elle n'avait pas mis de petite culotte.
*********************** ++Ohno++
Nous étions le 1er mars. Cela faisait très exactement deux semaines que j'avais renvoyé Teru vers sa femme. Deux semaines que je repensais jour et nuit à tout ce qui avait fait ma vie ces dix dernières années et ce qu'elle avait été depuis le dernier concert à Fukuoka. Ma semaine de tournage en Inde, qui s'était bien passée, m'avait permis de faire un peu le point. Outre que je l'avais pensé totalement hétéro jusqu'au matin de son mariage, Teru avait toujours été un garçon rangé, sans rébellion, sans excessivité, sans excentricité. Il était le parfait représentant de la bonne société japonaise, le bon fils de famille prêt à accomplir ce que la tradition attendait de lui. J'étais incapable de dire ce qui m'attirait tant chez lui. Parce que je savais que jamais cet homme si "idéal" ne pourrait vivre quelque chose avec moi. Pas en l'assumant, en tout cas. Pas en étant capable de regarder quelqu'un en face et de lui dire "j'aime cet homme près de moi, il est toute ma vie et je veux vivre à ses côtés". C'était évident et je le savais, depuis que Sho nous l'avait présenté. Même si je n'avais pris conscience de mon attirance pour lui que bien plus tard. Après plusieurs mois, en fait. A ce moment-là, il aurait été n'importe qui, je l'aurais invité à l'hôtel pour une séance très privée. Mais c'était un ami de Sho-kun, quelqu'un que je plaçais au même niveau que les membres d'Arashi. Un membre fantôme, en quelque sorte. Et je ne touchais pas à mes amis ou mes kohais. Déjà pas avant, mais encore moins depuis que j'avais un petit ami. A l'époque, j'ignorais si j'avais des sentiments pour Jun et, si je tolérais qu'il m'avoue les siens, c'était uniquement lorsque je l'avais amené au bord de la jouissance. Les amants d'un soir (de temps en temps plusieurs en une soirée, en de rares occasions deux ou trois en même temps) n'avaient pas d'autre intérêt pour moi que d'être des corps pratiques qui se laissaient faire et se pliaient à mes fantaisies, même quand celles-ci impliquaient de me soumettre à la volonté perverse d'un autre. Je ne savais plus très bien comment j'en étais venu finalement à tomber amoureux de Jun. Ça s'était fait au fur et à mesure je pense, et un jour, c'était devenu évident. Tellement que j'avais abandonné mon style de vie pour le moins dépravé et avais fait ce qu'il fallait pour que Jun accorde à mon premier "je t'aime" toute l'importance qu'il avait. J'avais toujours pensé que Matsujun était un calculateur, capable de manipuler les gens pour obtenir ce qu'il voulait. Quand il s'était jeté dans mes bras, j'en avais eu la confirmation, mais je pensais y trouver plus que mon compte et n'y voyais rien d'autre que l'expression du désir qu'il avait de moi et d'être initié aux plaisirs de la chair - bien qu'avec le recul, je me disais qu'il y avait des initiateurs moins dangereux que celui que j'étais à l'époque. Alors découvrir après toutes ces années que son objectif avait juste été d'empêcher Teru de m'approcher, ça m'avait rendu furieux. Et comprendre à quel point il était retors et dissimulateur, ça me mettait encore hors de moi deux semaines après. Même si je savais bien qu'il était acteur, je n'aurais pas pensé qu'il jouerait la comédie jusque dans le lit. Je n'aurais jamais cru que quelqu'un puisse faire ce qu'il avait fait juste pour une raison aussi minable. Parce qu'il m'avait parfois laissé tester des choses que même certains amants occasionnels et expérimentés m'avaient refusées. Je n'avais jamais forcé personne à accepter mes lubies. Je faisais juste autre chose ou changeait de partenaire. Et lui avait été jusque-là seulement pour éviter que je ne vive quelque chose avec Teru. Etait-ce par jalousie ? Ou avait-il eu peur que ça ne sépare Arashi ? C'était les seules raisons acceptables que j'avais trouvées. Les autres me donnaient la nausée. En tout cas, il avait su m'accrocher dans ses filets, et je m'étais naïvement fait prendre. Je pensais que l'on s'accordait parfaitement, que ce soient nos libidos ou nos caractères, et j'étais heureux, en fait. Et ça reposait sur du mensonge. Ça m'énervait d'avoir aimé un type pareil. Parce que je l'avais aimé, ce salaud. Et je savais que mon corps était prêt à ressentir encore ses caresses. Par connaissance et anticipation du plaisir qu'il savait me donner. Parce que même si ses raisons étaient ignobles, il m'avait fait sortir de la spirale infernale des nuits de débauche où je me laissais couler sans avoir aucune conscience de ce que je perdais en faisant ça. Si je lui pardonnais un jour ce qu'il avait fait, ce serait pour cette raison. En attendant, il nous fallait travailler ensemble et faire comme si de rien n'était, au moins en public. En privé, je m'étais permis de lui dire ma façon de penser un peu plus à froid que le 15 février, même si ça n'avait pas été très calme. Il avait eu l'air énervé, mais en même temps, toute son attitude (comme son absence à ma soirée de retour d'Inde) montrait qu'il se reconnaissait coupable de ce que je lui reprochais, et il n'avait pas tenté d'argumenter. Et c'était tant mieux, parce qu'à force de cogiter sur les comment et les pourquoi et d'accumuler des nuits blanches, je n'arrivais plus à faire le point correctement sur ma vie et mes sentiments.
*********************** ++Aiba++
- Nino tu sais quoi ! … Occupe-toi de tes affaires ! Pas des miennes. Et toi Masaki, arrête de me regarder comme ça. Ça m’énerve encore plus. Bon, je me casse, c’est mieux pour tout le monde ! Matsujun avait ramassé ses affaires et était sorti en claquant la porte. J’espérais que faire les quelques kilomètres qui nous séparaient de chez lui à pieds allait le calmer. Mais au moins il ne serait pas en voiture… Puisque nous avions convenu ce matin que je le ramènerais. C’était d’ailleurs la raison de ma présence ce soir à la Jimusho. J’avais croisé Riida dans le couloir menant à nos quartiers. S’il m’avait vaguement salué les ondes de colère qu’il émettait me faisaient appréhender ce que j’allais trouver en entrant chez nous. Depuis cette pathétique soirée de Saint Valentin où j’avais sorti ses quatre vérités à Nino, la relation entre Matsujun et Riida semblait avoir pris un nouveau virage, et pas des plus paisibles. Si j’avais consciencieusement fait la tête à Nino pendant l’absence de Riida, je n’avais pu que constater la nouvelle phase de déprime dans laquelle s’enfonçait notre benjamin. Il avait décliné l’invitation à la soirée retrouvailles-jeu-souvenir au retour de Riida sous un prétexte futile. Nino avait promis de s’en occuper, car la soirée avait été organisée chez lui. Il se retrouvait maintenant avec deux Gandhi, le sien et celui de Jun puisqu’Oh-chan n’avait pas eu envie de le ramener chez lui. Depuis ce jour, en dehors des enregistrements, Jun semblait marcher sur des œufs à chaque fois qu’il était obligé de s’adresser à Oh-chan. Quant à ce dernier, il parvenait même à ne pas parler à son ex sur les plateaux grâce à sa réputation et à un fan service intensif avec Sho et Nino qu’il collait plus que de raison. Le plus surprenant étant de voir notre gamer se décoller systématiquement de Riida dès qu’ils étaient hors des plateaux. Avant, Nino adorait faire bisquer notre benjamin et restait souvent collé à notre aîné. Pour l'heure, Nino grommelait que oui, il allait s’occuper de SES affaires et laisser notre ami se débrouiller. Après m’avoir souhaité une bonne soirée et dit de ne pas prendre l’attitude de Jun trop à cœur, il partit à son tour et je le suivis tout en laissant un message à Sho pour le tenir au courant des derniers événements, avant de rejoindre mon véhicule et retrouver Shigeru et mes bébés.
N'hésitez pas laissez vos impressions | | | Dim 20 Oct - 3:07 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| Comment allez-vous en ce dimanche matin? Allez, sans plus attendre, votre chapitre du jour... Il se déroule quelques semaines après le chapitre précédent. Et la date est symbolique. Vous la devinez peut-être avec l'illustration... - Chapitre 21:
11 mars 2011, Montréal, Canada, 03h00 J’ai peur ! J’étais en train de bosser sur une maquette quand Xavier a pénétré dans ma cabine. « T’as pas une copine au Japon ? » C’est quand je lui ai demandé pourquoi qu’il m’a appris le séisme et la vague. J’avoue ; j’ai tout laissé tomber pour me jeter sur mon téléphone et appeler ce numéro que je ne compose jamais d’habitude, puisque nous préférons l’internet. Evidemment je n’ai eu personne, le réseau ne passait pas ou les lignes étaient saturées. Après m’être efforcée de me calmer, j’ai contacté les deux personnes susceptibles de me donner des nouvelles rapidement : Ben et Airi. Depuis mon portable est resté allumé près de moi et je guette la moindre communication. Cécile appelle s’il te plait !
************************ ++Ohno++
Les haut-parleurs lançaient des directives calmes, invitant le public et le staff à se diriger vers les points de regroupement. Pour ma part, je restai un peu perdu, immobile au milieu des gens, jusqu'à ce que je sente une main dans la mienne. - Viens par-là ! Ils vont vérifier que le décor n'est pas dangereux avant de voir si on peut reprendre l'enregistrement. Je suivis la main chaude qui m'entraînait à travers l'étage. Puis je reconnus le dos de l'homme que j'avais serré contre moi pendant des années. Et je réalisai que j'avais envie de me blottir contre lui, juste pour être sûr qu'il était là, et que j'étais en vie. Lorsque nous rejoignîmes les autres, je lâchai sa main et mes yeux cherchèrent nos amis. Je les repérai rapidement et les rejoignis. Heureusement, il n'y avait pas de vrais dégâts, quelques égratignures tout au plus. - C'était quoi ? Nino me regarda par en-dessous avant de s'approcher de moi et de me prendre l'épaule. - Riida, à ton âge tu devrais savoir ce qu'est un tremblement de terre. En plus, c'est pas le premier qu'on subit ces derniers jours. Ah ! oui, c'était ça. Je croyais... Enfin... Mes parents ! - Il faut que je passe un coup de fil, Nino. Désolé. Ses lèvres s'affinèrent dans un sourire presque moqueur, mais il ôta sa main de mon épaule et me regarda m'éloigner avant de se retourner vers les autres. Je composai le numéro de la maison familiale tout en priant pour qu'il n'y ait pas eu de problème là-bas. Ma mère décrocha au bout de quelques sonneries. Tout allait bien chez eux et je raccrochai, soulagé. Une envie fugitive me traversa alors que je contemplai mon appareil. Teru. Allait-il bien, lui aussi ? Avais-je le droit de l'appeler ? Depuis mon départ pour l'Inde, je n'avais pas cherché à le joindre, sachant que je ne ferais que remuer le couteau dans la plaie. Pourtant, j'aurais voulu savoir... - Tu as appelé ta famille ? me demanda la voix nerveuse du caster. - Oui, tout le monde va bien. Et toi ? - Pas moyen de joindre qui que ce soit. Les lignes sont saturées. J'attends. Tu as eu de la veine. Ah ! le manager vient de revenir, il doit pouvoir nous en dire plus. Nous nous rapprochâmes de l'homme qui demandait le silence par quelques gestes calmes. - Nous devrions pouvoir reprendre le tournage d'ici trois-quarts d'heure. Merci à tous pour votre patience, nous vous prions d'excuser ce contretemps. Vous serez informés lorsque nous pourrons rejoindre le studio. - Ok, bon, va falloir s'occuper jusqu'à 16h. Quelqu'un a une proposition ? Nous nous regardâmes un instant. - Je descends fumer, annonçai-je. Libre à qui voulait de me suivre. Voyant que personne ne m'accompagnait, j'étais sorti du bâtiment, me décidant à faire un tour dans le quartier en revêtant ma tenue de camouflage. La clope n'était qu'une excuse pour le fuir. Si je restais trop près de lui, je serais tenté de le prendre dans mes bras. Et si je faisais ça, je ne pourrais m'empêcher de l'embrasser. Je savais qu'il ne s'était consolé avec personne, mais me servir de l'état de nervosité ambiante pour lui donner de faux espoirs, ce n'aurait pas été juste. Je lui avais fait assez de mal comme ça. D'autant que, le temps passant, je commençais à entrevoir une autre raison à ce que j'avais pris comme une trahison et qui avait déclenché ma colère. Et si cette raison était la bonne, alors j'avais été parfaitement injuste envers lui... Seulement, c'était Teru qui me manquait, pas Jun. Peu importait combien je l'avais aimé, tout avait été balayé en une nuit. Même si, il était revenu auprès de sa femme, c'était le trader que j'espérais près de moi. Et ce manque était encore trop frais pour que je cherche à le combler avec le premier venu. Ce que Jun n'était pas, en plus. J'étais donc condamné à rester seul quelques temps encore. Mes pensées furent interrompues par des cris. Je regardai les gens autour de moi et vis des jeunes filles serrées les unes contre les autres, et dans le parc, des mères se précipitant sur leurs enfants. Je compris en voyant les arbres frémir que la terre tremblait à nouveau. On le sentait moins que dans l'immeuble, pourtant, je pensai bien que l'intensité était la même qu'une demi-heure plus tôt. Là où j'étais, je n'avais rien de mieux à faire que ne pas bouger et attendre que ça passe. Voyant que ça ne cessait pas, je m'accroupis. C'est alors que je sentis deux bras m'enserrer fortement. Jun m'avait-il suivi ? Je ne pouvais le jurer, mon "protecteur" m'empêchant de me retourner. Ce n'est que lorsque la secousse prit fin, après un temps infiniment long, que je me relevai et tendis la main à celui qui m'avait tenu contre lui. Ne me laissant pas le voir, il m'entraîna à sa suite derrière un buisson et prit ma tête dans ses mains. - Yokatta, tu n'as rien. J'ai eu si peur qu'il te soit arrivé quelque chose. Je ne trouvai rien à répondre, le regard perdu dans ses yeux noirs. Et quand ses lèvres prirent les miennes, délicatement, tout doucement, je fermai les paupières et le serrai dans mes bras.
********************** ++Nino++
Nous venions de nous relever après une seconde secousse bien trop longue à mon goût et maintenant nous fixions l’écran de télévision mis à notre disposition et que Sho avait allumé avant que la terre tremble de nouveau. J’étais sur mon téléphone, essayant de joindre ma mère, ma sœur, ma famille quoi et un coup d’œil à Aiba me permit de voir l’inquiétude sur ses traits. - Aiba-chan ? - J’ai eu personne. Ni le restau, ni maman, ni Yusuke, ni la maison. Pourquoi est-ce qu’ils répondent pas ? - Les lignes sont surchargées ; moi non plus j’ai eu personne. - Oui… mais Nino ! ça venait de l’océan… c’était encore plus fort à Chiba qu’ici !! Je veux des nouvelles. J’entrainais mon ami sur un canapé en posant une main sur sa taille. Je n’étais pas Riida point de vue zenitude, mais je savais que pour calmer Aiba, la première chose était de le faire asseoir. Un coup d’œil sur Jun et je pus l’apercevoir en grande conversation avec quelqu’un sur son téléphone. Quant à Sho, il tirait son paquet de clopes de son sac avant d’attraper son manteau. - Je descends, nous informa-t-il. C’est vrai que j’en grillerai bien une moi aussi mais deux personnes en bas c’était déjà beaucoup et je décidai d’attendre qu’ils soient remontés avant de m’abandonner au plaisir de la nicotine. Bientôt Jun nous rejoignit, un petit sourire soulagé sur le visage. - J’ai eu ma sœur ; elle va chez les parents et me donnera des nouvelles dès que possible. - Yokatta. Aiba, envoie un mail à ton frère ; s’il a son téléphone, il répondra, lui proposai-je avant d’en faire autant. Je venais de remarquer que le réseau était momentanément revenu… autant en profiter. - Tadaima ! - Okae… Où est Riida ? Tu l’as pas vu ? Sho venait de remonter seul et c’est vrai qu’Oh-chan était descendu avant le second séisme. Où était-il passé ? - Non. Je l’ai pas vu en bas et j’ai cru que nous nous étions croisés, c’est noir de monde dans les escaliers et dans le hall avec l’évacuation du public. Jun essayait déjà de joindre Ohno, sans succès semblait-il. Soudain je pensai au grand sensible à côté de moi. Comment réagissait Aiba ? Ouf ! Il était aussi au téléphone mais il parlait de toute évidence avec sa mère. Je dégainai le mien pour envoyer un mail comme une bouteille à la mer.
« De : Nino A : Ohno Objet : T’es où ? Qu’est-ce que tu fous Riida ? Où est-ce que tu t’es planqué ? C’est pas parce que le big one ou un truc du genre nous tombe dessus que tu peux filer sans prévenir. Donne-nous de tes nouvelles ; pour le moment on est toujours au même endroit alors ramène tes fesses vite fait ! »
Alors que je refermai mon portable, un message s’annonça… C’était ma mère : tout le monde allait bien. Merci Kami-sama ! Mais ma sœur s’inquiétait pour son mari qui était en déplacement alors que les gares et les aéroports étaient fermés... Les aéroports... ? Oh non... Et moi qui devais partir demain... la poisse… Manager-san réapparut dans la pièce. - Messieurs c’est fini pour aujourd’hui. Vous avez quartier libre jusqu’à nouvel ordre. Ça veut dire que vous faites ce que vous voulez mais on doit savoir où vous retrouver. Alors avant de partir, tenez-moi informé ! Puis, sans attendre une réponse, il ressortit et nous nous regardâmes. - Jun, c’est toi qu’habites le plus près… commença Sho. - Et… ? - C’est simple, expliquai-je. Tant qu’on sait pas où est passé Riida, on reste ensemble. Du coup, on squatte chez toi. - Mais…. - T’as pas le choix ; on est tous inquiets et c’est pas les répliques qu’ils nous annoncent qui vont nous rassurer dans l’immédiat. Donc on reste ensemble. Ce sera mieux que de stresser chacun dans son coin. En plus, t'as deux chambres et un canapé... C’est sur ces mots que nous partîmes à pied chez Matsujun. Ce dernier continuait d’essayer de joindre Riida. Je finis par lui confisquer son portable. - J regarde devant toi. Pas la peine de te prendre un lampadaire, je suis sûr qu’on finira par avoir de ses nouvelles. Et il a pas fini de se faire engueuler.
********************** ++Aiba++
Je crois que j'avais jamais été aussi heureux d'avoir des nouvelles de ma famille. Malgré les sueurs froides que j’avais eues quand Yusuke m’avait raconté qu’il y avait eu un début d’incendie. Après maman m’avait rassuré. J’avais aussi eu des nouvelles de mes petits. Shigeru m’avait laissé un message disant qu'ils allaient bien et qu’ils m’attendaient tous sagement à la maison. Et j'étais content d'être avec les autres. Même si, maintenant qu'on se dirigeait vers chez Jun après avoir quitté l'immeuble de la NHK, on n'était plus que quatre. Où était passé Riida ? Jun était mort d'inquiétude, ça se voyait. Et Nino-kun avait bien du mal à l'apaiser. Le meilleur pour calmer les choses, c'était Oh-chan, surtout avec un paquet de nerfs comme l'était notre benjamin. Mais il existait une autre méthode que je mis en application dès qu'on fut arrivés. - Jun, on se prépare le repas ? Je vis l'interpelé me fixer avec des yeux ronds. - Il est même pas cinq heures, Ma-chan. T'as déjà faim ? - Non, euh, oui... Enfin, c'est-à-dire que... - Il a raison. On ne sait jamais s'il ne va pas y avoir une coupure quelconque. Autant que le repas soit déjà prêt, non ? On te laisse ta cuisine, ne Aiba-chan ? Je me tournai vers mon sauveur et le suivis dans le salon où Nino était déjà posé, le téléphone à la main. - Bon, toujours pas moyen de joindre l'idiot en chef. Jun ? - Aiba l'a occupé avec la bouffe. - C'est toi qui as argumenté ! - Peu importe, vous avez bien fait. Au moins, pendant ce temps il ne déprime pas. C'était aussi ce que je m'étais dit. Pendant que Nino partait surveiller le cuistot, j'allumai la télé et profitai du son pour chuchoter : - Dis, tu crois que c'est quoi, la raison de Riida pour ne pas répondre ? - J'en sais rien, fit-il en se laissant tomber sur le canapé. Si ça se trouve, il est juste rentré chez ses parents à pieds... Je vis son visage s'éclairer. - C'est eux qu'il faut appeler ! - Ouais, bonne idée. Mais t'as leur numéro, toi ? - Non, mais Jun doit l'avoir. C'était sa belle-famille jusqu'à il y a deux mois. Il se dirigeait vers la porte quand je poussai un cri. Je venais enfin de regarder l'écran. De l'eau. Des masses d'eau. L'océan qui débordait. - C'est où ? demanda le caster en revenant vers moi. - Oh ! Je tournai brièvement la tête vers l'entrée de la pièce pour voir que les deux autres nous avaient rejoints. Il nous fallut un bon moment pour réussir à détacher nos yeux de ce que nous voyions. Nous y parvînmes enfin quand Sho demanda si la cuisine ne craignait rien. Nino lui répondit qu'ils avaient tout éteint avant d'en sortir. Nous parlâmes alors de notre idée à Jun qui hocha la tête avant d'aller dans sa chambre chercher le numéro en question. - Il l'a pas dans son téléphone ? demandai-je ingénument. - Je suppose qu'il l'a viré quand Oh-chan l'a plaqué. En plus, pour autant que je sache, les Ohno ne voyaient pas leur relation d'un bon œil. - En effet Nino. Du coup, voici le numéro, mais c'est pas moi qui appelle. Jun était de retour avec un papier qu'il tendait au gamer. Celui-ci prit le combiné et fit un premier essai qui n'aboutit pas. Nous retentâmes notre chance plusieurs fois dans la soirée, mais sans succès. Pourtant, nous avions réussi à joindre à tour de rôle nos familles (les lignes fixes passaient mieux que les portables) et c'est un peu rassurés que nous décidâmes d'aller nous coucher. Rester à tourner comme des lions en cage n'avancerait à rien. Même si en l'occurrence, nous n'avions qu'un lion parmi nous, et qu'il était chez lui. La répartition se fit rapidement. Nino allait dormir avec Jun, et Sho-chan et moi occuperions la chambre d'ami. Quand je me retrouvai seul avec mon ami, je m'assis sur le lit et le regardai se déshabiller. Jun nous avait prêté des pyjamas et j'avais déjà enfilé le mien. J'admirai les épaules de notre rappeur quand je vis qu'il me fixait à son tour. - Tu as une question, Ma-chan ? - Pas vraiment... Jun est toujours vraiment amoureux. Il l'oubliera pas comme ça. - Je suppose qu'on y peut rien. - Non, tu as raison. On peut juste être là. Sho me poussa sur le lit avant de m'enjamber pour s'allonger de l'autre côté. Je tournai la tête vers lui. - C'est tout à fait ça. Et on sera beaucoup mieux "là" si on a dormi un peu. Oyasumi, Ma-chan. Merci d'être toujours attentif aux autres. - Oyasumi, Sho-chan, répondis-je en rougissant.
(...)
En me réveillant après de trop courtes heures de sommeil, je me rendis compte que je m'étais lové contre Sho-chan. Et sa chaleur était vraiment agréable. Sauf qu'en tentant d'en profiter davantage, je le sentis bouger. - Mmm. Bonjour Sho-chan. J'ai fait un rêve vraiment flippant. On était dans un bateau qui tanguait et on se noyait. - C'était pas un rêve, Aiba-chan, me dit-il en se redressant. On va voir les deux autres ? J'acquiesçai et nous traversâmes l'appartement pour retrouver nos deux gamins blottis l'un contre l'autre dans le lit de Jun. Nous hésitions à interrompre leur repos quand Matsujun gémit avant d'ouvrir les yeux. Il venait visiblement de faire un cauchemar. Et de réveiller Nino. Après un petit-déjeuner vite expédié, le propriétaire des lieux refit le numéro de la maman d'Ohno en repassant le combiné à Nino. Et cette fois, elle décrocha. C'est ainsi que nous apprîmes que notre chef l'avait appelée la veille au soir et qu'à ce moment-là, il semblait être chez lui. Nino la remercia avant de raccrocher et de composer le numéro du fixe de Riida. Sa bouche fit un "ah !" silencieux quand il obtint la communication. - Riida !!! T'étais passé où hier bon sang ? - ... - T'es rentré chez toi ? Comme une fleur ? - ... - Bordel, mais qu'est-ce que tu fous ? Tu t'imagines que c'était le moment de disparaître comme ça ? T'aurais pu prévenir quand même ! - ... - Si j'veux ! Ecoute, on est tous chez J. Et avec les problèmes qu'il y a avec l'électricité et tout, on pense qu'il vaut mieux être tous ensemble. C'est plus simple pour nos managers. - ... Après une dernière réponse d'Ohno, Nino raccrocha et nous regarda. - Il va venir nous rejoindre. - Tu vois Jun, il va bien. J'avais murmuré à l'oreille de mon ami et il plongea sa tête dans mon cou. Mais s'il le cachait aux deux autres, moi je sentais ses larmes glisser sur ma peau.
********************** ++Teru++
Je remplissais mon rôle de mari modèle sans avoir besoin de beaucoup me forcer. Je n'avais pas épousé Cécile par hasard ou par dépit, elle était vraiment la femme qu'il me fallait. Satoshi avait eu raison de me renvoyer vers elle. Nous étions un couple harmonieux et avions tout ce qu'il fallait pour être heureux. J'en avais toujours rêvé, et la naissance de mon neveu n'avait fait que renforcer mon souhait, mais j'espérais bien prochainement semer une vie dans le ventre de mon épouse. Je voulais juste que nous soyons dans un équilibre plus stable. Et j'avais envie que cet enfant soit pour elle un beau cadeau de Noël ou d'anniversaire. J'avais encore un mois pour me décider. La nuit dernière avait été intense au bureau, et je n'avais pas pu rentrer chez nous. J'avais envoyé un mail à Cécile pour l'en informer, avec une photo de moi et mes collègues prise par le stagiaire. Je me trouvais presque pathétique. J'éprouvais le besoin de lui démontrer que je ne la trompais pas, alors même qu'elle n'avait rien su pour Satoshi. Mais elle savait que jamais je n'impliquerais mes collègues dans une histoire louche et cette photo était vraiment pour me faire pardonner mon absence. Elle avait répondu un "je m'en doutais, bossez bien" qui m'avait fait sourire. Vu l'heure tardive de mon envoi, elle pouvait effectivement se douter que je restais travailler. Son baiser électronique accompagné d'un "je t'aime" en français m'avait motivé pour boucler les dossiers en un minimum de temps. Il m'avait malgré tout fallu toute la nuit pour le faire, et ce n'est qu'au début de la matinée suivante que j'avais enfin pu quitter mon bureau pour regagner notre appartement. Nuit m'attendait dans l'entrée en miaulant désespérément. Je lui avais rempli ses gamelles avant d'aller m'effondrer sur le lit à moitié habillé. Quand je m'étais réveillé vers 13 heures, j'avais pris une douche rapide, enfilé un nouveau costume, avalé un des plats qu'elle avait préparé et mis au frigo pour moi. Je m'étais souvenu, en rentrant dans l'appartement vide, qu'elle m'avait parlé l'avant-veille de quelque chose en rapport avec l'ambassade de France ou d'Allemagne. Comme ce n'était pas la première fois depuis le mariage, je n'avais pas vraiment relevé, trop attiré par l'odeur du nabe qui m'attendait sur la table. Je vérifiai que le chat avait ce qu'il lui fallait dans ses gamelles puis repartis vers ma boîte. J'étais installé depuis un gros quart d'heure lorsque la terre se mit à trembler plus fortement et plus longuement qu'elle ne l'avait fait ces derniers temps. J'appliquai sans hésiter les consignes de sécurité. A l'abri sous la table, j'entendais ma collègue Nishimoto répéter le prénom de son fils en leitmotiv. La secousse terminée, j'hésitai sur l'attitude à avoir. Mon ordinateur avait pris un coup, un dossier étant tombé sur l'écran, et je risquai d'avoir du mal à travailler ainsi. Surtout, un visage revenait en surimpression à tout ce que je regardais. Partout où je posais mes yeux, je voyais sa peau tannée, sa moue boudeuse et son air endormi. Je sentais l'inquiétude monter en moi comme une vague irrépressible. Où était-il ? Comment allait-il ? J'attrapai mon téléphone et tentai de le joindre, juste pour m'assurer qu'il n'était pas blessé. Mais la communication ne voulut pas s'établir. - Nishimoto-san, je dois y aller, je ne sais pas... Ne voyant la jeune mère célibataire nulle part, je ne finis pas ma phrase, mais décidai de suivre son exemple. L'important était les personnes que nous aimions, n'est-ce pas ? Je sautai dans ma voiture et me dirigeai vers les studios de Shibuya. J’avais eu Sho hier au téléphone et en bavardant il m’avait appris qu’ils y avaient un enregistrement exceptionnel aujourd’hui. Arrivé dans le quartier, je crus reconnaître au coin d'une rue la silhouette et le manteau que je cherchais. Je garai mon véhicule dès que possible et fonçai vers elle lorsque je vis les affiches trembler dans leurs cadres suspendus. Mon objectif s'était sagement baissé pour éviter de tomber, et je me jetai sur lui pour le protéger un peu plus. Le serrer dans mes bras me procura un bien-être qui me fit presque oublier que le sol bougeait toujours. Lorsque le séisme fut terminé, je le vis se relever et me tendre la main. Brûlant d'impatience, je la pris et l'entraînai à ma suite entre le mur d'un immeuble et une sorte de bosquet. Puis mes mains saisirent son visage que j'avais tant craint de ne plus revoir. Je lui dis mon angoisse avant de poser mes lèvres sur les siennes, timidement, à la mesure de la peur que j'avais eue. Le sentir me répondre et saisir ma veste pour me serrer contre lui atténua un peu mes craintes. Mais j'avais besoin de le sentir davantage contre moi. - Sato, dis-je en m'écartant légèrement, prouve-moi qu'on est en vie, qu'on va bien, que tu es dans mes bras. Sa main caressa ma joue et passa dans mes cheveux. Puis elle descendit dans ma nuque et rapprocha mon visage du sien. - Ramène-moi chez moi, et je te prouverai que tu es le plus vivant des hommes. Je lui repris la main et l'entraînai vers ma voiture. Il ne nous fallut pas une demi-heure pour rejoindre son appartement près du port. Et à peine un peu plus de temps pour nous retrouver nus l'un contre l'autre, nos corps brûlants s'adorant sans réserve.
********************** ++Ohno++
Lorsque nous étions arrivés chez moi, la terre avait tremblé plusieurs fois en quelques minutes. Les secousses étaient moins violentes que celles ressenties plus tôt, mais elles étaient suffisantes pour que nous éprouvions un réconfort certain à être collés l'un à l'autre. Nous avions fait l'amour une première fois, désespérément, comme si c'était la dernière chose qu'il nous serait donné de faire. Puis nous avions recommencé, plus calmement, avec tendresse, langoureusement. Nous avions fini par presque nous endormir l'un contre l'autre, épuisés mais momentanément rassasiés de l'autre. La terre continuait à trembler périodiquement. Mais comme ce n'était pas très fort, nous restions allongés sur mon lit, les membres enchevêtrés, ma tête sur son torse, son menton dans mes cheveux. J'avais envie de rester ainsi pour toujours, et si le plafond s'était effondré sur nous à ce moment-là, ça ne m'aurait pas plus dérangé que cela. J'étais prêt à n'importe quoi, pourvu que je puisse être avec lui, goûter encore à sa peau, à ses lèvres, éprouver de mon corps la virilité du sien. Peu importait si je n'étais pas le premier, si je n'avais pas la place de choix auprès de lui, du moment que j'avais une place. C'était ce que je voulais lui dire, mais les mots ne voulaient pas franchir mes lèvres. J'avais toujours trouvé pathétiques ceux qui quémandaient la place de l'ombre. Pourtant, je m'apprêtais à lui demander de faire de moi son amant, sans plus de reconnaissance qu'un peu de tendresse volée à des moments épars et fugitifs. Il me suffisait d'ouvrir la bouche, d'articuler ces quelques mots... - Je ne peux pas vivre sans toi. Je ne reconnus pas ma voix. Les mains qui erraient sur ma peau saisirent mes épaules pour me mettre sur le dos et je me retrouvai allongé sous le corps lourd de Teru. Il me fixait de ses yeux sombres dans lesquels je lus une résolution calme. Et ses lèvres formèrent des mots. - Je ne peux pas vivre sans toi, Sato. J'ai essayé, mais ce n'est pas possible. J'ai besoin de toi. Pas seulement contre moi dans un lit. J'ai besoin de toi tout le temps. C'était lui qui avait parlé ! Lui, pas moi. Je n'avais pas encore réussi à sortir le moindre son depuis qu'il m'avait fait gémir d'extase. Et il me disait les mots que je voulais lui dire. J'eus l'impression de me liquéfier, comme si mes entrailles fondaient. J'avais envie de devenir une partie de lui-même, pour toujours. La chaleur de mon ventre se répandit jusqu'au bout de mes orteils, de mes doigts et de mes oreilles. En même temps, un frisson me parcourut le dos. Je fermai les yeux, sentant les larmes les envahir. - Teru... - Je t'aime Satoshi. Je veux vivre avec toi. Je ne veux plus jamais être séparé de toi. Sa bouche caressa la mienne avant de descendre le long de ma mâchoire. Je ne pus retenir un gémissement. Kami-sama, que j'aimais cet homme ! Que ses paroles m'anéantissaient et me fortifiaient tout à la fois ! - Teru... Je... je suis content que tu me dises ça. Si content... Mais tu sais comme moi que ce n'est pas possible. C'est juste un beau rêve à faire au fond d'un lit. - Ne dis pas ça ! Il y avait tant d'assurance dans sa voix que je rouvris les yeux. - Bien sûr que si, dis-je en souriant doucement. Mais ce n'est pas grave. Moi non plus je ne peux pas vivre sans toi. Laisse-moi être ton amant. Laisse-moi être celui que personne ne voit. Je ne te demanderai qu'un peu d'attention quand tu auras du temps pour ça. Je n'exigerai rien de plus, promis. Pas de nuit, pas de jours, je me contenterai de quelques minutes si c'est tout ce que tu as. Il m'embrassa. - Ne dis pas de bêtises, Sato-chan. Ça te suffirait vraiment ? Des miettes de vie ? Je savais que ça me tuerait à petit feu, mais mieux valait cela que de ne plus le voir. - Si ce sont les tiennes, je les ramasserai avec amour, je les amasserai avec patience, je... Il m'embrassa encore. - Ce n'est pas ce que je veux. Je te veux tout entier. Tout entier à moi. Comme je le serai moi-même. J'ai fait une erreur en me mariant alors que j'étais amoureux de toi. Je vais quitter Cécile. Je lui expliquerai et elle comprendra. Rester dans cette situation ne peut que nous rendre malheureux tous les trois. On ne peut pas faire le bonheur de tout le monde, mais c'est de ton bonheur à toi que je veux m'occuper. Laisse-moi en prendre soin. Je ne suis certainement pas très doué, mais je ferai de mon mieux, je te le jure. J'avais envie de le croire. Envie de m'imaginer capable de le rendre heureux moi aussi. Physiquement, je ne me posais pas la question. Socialement, ma situation m'obligeait de toute façon à ne rien afficher, et je ne le pensais pas prêt à se montrer à qui que ce soit. Nos raisons différentes pourraient nous poser des problèmes, mais il faudrait en discuter, et je savais déjà que ce ne serait pas facile, vu nos personnalités. Familialement... Ma famille ! Nos familles ! - Teru ! Tu as eu tes parents depuis le séisme ? Son air me dit assez qu'il n'avait même pas dû essayer de les appeler. Je le poussai et me levai, récupérant mon téléphone dans la poche de mon pantalon. Il en fit autant de son côté tout en m'attirant contre lui pour m'enlacer. - Pas de réseau, ça ne passe pas. J'ai eu des messages, mais j'arrive même pas à savoir de qui. Teru, laisse-moi essayer avec mon fixe ! J'écartai son bras pour me lever et rejoindre mon salon. Après plusieurs essais, je parvins à joindre ma mère qui me rassura sur leur sort. Je n'eus que le temps de lui dire que j'étais chez moi avant que ça ne coupe à nouveau. J'avais entendu la voix de ma sœur en fond qui parlait de tsunami, aussi demandai-je à Teru d'allumer la télévision. Les images nous sautèrent à la figure et nous nous laissâmes tomber dans le canapé, choqués de ce que nous voyions. La terre trembla encore plusieurs fois avant que l'on ne s'endorme enfin, blottis l'un contre l'autre sur les coussins.
Voilà Laissez vos réactions à bientôt | | | Dim 27 Oct - 3:23 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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Localisation : Osaka!!! enfin!!!!
Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| Comment allez-vous en ce dimanche grisailleux... comment ça c'est pas français XD Bonne lecture PS: ceci est de l'anglaisPPS: ceci est du français- Chapitre 22:
++Teru++
Une sonnerie persistante vrillait mes tympans : celle d’un téléphone antique. Elle ne s’arrêta que lorsque mon amant décrocha. - Moshi, moshi ? - … - Ben chez moi. - … - Oui. Tout va bien. - … - Oh ! Du calme ! - … - Ok, je vous rejoins chez Jun. Il raccrocha et se tourna vers moi. - Teru, faut qu’on parle. Je me redressai sur le canapé, légèrement courbaturé par la nuit que nous venions de passer sur les coussins, déjà en manque de sa présence. - Ok, mais viens dans mes bras. - Je suis sérieux, Teru, dit-il en restant debout. C'était Nino. Ils sont tous les quatre chez Jun, et ils étaient inquiets d'être sans nouvelles de moi. Hier j'étais juste sorti fumer, et je ne suis pas revenu. Il s'était dirigé vers son coin cuisine et avait sorti deux canettes de bière. - Qu'est-ce que tu vas leur dire ? demandai-je en prenant celle qu'il me tendait. Que l'homme de ta vie t'a enlevé pour te faire l'amour toute la nuit ? Il eut un petit sourire amusé et s'assit en tailleur sur le tapis devant moi. - Je peux faire ça, si tu es d'accord. Mais je doute que ce soit le cas. ...Teru, honnêtement, tu te sens prêt à assumer le fait d'être avec un homme ? Tu vas être capable de leur dire que cet homme, c'est moi ? - Sho sait que tu m'as plu dès le premier regard. Nino, passé les remarques perfides, je pense qu'il ne dira rien. Aiba... c'est un grand sensible. S'il sait qu'on s'aime, je ne crois pas qu'il y trouve à redire. Le seul qui m'effraie un peu, c'est Matsujun. Parce que c'est ton ex et parce que je ne me suis jamais senti à la hauteur vis-à-vis de lui. Il pencha la tête. - Je ne suis pas sûr que tu mesures l'ampleur de la chose, Teruki. Peut-être que Sho ne dira rien. Et encore... Lui comme Aiba se sont pris d'affection pour Cécile-chan. Je ne sais pas s'ils te pardonneront de la blesser. Nino, c'est difficile de prévoir sa réaction, c'est vrai. Et Jun... il sait déjà beaucoup de choses sur nous deux. Et j'ignore si c'est une bonne ou une mauvaise chose. C'est quand même lui qui a gardé ta femme toute la nuit en février. - Tu penses qu'il vaut mieux ne rien leur dire ? Il me regarda un instant, puis hocha la tête. Quelque part, je me sentis soulagé. J'avais envie de vivre avec lui, et j'affronterai ce qu'il voudrait pour lui, mais si je pouvais éviter de me confronter dès maintenant à nos amis, je croyais que ça valait mieux. Je voulais avoir le temps de m'installer un peu dans notre relation et d'y prendre mes repères. - J'ai envoyé un mail à Cécile hier soir. Pour lui dire que je passerai la voir aujourd'hui, sans préciser pourquoi. Je préfère lui parler en face. - Je ne te laisserais pas faire autrement, Teru. Ça m'a fait mal de dire à Jun que je le quittais, mais je sais qu'il aurait beaucoup plus souffert si je m'y étais pris d'une autre façon. J'opinai. - Sato, je suis vraiment sérieux, tu sais. J'ai envie de vivre avec toi. Je suis prêt à tout lais... - Ne dis pas trop de choses ! Si tu quittes ta femme pour moi, si tu la quittes vraiment, en mettant les choses au clair avec elle, ce sera déjà beaucoup. Ensuite, si tu es d'accord pour que je te présente à mes parents comme mon petit ami, ce sera encore mieux. Je ne te demanderai pas d'en faire autant avec les tiens. Pas maintenant en tout cas. Mais sache que ça viendra un jour. Mes parents... Jamais ils ne me laisseraient quitter ma femme pour un homme. D'autant qu'ils avaient adopté Cécile immédiatement. Déjà, si j'avais pris une maîtresse, je ne pense pas qu'ils auraient apprécié, mais un amant ! Et mon père était quelqu'un d'influent. - Je crois qu'il faut prendre les choses dans l'ordre, Satoshi. Je t'aime, ça c'est l'essentiel. Je veux vivre avec toi, et pour ça, je vais quitter ma femme. Donc je vais aller la voir pour discuter avec elle. Pour ce qui est du reste... chaque chose en son temps. Encore une lâcheté de ma part. Mais ces dernières heures avaient été particulièrement bouleversantes, dans tous les sens du terme. J'avais besoin de temps. - Et tu veux venir vivre ici ? - Je vais lui laisser l'appartement. Elle en fera ce qu'elle voudra. ...Tu ne veux pas de moi dans ton domaine ? Il sourit en me tendant la main pour que je l'aide à se lever. - Je te veux. Je te veux chez moi. Sa main se ferma sur la mienne avant de m'attirer vers lui. Déséquilibré, je me retrouvai à genoux sur le tapis, le nez devant son épaule. Sa bouche s'approcha de mon oreille. - Je te veux en moi.
(…)
A sa demande, j’avais laissé Satoshi entre la Jimusho et chez moi, près d’un arrêt de bus. Les routes étaient à présents dégagées du gros du trafic d’hier que nous avions vu aux infos, mais les répliques, et surtout les nouvelles autour de la centrale de Fukushima, étaient inquiétantes malgré les discours rassurants des politiciens. - Tadaima ! Seuls les miaulements angoissés d’une Nuit escaladant mon pantalon me répondirent. - Cécile ? La connaissant, elle devait être en train de donner un coup de main à l’ambassade ou au commissariat le plus proche afin d’aider les étrangers dans leurs démarches pour se faire reconnaitre. Je me dirigeai alors vers la chambre, Nuit toujours sur mes talons. Cette dernière ne cessait de geindre et je décidai de faire un crochet par la cuisine afin de lui verser un bol de lait pour qu’elle me fiche la paix le temps d’emballer quelques affaires. C’est quand je vis que la vaisselle, que j'avais laissée en attendant que Cécile s'en occupe, était toujours dans l'évier, que je réalisai qu’elle n’était pas rentrée depuis… je ne savais même pas exactement quand puisqu’elle n’avait pas été là quand j’étais rentré la veille… ni même le jour précédent. J’étais vraiment le pire mari qu’il puisse exister, et ce que je m’apprêtai à lui annoncer n’allait pas plaider en ma faveur… Mais peut-être était-elle chez mes parents? Je les appelai aussitôt mais personne ne répondit. Alors que j’allais reposer le combiné sur sa base, celle-ci sonna et je décrochai sans prendre la peine de regarder qui pouvait appeler. - Moshi moshi ? - Allo ? Est-ce que je peux parler à Cécile ? La voix féminine de l’autre côté de l’appareil était déformée par un horrible accent germanique qui teintait son anglais, et, pour faciliter ma compréhension, quelqu’un était en train de faire frire une quantité impressionnante de tempura entre son micro et mon récepteur. - Elle n’est pas là. Qui la demande ? - Je suis Lena Streuber. Mais vous, vous êtes qui ? - Son mari. - Merci… Alors vous devez avoir de ses nouvelles ? Elle va bien ? Vous avez eu de ses nouvelles depuis les premiers séismes ? - Heu… non… vous savez, je me suis retrouvé coincé loin à l’autre bout de Tokyo et je viens tout juste de rentrer. Cécile n’est pas là. Je suppose qu’elle est au travail ou chez mes parents. Dès que je la vois, je lui dis de vous rappeler. - Mais Cécile est en déplacement ! Elle m’avait dit qu’elle partait vers Hokkaido et devait rentrer hier ! Vous n’éti… - … Moshi moshi ? Lena-san ? Moshi moshi ? La ligne venait de s’interrompre brusquement, me laissant totalement perdu. Cécile n’était pas à Tokyo ? Elle était partie pour Hokkaido ? Mais quand ? Instinctivement, je repris mon téléphone et après avoir fait dérouler la liste des contacts, je m’arrêtai sur celui qui serait sans doute le plus en mesure de m’aider. - Sho-kun ! Cécile n’est pas à la maison. Elle était en déplacement sans doute dans le nord et je n’arrive pas à la joindre. Qu’est-ce que je fais ? Sho m’annonça ce que je savais déjà, à savoir qu’il était avec tous les autres chez Matsujun, et il m’invita à les rejoindre. Je me précipitai dans l’entrée, remis mes chaussures et mon manteau, puis je me dirigeai vers l’appartement de l’ex de Satoshi sans savoir ce qui allait se passer ensuite. A peine avais-je sonné qu’Aiba-kun m’ouvrit la porte. Alors que j’ôtai mon manteau, je découvris pourquoi la capuche de ce dernier m’avait parue plus lourde que d’habitude : une boule de poil noire s’y était blottie. - Nuit ? Mais qu’est-ce qu’elle fait là ? - Teru-kun, t’es en train de nous dire que tu t’es pas aperçu qu'elle était avec toi ? C’est possible ça ? me demanda Aiba-kun. - La preuve Masaki. Assieds-toi Teru et explique-nous le problème avec Cécile-chan. Nino, qui venait de prononcer ces mots, était juste derrière Aiba. Il fit demi-tour et, rejoignant le séjour, fut tiré par Matsujun sur le canapé où il se retrouva coincé entre lui et Satoshi. Ce dernier me lança un doux sourire avant de me saluer. Sho m’invita à prendre place alors qu’il s’asseyait dans un fauteuil. Je m'installai sur le second divan où je fus rejoins par Aiba-kun, la bestiole toujours dans les bras. - Alors c’est quoi cette histoire Teru ? Tu sais pas où est ta femme ? - Ben… non, avouai-je tête basse. En ce moment au boulot, c’est de la folie, et même en faisant du mieux possible, j’ai des horaires de dingue. Conclusion, avant-hier je lui ai envoyé un mail, elle m’a répondu et j’ai cru qu’elle était à la maison, mais en fait elle était sans doute en déplacement… et… je sais pas où ? terminai-je dans un murmure. - Comment ça, tu sais pas ? T’es marié M**** à la fin ! C’est le minimum de savoir ce que fait ta femme non ? Et puis comment ça se fait que t’aies réalisé que maintenant qu’elle avait disparu ? T’étais où tout ce temps ? Je levai un regard surpris sur Matsujun. C’est vrai que la dernière fois que je l’avais vu, c’était quand j’étais venu récupérer Cécile chez lui le 15 au matin et qu’il semblait qu’entre eux la hache de guerre était enterrée, mais je ne pensais pas qu’il la défendrait comme ça. - Du calme J. Tu connais Teru pourtant. Ce mec est quand même capable de ranger ses slips dans son four et ses légumes dans la machine à laver ! Tout en disant ces mots, Nino avait posé un bras apaisant autour des épaules de notre ami. Puis il me foudroya du regard avant de reprendre. - N’empêche que Jun a raison. Comme ça se fait que tu ne t’aperçoives de son absence que maintenant ? T’étais où hier ? - Au boulot, c’était la panique, les ordinateurs ont sauté… répondis-je platement en jetant un coup d’œil à Satoshi qui fixait consciencieusement le contenu de la tasse qu’il avait entre les mains. Il a fallu attendre des heures pour pouvoir reprendre du coup, et ensuite il a fallu tout rattraper entre deux secousses. C’était la réponse que j’avais prévu de donner après avoir reçu le mail d’un collègue qui avait vraiment vécu la situation, son écran ayant été épargné contrairement au mien. - Ce matin en rentrant, j’ai tout de suite remarqué l’absence de Cécile et vu les problèmes de relais, elle ne décroche pas. Mais j'ai pensé qu'elle était en train d'aider des étrangers à se faire connaître. Si je suis inquiet, c’est parce qu’une de ses amies a appelé et m’a dit qu’elle était partie du côté de Hokkaido. - Lucie-chan a appelé ? demandèrent simultanément Aiba et Nino. - Non. C’était une Allemande. Je crois qu’elles se sont rencontrées ici. Cécile a dû me parler d’elle à l’occasion. - C’est plutôt une bonne nouvelle alors, parce que si c’était Lucie, les sources auraient été vraiment fiables, alors que là, si ça se trouve, Cécile-chan est à Kyushu. - T’as appelé l’ambassade ? Si Cécile partait, c’est sûrement avec elle non ? demanda Sho. C’est vrai, il avait raison. Là-bas, on saurait au moins où elle était partie et on me donnerait peut-être de ses nouvelles. Pour la première fois depuis que l’Allemande avait appelé, je me sentis respirer librement. Je savais où chercher. Le standard était évidemment saturé d’appels et un disque avait pris le relais, nous invitant à consulter les listes des ressortissants qui s’étaient fait connaître sur place ou sur leur site internet. Après quelques temps, nous pûmes accéder à la page qui reprenait les noms des personnes ayant contacté l'ambassade ou le consulat et celles que le programme Ariane avait repérées. Malheureusement, je ne vis Cécile nulle part, ni sous mon nom, ni sous celui de Bianchi, son nom de jeune fille qui figurait toujours sur certains de ses papiers. Je commençais à paniquer. Où était-elle? - Allez, faut pas t'en faire, me dit gentiment Aiba-kun en me passant une main dans le dos. Y a sûrement plein de gens qui n'ont pas encore pu se manifester. Je sentais les larmes se mettre à me piquer les yeux et quelque chose comme un vide se creuser dans ma poitrine. Je voulais la revoir. Je voulais qu'elle soit là. C'est ce que je me mis à murmurer en boucle, cette litanie me valant un nouveau geste de réconfort de la part de mon voisin. En relevant la tête, je croisai les yeux de Satoshi. J'y lus une inquiétude teintée d'angoisse et, avant que je puisse dire quoi que ce soit, il s'était levé pour rejoindre le balcon. Bien que fumeur lui-même, même si certainement le moins gros des cinq, Matsujun refusait depuis plusieurs années que l'on fume chez lui. Il ne voulait pas que l'odeur s'imprègne dans ses meubles et risque de provoquer une crise d'asthme chez sa sœur. Du coup, son balcon était le seul endroit autorisé, et je devinai sans mal que Satoshi était sorti s'en griller une. - Je vais lui en piquer une ! dis-je en me levant brusquement. - Teru ! Je croyais que tu avais arrêté ? - Oui, mais là, tout de suite, j'en ai besoin. Je rejoignis la fenêtre que je repoussai après l'avoir franchie, retrouvant mon amant accoudé à la rambarde devant la fenêtre de la chambre, les yeux dans le vague, un peu humides. Je pris un bâtonnet dans sa boîte en carton et lui demandai du feu. - Ne le prends pas mal, Sato-chan, murmurai-je après avoir tiré deux bouffées. Je veux la revoir parce que je ne lui souhaite aucun mal. Je veux juste qu'elle soit... - J'ai rien dit, me coupa-t-il. - Tes yeux parlent pour toi. Tu t'inquiètes pour elle mais tu as surtout peur que je change d'avis. Je ne veux pas être veuf, je veux pouvoir la quitter proprement, en lui parlant. J'inspirai profondément avant de regarder la ville à mon tour. - Sato, quand la terre a tremblé, je n'ai pensé qu'à toi, j'avais même oublié que j'étais marié. Aujourd'hui, je m'inquiète pour elle, mais je voudrais avoir ta main dans la mienne pour être sûr de ne pas flancher. Tu comprends ? Il sembla réfléchir un instant puis écrasa son mégot dans le cendrier avant de se tourner vers moi et de me tendre la main. - Je crois que je comprends ce que tu veux dire, fit-il en m'attirant contre lui. Elle est importante pour toi, mais moins que moi, c'est ça ? - Oui. J'étais heureux qu'il ait saisi et laissai ses mains apaisantes passer doucement dans mes cheveux. Il ne prolongea pas trop son geste, mais ça m'avait fait du bien. Et quand la fenêtre se rouvrit sur Nino, il ne vit qu'un homme avec une main réconfortante sur l'épaule d'un ami accablé. - Teru, rentre ! On a trouvé un autre numéro que celui du standard de l'ambassade et on a fini par avoir quelqu'un qui semble pouvoir nous renseigner, mais la personne au bout du fil nous comprend manifestement de travers. Nous le suivîmes et je vis que tous étaient groupés autour du téléphone mis sur haut-parleur. Sho tentait de se faire comprendre en anglais, mais sans grand succès. - Ah ! Teruki ! Parle-lui, toi, avant qu'il ne raccroche ! - Allô ? fit le correspondant. - Allô ? répondis-je. Ici Miura Teruki. Nous appelons... - Miura ? Comme Cécile Miura ? Mon cœur fit un bond. Et je vis que les autres avaient aussi réagi. - Cécile est ma femme, oui. Et en fait, je la cherche. Vous savez quelque chose ? - Bonjour Monsieur Miura. Je suis Christian Liévin. Ma femme et la vôtre font de la calligraphie ensemble. Astrid est partie avec votre épouse et quelques autres faire du ski. - A Hokkaido ? - Astrid m'avait parlé d'Aomori. Oh ! non. Non, pitié, pas ça ! De Tokyo à Aomori, le train passait par Sendai... - Vous avez des nouvelles de votre épouse ? - Oui. J'ai pu lui parler ce matin. Je repris mon souffle et regardai mes amis. Ils ne comprenaient manifestement pas un traitre mot de notre conversation. - Je suppose que vous ne savez rien de la mienne... - Non, en effet. Mais leurs noms ont été publiés sur le site de l'ambassade. Je fermai les yeux. Sa femme était sur la liste. Mais pas Cécile. - M. Miura ? Vous avez de quoi noter ? Je vous donne le numéro de téléphone d'Astrid. Vous pourrez en savoir plus. Je devrais malheureusement vous laisser ensuite. - Je comprends. Un papier ! Un crayon ! Vite s'il vous plait... C'est bon, je vous écoute. Jun avait tout mis devant moi en quelques secondes et je notai les coordonnées avant de remercier mon correspondant. Quand je raccrochai, je vis que tout le monde me fixait et les larmes qui avaient débordé ne devaient pas être très rassurantes. - Alors ? fit l'impatient Aiba en voyant que je n'arrivais pas à parler. - Alors elle serait partie à Aomori avec la femme de cet homme. Faire du ski... A-t-on idée de faire ski ? - En cette saison, oui, répliqua Nino-kun. Il a pu te renseigner ? - Non, il a dit que sa femme était listée sur internet. Mais Cécile n'y est pas. - C'est le portable de sa femme ? demanda Sho. Dans ce cas, il ne te reste plus qu'à appeler pour savoir. J'opinai lentement. Cette femme ne devait pas parler davantage japonais que son mari. Cela signifiait que c'était moi qui devais appeler. Sauf que je ne me sentais pas capable de parler pour le moment. - Reprends tes esprits, me dit Sho en restant près de moi. On n'est plus à cinq minutes près. Jun, Tu veux bien nous faire un thé ? Ça nous fera du bien à tous les six. Matsujun disparut dans sa cuisine en compagnie de Nino et je me retrouvai sur le canapé entouré d'Aiba-chan et de Sho. Du coin de l'œil, je voyais Sato-chan debout, mimant une sérénité et un calme que je le savais loin de ressentir. - Tu sais, Teru, me dit mon ami d'enfance, il peut y avoir cent raisons pour qu'elle ne soit pas sur la liste. Ils ont pu mal comprendre son nom, elle a pu changer d'avis au dernier moment... - Elle serait où alors ? demanda Aiba. Et puis, pourquoi elle a pas cherché à le joindre ? Sho lança un regard dur à son collègue. - Merci de nous le rassurer ! - Mais il a raison, Sho-kun, intervint Satoshi. C'est bizarre qu'elle ne lui ait pas téléphoné. Je levai mon regard trop humide à mon goût vers l'homme de ma vie. Que voulais-tu Sato-chan ? Me préparer au pire ? C'était ce que toi tu envisageais ? Le thé de notre hôte était bon, et son parfum me rappela celui que faisait ma mère quand je révisais à l'époque de l'université. En reposant ma tasse, je pris le papier que j'avais laissé sur la table et Matsujun me tendit son téléphone. Je le remerciai d'un hochement de tête et pris une profonde inspiration avant de composer le numéro. - Mets sur haut-parleur, demanda Aiba. - Je veux bien, mais vous ne comprendrez rien quand même... - Allô ? Je sursautai en entendant la voix féminine et me concentrai sur elle, cherchant à calmer le cheval au galop dans ma poitrine. - Allô, Madame Livin ? - Liévin, oui. A qu...neur ? - Allô ? La ligne ne passait pas très bien et je manquais des mots. - Attend...apte mal... ehors, un inst... Je crus comprendre qu'elle se déplaçait et patientai. - Ça passe mal, non ? - Oui. Je vais essayer de faire court. - Allô ? reprit ma correspondante. Ici ça devrait mieux capter. J'espère que vous me comprenez. A qui ai-je l'honneur ? - C'est mieux, oui. Je suis Teruki Miura, le mar... - Le mari de Cécile !!? Heureusement que c'était sur haut-parleur, elle m'aurait déchiré le tympan, sinon. - Oh ! Monsieur Miura, on ne savait pas comment vous joindre ! Je suis désolée, Cécile... Et ça recoupa. Je crus que j'allais devenir fou. Elle était désolée pour quoi ? Pas... La communication reprit. - Allô ? Allô ? Vous m'entende z? - Oui. - Désolée, je n'ai pas beaucoup de batterie et... - Dites-moi l'essentiel alors. Cécile est avec vous ? Comment va-t-elle ? - Oui, enfin, non. Cette femme n'était vraiment pas facile à faire parler. - Désolée... - Où êtes-vous ? - Dans la cour du ryokan. Je me passai une main sur le front en retenant un soupir exaspéré. - Et Cécile ? C'était sans doute la meilleure méthode, lui poser des questions concises. - A l'hôpital. Du calme ! Ca, ça voulait dire qu'elle était vivante, non ? Je voulus m'en assurer. - Vivante ? - Oui, évidemment ! - Pourquoi n'est-elle pas sur la liste ? - La liste ? Trop compliqué. - Où est le ryokan ? - A Nagano. - Quand rentrez-vous ? - Nous ne savons pas, les transports sont interrompus... Monsieur Miura ? Ma batterie sonne. - J'entends. Dites à Cécile... J'avais hésité sur le message que je voulais laisser à ma femme, et le téléphone en avait profité pour interrompre la conversation. Je fixai l'appareil un long moment après cela. Les autres me laissèrent un peu de temps avant de m'interroger. - Tu as pu apprendre quelque chose ? Parle, Teru. On n'a rien compris, nous ! Sho m'avait attrapé le poignet et sa voix reflétait l'inquiétude de mes amis. - Cécile est vivante mais à l'hôpital, apparemment. Elle est à Nagano. Impossible de savoir pourquoi elle n'est pas sur la liste, cette femme était trop stressée pour répondre normalement. Ou alors, elle n'est pas très futée. - Je penche pour le stress, Teru. Regarde-nous ; et pourtant, on a vécu avec ça toute notre vie. Alors imagine ce que c'est pour des étrangers. Sho avait raison, comme souvent. - Pourquoi elle est à l'hosto ? demanda Aiba. - Aucune idée. J'étais en train de me demander ce que j'allais faire. Rassuré sur le sort de Cécile, bien que pas encore complètement sur sa santé, mes pensées revinrent naturellement à Satoshi. J'allais pouvoir quitter ma femme pour aller vivre chez lui, mais l'incertitude sur son retour repoussait d'autant la discussion que nous aurions. Et si les choses étaient claires pour moi, je pensais bien que Sato-chan se sentirait dans l'expectative tant que je n'aurais pas parlé avec Cécile.
Après être tous passés par les montagnes russes émotionnelles, quelqu'un lança l'idée qu'on ne pouvait pas se séparer sans manger quelque chose. C'est pourquoi nous étions tous assis par terre autour de la table basse du salon de Jun lorsque Sho, qui surveillait le site internet de l'ambassade de France, poussa un cri avant de me regarder en souriant jusqu'aux oreilles. - Teru, y a un mot sur ta femme !! On se regroupa autour de l'écran et je traduisis les quelques lignes laconiques mais si rassurantes. "MIURA Cécile, à Nagano, saine et sauve. Sera rapatriée sur Tokyo dès que les conditions de circulation seront rétablies. Sans téléphone."
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++Nino++
- Il va venir nous rejoindre. C’était la seule phrase que j’avais été capable de prononcer quand j’avais reposé le combiné. Jun en pleurait de soulagement. Je le savais parce que, même s’il tentait de se cacher dans le cou de Ma-chan, l’air impuissant et protecteur de ce dernier en disait assez long pour moi. Comment Riida avait-il pu nous oublier ainsi ? Et son calme horripilant alors que Jun et moi avions dormi en pointillé ? Cette nuit m’avait rappelé celles que nous avions passées deux mois plus tôt. Je m’étais réveillé à chacun de ses cauchemars ou des miens, et quand ce n’était pas ça, c’était à cause des répliques. Alors le « Moshi, moshi » léthargique d’Oh-chan m’avait poussé à bout. - Nino ? Rentre s’il te plait. L’électricité est coupée. Faudrait conserver au maximum la chaleur dans l’appartement et pour cela éviter de laisser le balcon ouvert, tu ne penses pas ? Je levai la tête vers Sho-kun. Il me lança un sourire encourageant. Oui, il avait raison. Je ne pouvais pas craquer maintenant. Ma famille allait bien. Tout le monde allait bien y compris cet idiot d’Oh-chan. Quel soulagement… J’écrasai les restes de la clope, que je n’étais même pas certain d’avoir fumé après l’avoir allumée, dans le cendrier de Jun, juste avant qu’elle ne finisse de se consumer en brulant mes doigts, puis rentrai en refermant derrière moi. - Jun ? demandai-je à Aiba. - Dans la cuisine. Il cherche à s’occuper. - J’y vais. Je m’arrêtai cependant en passant près de mon ami pour l’enlacer. - Ça va toi ? - Oui. J’ai reçu un nouveau mail de Yusuke avec une photo de tout le monde alors ça va. - Et ta ménagerie ? - Shigeru m’attend avec eux. Et ta mère ? Ta sœur ? Nami ? Sacré Masaki, après l’avoir rassuré sur la bonne santé de ma famille et de mon chien que je laissai en pension à l’année chez ma mère, je me dégageai de son affectueuse étreinte pour aller retrouver Jun. Il était en pleine séance de récurage de la vaisselle et je pris un torchon pour essuyer à ses côtés. C’est pendant cette activité passionnante et silencieuse que le courant revint. - Tu devrais aller te doucher, grommela-t-il. - Toi aussi, répondis-je du tac au tac. Je tournai alors la tête vers lui et découvris qu’il avait fait de même. Des sourires jumeaux étirèrent nos lèvres et nous déposâmes doucement torchon, éponge et vaisselle sans nous lâcher des yeux. Ce fut le signal du départ et, comme deux gosses, nous partîmes en direction de la salle de bain en courant, avant de nous casser le nez sur la porte close. Trop tard, Sho et Masaki avaient été plus rapides. - Les gars grouillez-vous ! Nous aussi on a besoin de se laver ! dis-je en tambourinant contre la porte close. - Moi je dis que si je peux pas profiter de l’eau chaude, vous n’aurez plus qu’à aller au conbini du coin pour acheter votre prochain repas. Autrement je pourrai profiter du fait que le gaz ait été remis en route pour faire un curry et une soupe, alors c’est vous qui voyez, ajouta mon alter ego avant de faire demi-tour. Une fois dans la cuisine, il sortit les légumes du bac. - Tu m’aides ? - Moui. D’accord… Si tu t’occupes des oignons. Pendant que J s’occupait des oignons et de la viande, j’épluchais rapidement les carottes et les pommes de terre pour le curry avant de m’attaquer au reste des légumes pour la soupe. Nous venions de mettre le tout à mijoter quand Aiba nous rejoignit à la cuisine. - C’est libre. - Merci. J’étais déjà dans l’entrée de la salle de bain quand j’entendis Jun donner les dernières instructions pour éviter que les gamelles ne brulent. Il me rejoignit rapidement et quand nous sortîmes une demi-heure plus tard de la salle de bain, à la fois réchauffés et rafraîchis, nous découvrîmes que Riida était arrivé et qu’il était en train d’humer les casseroles. - Toi ! Sérieux, Oh-chan, comment t’as pu nous faire ça ? A mon éclat, Ohno s’écarta des plaques avant de nous sourire. - Toshi, je suis heureux que tu sois sauf. Mais tout de suite, va dans le salon. Vous aussi les gars ! On arrive. La voix de Jun grinçait un peu en disant ces mots et ses doigts agrippés à mon T-shirt indiquaient combien notre pseudo détente tout à l’heure était factice. Masaki et Sho étaient dans l’encadrement de la porte séparant le salon de la cuisine, sans doute suite à mon cri. Dès qu’Oh-chan les eut rejoints, ils disparurent. - Nino, s’il te plait calme-toi. On va tous bien, c’est le principal maintenant, non ? - Oui. T’as raison. Gomen… Nous rejoignîmes les gars dans le salon quelques instants plus tard. J’étais plus calme à présent, mais le regard inquiet que Masaki posa sur moi quand je pénétrai dans la pièce avec Jun, me fit réaliser que ces dernières heures, j’avais sûrement eu mon air des mauvais jours. Je lui offris un sourire que je m’efforçai d’afficher le plus serein possible et une fois que je fus assis entre lui et J, Sho prit la parole. - Alors Riida ? Pourquoi as-tu oublié notre existence hier ? Oh-chan avait la tête baissée. Il resta un moment silencieux puis se redressa et nous regarda droit dans les yeux avant de répondre. - J’étais dehors quand la terre a tremblé de nouveau. Et puis un imprévu est arrivé et, je m’excuse, j’ai tout oublié. Ce n’est que plus tard, chez moi, que j’ai réussi à joindre mes parents et j’ai envoyé un mail aux managers. J’ai cru qu’ils transmettraient. Désolé. - Et nos messages ? Tu ne les as pas lus ? - Désolé Aiba-chan, j’ai pas pu y accéder. Avant que nous ne puissions poser la question suivante, le téléphone de Sho sonna. - Moshi mosh… - … - Teru-kun, calme-toi. Ecoute, on est tous chez Jun-kun là. Tu n’as qu’à nous rejoindre. - … - A tout de suite. Sho raccrocha et nous regarda. - C’était Teru. Cécile a disparu. Il est en panique. Je lui ai dit de venir. A six on sera plus efficaces que lui tout seul. Ne ? Nous ne pouvions qu’acquiescer et, en attendant son arrivée, Jun repartit vers la cuisine. Riida se leva, et je surpris un pli soucieux barrer son front. Quand la sonnette retentit, il s’était installé dans le canapé, Jun s’installa à l’autre bout de celui-ci, m’entrainant entre eux sans me demander mon avis à l’entrée de Teru qui avait été accueilli par Ma-chan.
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++Cécile++
J'avais fourni à Nuit une ration qui théoriquement devrait lui permettre de tenir deux jours. Mes deux jours d'absence. Car j'étais sûre que mon cher Teru profiterait de ce que je ne dormais pas à la maison pour rester tardivement à son travail. Et un chaton, davantage qu'une plante verte, ça a besoin de manger et de boire. J'avais rejoint l'ambassade avec un bon quart d'heure d'avance sur l'horaire prévu pour le départ. Je devais accompagner des épouses de diplomates au ski. Plus qu'une véritable séance de travail, c'était un séjour de villégiature dans la neige que l'on m'avait ainsi proposé. Avec possibilité de faire un peu de tourisme plus culturel. J'avais garé la voiture familiale sur un parking pas trop éloigné et avait rejoint le groupe. Le trajet en train ne m'avait pas paru bien long, ma tendance à dormir dès que j'étais un peu bercée devant y faire beaucoup. Un peu avant l'arrivée, j'avais été secouée gentiment par l'épaule. - Madame Miura, quand nous serons arrivées, vous voudrez bien rester avec moi ? J'aime beaucoup la neige, mais pas le ski. Je regardai la jeune femme qui me parlait ainsi. Un peu plus jeune que moi, mère de trois enfants, elle était au Japon depuis six mois environ. Pas suffisamment pour parler japonais, mais assez pour connaître un minimum de kanji. Et s'intéresser à des aspects culturels tels que la cérémonie du thé ou la calligraphie qu'elle m'avait convaincue d'apprendre avec son maître. Mais elle restait toujours formelle avec moi. - Pas de problème. Ca fait cinq ans que je n'ai pas skié, j'aimerais autant revenir à Tokyo sur mes deux jambes ! Nous étions une dizaine de tous âges. Leur anglais était souvent impeccable, mais il ne leur était pas très utile quand elles partaient à l'assaut des petites boutiques des villes où elles se rendaient en groupe. D'où leur demande d'avoir avec elles quelqu'un comme moi. Je n'allais pas me plaindre, je pourrai profiter des bassins d'eau chaude du ryokan de luxe où nous logerions le soir. La journée fila rapidement, et le petit groupe pépiant avait passé une soirée agréable. Au milieu du brouhaha, j'avais entendu mon téléphone m'annoncer un mail. Teru me prévenait, photo à l'appui, qu'il restait travailler toute la nuit. C'était la deuxième fois depuis la Saint-Valentin. Je savais qu'il n'avait pas revu Satoshi. Nous ne faisions plus l'amour aussi souvent qu'avant le mariage, mais il était toujours aussi attentionné, et je le sentais plus "présent" dans mes bras qu'au début de février.
La nuit et la matinée étaient passées rapidement et, ces dames ayant occupé les heures avant midi à profiter de l'onsen, tous les estomacs criaient famine quand nous étions sorties pour chercher un restaurant. Je nous dirigeai vers un établissement que nous avions repéré la veille et qui m'avait l'air de pouvoir satisfaire les goûts de chacune. Ni trop occidental, ni trop traditionnel. Le départ était prévu pour dix-sept heures, ce qui nous laissait encore largement le temps pour une exploration poussée des boutiques de produits plus ou moins locaux. J'avais l'impression d'être une poupée qui passait de mains en mains au gré des demandes de mes compagnes. Quand la terre se mit à trembler, nous étions au deuxième étage d'un grand magasin, et mon premier réflexe fut d'appliquer ce qu'on m'avait appris. Jusqu'à ce que j'entende une Japonaise à côté de moi crier qu'il ne fallait pas sortir. Je regardai dans la même direction qu'elle et m'élançai vers deux de "mes" Françaises qui, affolées, cherchaient à prendre l'escalier. Je les rattrapai juste avant qu'elles ne l'atteignent. - Stop ! Pas tant que ça bouge. Restez là, vous ne craignez rien. Ce bâtiment est récent, il est aux normes. Je savais bien que mes paroles n'avaient pas grand effet, mais si ça pouvait au moins les convaincre que c'était une compatriote qui leur parlait, ce serait toujours ça de gagné en calme. Quand tout s'arrêta enfin, au bout de ce qui nous parut une éternité, je les lâchai et elles descendirent à toute vitesse. Je n'avais jamais vécu une telle secousse. C'était impressionnant. Et quand on se retrouva dehors, les quelques échanges que je saisis pendant que je cherchais à rassembler mes brebis affolées me confortèrent dans mon idée. - Ils annoncent un tsunami sur la côte est. La personne qui venait de parler avait les yeux rivés sur son téléphone portable. Sans doute quelqu'un d'inscrit sur ces listes de diffusion des avertissements météo. Je me dis que je devrais sûrement en faire autant. Quand je parvins à remettre la main sur tout mon groupe, je proposai de rentrer au ryokan. Ce serait plus facile ensuite de faire le point. Arrivées à l'auberge, la propriétaire nous accueillit avec un soulagement discret et m'indiqua que les lignes téléphoniques fonctionnaient mal mais que la télévision donnait des informations. J'hésitai à faire se coller devant mes compagnes, de crainte de les voir s'affoler davantage. Après la deuxième secousse, qui nous dota de trois nouvelles fontaines (je me trouvai un peu dure de critiquer ainsi ces femmes in petto), je ne pus que constater que mon téléphone, que j'avais laissé sur une table en attendant que le réseau revienne, était tombé et avait été écrasé d'une manière ou d'une autre. La puce elle-même était hors d'usage et j'eus un blanc en réalisant que je n'avais noté dans mon calepin aucun des numéros contenus dans la mémoire de la machine. Je ne pouvais même pas appeler chez moi... L'idée ne me resta pas longtemps en tête, les femmes de notre groupe demandant plus d'attention que des colons en vacances. A des enfants, je pouvais faire chanter des chansons quand ils étaient effrayés par un orage un peu bruyant ; je me voyais mal entonner Fanchon ou les Champs Elysées avec ces dames... Heureusement, Astrid avait les deux pieds sur terre elle aussi, et nous parvînmes à dédramatiser les choses. J'avais noté les noms de chacune et étais allée porter la liste au commissariat qui saurait la faire parvenir à l'ambassade. Je ne vis pas passer le restant de l'après-midi. Evidemment, la voie ferrée était impraticable, et les routes dangereuses. Nous étions bloquées ici pour quelques jours. Je comprenais très bien le besoin qu'avait notre hôtesse de regarder la télévision et son flot d'images, mais je réussis à lui faire comprendre que pour permettre à notre groupe de trouver un peu de sérénité afin de dormir, il valait mieux que nous ne soyons pas trop mises au courant de tout ce qui arrivait. En tout cas, pas en continu et dans une langue étrangère qui leur faisait souvent comprendre ce qu'elles voyaient de travers. Elle nous "isola" dans une partie de son établissement et Astrid nous fit profiter des hanafudas qu'elle avait achetés pour sa famille. Les règles du jeu le plus basique étaient simples à expliquer et, passée la différence avec nos jeux de cartes européens, tout le monde se trouva pris dans les parties que nous enchaînâmes jusqu'à l'heure du coucher, ne nous interrompant que très provisoirement pour dîner.
La nuit aurait pu être reposante, outre les micro-éveils dus aux cauchemars de chacune (elles avaient préféré que l'on dorme toutes ensemble plutôt que par chambrée de quatre comme nous l'avions fait la veille), si la terre n'avait pas de nouveau tremblé à l'aurore. Levées aussitôt, nous étions sorties du bâtiment pour nous regrouper dans la cour comme nous l'avait recommandé la patronne. Cette dernière nous y avait rejointes et nous proposa un thé quand elle vit que ce troisième séisme en douze heures avait plus que sérieusement entamé le moral des plus résistantes. Elle me confia que les nouvelles données par la télévision n'étaient pas rassurantes, me parlant d'une centrale inondée et d'une vague, plus grande que les pires prévisions, qui avait submergé les digues. J'édulcorais ces informations, trop rudes pour une telle heure. Je tenais encore parce qu'il fallait bien que quelqu'un tienne, et que si je craquais, la communication serait plus difficile. Après ça, nous tentâmes de nous recoucher, mais pour celles qui avaient surmonté leur peur de l'espace clos (et il faisait bien trop froid pour garder les portes ouvertes), trouver un semblant de sommeil fut quasiment impossible. Pourtant, ce ne fut qu'au petit-déjeuner que la plus âgée d'entre nous manifesta un certain inconfort. Elle avait pris sur elle pour ne pas affoler davantage nos compagnes plus nerveuses et il me fallut l'emmener à l'écart pour qu'elle consente à m'avouer que lors du dernier séisme, elle était tombée en sortant de la chambre et s'était fait mal au bras. Sans avoir les connaissances de mon infirmière de mère, je pouvais dire, rien qu'en voyant le membre enflé qu'elle découvrit devant moi, qu'elle s'était fait plus qu'un simple bleu. Je demandai à la propriétaire une planchette en bois, un grand foulard et l'adresse de l'hôpital le plus proche et informai Astrid qu'après lui avoir posé une attelle j'emmenai notre doyenne passer une radio si cela était possible. Depuis la veille, nous avions largement eu le temps de nous rapprocher un peu, et si nous conservions le vouvoiement, elle ne me servait plus du Mme Miura à toutes les sauces et je l'appelais par son prénom. - Cécile, vous êtes sûre que vous voulez aller à l'hôpital ? Vous aviez dit que vous détestiez ce genre d'endroit. - Oui, mais pouvoir expliquer ce qui lui est arrivé directement en japonais évitera de nous faire perdre du temps. Et j'en profiterai pour me renseigner sur les moyens de transport disponibles pour rentrer à Tokyo. A tout à l'heure.
Quand je revins de l'hôpital avec notre éclopée qui s'en tirait à bon compte avec une fracture simple et franche, j'eus la surprise de voir me tomber dessus une Astrid tout excitée qui m'expliqua qu'elle avait eu Teru au téléphone avant que celui-ci ne soit totalement déchargé et elle me rapporta leur conversation. Enfin, l'interrogatoire qu'il lui avait fait subir. Je souris intérieurement en imaginant la retenue dont il avait dû faire preuve si elle avait été aussi nerveuse qu'elle l'était à présent. - Oh ! Cécile, je suis désolée. Quand votre mari a appelé, j'étais tellement stressée que je crois que j'ai dit beaucoup de bêtises. Il m'a demandé où j'étais et j'ai répondu "dans la cour du ryokan"... J'esquissai un sourire et lui pris la main. Oui, elle était stressée. Mais heureusement, elle n'avait pas craqué en même temps que les autres. Et puis, ça semblait justifié, non, de céder à ce que l'on avait vécu lorsque l'on avait enfin pu parler à son mari et être rassurée sur le sort de ses enfants ? - Vous avez fini par lui dire que nous sommes à Nagano ? - Oui. Parce qu'il m'a aidée en posant des questions faciles. Il est d'un calme ! C'est impressionnant. Je serai curieuse de le rencontrer. A quoi ressemble-t-il ? Teru, calme ? Mmm, non. Mon frère était calme. Teru était un homme stressé qui s'appliquait du mieux qu'il pouvait à dissimuler ses sentiments. Surtout quand ceux-ci s'apparentaient à la crainte, la douleur, la peine, ou la trop grande joie. Sa tendresse n'était pas rare, mais timide. - C'est un homme normal, sans super pouvoir. Et qui, je pense, a oublié d'appeler ses parents... - Ah ! fit-elle, une main sur la bouche. Il a parlé d'une liste. Mais il ne s'est pas expliqué. - Une liste ? De quelle... Oh ! la liste que j'avais déposée ce matin au commissariat pour qu'elle soit transmise à l'ambassade et permette de rassurer nos familles éparpillées, sans doute. Je sortis le bout de papier sur lequel j'avais noté les noms de mes compagnes. Et réalisai en la regardant que j'avais omis quelque chose en donnant les identités. Une petite chose sans importance qui avait aussi échappé à l'agent qui avait pris note : je m'étais simplement oubliée... - Astrid, je vais devoir retourner au commissariat. Vous voulez m'accompagner ? On cherchera une prise pour votre téléphone. Sa main dans la mienne se crispa et je la regardai avec attention. Elle avait les larmes aux yeux. Je l'attirai contre moi et lui dis tout bas de pleurer maintenant, pour que ses enfants retrouvent une maman toute prête à écouter leurs chagrins et à les rassurer. Une fois la crise passée, je confiai le groupe à la doyenne et je repartis me perdre en ville. - On va se perdre ? demanda Astrid d'une voix légèrement inquiète. - Ne vous en faites pas, j'ai un GPS permanent avec moi. Je posai un doigt sur mon front en la regardant et ris doucement avant de poursuivre : - Celui-ci, s'il me lâche, c'est que je ne suis plus en état de me rendre nulle part de toute façon. Pas comme mon téléphone. - Oh ! Cécile ! Quand on sera rentrées, il y a quelqu'un que vous souhaitez appeler ? En France peut-être ? Mon forfait est fait pour ça, alors n'hésitez pas ! J'hésitais justement. Son offre était tentante, mais je ne connaissais par cœur que les numéros de mes parents et de mon ancien appartement que je savais vide cette semaine. Et appeler mes parents m'exposait à une montagne de recommandations que je n'étais pas certaine de supporter, vu ma nervosité actuelle. Que n'avais-je retenu le numéro de Ben ? Lui au moins aurait pu prévenir tout le monde ensuite... Malgré tout, quand nous revînmes, et dès que l'appareil eut un semblant de batterie, je composai le numéro de mon enfance et remerciai le ciel d'avoir mis mon père au bout de la ligne. Maman avait pris des somnifères pour pouvoir dormir, me dit-il. Et je réalisai qu'en France il devait être environ trois heures du matin... Je pus le rassurer et lui dire de faire passer le message que j'allais bien et était à Nagano où je me trouvais momentanément coincée. Je donnerais plus de nouvelles quand je rentrerais à Tokyo. J'embrassai mon père et raccrochai avant d'être contaminée par son émotion. Je ne l'avais pas entendu pleurer souvent ; pourtant, là, ses larmes étaient presque en train de mouiller mes joues... - Cécile ? Tout va bien ? - Mmm, opinai-je lentement. C'est bon. Je suis sûre que toute ma famille sera au courant dans moins d'une heure. - Il est pourtant... - Oui... J'aurais dû appeler avant. C'était ça de vieillir... - Cécile ? Merci de vous occuper de nous. - Merci de vous occuper de moi ! Je lui fis une grimace qui lui arracha un sourire. Je m'étais fait une nouvelle amie.
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11 mars 2011 , Montréal, Canada, … 22h30
Merci, Seigneur ! Cette journée a été l’une des plus longues de toute ma vie. Ben vient d’appeler Cécile va bien. Elle était à Nagano et là-bas la secousse était nettement moins forte qu’à Tokyo. Les lignes étant mauvaises, Cécile m’appellera plus tard mais à priori tout va bien.
Voilà, c'est tout pour aujourd'hui N'hésitez pas à laisser un petit coucou | | | Mer 6 Nov - 13:55 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| Bonsoir (en tout cas chez moi) Ave un peu de retard je vous poste ce nouveau chapitre. Mais avant pour me faire pardonne, je vous propose quelques images de ma balade de dimanche qui est la raison principale pour laquelle je n'ai pas posté en temps et en heure. - Balade au Koya-san et à Koyasan:
Revenons à Jinsei. L'heure des grandes décisions est arrivées (ou peut-être seulement de la grande décision) Sans plus attendre voici le nouveau chapitre - Chapitre 23:
++Ohno++
Quand Teru était parti de chez Jun, il était passé chez eux pour préparer ses affaires et s'était ensuite rendu directement chez moi. Je lui avais donné le double de mes clés exprès et c'était le programme qu'il m'avait envoyé par mail alors qu'il était aux toilettes et moi sur le balcon. Mentir à nos amis allait devenir un jeu d'acrobatie quotidien, je m'en rendais bien compte. Et il y en avait un à qui je savais que je ne pourrais pas dissimuler ce qui nous arrivait. Mais pour dire la vérité à Jun, j'attendais que Teru ait parlé à sa femme. Ça me paraissait plus correct. Et peut-être aussi était-ce un peu parce que j'avais peur qu'il ne change d'avis et reste avec elle. Ce tremblement de terre avait-il été un révélateur de ce qu'il voulait, ou mes bras lui avaient-ils juste offert un refuge momentanément rassurant ? Il avait rappelé le numéro de la française qui était avec Cécile-chan. Deux fois seulement, mais à chaque fois devant moi. Et s'il parlait à cette femme en français, il avait discuté avec son épouse en japonais. Enfin, la seule fois où il l'avait eue. - Cécile ? Tu vas bien ? - Comme n'importe qui à Nagano aujourd'hui, je pense. La ville en soi n'a pas vraiment de problème, le seul souci c'est qu'on ne sait pas quand ni comment on pourra rentrer à Tokyo. Mais on a réussi à avoir toutes les familles et à les rassurer. - Sauf toi... - Je suis une idiote. J'avais oublié qu'il fallait aussi se compter quand on faisait l'appel... Mais c'est bon, ça a été rectifié. Je suis désolée si je t'ai inquiété. - Cécile... Tu t'occupes des autres, c'est très bien. Mais qui s'occupe de toi ? - Ne t'en fais pas, j'ai trouvé une mère poule. Elle est plus jeune que moi, mais ses bambins lui manquent et du coup, c'est moi qui lui sers de substitut. Astrid est adorable. Et son mari est très gentil. Il faudra qu'on les invite un de ces jours. - Cécile... - Oui, oui, je sais, c'est un peu tôt. Et puis, il ne faut pas que je reste trop longtemps au téléphone. Je t'aime, Teru. On devrait trouver une solution pour rentrer d'ici demain ou après-demain. A très bientôt alors. Je t'embrasse. - Moi aussi.
Au deuxième appel, le dimanche, elle était partie en ville avec d'autres femmes. C'était ce qu'il m'avait expliqué après avoir noté quelque chose et raccroché. - Elles rentrent demain à l'ambassade, par la route. Cécile m'a fait dire qu'elle devrait être à la maison vers dix-huit heures. - Mmm. Tu y seras ? - Oui. Il avait téléphoné assis sur mon tapis à côté de la table basse, et me regardait par en-dessous puisque je m'étais installé en tailleur sur une chaise à côté de la fenêtre. - Tu viendras avec moi demain. - Pourquoi je devrais être là ? C'est une demande ? - Pas vraiment. J'ai envie que tu sois là. - Envie ? - J'ai besoin que tu sois là. S'il te plait. J'hésitai un instant avant d'acquiescer. Autant régler cette histoire une bonne fois pour toute, non ? - Viens dans mes bras, Sato, appela-t-il. Tu me manques. - Hey ! je ne suis pas un chaton ! - Non, je sais. Tu es un fauve, je m'en rends compte à chaque fois que tu me prends. Mais là, je voudrais juste sentir ton poids et ta chaleur. Je m'approchai de lui après avoir posé mon bloc et mon crayon. Me glissant entre ses bras, je m'installai à cheval sur ses cuisses, face à lui, et passai mes bras autour de son cou, les posant sur le canapé auquel il était adossé. - Quand tu m'invites comme ça, Teru, je n'ai qu'une envie, c'est te sauter dessus. Tu le sais, non ? - Mmm. C'est bien pour ça que je te l'ai demandé, me dit-il alors que ses mains caressaient mes fesses et mes cuisses au travers de mon jeans. - Si tu le sais, ça va, souris-je en penchant la tête pour l'embrasser. Elle rentrait demain. Si jamais mes craintes irraisonnées s'avéraient exactes, je n'aurais plus que cette nuit pour l'avoir pour moi seul. Alors je voulais juste profiter de l'instant présent, de ses lèvres, de ses mains, de son sexe, de sa fougue et de son envie. Après... je ne voulais pas y penser. Demain serait un autre jour.
(...)
Nous étions debout au milieu du salon, à attendre Son retour. - Teru, je persiste à penser que ma place n'est pas ici. Ce que tu as à lui dire ne me regarde pas. Il me jeta un coup d'œil dans lequel je ne savais si j'y voyais plus de détresse que de résolution ; mais c'était une résolution qu'on le sentait devoir tenir par obligation. Je ne doutais pas qu'il voulait vivre avec moi. Il avait déjà apporté chez moi tous ses vêtements, ses affaires de travail, enfin tout ce dont sa femme n'aurait pas l'utilité. Je savais tout ça, mais je me demandais dans quelle mesure il comptait sur ma présence pour ne pas flancher dans sa résolution. Je savais pourquoi nous nous étions vus en cachette entre le mariage et la Saint-Valentin. Simplement parce que c'était plus confortable pour lui de ne pas avoir à choisir entre l'apparence respectable que lui offrait le mariage, et l'amour honteux qu'il vivait avec moi. Honteux aux yeux des siens, de son environnement familial et professionnel. Contrairement à Sho qui avait joué au rebelle, Teru avait toujours parfaitement collé à son statut social. Et aimer un homme n'en faisait pas partie. Je ne me leurrais pas sur le fait qu'il n'assumerait pas facilement notre histoire. Elle lui faisait risquer beaucoup de choses qu'il avait peur de perdre. C'était aussi pour cela que je savais qu'il tenait à moi et à nous. Parce que malgré ce qu'il y avait en balance, il venait vivre chez moi, avec moi. Mais avant cela, il fallait qu'il quitte sa femme. Et je voyais bien qu'il n'était pas aussi assuré qu'il tentait de me le faire croire. Je l'avais entendu se poser des questions à mi-voix dans la voiture, pendant que nous venions ici. Comment allait-elle réagir ? Que pourrait-il lui dire pour ne lui laisser aucun faux espoir sans avoir l'air d'un monstre ? Comment espérait-il ne pas passer pour un monstre en venant lui annoncer qu'il la quittait pour moi le jour même où elle rentrait à Tokyo, alors qu'elle avait passé trois jours, coincée à Nagano, loin de celui sur qui elle était censée pouvoir compter, au cours d'évènements qui avaient bouleversé un pays entier ? - J'ai besoin de toi, Sato. Si je suis seul avec elle, j'ai peur d'avoir envie de la consoler, et que ça ne tourne mal. Alors que si tu es là, je n'oserai pas l'approcher. - Tu plaisantes ? sursautai-je. Tu comptes sur moi pour ne pas la toucher ? Mais si tu as envie de la toucher, ou de l'allonger, ou ce que tu veux, c'est que tu n'es pas prêt à la quitter ! Je me sentais bouillir. Il me faisait quoi, là ? - Satoshi, dit-il en m'enlaçant pour m'immobiliser, je t'aime, je suis fou amoureux de toi et je t'aime. Ce que j'éprouve pour Cécile est différent. Je l'aime mais c'est plus proche de l'admiration que de l'amour véritable. Elle est précieuse pour moi, comme une amie. Et j'ai peur de la manière dont je vais la blesser. Je voudrais ne pas avoir à la faire pleurer... - C'est inévitable, baka ! Tu y avais pensé en demandant à vivre avec moi, non ? A son hésitation, je compris qu'il n'avait pas vraiment réfléchi à la question. L'homme que j'aimais était un idiot complet en matière de sentiments. - N'as-tu jamais fait pleurer une personne qui t'étais chère ? - Tu penses que j'ai pu passer autant d'années aux côtés de Jun sans rien ressentir pour lui ? Tu crois vraiment que le voir au bord des larmes m'a fait plaisir ? Et j'ignorais s'il y aurait quelqu'un pour me prendre dans ses bras ensuite. Alors que là, je serai là pour toi. - Cécile n'a pas mérité ça. - Non, c'est vrai. Pas plus que Jun en janvier. Mais si tu veux changer d'avis, il est encore temps. - Je ne veux pas changer d'avis. Mais qui va la consoler ? - Si ce que tu me dis est sincère, si tu m'aimes au point de vouloir vivre avec moi, alors pardon pour Cécile, mais ce n'est pas ton problème. Je sentis ses bras se resserrer sur moi. Je l'obligeai à desserrer son étreinte et me tournai vers lui. - Teru, tu es quelqu'un de gentil, et ça a déjà dû te jouer des tours. Mais crois-moi, dans cette situation, vouloir être gentil ne sert qu'à faire plus de mal aux gens. - Que ça me fasse mal à moi, je m'en fous. Je ne veux pas lui faire de mal à elle. Je soupirai. - Et à moi ? - Comment ça à toi ? Je viens vivre avec toi... - Teru ! Que tu hésites ainsi, ça me fait mal. Je te connais, je sais un peu quelles sont tes faiblesses, mais tes hésitations sont comme des aiguilles que tu me plantes dans le cœur. Tu portes toujours ton alliance. Tu t'inquiètes pour ta femme. Tu me dis que tu vas la quitter, mais je ne t'ai pas entendu parler de divorce. A ton avis, je prends tout ça comment ? - Mais tu es fort, Sato. Tu es un homme et tu... Je ne sus ce qu'il allait ajouter, la sonnette nous interrompit. Nous nous écartâmes comme deux enfants pris en faute. Je savais qu'il était sincère en disant vouloir vivre avec moi, oui. Mais je sentais que si Cécile utilisait les grands moyens pour le retenir, il lui céderait. Il suffirait qu'elle pleure pour qu'il vacille dans ses résolutions. Et les femmes pleurent si facilement... Finalement, ma présence en ce moment était certainement indispensable. Teru alla ouvrir à sa femme. Il revint avant elle, déposant devant la porte de la chambre le petit sac à dos avec lequel elle avait dû partir jeudi dernier. Les miaulements du chat qui se rapprochaient indiquaient qu'elle allait entrer dans la pièce dans les secondes qui suivaient. Et je me sentais toujours aussi mal à l'aise. Je la vis passer la porte, la tête penchée sur la petite masse noire qui lui léchait le nez. Elle lui gratouillait la tête en souriant. - Tu sais Teru, si tu n'avais pas laissé ta clé dans la serrure, je n'aurais pas eu besoin de sonner. Elle leva la tête et me vit. Son regard se figea un instant, puis fit un rapide aller-retour entre mon amant et moi. - Bonjour Satoshi. Tu vas bien ? Et ta famille ? - Bonjour Cécile-chan. Euh... oui, tout le monde va bien. Et... et toi ? Tu étais à Nagano, c'est ça ? - Oui, avec des femmes de diplomates de l'ambassade de France. Si elles n'avaient pas changé d'avis jeudi matin, nous nous serions retrouvées à Aomori. Et on aurait dû être dans le train de retour vendredi après-midi. Je regardai Teru qui la fixait avec des yeux ronds. - Vous auriez vraiment dû être dans le Tohoku ? Pourquoi vous n'avez pas pris l'avion ? - ...Désolée. En fait, je préfèrerais oublier tout ça. Je l'ai dit juste parce qu'elles n'ont pas arrêté de le ressasser depuis qu'elles ont su pour Sendai et Fukushima. Alors je crois que j'avais besoin de le dire une fois moi aussi. Mais franchement, je n'ai pas envie d'y repenser. Nous étions à Nagano, il y avait de la neige, la terre a tremblé mais nous en sommes sorties avec au pire quelques égratignures et une bonne frousse. Les gens ont été adorables alors que la propriétaire du ryokan nous disait qu'elle n'avait jamais vécu ça. Euh... je crois que c'est un peu décousu ce que je vous raconte. Désolée, je n'ai pas beaucoup dormi ces derniers jours... Ici aussi, ça continue de trembler, n'est-ce pas ? - Oui, ça tremble encore, affirma Teru. Comment vas-tu Cécile ? Je le sentais inquiet. Son corps tendu semblait prêt à s'approcher d'elle et je devinais qu'il voulait la prendre dans ses bras. Je compris qu'il allait certainement se défausser s'il s'avérait que Cécile avait trop souffert. Mais pouvais-je vraiment le blâmer ? - Moi ? J'ai été secouée, fit-elle en souriant. Et toi ? Teru ! Je t'en supplie Teru, ne me laisse pas ! Ne détruis pas notre bonheur alors qu'il vient juste d'éclore. - Moi aussi. Je... je vais faire un thé, tu en veux ? - Je préfèrerais un café malgré l'heure. Mais... va pour un thé. Un blanc alors. Il se dirigea vers la cuisine, me laissant seul avec elle. Je me sentais si mal. Je n'avais qu'une envie, c'était partir. Les laisser tous les deux, et voir s'il me revenait malgré tout. J'allais pour sortir de la pièce lorsque son bras tendu devant moi me barra la route. Surpris, je levai les yeux vers elle. Les sourcils légèrement froncés, elle semblait sonder mon âme. - Il a pris sa décision ? Il nous veut tous les deux, ou il t'a choisi ? Interloqué, je ne pus que la fixer sans prononcer un mot. Comment pouvait-elle savoir ça ? Etait-elle devin ? - Satoshi ? Réponds à ma question. Elle gardait son bras tendu devant moi. - Il... m'a choisi... dis-je en sentant mon visage s'empourprer. Mais... pourquoi me croirais-tu ? Elle grimaça et je sentis physiquement qu'elle se crispait. Puis elle inspira doucement et longuement en fermant les yeux. Quand elle les rouvrit, il y avait dedans un maelström de sentiments qui ajouta à ma confusion. Puis elle les fixa sur moi et je vis qu'ils brillaient d'une résolution puissante. - Satoshi, promets-moi une chose, une seule. Je n'étais pas sûr de bien la suivre. Moi, je devais lui promettre quelque chose ? - Pourquoi ? - Parce que sinon, ni toi, ni moi ne pourrons être heureux. Et Teru ne le sera pas non plus. Que voulait-elle ? Qu'il lui reste un peu ? Que je le lui laisse de temps en temps ? Qu'on fasse ce que les Français appelaient un ménage à trois ? Non, elle ne me faisait pas l'effet d'une femme aussi peu réaliste. - Si ça me paraît correspondre à ce qu'il y a de mieux pour Teru, je suis d'accord. Ses lèvres s'étirèrent mais ses yeux gardèrent cette couleur triste. - Alors tu l'aimes vraiment... Oui, tu dois l'aimer, sinon tu n'aurais pas quitté Jun... - Comment sais-tu ? l'interrompis-je. - Peu importe Satoshi. Promets-moi ceci : laisse Teru parler. Ne l'aide pas à s'exprimer. Il faut qu'il dise ce qu'il veut tout seul. Si je faisais ça, je savais qu'il allait souffrir. Elle voulait qu'on le lâche sans filet pour traverser un gouffre. Mais je comprenais. - Je suis d'accord. - Je n'ai pas dit quelle serait ma réponse. - Je sais. Mais tu ne peux pas répondre si tu n'as pas de question. Elle me fixa un instant qui me sembla une éternité puis je sentis son corps se détendre. - Nuit, mon chaton, viens ici, dit-elle en se baissant pour attirer la bestiole. Celle-ci s'approcha en penchant la tête. Quand sa maîtresse lui tendit la main, elle y posa son museau puis une patte. Cécile-san la prit dans ses mains et la câlina un peu avant de l'emmener dans sa pièce. Quand elle revint, je n'avais pas bougé. - Je t'invite à t'asseoir ou c'est toi qui le fais ? Mes yeux s'écarquillèrent à ces mots. - Tu es chez toi ! Je ne te prendrai pas... Je m'interrompis. Qu'allais-je lui dire ? Que je ne lui prendrai pas son appart ? Mais si, deux mois plus tôt, on m'avait pris Jun, je m'en serai bien foutu de savoir que je gardais mon atelier. Et s'il osait parler, c'était son mari que je lui prenais. Celui qui lui avait fait une promesse solennelle. Je baissai la tête. - Pardon Cécile-san. Je veux Teru. Je veux te le prendre, alors je n'ai pas à te parler comme ça. - Depuis quand ? - Pardon ? - Depuis quand es-tu amoureux de lui ? Je réfléchis un instant. - Il m'a plu tout de suite. Mais je le pensais inaccessible. - Et tu avais déjà Jun... - Non. Jun m'a séduit après. Je ne savais pas trop comment interpréter le regard qu'elle me lança. Mais je n'eus pas le temps de m'y attarder, de la cuisine nous parvenaient des bruits de vaisselle. Cécile me prit le poignet pour me guider jusqu'au canapé où elle me fit asseoir. Elle s'installa à un coussin d'écart. Teru entrant avec son plateau n'eut plus le choix que du fauteuil qui nous faisait face. Elle nous avait mis à égalité et Teru en position centrale. J'espérais... non, NOUS espérions qu'il saurait s'en servir. Je jetai un coup d'œil à la jeune femme à côté de moi que j'avais entendu soupirer doucement, et vis son regard fixé sur la table basse où mon amant venait de déposer le plateau. Et sur le plateau... le service à thé offert par Sho en cadeau de mariage. Oh ! Teru... Quel manque de délicatesse en toi. Tu es aussi peu attentif à ta femme que tu l'as été envers moi avec tes hésitations. Je secouai la tête. - Au fait Teru, la voiture était bien assurée j'espère ? - ...Oui, pourquoi ? demanda-t-il un peu fébrile. Tu as eu un accident ? - Elle a eu un accident, toute seule. Je l'avais garée pas loin de l'ambassade. Et je l'ai retrouvée avec le toit défoncé... Elle parlait naturellement, comme si elle ne savait pas que son mari voulait la quitter. - Je t'en rachèterai une. Je sursautai. - Je n'ai pas demandé un nouveau jouet, Teru. Je t'informe juste. Au fait, tu étais où vendredi ? Au boulot ? - Oui. Mais comme mon écran a été cassé dès la première secousse, j'en suis parti assez vite... Je vis qu'il prenait conscience en en parlant qu'il allait s'enfoncer très vite. Et il fit ce qui ne pouvait que paraître encore plus suspect : il se tut. - Teru ? Quelque chose ne va pas ? - Hm ? Non, non, tout va bien. Teru ! Elle vient de te tendre une perche immense, et tu la laisses passer... - J'ai su que tes parents avaient appelé l'ambassade plusieurs fois parce qu'ils n'arrivaient pas à nous joindre. Tiens, d'ailleurs, il faut absolument que je garde en mémoire quelques numéros de base, comme celui de cet appartement. Comme mon téléphone s'est cassé lors des secousses, je n'avais plus de répertoire. Quelle idée de tout confier à l'électronique ! Bref ! J'espère que tu les as rassurés. - Qui ça ? - Tes parents, Teru, soupira-t-elle. Tu ne m'écoutes pas... - Si si ! C'est juste que... euh... Il se tordait les mains, et j'étais certain qu'il ne s'en rendait même pas compte. Il m'avait lancé un regard qui ressemblait à une demande de bouée pour homme en plein naufrage. Mais j'avais promis et avais donc détourné les yeux vers Cécile-san. J'avais mal pour lui. Je savais que dans son travail, c'était un décideur calme et réfléchi. Pourquoi ne pouvait-il agir de même dans sa vie privée ? - Cécile... Elle ne répondit rien mais le regarda en souriant doucement. Pourrait-elle réellement accepter de me laisser cet homme ? Elle l'aimait, après tout. Et à sa place... Mais je n'étais pas à sa place. - Cécile... Il faut que je te parle de quelque chose. Je retins mon souffle. Allait-il enfin aborder Le sujet ? - Je... Tu te souviens du Haut-Koenigsbourg? J'ignorais totalement de quoi il parlait. - Oui, répondit-elle en souriant toujours. Son grès rose et ses députés italiens. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais fut interrompu par la sonnerie du téléphone. Etant la plus proche de l'appareil, la jeune femme se leva pour attraper le combiné et se présenta. - Miura Cécile... Oui ! je viens de rentrer. Comment allez-vous ? Profitant que sa femme était concentrée sur sa conversation, Teru se pencha vers moi. - Sato, j'ai besoin de ton aide. On est deux dans cette histoire. Je le regardai rapidement et répondis à voix basse. - Non Teru, on est trois. Je n'eus pas le temps d'en dire davantage. - Oui il est là. Je vous le passe. Teru, ce sont tes parents. Elle lui tendit le combiné. Il le prit et, au bout de deux phrases, se décida à s'isoler dans la chambre. - Il est lent... Je ne pus que soupirer. - Oui. A croire qu'il ne sait pas ce qu'il veut, fis-je avant de me rappeler qu'il y avait quelque chose qui m'échappait. Cécile-san... depuis quand sais-tu... ? - Depuis le début. - Vraiment ? - D'après Jun, c'était le début. Et je n'ai aucune raison de ne pas le croire. - Jun... Jun ?! C'est lui qui te l'as dit ? Il a... - Non, il ne m'a rien dit. Je vous ai vus. Vous croyiez vraiment que la mariée avait accepté de passer sa nuit de noce sans son mari avec cette pauvre explication d'un homme fatigué ? J'avais naïvement juste envie de croire que ce n'était qu'une nuit unique et qu'il me reviendrait. Après ça, il me faisait l'amour comme avant. Mais je sentais que quelque chose était différent. Ce n'est pas un grand bavard, mais il rêvait de plus en plus souvent. Elle avait su, et elle avait tout fait pour le garder... Elle le voulait. Et si je ne disais rien pour l'aider à parler, il risquait de rester avec elle, je le sentais. Mais... Teru revint à ce moment-là. A sa mine, je vis qu'il était contrarié. - Un problème ? demanda sa femme. - Disons que je n'ai pas aimé me faire traiter comme un gosse. - Mais c'est ce que tu es, Teru. Leur enfant. Tu aurais cinquante ans, ce serait la même chose. Je restai étranger à leur discussion. Je voulais intervenir, dire quelque chose pour qu'il soit à moi, mais je ne me sentais plus du tout à ma place - si je l'avais jamais été depuis qu'elle était rentrée. Je regardai Teru faire le tour du canapé et se mettre à genoux devant sa femme. Que faisait-il? - Cécile, quand je t'ai demandé ta main, je t'ai dit que je t'aimais, mais que je n'étais pas amoureux. Et aussi que je pensais que je pouvais tomber amoureux de toi. Tu t'en souviens, je le sais. Tu as une trop bonne mémoire pour avoir oublié ça. - Je m'en souviens. - J'étais sincère. Tu étais, tu es la femme qu'il me fallait. Je me sentis soudain nauséeux. Je voulais fuir, partir à l'autre bout de la ville, dans un endroit isolé, n'importe où, mais loin d'ici. Teru, Teru, pourquoi lui disais-tu des choses pareilles ? Pourquoi devant moi ? Il continuait de la regarder dans les yeux en lui tenant la main. - Je t'aime, mais j'aime Satoshi davantage. J'ai compris vendredi que c'est lui la personne sans qui je ne pourrais pas vivre. Je sais que te dire ça comme ça, c'est dur, c'est nul de ma part. Mais tu me connais, n'est-ce pas ? Je ne sais pas parler, je suis pas doué en sociabilité. Tu avais déjà tout compris, ne ? Elle hocha la tête. Le sourire léger qui errait sur ses lèvres n'avait pas changé, mais je le vis soudain plus triste. - Pardon Cécile. Pardon de ne pas être celui qu'il te faut, celui qui prendra soin de toi. Je suis en-dessous de tout... - Avec moi, oui, sans aucun doute. Elle passa sa main libre sur la joue de l'homme que j'aimais. - Essaie d'être celui qu'il faut à Satoshi. C'est pas facile de deviner ce qu'il se passe dans ta petite tête d'éléphant. Alors apprends à lui parler. Il posa son front sur les genoux de la jeune femme. En quelques minutes, j'étais passé par tous les stades des sentiments, allant de la confusion au plus grand désespoir en passant par la gêne et l'amour. L'amour pour cet homme qui osait se dire amoureux de moi. Et en les voyant si proches l'un de l'autre, je me demandai si je devais encore éprouver de la jalousie. Puis je compris que Teru exagérait. Se faire consoler par celle qu'il quittait, c'était odieux. Il n'en avait sûrement pas conscience, mais elle si. Voyant la tension dans ses épaules, je décidai d'intervenir et me levai. - Teru, murmurai-je en lui prenant l'épaule, un peu de tenue. Tu n'as pas le droit de demander ça. Il tourna la tête vers moi et je vis qu'il n'avait rien saisi. Je ne pensais pas être un maître en relations humaines, mais là quand même... - Teru, tu sais déjà comment tu veux faire ? Il la regarda, un peu gêné. - Je vais... je vais aller vivre chez Satoshi. Je te laisse l'appartement, on modifiera les papiers en conséquence. Pour le reste... Comme il ne finit pas sa phrase, je la vis soupirer. - Pour le reste, je propose qu'on en discute par internet. Teru, je ne suis pas superwoman, je suis épuisée, et ça en plus, ça fait beaucoup. Alors je vais vous laisser rentrer chez vous. Je suppose que tu as déjà déménagé tes affaires ? - Ce qui n'appartient qu'à moi, oui. Je te laisse le reste. Son sourire se fit las. - Ok, on verra ça plus tard. Rentrez bien tous les deux. Teru, pense à exprimer ce que tu ressens. Même s'ils sont maladroits, mets tes mots sur tes idées. Je voyais bien ce qui semblait échapper à Teru : elle voulait se retrouver seule. Elle refusait de pleurer devant nous. Je l'obligeai à se lever et elle nous raccompagna jusqu'à la porte. Arrivés là, je vis Teru désigner un trousseau accroché parmi d'autres. - Je te laisse mes clés. Et pour la voiture... - C'est bon, ne t'inquiète pas pour ça. J'ai vécu avant de t'épouser, Teruki. Je saurai bien me débrouiller. Nous la saluâmes une dernière fois puis nous rejoignîmes la voiture. Une fois montés dans le véhicule, Teru démarra pour nous ramener... chez nous. - Je crois que j'avais sous-estimé Cécile-san. - Comment ça ? - C'est quelqu'un de bien. - Oui. Je ne la méritais pas. Je laissai passer quelques instants en silence avant de me tourner vers mon homme en profitant d'un feu rouge. - Teru ? - Mmm ? - Je veux que tu fasses en sorte de me mériter. N'abandonne pas comme tu viens de le faire avec elle. Parce que je ne te laisserais pas faire. Il redémarra sans me regarder, mais sa main vint prendre la mienne et la serra. - Tant que tu voudras d'un idiot comme moi, je n'abandonnerai pas. Je lui jetai un coup d'œil avant de reporter mon attention sur ce qu'il se passait devant. A ses yeux, des larmes brillaient.
**************************** ++Cécile++
La porte enfin fermée, je m'y adossai et sentis mes jambes trembler. Seul le miaulement impérieux de Nuit m'obligea à me bouger pour aller la sortir de son domaine. Lorsque j'ouvris la porte, un projectile tout en poils et en griffes me sauta sur le ventre. Je l'interceptai et la cajolai avec un peu de brusquerie pour la calmer tout en me dirigeant vers le salon. Là, je me laissai tomber sur le canapé et le ronronnement de ma crapule installée sur mes genoux m'apaisa quelque peu. Je ne comprenais pas encore tout ce qui venait de se passer. Mais le résultat m'apparaissait clairement : il m'avait quittée. Il avait préféré son premier amour. Et je ne pouvais même pas dire que je lui en voulais. Ce que j'avais dit à Satoshi était vrai, Teru et moi faisions toujours l'amour, mais... il était parfois ailleurs. Il avait voulu se forcer à respecter à la fois sa parole et son éducation, mais je voyais bien qu'il était mal. Mal à l'aise ou malheureux, je ne savais pas trop. Et ne le sentant pas pleinement à moi, je n'avais pas eu la force de faire comme si de rien n'était pour le garder dans mes bras. J'avais soutenu notre mariage du bout des doigts. Cette situation avait un mauvais goût de déjà vécu. Mais comme auparavant, je ferai ce que je savais faire de mieux : je me réjouirai pour le courage dont il avait enfin su faire preuve, et pour le bonheur qu'il pouvait trouver avec Lui. Pour ce qui me concernait... Ce serait encore comme si je n'existais pas pour moi-même. De toute façon, je me sentais trop nerveusement à plat pour tenir une réflexion cohérente. - Qu'est-ce que je fais, Nuit ? Je n'eus pas à me poser la question trop longtemps. Comme un fait exprès, le téléphone sonna à côté de moi. - Allô ? - Cécile !! Cécile, c'est bien toi ? - Lucie ? Désolée ma belle, je ne t'ai pas appelée avant... - On s'en fiche ! Tu vas bien ? C'est ça le principal ! Je ne me sentais pas capable de lui raconter ma vie. Je ne voulais en parler à personne. - Je vais bien, oui. Pas de bobo, juste un téléphone et une voiture totalement out. - Une voiture ? - T'inquiète, y avait personne dedans. - Alors ? - Ben... rien de particulier. Tu sais, je viens de rentrer à Tokyo, je n'ai pas encore tout saisi des histoires de blackout et autres. Je vais bien. Teru et ses parents aussi. Nuit également, si ça t'intéresse. - Je l'entends miauler. - D'après ce que je sais, tes chouchous vont bien aussi. ...Lucie ? Ne pleure pas miss... - Je pleure pas, me dit-elle avec une voix plus humide que le jour où elle avait obtenu son dernier diplôme. - Lucie, pardon, je voudrais te parler, mais j'attends de la visite. Va falloir que je te laisse, j'ai du rangement à faire. Tu veux bien ? - Oui, excuse-moi, je comprends. Pas de problème. A plus sur msn ? - Euh... je sais pas trop. Je suis fatiguée, je vais pas me coucher trop tard. Et demain, j'ai du boulot. On verra, d'accord ? - Pas de problème. Du moment que tu vas bien, c'est le principal. Je t'embrasse. Prends soin de toi ! - Merci. Toi aussi. J'appuyai sur le bouton et soupirai. Ouf ! J'avais réussi à tenir toute la conversation sans céder à mon envie de balancer l'appareil. Je me sentais trop fébrile, trop nerveuse pour réussir à parler plus longtemps. Lucie... Tu étais trop loin, tu ne pouvais rien pour moi. Et de toute façon, je ne te demanderais rien. Trop d'orgueil en moi. Même si tu le sais. Il fallait que je m'occupe. J'étais fatiguée, je le savais, mais je sentais aussi que je ne parviendrai pas à dormir. Alors je me lançai dans le récurage complet de la salle de bain. Puis le ménage et le rangement de la cuisine. La pièce à tatami était la moins impactée par le départ de Teru, mais j'y fis quand même un tour. Il n'y avait pas grand-chose en hauteur, et le sol moins dur que dans le reste de l'appartement avait évité la casse des quelques objets qui étaient tombés. Je n'avais rien trouvé par terre dans les autres pièces. Teru avait dû les ramasser... Nuit me regardait depuis la porte coulissante que je n'avais pas refermée. Sa jolie petite tête noire était penchée sur le côté dans un mouvement anthropomorphiquement interrogatif. - Tu as mangé, mon chaton ? Tu as faim ? Un miaulement léger me répondit. Elle avança une patte et se regarda la poser prudemment sur le tatami. Puis, sans faire un pas de plus, elle me fixa, l'air de dire "viens vers moi". En me penchant pour la récupérer, je me sentis envahie par la lassitude. J'allai jusqu'au canapé et m'y laissai tomber. Nuit m'escalada pour venir frotter son museau sur ma joue. Puis elle me lécha gentiment le nez de sa langue râpeuse. Je me fis la réflexion de combien je trouvai incroyable ma capacité à sentir ces petits détails alors que je ne me souvenais déjà plus de la voix de Lucie ou de la dernière salutation de Teru. Ce n'était pas ma première rupture. Et je savais très bien ce que mon caractère foncièrement mélancolique risquait de faire de celle-ci. Il fallait que je me secoue si je ne voulais pas me transformer en zombie pour les deux prochains mois. Avec une dernière caresse sur le dos de la petite crapule câline, je me relevai et observai un instant mon salon. - Bien, faisons du ménage dans ces vitrines !
(...)
Trois heures plus tard, deux cartons pleins de vaisselle et de bibelots offerts pour le mariage étaient en attente dans le couloir. Je demanderai à Teru ce qu'il voulait en faire, et sans réponse de sa part, ils iraient prendre la poussière dans le grenier avant que je décide de leur sort. Le téléphone sonna alors que je cherchais à quoi me faisait penser cette pièce, et je décrochai sans prêter une attention très poussée à ce que je faisais. - Moshi moshi ? - Cécile ? J'eus un blanc. - Cécile, c'est Astrid. Excusez-moi si je vous réveille, mais comme hier vous m'aviez demandé de passer vous prendre... - Oui ! Oui, bien sûr, dis-je précipitamment en me rappelant du visage de mon obligeant taxi. Excusez-moi, votre voix est différente au téléphone. Vous êtes déjà en bas ? - Non, rit-elle, je vous appelais justement pour vous dire que j'aurai un peu de retard. Je dois conduire les enfants à l'école avant de passer vous prendre. Ça ne vous ennuie pa s? - Absolument pas, affirmai-je. Je vous attendrai en bas d'ici... - Une demi-heure, ça vous va ? - C'est parfait. Mais prenez votre temps. - Entendu. A tout à l'heure. En remettant le téléphone sur sa base, j'étais déjà en train de retirer mon pantalon et mon chemisier que je jetai au hasard. Dix minutes plus tard, je sortais de la salle de bain en peignoir et envisageais de me trouver un truc à grignoter dans la cuisine lorsque la boule de poil me rappela que son propre estomac méritait lui aussi toute mon attention. Sachant que ma journée à l'ambassade risquait d'être longue, j'acceptai de lui ouvrir une boîte de pâtée. J'imagine que ce fut grâce à mon odorat défaillant que je pus ouvrir la boîte avant de sentir mon cœur se soulever. J'abandonnai aussitôt la conserve sur le sol avant de me précipiter dans la pièce à côté. Je ne savais plus depuis quand je n'avais pas mangé. Il me semblait qu'Astrid avait insisté pour que j'avale quelque chose la veille à midi. En tout cas, je ne sentis que la bile me brûler la gorge et la bouche tandis que je me tenais au réservoir des toilettes. Il me fallut dix minutes pour reprendre le contrôle de mon estomac et que le miroir me renvoie une figure presque humaine. Les dix minutes restantes me servirent à m'habiller avec la robe que j'avais hésité à mettre jeudi matin, et qui était restée suspendue dans la salle de bain, et à empêcher Nuit de se couper avec le bord de la boîte de pâtée. J'en avais vidé le contenu en apnée, n'ayant aucune envie de renouveler l'expérience précédente. A l'heure dite, j'étais devant mon immeuble et je courus à la voiture qui m'attendait. - Désolée, je vous ai fait attendre. - Pas du tout, je viens d'arriver. Elle démarra et finit par me lancer en m'observant du coin de l'œil. - Vous avez pu dormir ? Je vous trouve une petite mine. Je tentai de faire bonne figure. - Je crois que j'ai attrapé la même gastro que les autres, finalement. - Aïe ! Il ne faut plus boire que de l'eau en bouteille, je vous l'avais dit ! Allez, on va faire ce qu'il faut pour s'en débarrasser, vous allez voir. Au menu ce midi : soupe de riz ! Je ris doucement, incapable d'y mettre tout mon cœur, mais touchée par son attention. - Vous savez quoi, Astrid ? Vous allez me manquer quand votre mari va devoir partir.
La journée passa à une vitesse étourdissante. Astrid m'avait laissée devant les guichets et m'avait retrouvée pour le déjeuner. Comme promis, elle avait veillé à ce que je mange et boive ce qu'elle avait annoncé. Avant de la quitter, il m'avait fallu beaucoup de persuasion pour la convaincre que je pourrai rentrer par mes propres moyens. Heureusement, les transports se remettaient doucement en service, et je finis par emporter le morceau en parlant des courses qu'il allait me falloir faire. J'étais donc revenue chez moi à pied, ne souhaitant pas me retrouver parmi les gens, et appréciant la nuit tombant sur la ville. En ouvrant ma porte, je fus accueillie par une Nuit miaulante, qui semblait vouloir quelque chose. J'enlevai mon manteau avant de lui caresser la tête et de la voir s'élancer dans le couloir pour quelques allers-retours en mode Shinkansen. Un coup d'œil dans sa pièce me prouva qu'elle n'avait pas tout mangé, mais l'odeur de sa nourriture ne me rendit pas nauséeuse comme je l'avais craint. - Pourquoi ai-je hérité d'un chat hyperactif ? Tu voudrais pas être une bonne vieille pantouflarde, comme moi ? demandai-je en ouvrant la porte du séjour. Je souhaitais me changer avant de m'occuper de nous, mais je restai figée devant ce que je vis. Je savais à présent à quoi me faisait penser cette pièce : à mon appartement de célibataire de Strasbourg, avant ma colocation avec Lucie. Un peu d'impersonnalité et de froideur, des vêtements jetés au hasard, l'impression que personne n'attend. Sentant la nausée qui revenait, j'appelai Nuit qui batifolait sur le canapé avant de refermer la porte et de m'y adosser. Me reprendre, il me fallait me reprendre ! - Nuit, mon poussin, tu veux aller faire un tour dehors ? Elle me regarda un instant avant de reprendre sa course folle dans le couloir. Poussant un léger soupir, j'allai récupérer la laisse de la bestiole et me baissai pour la lui présenter. Elle miaula et voulut me sauter sur l'épaule. - Non non non, pas comme ça, ma puce. Je remets mon manteau, je t'attache, et on descend. Je mis mon programme à exécution et quelques minutes plus tard, j'arpentai les rues du quartier avec un chaton tour à tour curieux, inquiet ou tout fou qui m'entraînait à sa guise. Mon mal au cœur ne passait pas. Je me sentais presque étourdie et une boule dans ma gorge m'étouffait. J'avais l'impression que mes pas me menaient dans une direction que je ne voulais pas prendre, sauf que j'ignorais laquelle. Mais mes pieds refusaient d'obéir à ma tête qui me disait de retourner chez moi. Ils semblaient préférer me laisser descendre les rues. La gravité, sans doute. Je m'arrêtai brusquement en reconnaissant l'immeuble devant lequel je passais. Je compris pourquoi ma tête m'ordonnait de rentrer chez moi. Hors de question que je sonne. - Nuit ? appelai-je. On rentre. Je ne sus pas trop comment elle m'entendit, parce que je ne m'entendais pas moi-même. Ma voix me semblait coincée entre mes cordes vocales. Toujours est-il qu'elle revint vers moi en miaulant puis s'intéressa à quelque chose derrière moi et poursuivis son chemin. Je soupirai, fatiguée des lubies de mon chat. Me retournant, je voulus tirer doucement sur la laisse pour la ramener vers moi. - Cécile-chan ? Qu'est-ce que tu fabriques ici ?
*********************** ++Lucie++
14/03/2011 J’ai enfin pu parler à Cécile. Elle venait de rentrer chez elle et m’a paru crevée. Elle attendait de la visite alors nous avons rapidement raccroché. Mais elle m’a promis de me rappeler rapidement. J’espère quand même qu’elle n’est pas trop secouée par tout ça, Cécile est forte mais un chêne brise au lieu de plier. (…)
Refermant mon fichier et débranchant ma clé de l’ordinateur avant de l’éteindre pour partir travailler. Pour une fois, j’étais à la maison et j’allais y rester au moins une semaine. Dans le tram, sur le chemin des studios, je repensais aux différents coups de fils que j’avais reçus et passés ces derniers jours. J’avais appelé Masaki-kun hier et il m’avait raconté comment il avait vécu ces derniers jours. Il avait fait l’éloge du calme du Geek, et si je ne pouvais qu’admirer son sens de l’amitié, je ne pouvais pas pardonner ses actes de janvier. Arrivée au studio, je sursautai quand une main se posa sur mon épaule. - Salut Lucie. - Xavier ? Qu’est-ce-que tu fais ici ? Je t’ai laissé avant-hier à Montréal ! - Exact, mais si tu n’avais pas été aussi inquiète à propos du Japon, tu aurais sûrement réalisé que mon contrat là-bas se terminait et que j’avais décidé de rentrer en Europe. J’ai obtenu un poste ici… - Vraiment ? Cool ! Je sautai au cou de mon ami. Xavier et moi avions le même âge ou presque et, surtout nous avions fait toutes nos études ensembles. Nous étions aussi sortis ensemble quelques temps avant de rapidement nous rendre compte que nos sentiments étaient bien plus fraternels qu’amoureux. - Au fait, tu vas loger où entre deux missions à l’étranger ? - Pour l’instant, je squatte l’appartement de Matthias, mais il faut que je trouve autre chose, un deux-pièces, c’est vraiment trop petit pour nous deux. Matthias… Un mec sympa, bien qu’un peu collant, qui bossait ici depuis quelques mois et que j’avais rencontré à mon retour du Japon. S’il n’essayait pas à tout prix de sortir avec moi avec des techniques aussi subtiles que celles d’Aiba-chan et Nino réunies, je serais sûrement moins sur mes gardes. Après une journée tranquille, où j’avais aidé quelques artistes indépendants à enregistrer leurs maquettes, je rentrai chez moi. En faisant un tour dans la boîte aux lettres, je découvris une enveloppe en provenance du Japon. L’expéditeur était suffisamment incroyable pour que j’attende d’être installée dans mon canapé pour l’ouvrir fébrilement.
« Mademoiselle Bergevin, Nous avons bien reçu votre candidature spontanée à un éventuel poste d’ingénieur du son dans notre Compagnie. Votre profil nous intéresse et nous souhaiterions vous rencontrer. Merci de confirmer votre présence pour le 21 mars 2011 ou le 1er avril 2011. Merci d’appeler le secrétariat dont le numéro figure ci-dessus. Dans l’attente… etc... etc... »
Le courrier était signé au nom de Kitagawa. La Johnny Entertainement me proposait un poste. Je relus la lettre et vis ce que je n’avais pas aperçus à la première lecture. Le courrier était daté du 8 mars, avant le séisme, cette proposition était-elle toujours d’actualité ? Le plus simple était d’appeler dès demain pour en savoir plus. En attendant j’allais garder cette information pour moi.
Bon… si vous avez envie de laisser vos impressions… N’hésitez pas. | | | Dim 10 Nov - 12:09 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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Humeur : en plein jetlag
| On est dimanche et pour une fois je suis à l'heure!! Alors voilà, maintenant c’est l’heure du nouveau chapitre - Chapitre 24:
++Nino++
En entrant dans la loge qu’on nous avait attribuée ce matin à Odaiba, je découvris que j’étais le premier arrivé. Je m’assis pour sortir la DS de mon sac et la poser sur la table basse avant de m’étaler de tout mon long sur le canapé. J’avais mal dormi cette nuit, sans doute parce que c’était la première fois que je me retrouvais tout seul et dans mon appart depuis vendredi. Les deux premières nuits, j’avais squatté le pieu de J, la seconde parce que je préférais les cauchemars du benjamin aux ronflements de Sho qui était resté aussi cette nuit-là. Aiba était rentré avec Murakami, le manager en chef, qui était passé dans la soirée nous donner le programme de nos prochaines journées; à savoir, repos pour le dimanche et rendez-vous à la Jimusho lundi matin pour une réunion de crise. Au moment où il repartait, Masaki lui avait demandé s’il pouvait le déposer chez lui : sa ménagerie lui manquait. Teru était rentré chez lui un peu plus tôt avec la boule de poil, avant l’arrivée de Murakami-san. Quant à Riida, je m’étais aperçu de sa disparition quand Jun m’avait secoué plus tard car je m’étais assoupi sur le canapé. Sho avait regagné ses pénates dimanche en fin de matinée, et j’allais partager un taxi avec lui mais Jun m’avait retenu.
++ Flash-Back ++ - Kazu ? Y a quelque chose qui t’attend chez toi ? - A part d’éventuels dégâts, non pourquoi ? - Parce que ce serait plus simple qu’on aille ensemble demain à la Jimusho, non ? C’était un peu bizarre cette proposition, surtout parce que j’avais déjà squatté deux nuits. Mais j’étais moyennement motivé pour rentrer dans un appartement vide et dans un état dont j’ignorais à peu près tout, alors j’acceptai facilement. Je supposais que Jun n’avait pas forcément envie lui non plus de se retrouver seul alors que la terre tremblait encore par moment et que les coupures de courant préventives nous isolaient encore plus. Sho repartit donc tout seul et, alors que j’allais demander à mon ami pourquoi il m’avait fait cette proposition, il m’entraina vers sa chambre et mon sac que j’avais déposé là vendredi. - Dis-moi ? Comment ça se fait que t’aies eu un aussi gros sac avec toi vendredi ? - Parce que je devais m’absenter ce week-end et ne rentrer que mardi matin pour les enregistrements. - Je comprends mieux. Et tu comptais aller où ? Chez ta mère ? Non. Là-bas, t’as encore tes vieilles fringues… alors ? Tes projets ? - Si je te le dis, tu te fous pas de moi, d’accord ? - OK. - J’allais en France… - En France ? ++ Fin du Flash-Back ++
Je l’avais vu me regarder fixement un moment pendant lequel un sourire désagréable s’était lentement dessiné sur son visage. Au moment où j’allais reprendre mon sac et me casser, il m’avait retenu en me disant qu’il avait besoin de moi. J’avais quand même récupéré mes affaires pour squatter sa chambre d’ami. Nous avions passé l’après-midi à jouer aux cartes, ne rallumant la télévision qu’en début de soirée quand l’électricité était revenue. Le lendemain, nous avions eu une réunion pendant laquelle nous avions revu nos objectifs pour les semaines à venir. Les concerts de début de tournée allaient être annulés, le drama d’Aiba raccourci, et nos activités mises en pointillés pour les prochaines semaines. Là, nous avions protesté. Que les gens les plus touchés n’aient pas le cœur à rire, nous le comprenions, mais justement, nous étions là aussi pour leur redonner courage, alors la réunion qui devait être bouclée en une heure avait duré la journée. Notre emploi du temps s’était re-rempli, et si, pour des raisons financières, nous étions obligés d’annuler des concerts, nous avions toujours les salles et nous allions motiver nos fans pour aider ceux qui avaient subi le plus durement la catastrophe. Sur le chemin, Manager-san m’avait dit que mon planning aurait un trou début avril et que d’ici là les aéroports seraient sûrement rouverts, alors, si je le souhaitais, il pourrait reporter mon voyage à ce moment-là. Lucie…
- Ohayô Nino ! J’ouvris un œil et vis entrer Aiba et Jun. Aiba avait son air habituel, par contre, Jun… j’aurais pu jurer qu’il avait pleuré toute la nuit. Mais, quand je lui demandai si tout allait bien, il me renvoya face à un miroir en me disant que je n’avais pas l’air mieux que lui. Quand la Yama arriva à son tour, Sho s’enfonça dans un fauteuil et s’endormit sous son journal, preuve que les événements de ces derniers jours l’avaient aussi profondément marqué. Pour Riida, quelque chose avait changé, mais quoi ? Etrangement, il semblait être le plus réveillé de nous tous, malgré l’enthousiasme un peu sur-joué de Masaki. - Arashi-san ! Voici vos costumes et le déroulement de ce VS. Un assistant, suivi du staff costume, venait d’entrer dans la loge après avoir frappé. Enfin, je supposais qu’il avait frappé parce que je n’en avais pas eu réellement conscience.
************************ ++Jun++
Nous avions passé la journée à l'agence, à étudier les possibilités d'activités des prochaines semaines après avoir réglé les emplois du temps en fonction des blackouts et des diverses mesures prises sur la ville. Il était plus que probable que la tournée d'été soit annulée. Nous étions tous nerveusement fatigués par les répliques et l'ambiance qui régnait à Tokyo. Les informations, qui se voulaient rassurantes, nous inquiétaient malgré tout. Pourtant, j'avais trouvé Riida étrangement... à la fois plus reposé et plus épuisé que nous. Un peu comme s'il était déjà au printemps, alors que nous étions restés en hiver. Je repensais au Mannequin 5 en remontant ma rue. Pour une fois que j'avais une chance de ne pas finir sur le camion, les votes n'avaient plus pu se faire que par internet. Mais j'espérais bien, malgré tout, laisser la place de choix à l'un de mes collègues... En arrivant devant mon immeuble, je vis le manège d'une personne qui promenait son chat et semblait hésiter à entrer. A cause de l'obscurité, je ne la reconnus qu'en arrivant derrière elle. Mais que faisait-elle là, à presque dix heures du soir ? - Cécile-chan ? Qu'est-ce que tu fabriques ici ? Je la vis lever le nez et mettre quelques instants à me reconnaître. Je savais qu'elle promenait parfois sa bestiole en laisse dans le quartier, mais quand même, à cette heure-ci... - Teru est encore au boulot ? Ce type fait un sacré mari... Je me mordis la langue pour ne pas exprimer tout ce que je pensais de sa façon de ne pas s'inquiéter plus vite de l'absence de sa femme. Après tout, je ne les avais pas revus ensemble depuis la Saint-Valentin, et j'ignorais comment s'était passée leur vie commune depuis qu'il était venu la récupérer chez moi. Je me rendis compte, malgré tout, qu'elle avait eu un mouvement de recul lorsque j'avais parlé de lui. Qu'avait-il encore fait ? - Cécile-chan, tu n'as pas froid ? Cette veste m'a l'air bien légère pour la saison. Elle tendit les mains pour regarder ses bras mais ses yeux avaient l'air d'être perdus dans le vague. Et sa main lâcha la laisse du chat qui ne perdit pas de temps pour tenter une escapade. Je bloquai la lanière du pied avant de me pencher pour ramasser le tout, laisse et bestiole. Quand je me relevai, je constatai avec une légère inquiétude que la propriétaire de la boule de poil occupée à me mordiller les doigts avait toujours les bras tendus devant elle. Il était tard, et je ne risquais pas grand-chose à traîner dehors, ici, mais je commençais à avoir faim et froid. Au besoin, je pourrai toujours la raccompagner chez elle plus tard ou appeler Teru pour qu'il vienne la chercher. Je décidai donc de faire monter la jeune femme chez moi, ne serait-ce que pour m'assurer qu'elle allait bien ; parce que là, dans la pénombre, ce n'était pas l'impression qu'elle me donnait. - Viens avec moi, dis-je en lui attrapant le bras de ma main libre. J'ai pas envie de tenir salon ici. Elle ne résista pas vraiment, mais ne se laissa pas réellement faire non plus. Je lui collai son moteur dans les bras et lui pris les épaules pour la faire pivoter et la pousser vers l'entrée de mon immeuble. Une fois à l'intérieur, je vérifiai ma boîte aux lettres, vide, et appelai l'ascenseur. Je ne me voyais pas lui faire grimper les escaliers. - Cécile, j'ai faim, je vais me faire à manger. Tu voudras quelque chose ? Elle me regarda sans répondre. J'avais l'impression d'avoir un zombie près de moi. Je la traînai jusqu'à ma porte, la fis entrer, lui retirai ses chaussures et sa veste puis la poussai jusque dans ma cuisine où je la fis asseoir sur une chaise. J'avais largué le chat dans le couloir où il avait assez de place pour s'amuser. Je me lançai dans la préparation express d'un repas et, lorsqu'il n'y eut plus qu'à le laisser cuire, je me retournai vers mon invitée. Elle n'avait pas bougé et semblait plus ou moins grelottante. Je m'approchai d'elle et constatai qu'elle était frigorifiée. - Tu veux prendre une douche ? L'eau doit être chaude. N'obtenant aucune réponse, je décidai de la secouer un peu. - Oï ! Cécile ! Tu veux quand même pas que je t'accompagne sous la douche, ne ? Ou tu veux que j'appelle Teru maintenant ? Je ne savais pas ce qu'il s'était passé entre eux, mais manifestement, le prénom de son mari était la seule chose qui la faisait un minimum réagir, car elle se redressa sur sa chaise et me fixa d'un air... affolé. Comme un lapin dans les phares d'une voiture. - Dis, tu m'entends ? - Mmm... Oui... Désolée Jun, je suis fatiguée. - Je ne crois pas que ce soit juste de la fatigue. Mais passons. Tu sembles congelée, tu veux prendre une douche ? - Une... douche... ? Mmm... pourquoi... pas ? Je ne la connaissais pas beaucoup, la plus longue période où je l'avais vue était la semaine avant le mariage. Pourtant, elle ne me paraissait pas être du genre "lent à la détente". J'avais l'impression d'avoir son attention et en profitai pour pousser mon avantage. - Je te proposerai bien un bain, mais avec les restrictions, je ne suis pas convaincu que ce soit faisable. Tu te sens capable de prendre une douche toute seule ? Elle hocha la tête après un instant de réflexion. Je lui tendis la main et l'emmenai dans la salle de bain après avoir éteint le feu. Je lui indiquai la douche et m'esquivai vers ma chambre où je pris pour elle une serviette, un pantalon de jogging et un grand t-shirt, souvenir d'un des voyages d'Aiba. Je savais qu'une couverture traînait sur le canapé, je la ferai s'y enrouler après lui avoir fait avaler quelque chose. Je revins dans la salle de bain, m'adossant à la demie-cloison de la douche. - J'entre pas, je te regarde pas, mais je préfère rester là. Tu m'as l'air totalement out. Pas envie que tu t'endormes en vidant mon ballon. Si je la mordais, elle devait réagir, non ? - Ok. Je fus tenté de me retourner immédiatement. C'était quoi, cette approbation ? - Cécile... Un bras se présenta sur ma droite. - Tu as parlé d'une serviette... Sa voix me parut plus affirmée. La douche avait dû lui faire du bien. - Tiens. Je la vis se planter devant moi, enroulée dans le drap de bain. - Excuse-moi, mais j'aimerais me rhabiller. Je sais bien que je ne te fais aucun effet, mais ta salle de bain n'est pas immense. Je lui pris le menton pour vérifier son regard. Ses yeux brillaient d'une présence que je n'y avais pas vue cinq minutes plus tôt. - Ok, on échange nos places, je file sous la douche. Elle recula dans l'autre partie de la pièce le temps que je me débarrasse de mes vêtements, puis je me mis sous le jet tandis qu'elle passait du côté lavabo. Quand je sortis pour attraper ma serviette, je vis qu'elle s'était adossée au mur de séparation et ne me regardait même pas. - Tu sais que certaines fans tueraient pour être à ta place ? - Je ne suis pas une de vos fans, Jun. Tu es un beau mec, c'est vrai, mais tu n'es pas le seul, et je peux même dire que de vous cinq, ce n'est pas toi que je trouve le plus beau. Et prends-toi ça dans les dents, Matsujun ! J'avais eu l'occasion de constater qu'elle n'était pas méchante, mais il y avait quelque chose de l'attitude pachydermique de Teru dans ses réactions, parfois. Alors qu'à d'autres moments, elle pouvait être pleine de retenue et de pudeur. Cette fille était quasi incompréhensible pour moi. Enfin, ça voulait dire qu'il y avait encore quelque chose de vivant et naturel derrière la façade figée qu'elle m'avait montrée depuis que je l'avais trouvée devant chez moi. - Ravi de ne pas te plaire. Vue notre promiscuité actuelle, c'était certainement une bonne chose, mais il n'empêchait que je me sentais vexé. Combien d'hommes comme moi, avait-elle pu approcher dans sa vie pour faire la fine bouche ? A moins qu'elle ne soit du genre à ne pas regarder ailleurs depuis qu'elle était mariée ? Décidant de mettre ma fierté de côté, je nous fis sortir de la salle de bain et lui indiquai la cuisine avant d'aller m'habiller dans ma chambre. Quand je revins près de mes fourneaux, je constatai qu'elle s'était rassise à table avec son chat sur les genoux. Je nous servis deux bols de riz au curry et m'assis en face d'elle. - Tu n'as pas faim ? Je croyais que ton appétit était indestructible ? - Je... je ne sais... pas. - Eh bien, mange alors ! Il lui fallut dix minutes pour manger la moitié de son bol. Je m'étais resservi entretemps. J'hésitai un instant avant de lui prendre la cuillère des mains et de la nourrir. Sa réaction m'inquiéta : elle se laissait faire et ouvrait docilement la bouche. Mais ses joues ressemblaient à celles des hamsters. - Cécile-chan, mâche et avale ! C'est meilleur chaud. - Mmm. J'avais de nouveau l'impression qu'elle était lobotomisée. Même son chat la regardait avec ce qui pouvait ressembler à de la perplexité. Arrivé au bout du bol, je renonçai à lui en servir un autre et l'emmenai dans le séjour. - J'ai pas spécialement envie de ressortir, et je suppose que Teru n'est pas chez vous ? A nouveau ce regard étrange, comme de la peur. Ou... de la douleur ? - Bien ! Cécile, il est tard et j'ai pas envie de jouer aux devinettes. Alors je te propose le canapé. J'ai un rendez-vous boulot prévu demain dans la matinée, mais je t'obligerai pas à te lever si tu veux rester dormir. Je te passerai un double des clés. Et si jamais tu te réveilles avant moi et que tu as faim, tu peux utiliser la cuisine. Ça te va ? Elle commença à hocher la tête sans conviction. Et la terre trembla encore une fois. Moins fort que vendredi, mais suffisamment pour qu'on le sente bien. Mes réflexes jouèrent ; pourtant, en lui jetant un coup d'œil pour vérifier qu'elle savait quoi faire, je constatai qu'elle semblait tétanisée. Et ce que je lus dans ses yeux cette fois était clairement de la peur. Je tendis le bras pour lui prendre la main et ce geste la fit réagir. Je me retrouvai avec un koala cramponné à moi de toutes ses forces. Elle m'avait agrippé si vite qu'elle m'avait presque fait tomber. Heureusement, le séisme était fini et je pus reprendre mon équilibre. Je me retrouvai donc avec sa tête dans le creux de mon épaule et ses bras autour de mon torse. Elle me serrait tellement que j'avais du mal à respirer. - Cécile-chan, fis-je en tentant de lui faire relâcher un peu son étreinte, c'est fini, tout va bien. Je passai la main sur ses épaules et y sentis une tension qui me sembla bien trop forte. Ne sachant pas trop comment lui faire lâcher prise, je frottai doucement ses omoplates avec des mouvements circulaires. Elle parut se calmer peu à peu, mais refusait toujours de s'écarter de moi. - Est-ce que tu m'entends ? Est-ce que tu comprends ce que je te dis ? Elle respirait fort contre moi, mais je n'avais pas l'impression qu'elle me prêtait la moindre attention. Je pouvais comprendre qu'elle ait été choquée par les précédents séismes, surtout que, si je me souvenais bien, ce n'était pas courant dans son pays, et si elle avait réagi comme ça à chaque fois ces derniers jours, elle devait être à bout de nerfs. Mais cette fois, j'étais là, non ? Pourquoi craquait-elle de cette... Un souvenir me traversa l'esprit. Teru, debout dans le salon de Fukuoka, expliquant qu'elle était du genre de Sho, "pression qui monte et soupape qui explose". La pression était montée ces derniers jours, et la soupape venait d'exploser dans mes bras. Je poussai un soupir aussi profond qu'elle me le permettait et pris une décision. Je ne pouvais pas rester là toute la nuit. J'étais moi-même épuisé, mes yeux n'avaient qu'une envie, se fermer et me laisser m'endormir. Et puis, ce ne serait pas la première fois, ne ? Je ne pensais pas que Teru lui en voudrait d'avoir dormi contre un homme comme moi. Et si jamais ça arrivait, je lui expliquerais ce que je pensais de sa façon de passer sa nuit de noce. - Cécile, tu peux marcher ? Tu veux bien me lâcher un peu ? Promis, après tu pourras me serrer autant que tu voudras. Mais je voudrais récupérer Nuit. Tu sais, ton chat ? - Nuit ? Ça ressemblait à un miaulement. Mais elle s'écarta un peu de mon épaule. - Oui, Nuit. C'est bien comme ça que tu l'appelles, non ? Il est en train de prendre mon canapé pour un trampoline. Elle ne bougea pas mais me laissa m'éloigner d'elle. J'attrapai la bestiole, qui n'avait pas l'air tout à fait d'accord, et pris la main de sa maîtresse. Emmenant les deux dans le couloir, j'en fermai les portes avant de relâcher la boule de poil. - Voilà ton domaine pour cette nuit. Ça devrait limiter les dégâts. Puis je nous dirigeai vers ma chambre. Cécile suivait docilement, sa main mollement accrochée à la mienne. Je m'assurai que le chat ne nous suivait pas et je refermai la porte, puis je menai la jeune femme vers le lit où je l'assis sur le bord. - Allonge-toi pendant que je ferme les volets. Je fis le tour du lit en poursuivant dans l'espoir de la faire réagir ne serait-ce qu'un tout petit peu. - Tu sais qu'un autre en profiterait sûrement ? Je pourrais te faire ce que je veux, ne ? Enfin, t'as de la chance que ce soit moi et pas Nino. "Même si on dirait qu'il commence à changer, de ce côté-là..." J'étais revenu vers mon côté du lit où je me glissai sous la couette. Elle n'avait pas bougé. Je lui pris le coude pour l'obliger à se coucher et la couvris. Je tendais le bras de mon côté pour éteindre la lumière quand je la sentis se coller à moi. Surpris, j'interrompis mon geste. - Fais-moi ce que tu veux, si c'est ce que tu veux. Là, j'avais dépassé la surprise. Qu'est-ce qu'elle racontait maintenant ? - Ça va pas non ? T'es une femme ! - Imagine que je suis Satoshi... J'hésitai entre sauter hors de mon lit ou éclater de rire. Mais un rire jaune. - T'as fini de raconter n'importe quoi ? - Pardon... Elle s'éloigna un peu et se recroquevilla sur elle-même. J'avais vraiment envie de dormir. Mais quelque chose dans ce dernier mot m'empêcha d'éteindre la lumière. Je me redressai sur un coude et lui mis la main sur l'épaule. - Cécile-chan, qu'est-ce que tu as ? Son corps s'était durci sous mon geste, avant de se détendre pendant qu'elle murmurait quelque chose que je ne compris pas. - Quoi ? Elle se tourna vers moi et je vis les larmes qui bordaient ses yeux. Ma main se posa malgré moi sur sa joue. - ...choisi... Il l'a choisi. Je ne comprenais pas. De quoi parlait-elle ? Elle se rapprocha de moi, m'étreignant à nouveau et me déséquilibrant. J'essayai tant bien que mal de dégager mon bras et la serrai contre moi. J'avais l'impression que ses larmes ne coulaient pas. - Cécile... de quoi tu parles ? Pendant un long moment, il n'y eut que le silence pour me répondre. Les seuls bruits de la pièce provenaient de ma respiration contrainte. Puis elle tourna légèrement la tête, dégageant une partie de son visage tout en restant collée à mon torse. Je passai à nouveau ma main sur sa joue. - Cécile ? demandai-je tout bas. - Pardon, dit-elle enfin. Je te demande pardon. Ne voyant pas ce que je pouvais bien avoir à lui pardonner, en dehors du fait qu'elle m'écrasait les côtes, je ne répondis pas. - Je n'ai pas vraiment dormi depuis... depuis samedi, je crois. Je suis à bout. Pardon. Mmm, oui, ça, ça devait l'explication pour son attitude totalement hors norme. Qu'elle réagisse avec retard, qu'elle ne réponde pas aux questions et ne se rende pas compte qu'elle avait froid ou faim, si elle n'avait pas dormi, ça pouvait s'expliquer. Mais, depuis samedi ? Teru avait-il oublié de rentrer hier aussi ? Il avait pourtant dit qu'il serait là quand elle reviendrait. Qu'est-ce que cet abruti avait encore fabriqué ? Ç'aurait dû être son rôle, de la prendre dans ses bras et de la rassurer, non ? Même si, comme il nous l'avait dit samedi, elle était forte et plus solide que lui. Personne n'est si fort qu'il peut se passer de quelqu'un sur qui s'appuyer. Quand Toshi m'avait quitté, je m'étais bien appuyé sur Nino. Et Sho m'avait récupéré dans un bar. Et même... j'avais même atterri chez elle... Où elle m'avait laissé pleurer toute la nuit. - Cécile... Si tu as besoin de pleurer, vas-y. Te gêne pas pour moi. Mon T-shirt est très absorbant. Pourquoi ne pouvais-je m'empêcher de sortir de telles âneries ? Espérais-je la faire rire un peu pour qu'elle se détende un minimum ? Peut-être. En tout cas, le résultat obtenu ne fut pas celui escompté. Elle resserra encore sa prise, comme si elle voulait se cacher en moi. Et son visage re-disparut contre mon torse. Etait-ce la lumière qui la gênait ? Elle ne voulait pas que je la vois comme ça ? En étendant le bras pour éteindre la lampe, je me rappelai des premiers mots qu'elle avait dit après m'avoir demandé pardon. Et au lieu d'appuyer sur le bouton, mes doigts passèrent dans ses cheveux à moitié défaits. - Cécile, c'est quoi cette histoire de choix ? Qui a choisi ? Elle ne répondit pas, mais son corps le fit pour elle en tressaillant. - Cécile... appelai-je en tentant de lui redresser la tête. Et je sentis tout à la fois son corps se détendre, sa respiration se saccader et des gémissements s'échapper de sa poitrine alors que mon fameux T-shirt absorbant se retrouvait inondé de larmes. Elle pleurait enfin. Comme une petite fille dont le chagrin lui déchirait le cœur. Elle avait dû retenir ses sanglots bien longtemps pour qu'ils la submergent ainsi. Je ne savais pas quoi faire, alors je ne fis rien, la laissant soulager ce que j'imaginai être une douleur sans nom. Peut-être qu'il n'y avait rien derrière ça. Rien d'autre que des nerfs fatigués par une trop longue veille et les caprices de la terre. Mais, même ce rien avait le droit d'être exprimé. Et après avoir mêlé nos larmes la nuit du mariage, je ne pouvais pas croire qu'il n'y avait aucune raison à ces torrents qu'elle déversait contre mon épaule. Elle pleura longtemps. Je ne voulais pas la laisser seule, mais mon corps éreinté m'avait trahi plusieurs fois, me faisant somnoler malgré moi. Quand elle se calma enfin, je me réveillai un peu en sursaut. Ma main était restée dans ses cheveux et ses bras étaient toujours autour de moi. Je sentais déjà que j'aurai de sacrées courbatures au moment de me lever demain... je jetai un coup d'œil au réveil... ce matin, je me levai ce matin ! Enfin, il était déjà trois heures bien passées, le jour n'était plus très loin. Je voulus m'étirer un peu, mais ce faisant, une légère plainte m'échappa. Et je vis sa tête se relever doucement, avant que son regard n'accroche le mien. Je sentis ses bras tenter de se retirer, mais ils ne pouvaient se dégager alors que j'étais allongé dessus. Et même une fois que j'eus réussi à me soulever un peu du matelas, elle sembla avoir du mal à les ramener vers elle. - Ankylosée ? - Mm ? fit-elle en me lançant un regard rougi et plus ou moins perdu. Je l'aidai à faire passer ses mains devant moi et me reposai sur le lit. Oh oui, j'allais avoir mal en me levant. Mais elle semblait un peu plus calme. J'hésitai sur quoi faire maintenant. La tenir contre moi en silence ou lui demander de m'expliquer ? - Pardon. Encore ? C'était pour quoi cette fois ? - Je t'ai fait mal au dos ? Je suis désolée. Je sais pourtant combien c'est désagréable. Je... Elle se tut quand ma main se posa sur sa joue puis glissa vers ses cheveux que je repoussai pour mieux voir son visage. Les larmes avaient séché mais leurs chemins dessinaient un vaste réseau. - Cécile... Tu... tu n'as pas dormi à Nagano ? C'était quoi cette question ? Depuis quand je prenais des gants moi ? Enfin, l'info m'intéressait quand même. Et puis... peut-être qu'il fallait l'aborder de manière détournée pour qu'elle parle. - Samedi matin... vers... 4 heures je crois, ça a tremblé. On a su après que l'épicentre était plus proche que les autres. Les femmes que j'accompagnais étaient terrorisées. Pas toutes, mais bon... On a essayé de les calmer, mais à force d'absorber leurs angoisses, j'ai fini par ne pas réussir à m'en débarrasser. Ça faisait trop. Et tant qu'on n'était pas rentrées à Tokyo, qu'on n'était pas sûres que nos familles allaient bien, c'était très tendu. Je comprenais un peu mieux. Mais... Bon, c'était décidé, je mettrai les pieds dans le plat. - Teru nous avait dit qu'il serait là à ton retour. Pourquoi il ne t'a pas aidée ? Je sentis ses poings se serrer contre mon torse. Ne me dites pas que... - Il était là quand je suis rentrée hier. Mais je ne lui ai pas demandé. Elle avait tourné son visage dans l'oreiller, et je me demandai un instant si je connaîtrais la suite. Puis elle rouvrit les poings et me regarda à nouveau. - Pardon Jun, j'ai trop d'orgueil, j'aime pas me montrer si faible. Je... Elle s'interrompit. J'éteignis la lumière, l'attirai contre moi et lui caressai la tête. - Personne ne te regarde là. Tu peux parler, dire tout ce que tu as à dire. Elle hésita un instant et je sentis ses mains se poser sur mon T-shirt. Quelque chose me semblait bizarre. J'avais l'impression qu'elle voulait... me rassurer ? Ou... me consoler ? Alors, j'aurais deviné juste ? Non ! Non, je ne voulais pas ! Si c'était vrai, je n'aurais vraiment plus aucun espoir. - Pardon Jun. Je... je n'ai jamais su... retenir les gens qui ne voulaient pas rester... J'avais cessé de bouger, bloquant même ma respiration, attendant qu'elle prononce les mots qui m'achèveraient. - Teru a choisi Satoshi. Il... Il est parti... vivre chez lui... Je sentis quelque chose exploser puis se désagréger. Les morceaux de mon cœur, que j'avais tenté de rassembler et de recoller depuis que Toshi m'avait quitté, venaient de se réduire en miettes. Je me sentais vide, écœuré au sens propre. Et je me mis à pleurer. Sans doute autant que lorsque Toshi avait passé la porte de mon appartement pour la dernière fois. Je ne savais pas depuis combien de temps je pleurais lorsque je revins à ce qui m'entourait. J'avais mal, vraiment. Mais je réalisai que la douleur était plus physique qu'intérieure, cette fois. Et bizarrement localisée dans les épaules et les bras. C'est en relâchant la tension que je me rendis compte que j'avais serré Cécile à l'étouffer. Mais, si elle s'en était plainte, je n'avais rien entendu. - Cécile-chan... - Pardon Jun, me dit-elle d'une voix humide. J'aurais dû... - Chhh... J'ai essayé avant toi. Ça n'a pas été plus efficace, tu vois... Je la gardai dans mes bras mais j'eus l'impression que c'était elle qui me tenait. Nous en étions là, parce que j'avais tenté de et réussi à séduire un homme qui était tombé, sans s'en rendre compte, sous le charme d'un autre. Si je les avais laissés s'approcher à l'époque, s'ils avaient succombé à leurs désirs, quelles seraient nos vies à l'heure actuelle ? Oserai-je en parler un jour à cette femme dont je ne savais plus trop si je la consolais ou si je pleurais dans ses bras ?
************************ ++Cécile++
Quand je repris conscience, de moi et de ce qui m'entourait, j'étais dans les bras très chauds et très serrés d'un homme transformé en fontaine dormante. Je ne le voyais pas, mais je sentais sa respiration pleine de sanglots. J'avais fini par lui dire ce qui avait bouleversé ma vie. J'avais... Pour ne pas plonger dans l'auto apitoiement, je préférai me détacher de la scène, et venir la regarder d'un œil extérieur. Une femme, abandonnée par son mari pour un autre homme, avait passé sa nuit à pleurer dans les bras d'un homme abandonné par son petit-ami. Cherchez l'erreur. Quoique, en même temps, c'était sûrement les bras les moins dangereux qu'elle pouvait trouver. Un homme qui ne chercherait pas à obtenir d'elle ce qu'elle était incapable de donner, qui se contenterait d'être là. Si nos rapports n'avaient pas si mal commencé, je pensais que Jun aurait pu être un ami agaçant et moqueur, mais rassurant. Et pas ambigu. Et tandis que je laissais mes pensées dériver ainsi, je ne pris pas conscience que les mains qui me tenaient, s'étaient mises à plat dans mon dos et que l'une d'elle était venue caresser doucement ma nuque. Ce fut quand elle vint écarter une mèche de cheveux de mon visage que je réalisai que le jour qui s'était levé, éclairait indirectement la chambre et que l'homme contre qui je somnolais s'était réveillé. - Tu veux encore dormir ou te lever ? demanda-t-il quand il vit que je le regardais. - Il est quelle heure ? - Dans les sept ou huit heures. Je voulais encore un peu de sa chaleur. Elle était si consolante. Mais rester ainsi toute la journée était impossible, n'est-ce pas ? - Me lever. Nuit doit avoir faim, et j'ai un certain nombre de choses à faire. En commençant par rentrer chez moi... - Ok. Jun nous prépara un petit-déjeuner rapide, puis nous nous apprêtâmes à sortir. - Cécile-chan ? Tes mouvements ralentissent. Et c'est la deuxième fois que tu lâches la laisse de ton chat alors qu'on n'est pas encore sortis. Tu es sûre que ça va aller ? Vraiment ? Je ne m'en rendais même pas compte. - Euh... - C'est quoi le problème ? Tu n'as pas assez dormi ? Tu veux rester encore ? Ça ne me dérange pas, tu sais. Je vis qu'il m'observait avec attention. Je remarquai à ce moment qu'il avait les yeux légèrement enflés. - Tu vas faire des photos avec cette tête ? - Je ne fais pas des shoots tous les jours. Tu ne veux pas rentrer chez toi ? - NON ! J'étais aussi surprise que lui par le cri que j'avais poussé. Il soupira et m'emmena dans son salon. - Reste là. Je peux pas t'accompagner chez toi tout de suite, mais tu peux rester chez moi pour le moment. Quand je rentrerai, je viendrai avec toi, promis. Je te laisse mon double, si jamais tu veux sortir. Et je t'enverrai un mail pour te dire que je rentre. - Je n'ai plus de téléphone. - J'appellerai sur mon fixe alors. Et si tu ne réponds pas, c'est que tu seras sortie. Donc au besoin, je t'attendrai ici, une fois rentré. Je sentis sa main sur ma joue écraser une larme que j'ignorais s'y trouver. - Ne te force pas. Pas tout de suite. Prends ton temps. A tout à l'heure. Quand la porte se ferma, je me recroquevillai sur moi-même. Il s'écoula un temps incertain avant que je ne me réveille, allongée sur son canapé, un moteur ronronnant sur ma poitrine qui m'offrit un doux miaulement en me voyant ouvrir les yeux.
(...)
Il était rentré et m'avait retrouvée chez lui. J'avais pourtant pensé que ma balade jusqu'à l'ambassade aurait pris plus de temps que sa réunion... Comme il me l'avait promis le matin, il m'accompagna à la maison. Il s'était déguisé avec une perruque et une fausse moustache qui tiraient vers le roux. J'avais éclaté de rire en le voyant sortir de sa chambre ainsi, et il avait souri avant que je ne commente ma réaction. - Grognon s'est transformé en Poil-de-Carotte. T'es mimi comme ça... - Fais attention toi ! Je vais te trouver un surnom aussi, si tu continues ! - "Sale peste" est refusé ! - Je choisirai moi-même !
Ce gars devait avoir un sixième sens, parce qu'il m'avait forcée à avaler quelque chose avant qu'on ne ressorte. Et effectivement, je n'avais rien mangé depuis le matin. Je n'y avais pas pensé. - Ce n'est pas te laisser mourir de faim qui fera avancer les choses, me glissa-t-il alors que nous remontions les rues. - T'es pas ma mère ! Et tu sais, même si tu as un vague air de ressemblance avec Benjamin coiffé comme ça, un frère et une sœur se tiennent rarement la main de cette façon. - Je ne tiens pas ta main mais la laisse du chat. - Prends-la dans ce cas, je me sentirai moins mal à l'aise. Nuit finit sa promenade sur l'épaule de mon escorte qu'elle ne quitta qu'une fois dans l'appartement. Elle semblait heureuse de retrouver ses jouets et ses repères. Pour ma part, une fois le manteau enlevé, je restai figée devant la porte du salon avant de faire demi-tour, d'attraper, non pas le trousseau de clé laissé par Teru, mais le triple pour invités, et de le tendre à Jun. Il le prit mais me retint quand je fis mine de reprendre mon manteau. - Non Cécile-chan. Tu peux pas passer ta vie à fuir cet appart. Je suis venu pour ça, alors on va l'explorer et chasser tout ce qui pourrait te rendre malade. Et s'il faut te tenir la main ou te donner un coup de pied au derrière pour ça, je le ferai. - Bourreau ! essayai-je de protester. - M'en fous. Les autres m'appellent DoS, alors le reste, tu sais... Il fit comme il avait dit. La cuisine et la pièce à tatami étaient déjà mon domaine, il n'y avait eu aucun problème. Dans le séjour, il avait ramassé mes vêtements et nous avions changé la disposition des meubles. Ça faisait plus intime, plus amical. Ce garçon avait un coup d'œil intéressant. En déplaçant la vidéothèque, j'avais fait tomber quelques dvd, et j'en avais ramassé un qui m'avait rappelé des souvenirs. - Qu'est-ce que c'est ? Il avait posé son menton sur mon épaule et regardait la pochette. - Il y a longtemps, un très bon ami à moi a été quitté par la fille avec qui il comptait se fiancer. Nous avons passé des heures au téléphone, lui à pleurer, moi à l'écouter. Quand je suis revenue en vacances après la fin de l'année scolaire, je suis allée le voir et, pour lui changer les idées, on a décidé de se regarder un film. Il a voulu voir "quelque chose qui lui permette de pleurer pour une belle histoire d'amour". Et on a fini par tomber sur "Ever After". On a usé ce dvd en le regardant tous les jours pendant une semaine. Et il me l'a donné le jour où il s'est marié. - Ever After ? Jamais vu. Ça raconte quoi ? - L'histoire de Cendrillon. - On le regardera tout à l'heure ? Je vérifiai sous la pochette. - C'est en VO, c'est-à-dire en anglais, et sous-titré en français. Ça t'ira ? On peut aussi mettre la version française, si tu veux. - La première fois, je comprendrai mieux en anglais. Après, je le regarderai volontiers dans ta langue. Je reposai le boîtier lorsque je saisis ce qu'il sous-entendait. Nous le regarderions plusieurs fois ? Ce serait MA cure cette fois-ci ? Je ne savais pas si ce serait aussi efficace. Et je voulus lui dire quand il prit ma main pour m'entraîner vers LA pièce où je n'avais pas voulu mettre les pieds depuis le 10. - Jun ! Non ! Pas maintenant, s'il te plaît ! Sans m'écouter, il ouvrit la porte et me poussa dans la chambre. - Regarde-la, Cécile-chan. C'est ta chambre. C'est là où tu vas dormir, où il y a tes affaires, et ton lit. - Son lit. - TON lit ! Et j'y ai aussi dormi avec toi ! Je secouai la tête, incapable d'ouvrir les yeux. Et me trouvant ridicule au possible. - Cécile-chan, il a laissé les portes de l'armoire ouvertes. Je ne vois aucun habit d'homme. J'entrouvris un œil et vérifiai qu'il disait vrai. Je ne savais pas si c'était une bonne ou une mauvaise chose. - C'est bien de sa part de ne pas t'imposer des vestiges de lui ici. Regarde et dis-moi si tu vois autre chose ? Je l'enlèverai. - Pourquoi tu fais ça, Jun ? Il garda le silence un moment avant de répondre. - Peut-être pour tenter de faire oublier que, tout ça, est ma faute. - Comment ça ? Je le regardai, étonnée, et il me fit asseoir. - J'ai toujours eu les yeux fixés sur Toshi, même avant de savoir pourquoi. Et quand Sho nous a présenté Teru, j'ai vu tout de suite le cœur de Riida faire des bonds. Alors, j'ai fait tout ce que j'ai pu pour l'avoir pour moi. Si... Si je n'avais pas fait ça, Teru et lui se seraient sûrement mis ensemble à l'époque. ...Et tu n'aurais pas eu à souffrir à cause d'eux. Il avait la tête baissée, et j'entendais ses larmes. Je lui pris la main. - Ça se trouve, ils n’auraient pas osé s'approcher. - On n'en sait rien ! Et on ne le saura jamais. Parce que j'ai été trop égoïste... - Jun... Tu l'aimais, non ? Me concentrer sur les histoires des autres m'avait toujours permis de distancier les miennes... - Quand on aime, on n'empêche pas l'autre d'être heureux. - Ils auraient été heureux ? Je n'en suis pas si sûre. Depuis quand Satoshi assume-t-il son homosexualité ? - Depuis toujours. Il le cache à cause de la JE, c'est tout. - Et il a fallu un tremblement de terre à Teruki pour oser le dire à quelqu'un avec qui il a partagé son lit. Ça devait être pire il y a dix ans. Ils n'auraient jamais pu se mettre ensemble. Et... et tu t'en doutais, n'est-ce pas ? Il baissa la tête davantage et j'y vis un acquiescement. - Tu l'as fait par amour. Le résultat n'est pas forcément agréable pour moi, mais je ne te reprocherai jamais de l'avoir aimé comme ça, je te le jure. Je ne réalisai qu'à ce moment-là que j'étais assise sur notre lit. Je sentis mon cœur se soulever lentement et ma main se crispa sur celle de Jun. - Cécile-chan ? - Sors-moi d'ici. S'il te plait ! J'avais la main devant la bouche et les larmes aux yeux. Il m'attira vers le séjour et m'installa dans le canapé. - Va falloir que tu surmontes ça, Cécile. Je l'ai fait, tu vas y arriver. J'avais envie de le croire. Quelque part en moi, une petite voix me disait même qu'il avait raison. - Donne-moi une seule bonne raison de dormir dans ce lit. - Il est presque neuf. - Y a des tas de gens à qui il ferait plaisir. - Si tu passes la nuit dans ton lit, tu pourrais bien m'y trouver de temps à autre le matin. Je faillis lui dire que c'était pas vraiment mon idée d'un réveil plaisant, mais sa main qui tenait toujours la mienne s'était légèrement crispée tandis qu'il parlait, et je compris que s'il faisait ça, c'était tout autant pour lui que pour moi. - A une condition alors. - Laquelle ? - Que je puisse moi aussi débarquer n'importe quand chez toi. - Et, si je suis pas seul ? - Pardon ? Il tourna la tête en levant le nez. L'image même de la fierté ridicule. - J'ai du succès, moi, chère Môdame, dit-il avec emphase avant de revenir à une attitude plus normale. Mais t'en fais pas, ça risque pas d'arriver. La politique de Nino est bonne : il ne ramène jamais de fille chez lui, même quand c'est une histoire un peu sérieuse. J'en ferai autant. - Jamais de fille chez toi ? demandai-je un peu moqueuse. - Nan, jamais d'autres mecs que ceux d'Arashi. Et je couche plus avec mes amis. Trop compliqué. Je voulus rire, mais ce furent des larmes qui m'échappèrent. - Hey ! Tu fais la forte, mais en fait, tu n'es qu'une délicate petite princesse... - Chuis pas une princesse ! - Oh ! si t'en es une. Tu te comportes comme telle ! - T'as besoin d'être désagréable ? - Si ça peut te faire sourire... Je voulus lui tirer la langue, mais il ne m'en laissa pas le temps. - Alors, on se le regarde, ce film ? Et après, on ira dormir dans ton lit. - Jun... - Quoi ? Oh ! la princesse souhaite que les draps soient changés ? Oui, je comprends ça. Qu'elle me dise juste où j'en trouverai des propres. - Jun! T'es infernal!
************************ ++Ohno++
Maintenant que Teru avait proprement quitté Cécile pour moi, je devais le dire à Jun. Non pas que je lui devais encore quelque chose, mais je sentais bien qu’il n’avait toujours pas tiré un trait définitif sur notre histoire. Et c’était en partie à cause de la valse-hésitation de Teru qui avait pu lui donner de faux espoirs. Après notre entretien avec Cécile-chan, j’avais annoncé à Teru que je ne voulais pas cacher notre relation à Jun et il avait accepté ma décision. Mais hier, je n’avais pas réussi à coincer Jun ne serait-ce qu’une minute pour lui donner rendez-vous. Quand j’avais fini, il était toujours en réunion et je ne pouvais pas l’attendre puisque Matsuura-san m’avait proposé de me raccompagner ce matin et que j’avais accepté. Avant de partir, je laissais cependant un mot en évidence sur les affaires de Jun lui demandant de m’accorder un moment en tête à tête aujourd’hui ou dans les jours prochains. Aussi quand j’entrai dans notre loge ce matin, il fut la première personne que je recherchai. Il était assis, la DS de Nino entre les mains et la tête de ce dernier sur ses cuisses. Il me jeta un rapide coup d’œil avant de replonger dans son jeu, mais ce fut suffisant pour que je remarque sa fatigue. Quand le staff entra, je parvins à l’approcher, il me jeta un « après l’enregistrement » fatigué et secoua son meilleur ami qui semblait lui aussi avoir passé une mauvaise nuit. L’enregistrement s’était bien déroulé, et tout notre groupe s’était dispersé. Il ne restait plus que nous deux dans la loge. Je m’étais installé sur l’une des chaises qui encadraient la table de travail et une fois qu’il eut fini de se préparer, il s’installa en face de moi. - Alors ? Tu veux me dire quoi ? Son ton était agressif même si j’y reconnus un accent de désespoir. Je pris une profonde inspiration. - Pardon Jun. Pardon… et merci. Je n’avais jamais aimé utiliser les mots pour m’exprimer. Et cette fois-ci, j’aurais bien aimé que Jun n’attende pas de grandes explications ; mais il voulait autre chose, je pouvais le lire dans son regard. Devant mon silence, il prit la parole. - Pardon ? Merci ? Pour quoi ? Pour qui ? La dernière fois, tu… - …J’avais tort. Je l’ai compris, même s’il m’a fallu du temps… surtout pour l’admettre. Merci Jun pour avoir endossé le mauvais rôle, pardon pour ce que j’ai dit l’autre fois… et… Pardon. … Pardon parce que… je vais encore te blesser mais je veux te dire que… - Oui ? Sa voix était douce cette fois, un peu résignée. - Teru vit avec moi… Seul le silence me répondit, Jun me regardait mais ne me disait rien. Soudain, j’eus peur ; le choc avait-il été trop important ? - Jun ? Teru a quitté Cécile pour vivre avec moi, tu as compris ? - … oui… Ses yeux étaient noyés mais il les frotta et reprit tout bas. - … merci… de me l’avoir dit. Merci Riida. Tu seras toujours l’homme de ma vie alors sois heureux. Il se leva de sa chaise et se dirigea vers la porte. - Jun ? Ça va ? - Oui Riida, ça va. Enfin, ça ira. Excuse-moi… mais… j’ai un rendez-vous. A demain… Il me sourit avant de refermer la porte. Je la regardai un moment avant de me secouer. J’avais fait ce que je devais. Maintenant Teru et moi allions pouvoir aller de l’avant la conscience en paix vis-à-vis de nos moitiés, pardon de nos ex-moitiés.
A la semaine prochaine.... | | | Dim 17 Nov - 7:54 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| En ce beau dimanche, voici un nouveau chapitre de Jinsei. Dès que je serai chez moi je pourrais ajouter une photo prise aujourd'hui si vous voulez Allez, sans plus attendre et pour ne pas trop vous spoiler voici le nouveau chapitre - Chapitre 25:
++Jun++
Je dormais profondément, allongé sur le ventre et serrant mon oreiller doucement comme je le faisais avec son torse, les quelques fois où nous avions eu le droit de dormir ensemble et que les autres étaient avec nous. Il me manquait. Nous avions pu faire l'amour à mon anniversaire, mais même pas passer toute la nuit ensemble. Les autres nous avaient laissé la chambre pendant presque deux heures, seulement ça n'était pas comme si nous avions pu nous unir autant que nous l'aurions voulu. Heureusement, ils nous avaient permis de partager le même lit jusqu'au matin, mais j'avais dû me contenter de me coller à lui, respirant son odeur à défaut de goûter ses lèvres et caressant sa peau au lieu de sentir sa virilité faire de moi son homme. J'aimais quand il me préparait. J'aimais quand il était en moi et que ses martèlements me faisaient gémir. Quand j'étais sous lui, je n'avais qu'une envie : perdre la tête et la notion du temps. Oublier tout ce qui nous entourait et faire en sorte qu'il ne pense qu'à moi. Alors dans mon sommeil, je m'alanguissais. Depuis que j'avais emménagé dans cet appartement, dans MON appartement, j'avais envie qu'il vienne y vivre avec moi. Mais ç'eut été du suicide. Et des trois paires de clés qu'on m'avait remises à la signature, Sho m'avait obligé à en laisser une à mes parents après en avoir récupéré une d'office. "Comme ça tu ne seras pas tenté de les refiler à Riida" avait-il dit en me fixant sérieusement. "De toute façon, il vit encore chez ses parents." Comme eux tous ! J'étais le premier à prendre mon indépendance. J'aurais au moins voulu avoir avec moi celui que j'aimais. Même si je me doutais bien qu'il n'aurait pas passé toutes ses nuits avec moi. Je savais qu'il continuait à aller voir ailleurs. J'ignorais si c'était parce qu'il aimait la variété, ou s'il était vraiment obsédé, ou simplement parce que je ne lui suffisais pas, mais il n'avait pas changé de vie depuis ces plus de deux ans que nous étions ensemble ; et j'en crevais. Mais jamais je ne l'aurais avoué. Ni à lui, ni aux autres. Demain, il allait avoir vingt-deux ans. Et j'avais dit à nos amis que je voulais être son cadeau d'anniversaire. Ils n'avaient qu'à venir fêter ça chez moi, et repartir plus ou moins en douce en le laissant avec moi. C'était pas compliqué et pas très risqué. Ils pouvaient même revenir prendre le petit-déj le lendemain matin pour le récupérer ! Mais Nino m'avait ôté tout espoir après que les deux autres aient secoué la tête. "Ses parents veulent absolument qu'il passe la soirée chez eux. Tu pourras pas l'avoir pour toi, de toutes façons." J'aurais pu en pleurer de rage. Pourquoi devais-je toujours passer après les autres ? Je ne leur avais plus adressé la parole que pour le minimum vital indispensable pendant les quelques heures de répétition qui nous restaient ce jour-là. Et quand j'étais rentré chez moi, j'avais rapidement pris une douche avant d'aller me coucher et pleurer dans mon oreiller. Mon oreiller que je tenais donc à présent comme j'aurais voulu le tenir lui. Et dans mon demi-sommeil, je me mis à imaginer ses mains sur mon corps, ses lèvres sur ma peau, ses doigts en moi, son souffle dans mon cou, son poids sur mon dos. C'était si bon que je gémis sourdement, écartant légèrement mes jambes tandis que je l'imaginais se glisser en moi avec sa prévenance habituelle lorsque c'était notre première union de la nuit. - Je... Non, c'était encore trop tôt pour que je puisse dire ça. Il ne le tolérait que lorsque nous étions très loin de la rive de la raison. Et pourtant, ça me rendait malade de devoir me taire. Je rêvais de lui murmurer ces mots-là après être arrivé au paradis avec lui. Le tenir dans mes bras et lui dire tout simplement... Mais... c'était un rêve, non ? Alors je pouvais bien dire ce qui me chantait ! - Je t'aime. - Je sais. - Je suis sérieux, Toshi. Je t'aime vraiment. Je rêvais qu'il caressait ma joue et se collait à moi un peu plus encore pour m'embrasser délicatement, faisant onduler nos bassins au même rythme langoureux. - Je sais Jun. Quand on dort ensemble, tu m'appelles. Quand tu dors avec les autres, c'est toujours mon nom qui vient sur tes lèvres. Ils me l'ont dit. Son nez vint se blottir dans ma nuque et sa bouche effleura ma peau, me faisant frissonner. Ses mains saisirent les miennes qui avaient depuis longtemps lâché l'oreiller, et il mêla nos doigts en les posant à plat sur le matelas. Oh ! que j'aimais ça ! - Je t'aime Toshi. - Je t'aime Jun. Mon rêve devenait vraiment n'importe quoi, mais je ne voulais surtout pas me réveiller. Je n'entendrais sans doute jamais ces mots dans sa bouche, alors il fallait que j'en profite dans mon sommeil. Et ce fut ce que je fis, gémissant, haletant, soupirant, criant comme s'il était vraiment là, en moi, à me faire faire toutes ces choses, prétendant que c'était sa bouche qui murmurait dans mon oreille une litanie de "je t'aime" passionnés, que c'était lui qui possédait mon corps de cette manière exigeante et retenue. Que c'était sa main qui me caressait et me fit enfin venir. Epuisé, je retombai sur mes draps salis, ne souhaitant plus qu'une seule chose : me rendormir en rêvant de l'homme qui habitait mon cœur. Le poids sur mon dos s'allégea et le matelas bougea à côté de moi. Mon rêve était vraiment très réaliste... - Toshi... Je t'aime. - Moi aussi je t'aime, Jun, me murmura sa voix douce alors que ses bras me tournaient pour me serrer contre lui. Je me lovai un peu plus dans sa chaleur. Puis je bougeai mes jambes pour tenter de les mêler aux siennes. Ce faisant, je sentis quelque chose de bizarre. Ce qui acheva de me réveiller. Je voulus me redresser, mais les bras musclés de mon amant me tenaient trop fermement pour ça. - Toshi ? fis-je en écarquillant les yeux. T'es vraiment là ? Il pouffa doucement. - Evidemment ! Dis donc, tu laisserais n'importe qui te prendre comme ça ? - J'avais l'impression de rêver... - Et tu rêvais de moi ? demanda-t-il doucement. Sa main courait de mon coude à mon épaule, câline. - Tu peuples mes rêves. Mais tu le sais, non ? - Mmm. Je te l'ai dit tout à l'heure, je sais que c'est moi que tu appelles dans ton sommeil. Quelque chose me paraissait bizarre, mais il me fallut tout ce temps pour mettre le doigt dessus. Et une fois identifiée, je répétai la phrase taboue. Juste pour voir. - Toshi ? - Mmm ? - Je t'aime. Je le vis sourire. Et se rapprocher de moi. Et m'embrasser. - Je t'aime aussi. Et il m'embrassa à nouveau, me poussant sur le dos tout en s'installant sur mon ventre. Je sentis à nouveau cette impression bizarre. - Toshi... depuis quand ? Il se recula un peu pour me regarder. - Voyons voir... depuis quelques mois. - Honto ?!! Pourquoi tu me le dis que maintenant ? - Parce que j'avais besoin d'avoir une assurance avant. - Quoi ? Laquelle ? Il posa doucement ses lèvres sur les miennes, sans les bouger, avant de s'écarter à nouveau. - Celle de ne pas te faire de mal. - Parce qu'à ton avis, ne pas vouloir que je te dise que je t'aime, ça me faisait du bien ? - Jun... soupira-t-il avant de se redresser et de sortir à moitié du lit pour récupérer son paquet de clopes. Je voulais être sûr de pouvoir te dire que je t'aimais. - De pouvoir ? Pourquoi t'aurais pas pu ? D'où tu tiens ton pouvoir maintenant ? Il sortit une cigarette qu'il alluma et tira deux bouffées avant de se tourner vers moi et passer la main sur mon ventre. - Honnêtement ? De deux bouts de papier. Je sentis l'énervement me gagner. Je ne comprenais plus rien. Qu'est-ce qu'il était en train de me faire, là ? Je me redressai à mon tour et voulus m'asseoir à côté de lui pour lui piquer une clope. Mais quelque chose m'interrompit dans mon mouvement. Quelque chose d'humide que je sentais entre mes jambes. - Toshi ? - Oui ? - T'as pas mis de préservatif ? - Non. C'était... euh... comment devais-je le prendre ? Il avait toujours refusé mordicus qu'on le fasse sans. Même si je l'avais réclamé quelques fois. Pas beaucoup parce que je savais qu'il avait des raisons valables, mais quand même, parce que j'avais l'impression de perdre en sensibilité, et lui aussi. - Toshi ?... Pourquoi ? T'as jamais voulu... T'aurais pu me demander avant ! - Ça faisait combien de temps que tu me disais que tu voulais que je n'en mette pas ? Il écrasa sa clope dans le cendrier et se tourna vers moi. Malgré la réponse un peu rude qu'il venait de me faire, je vis qu'il n'était pas vraiment énervé. - Mais... t'avais pas tort de refuser. - C'est quoi ton problème ? Tu es allé voir ailleurs ? Comme si j'avais pu ! Enfin, j'avais surtout jamais voulu... - Bien sûr que non ! Mais toi oui ! - Depuis six mois, tu es le seul. - Eh ?? Il s'installa en face de moi, à genoux sur le matelas. Son regard sérieux me fascinait presque autant que ses joues rosies. - J'ai vu personne depuis six mois. Mais j'ai voulu faire les tests pour être sûr d'être clean et de rien te refiler. - ... C'est pas tous les trois mois ? - J'ai attendu une fois trois mois après le dernier mec, et encore une fois. J'avais pas envie de risquer de tout gâcher. - Pour moi ? - Tu vois quelqu'un d'autre dans la pièce ? - Ça pourrait être Sho qui t'y a obligé. Ou Nino. - Non Jun. Les autres ne sont pas au courant. J'ai décidé ça tout seul. Quand j'ai compris que tous ces mecs que je mettais au lit, ne me faisaient pas le même effet que toi. Que c'était toi que je voyais quand j'étais avec eux. Et que c'était meilleur de faire l'amour à une seule personne plutôt que de coucher avec des dizaines. Je voulus m'accrocher à son cou pour l'embrasser comme un fou, mais mon élan fut coupé par cette bizarre sensation. - Rhaa ! Toshi, c'est... c'est pas super agréable, dis-je en grimaçant. - Oui ? demanda-t-il ingénument. - Mais, repris-je en ne voulant pas risquer de le vexer alors que j'avais tellement envie de lui dire mon amour pour lui, ça me touche que t'aies fait ça pour moi. Et... Et je ne pus rien dire de plus parce qu'il s'était emparé de mes lèvres et m'avait rallongé dans le mouvement. - Jun, murmura-t-il dans un souffle en s'écartant de moi, si on profitait de cette lubrification naturelle ? - Eh ??? - Jun chéri, tu es encore plus mignon quand tu rougis. Il plongea dans mon cou avant d'unir nos corps encore une fois, doucement, amoureusement. J'avais attendu longtemps qu'il veuille bien me donner un peu plus qu'aux autres, mais je ne regrettais pas cette patience. Parce que l'homme qui m'avait pris mon cœur et rendu fou de lui était en train de nous faire danser sensuellement une chorégraphie qu'il ne partagerait plus qu'avec moi. - Ça va ? me demanda-t-il après m'avoir emmené encore plus loin qu'il ne l'avait jamais fait. Je n'arrivais pas à redescendre sur terre, tellement j'étais bien. Sa question traversa de nombreuses épaisseurs de brume jusqu'à ce que je ne la comprenne. Et avant d'y répondre, je me collai à lui. - Ça n'a jamais été aussi bien. Je t'aime Toshi. Il sourit. - Je t'aime aussi, mon Jun. - Dis ? - Oui ? - On leur dit pas, ne ? - Que veux-tu qu'on garde pour nous ? Ils savent que je suis là, tu sais. - Eh ? Il avait encore combien de surprises pour moi, cette nuit ? - Tu croyais que j'avais traversé les murs ? Sho m'a donné ta clé après m'avoir amené dans ton parking. Et il reviendra demain matin avec les deux autres pour le petit-déjeuner. - Pourquoi ? - Pour fêter mon anniversaire, tiens ! Comme je dois être en famille le soir... - Mais ils voulaient pas... - C'est moi qui leur avais demandé de te refuser ça. Il devina mon indignation et posa un doigt sur ma bouche. - Je te voulais comme cadeau, mais je voulais te faire la surprise. Tu vas quand même devoir t'excuser pour ton attitude d'hier soir. Même si tu es contrarié dans ce que tu veux, ce n'est pas une raison pour passer tes nerfs sur les autres. - Mmm. Ok. Je me rallongeai sans lâcher son regard. - Mais seulement si tu profites encore de ton cadeau. Il s'étendit sur moi. - Pas de problème. Je gémis de bien-être, étirant mes membres avant de les refermer sur... le vide. Enfin, plutôt ma couette. - Toshi... Ça tenait plus du geignement que de la parole humaine. Pourquoi ? Mais pourquoi bon sang ! Je me redressai et allumai la lumière. Encore ce rêve. Enfin, encore... Ça faisait plusieurs années que je ne l'avais pas fait. Mon esprit m'avait rejoué souvent, avant mes vingt ans, la première déclaration de Toshi. Par la suite, ce souvenir m'avait hanté, les nuits où nous ne dormions pas ensemble. Au fil des années, il s'était mêlé à tant d'autres qu'il avait fini par ne plus faire surface ; en tout cas, pas aussi clairement. Je ne me sentais pas capable de me rendormir. Plus maintenant que j'avais cru sentir ce corps tant aimé tout contre moi. J'hésitai un instant en voyant l'heure nocturne indiquée par mon réveil. Trop tôt pour se lever. Mais peut-être que je pourrais quand même... Est-ce que c'était vraiment abuser ? Si je l'appelais à cette heure, c'était plus qu'inconvenant, mais si j'allais là-bas ? Après tout, si j'avais le double de ses clés, c'était aussi, surtout, pour ça. J'attrapai un t-shirt et me dirigeai vers la porte lorsque je remarquai quelque chose d'insolite. Bien que j'aie beaucoup bougé durant mon sommeil agité, l'empreinte d'un autre corps était visible dans mon lit. Quelqu'un avait été allongé près de moi cette nuit. Et ce quelqu'un ne pouvait être que Cécile-chan. Il me fallut quelques instants de réflexion pour remettre mes idées dans l'ordre. J'avais ses clés, certes, mais je lui avais également donné les miennes. Ce que je voulais faire maintenant, elle l'avait manifestement fait plus tôt que moi. En y repensant, je retrouvai quelques souvenirs flous d'un "oyasumi" murmuré avant qu'une présence ne vienne se glisser à mes côtés. Et quelques instants plus tard, mes mains avaient cherché ses épaules pour l'attirer contre moi. Parce qu'elle pleurait, en silence, tout doucement, mais je savais à présent le bruit que faisaient ses larmes lorsqu'elles coulaient sur ses joues. Et même si mes bras ne suffisaient pas à les arrêter, ils les rendaient un peu moins douloureuses. Donc, elle était venue. Etait-elle déjà repartie ? N'avait-elle vraiment fait qu'un passage éclair ? Même si elle n'était pas particulièrement agréable au réveil, elle était toujours restée jusqu'à ce que j'ouvre les yeux. L'heure me paraissait vraiment trop matinale, là. Après avoir changé de pantalon de pyjama, je partis donc à sa recherche en commençant par l'entrée. Ses chaussures étaient effectivement à côté des miennes. Je poursuivis mon exploration par la cuisine où elle pouvait parfaitement être en train de faire un sort à l'un ou l'autre de mes plats ; mais ici non plus, personne. Je la vis en ouvrant la porte du salon. Elle était enroulée dans une couverture, sur mon canapé. En approchant, je me rendis compte qu'elle dormait à poings fermés. Pourquoi avait-elle atterri là ? Veillant à ne pas faire de bruit, je m'approchai doucement puis me mis à genoux à hauteur de sa tête. J'hésitai un instant, me demandant si je ne ferais pas mieux de la ramener dans mon lit. Elle y dormirait nettement mieux que roulée en boule sur le divan. Et vu comme elle se plaignait régulièrement de son dos, ça ne serait pas du luxe. Je posai donc une main sur son bras, espérant sans doute la réveiller, égoïstement puisque j'aurais aussi bien pu la porter. C'était moi qui avais besoin de son épaule, là, même si le fait qu'elle soit venue chez moi ne pouvait indiquer qu'une nécessité semblable de réconfort. Voyant mon geste sans autre résultat qu'un vague grognement, je passai un doigt sur sa mâchoire avant de redescendre le long de son nez. Et j'obtins plus que je n'espérais. Sa main vint attraper mon poignet brutalement comme elle se reculait avant de se redresser en clignant des paupières. Elle me gratifia de quelques mots que je supposai français et que je ne compris évidemment pas. Puis fixant son regard sur moi, elle sembla s'en rendre compte et m'offrit une traduction toute aussi virulente. - Jamais ! Ne touche jamais à mon nez. Je ne supporte pas ça ! - Ok, ok ! Et calme-toi. C'est pas l'heure d'être aussi excitée. Elle avait lâché mon bras. Je me relevai et m'assis à côté d'elle. - Cécile, qu'est-ce que tu fais là ? - ...Je me sentais pas bien... alors je suis venue... Je t'embête ? Je peux repartir si tu veux. - Non, je voulais dire : qu'est-ce que tu fais sur mon canapé ? Tu dormais avec moi tout à l'heure. - Oh ! ça... Elle ramena ses jambes contre elle et les entoura de ses bras. Devant son mutisme, je me mis en tailleur et lui attrapai la main pour obtenir son attention. - Cécile-chan ? Tu... tu sais, je ne vais pas forcément mieux que toi, sauf que c'est toi qui est venue, alors parle la première. Elle plongea le nez dans ses genoux puis me regarda et serra ma main. - Rien de nouveau sous le soleil, fit-elle à mi-voix avec un pâle sourire. Je me sens seule, je me sens triste, j'ai l'impression de tomber. En fait, en rentrant du boulot, j'ai dû me forcer pour entrer chez moi. Et la seule chose qui m'y ait poussée, c'est le fait que Nuit avait besoin de manger et que tes clés étaient accrochées avec les autres, à l'intérieur. Elle eut une sorte de petit gloussement. - J'ai même pas enlevé mon manteau pour nourrir mon chat. Pathétique, non ? - Un peu, oui. Je vis quelques larmes déborder de ses yeux embués. - Jun... Elle attendit que j'acquiesce avant de poursuivre. - Je peux ? Elle savait que je n'aimais pas les contacts, et elle me demandait toujours avant de se blottir contre moi. Sauf que cette fois, c'était moi qui avais envie d'être rassuré. Alors en ouvrant les bras, je la forçai à ouvrir les siens aussi, et nous collai l'un à l'autre. Elle resta, quelques longues minutes, immobile avant que ses bras ne se referment sur moi à leur tour. Puis elle se mit à me serrer tellement fort que je dus lui dire qu'elle m'étouffait pour lui faire lâcher prise. - Cécile, tu m'as toujours pas dit pourquoi tu es dans mon salon... Je l'avais gardée dans mes bras et lui calai la tête sur mon épaule en lui parlant. - Tu t'es mise à détester tous les hommes ? - Mmm... non. Jun... Tu as rêvé cette nuit, tu t'en souviens ? - Oui. Je l'entendis souffler dans mon cou. - Donc j'ai pas besoin de te rappeler de quoi, tant mieux. Ton rêve était... très réaliste apparemment. J'ai pas osé te réveiller. Mais rester dans le même lit, c'était... un peu... gênant. - Cécile, la prochaine fois que ça arrive, réveille-moi. - Mais... - Je suis sérieux. Je me sens mal à cause de ce rêve. - Un rêve, c'est ton inconscient qui parle. Il veut te faire passer un message que tu n'écoutes pas forcément quand tu es éveillé. J'hésitai un instant puis me décidai. Après tout, depuis le 15 mars, on s'était raconté beaucoup de choses sur nos vies respectives, comme pour cautériser nos plaies à vifs. - Mon rêve... C'était... J'ai rêvé de la première fois où Toshi m'a dit qu'il m'aimait. Il lui a fallu deux ans pour me l'avouer. Enfin... non, il a mis un an et demi à devenir amoureux, et six mois de plus avant de me le dire. Il n'avait pas encore le double de mes clés, les autres n'avaient pas voulu. Je me demandai si elle avait vraiment envie d'écouter ça. C'était des détails, toutes ces petites choses sans intérêt qui avaient fait notre vie. - Continue, Jun, me dit-elle en posant sa main sur mon bras. Si tu en as rêvé, c'est que ça a de l'importance. Même si tu ne vois pas encore laquelle. J'inspirai profondément avant de reprendre. - J'avais fait la tête à tout le monde la veille de l'anniversaire de Satoshi, parce qu'ils n'avaient pas voulu que l'on passe du temps ensemble tous les deux pour ses vingt-deux ans. - Du temps ? - Qu'on couche ensemble. A cette époque, on devait se plier à ce que les autres nous autorisaient à faire. Ils étaient nos garants. - Et vous n'avez jamais dérogé ? - Ils nous auraient empêchés de recommencer. J'avais tout le temps peur que Toshi me dise qu'il ne voulait plus être mon petit ami. Je respectais ses règles à la virgule près pour que ça n'arrive pas. - Et tu étais d'autant plus arrogant à côté, j'imagine ça... - Hey ! je suis pas arrogant ! - Si tu le dis... Si vous n'aviez pas pu vous voir, comment il a pu te faire l'amour ? - Comment tu sais... ? - Jun, je t'ai dit que ton rêve semblait réaliste. - Oh ! ...Ok. En fait, Sho lui a prêté ma clé, le double qu'il avait au cas où, et qu'il m'a rendu le jour de mes vingt ans en me disant d'en faire ce que je voulais. Je l'ai donnée à Toshi, évidemment. - Mais il l'avait rendue sans faire d'histoire ? - On ne voulait pas qu'ils nous interdisent de nous voir. Il restait encore neuf mois avant mon anniversaire. C'était vraiment fou comme on pouvait discuter tranquillement tous les deux. Mieux que je ne l'avais jamais fait avec ma sœur. Presque comme je le faisais avec Nino ou Aiba-chan, quand je n'étais pas encore célibataire. Sauf qu'avec ces deux-là, ce genre de conversation finissait la plupart du temps en comparaison de capacités masculines quand ça ne glissait pas sur une pente graveleuse. Une discussion de mecs, quoi. Alors qu'avec Cécile-chan, nous échangions comme si nous ne parlions pas de l'homme qui vivait à présent avec son mari. Autant de détachement faisait presque inhumain. Et pourtant, ça nous faisait du bien à tous les deux, nous apaisant en nous permettant de constater que nos souvenirs n'étaient pas tous devenus noirs lorsqu'ils nous avaient quittés. Ses questions distrayaient son esprit des idées qui y tournaient en boucle lorsqu'elle était seule ; mes réponses me faisaient réaliser que le temps avait passé, et que bien qu'ayant toujours mal en pensant à lui, j'étais capable de déposer ma peine sur le bord du chemin. - Il ne m'avait jamais vraiment fait l'amour avant cette nuit-là, constatai-je avec comme un accent de tendresse. C'était doux... Qu'est-ce que j'ai regretté que le soleil se lève ce jour-là ! - Le soleil se lève toujours... murmura-t-elle. - Les autres ont débarqué après avoir appelé et on a petit-déjeuné tous ensemble. On ne leur a pas dit que quelque chose avait changé entre nous, mais je pense qu'ils l'ont compris. Parce que Toshi me tenait la main la plupart du temps, ce qu'il ne faisait jamais avant. On avait tourné une page. A repenser à mon rêve avec un peu de recul pour pouvoir lui en parler, je venais de me rappeler de quelque chose. Une chose que Toshi m'avait dite. - Cécile... coucher avec des types sans sentiment alors qu'on aime quelqu'un, c'est... Je ne finis pas ma phrase, je voulais son avis. - C'est destructeur. Mes mains se crispèrent sur elle. - Carrément ? - Oui. Pour toi, parce que tu ne peux que te faire du mal comme ça, et te déprécier chaque fois davantage. Et pour celui avec qui tu couches en plus, si cette personne t'aime sincèrement. Enfin, ça n'a peut-être pas autant d'impact si c'est une fois par hasard. Mais si c'est régulier, je ne pense pas qu'il puisse y avoir un bien à en tirer. Pourquoi cette question ? - Je crois que j'ai compris pourquoi j'ai fait ce rêve. Je lui parlai de l'aveu de Satoshi sur les gars avec qui il couchait en pensant à moi. Puis je lui redis ses mots quand il m'avait quitté, ce qu'il m'avait dit de mes caresses et de mes baisers, et de Teru. - Il m'a quitté parce qu'il tenait à moi... Parce qu'il m'aimait encore assez pour ne pas vouloir me faire plus de mal. Je l'avais su à l'instant même où il me l'avait dit, mais je venais seulement de le comprendre, de l'intégrer complètement dans mon esprit et dans mon cœur. Je sentais mes larmes déborder mes yeux tout doucement. Mais curieusement, elles ne faisaient plus si mal. Comme si j'avais été libéré d'un poids. Puis je réalisai que je n'étais pas le seul à pleurer. Dans mes bras, mon amie n'avait pas les mêmes raisons d'apaisement. Teru n'avait pas été aussi honnête avec elle, et même si elle comprenait aussi bien que moi la situation, elle n'avait pas encore atteint le même stade que moi. Mais je n'allais pas la laisser se morfondre dans ses idées noires. Et je lui proposai ce qui nous servait de médicament depuis une dizaine de jours. - Prête pour Ever After ?
********************** ++Cécile++
- Cécile, vous me ferez le plaisir de venir dîner chez nous avant l'été ; avec votre mari, bien sûr ! Je regardai mon interlocutrice en souriant par habitude, tout en réfléchissant à toute vitesse. D'ici l'été, j'aurais peut-être réussi à lui dire que j'étais techniquement célibataire. Je ne m'étais pas tue par peur de la réprobation, juste parce que je n'avais pas envie de voir de la pitié dans ses yeux si clairs. Et plus les jours passaient, plus le dire était un sujet... pas vraiment difficile, mais pas évident à aborder. Non que j'aie envie de pleurer. Je versais mon content de larmes tous les soirs, parfois seule, parfois dans les bras d'une autre fontaine. Enfin, peu importaient mes raisons, Astrid attendait une réponse même si elle rangeait ses pinceaux de calligraphie. J'essuyai consciencieusement ma pierre à encre avant de lui dire que le plaisir serait pour nous et qu'il fallait juste trouver une date où nous serions disponibles tous les quatre. L'excuse était parfaitement crédible, vu comme je me noyais dans le travail en journée prolongée (en y repensant, je trouvais fou que Jun me laisse débarquer chez lui à parfois minuit passé. Enfin, la dernière fois, c'était lui que j'avais trouvé dans mon lit en me réveillant...). - Entendu. Au prochain cours, préparez votre planning, je viendrai avec le mien. Bonne soirée ! - Bonne soirée, Astrid ! Aïe... Bon, après tout, on pouvait toujours avoir un impondérable. Mais il me fallut tout le trajet jusqu'à chez moi pour me convaincre que ça pourrait passer. Et, arrivée devant ma porte, je me rappelai enfin que j'avais prévu autre chose avant de rentrer chez moi : quelques courses pour regarnir le frigo. Si Nuit ne m'avait pas entendue à travers la porte et ne s'était pas mise à miauler, j'aurais sûrement fait demi-tour. Mais là, j'étais certaine que mon chat me ferait une vie impossible si je ne la câlinais pas dans les cinq minutes (j'avais quand même le droit de poser mes affaires avant. Ce chaton était très magnanime, dans son genre et à ses heures perdues). - Tadaima, fis-je par habitude. Comme si Nuit allait me répondre... - Okaeri, dit une voix localisée vers la cuisine. Je vis avec surprise Jun sortir de la pièce, un tablier sur les hanches, qui éclata de rire en voyant ma mine ahurie. - Eh ! Me dis pas que tu avais oublié que j'avais tes clés ! Il s'avança vers moi et m'aida à enlever mon manteau qu'il mit sur un cintre. - C'est vrai que c'est plus souvent toi qui débarque chez moi, mais là, j'avais envie de voir Ever After sur ton écran. Et surtout, dans ton canapé. Je le trouve plus confortable que le mien... Ouhou ! Cécile ! Tu dors debout ou quoi ? Il me passait une main devant les yeux mais je ne réagissais pas. Et quand je me décidai enfin à faire un mouvement, je ne contrôlai plus mon corps et Jun se retrouva avec un koala en pleurs accroché à sa taille. Passée la surprise, il m'enlaça gentiment et attendit que je me calme un peu avant de me dire qu'il avait fini de préparer le dîner et que, comme je devais avoir faim, nous pouvions nous mettre à table. Son repas était, comme d'habitude, excellent. Et nous le dégustâmes en silence. Ça me changeait des repas bruyants que j'avais pu connaître autrefois, mais pour autant, il n'y avait pas de malaise. C'était simplement comme un accord tacite : nos paroles nous entraînaient souvent vers les larmes, alors il valait mieux les réserver pour après. Quoique depuis cette nuit un peu spéciale où il avait rêvé de manière très concrète, je le sentais moins fragile. Il avait dû se trouver une force dans ce rêve ; et quelque part, je l'enviais un peu, souhaitant pouvoir moi aussi avoir une raison de relever la tête. Installés sur le fameux canapé, blottis l'un contre l'autre et sous les couvertures, le chat tranquillement lové près de nous, j'allais me pencher vers la télécommande pour lancer le film lorsqu'il me retint. - Princesse, tu veux me parler de tout à l'heure ? Pas besoin de demander à quoi il pensait. - Je... je ne suis pas sûre de savoir pourquoi j'ai pleuré... - C'était trop "normal" ? Tu rentres chez toi et tout est déjà prêt ? Je tournai lentement la tête vers lui. - Tu te prends pour une petite femme d'intérieur ? - J'ai pas la tête de l'emploi ? Je pouffai doucement. - Oh ! si, presque. Il manque la charlotte sur la tête, c'est tout. - Alors, c'était ça ? - Mmm, peut-être. Au cours, tout à l'heure, Astrid m'a rappelé qu'elle et sa famille comptaient sur moi et mon mari pour venir dîner chez eux. Sauf que je ne lui ai pas dit que Teru était parti. - Dis-lui. - Oui, ce serait le plus simple. Ou alors, j'embauche un escort boy pour jouer son rôle. Ça pourrait le faire, non ? Et en plus, pendant quelques heures, j'aurais à nouveau quelqu'un. Et si je le paie assez, peut-être même que je m'autoriserai à le garder pour la nuit. C'est un bon plan, non ? - Tu pourrais coucher avec un inconnu pour de l'argent ? - Pas besoin de coucher. Enfin, pas sexuellement en tout cas. Juste l'avoir dans mon lit. - Euh... Tu sais que tu m'as déjà, moi ? Je fais ça gratuitement, en plus. - Tu veux jouer le rôle de Teru à ce dîner ? Ça peut être marrant, remarque. Mais je pense que tu es trop connu. Ça ferait bizarre. - Ce serait une bonne raison pour expliquer que tu caches ton mari, non ? Je souris en imaginant la scène avant de revenir sur terre. - Jun, c'est gentil de te proposer, mais s'il y a bien un rôle que je ne te ferais pas jouer, c'est celui de Teru. Ce serait du plus mauvais goût possible. Je sentis ses bras se resserrer autour de moi et il déposa un léger baiser sur ma tempe. - Dans l'absolu, c'est vrai que c'est vraiment pas ce que j'aurais envie de faire. Mais je sais que tu le ferais avec toute la réserve nécessaire. Alors je te ferais confiance. En tout cas, si jamais un jour tu as besoin... - Mmm, non. Merci, mais non. ...Et toi, il y a quelque chose dont tu voulais parler ? S'il était venu, c'était qu'il devait y avoir une raison. La simple envie de cuisiner pour deux me semblait un peu légère. - Je voulais voir ta tête de déterrée ? - Idiot ! Plutôt qu'une nana fatiguée, t'as pas un bel éphèbe à te mettre sous la dent ? - Mmm... Maintenant que tu le dis... Je t'avais parlé de Ginta-kun, l'assistant ? - Le théoricien du célibat qui se pense de taille à remplacer ton manager ? - Celui-là même ; et en fait, je ne suis plus si sûr que c'était Uehara-san qu'il se proposait de remplacer. Je l'ai revu aujourd'hui. - Et ? Il a changé d'opinion sur le célibat ? - Je pense pas, non. Mais je l'ai trouvé très attentionné. Il a pris soin de me servir en premier de tout ce qu'il pouvait. - Je te l'avais dit ! Tu lui plais, c'est évident. Il est désagréable à regarder ? - Non, plutôt joli garçon. C'était un Junior. - Ben alors, vas-y ! Fais-toi plaisir si tu en as envie. - Juste parce qu'il est mignon ? - Te base pas sur mes critères ! Tu comptes passer ta vie avec lui ou t'amuser un peu dans un échange de bons procédés ? - ...Tu le ferais, toi ? - Non. Parce que j'ai déjà testé et que ça ne me correspond pas. Mais si tu n'as jamais essayé, tu pourrais au moins tenter. Et si finalement c'est pas ce que tu veux, dis-le-lui. Enfin, tu vois ce que je veux dire ? - Je pense oui. - En plus, tu vas avoir quelques jours pour l'inviter chez toi, si tu veux. - Ah ? - Oui. Lucie vient faire un tour à Tokyo. Du coup, je ne vais pas la laisser toute seule au milieu de la nuit. Donc tu ne risques pas de me voir débarquer au milieu d'une séance privée... Profites-en ! - Je verrai. Il me regarde avec des yeux chauds comme la braise... Je souris. - Tu te fiches de moi, là ? - Oui. Allez Princesse, un petit costume de papillon, ça te dit ? - J'envoie ! dis-je en appuyant sur lecture. Oui, Jun était effectivement en train de relever la tête. Et, avec à peine un petit sentiment d'exagérer, je me calai davantage dans ses bras pour tenter, peut-être, de prendre un peu de sa force.
***************** ++Aiba++
- Matsumoto-kun, je vous ai mis une bouteille de soda sur votre serviette. - Merci Ginta-kun. J’entendis cette conversation depuis le couloir. Elle émanait de la porte entrouverte de notre loge. Un coup d’œil avant d’entrer et je confirmai la présence de Ginta-kun, ex junior de la JE. Il avait été un excellent danseur qui nous avait accompagné sur quelques tournées avant qu’une blessure pendant un entrainement ne mette fin à sa carrière. C’est à la suite de ça qu’il avait changé de voie pour passer derrière, parmi le staff. Et aujourd’hui, il avait obtenu un poste d’assistant réalisateur. Une chose était sûre, apporter les boissons ne faisait pas partie de ses attributions. C’était bizarre. Ça aurait été une assistante quelconque, j’aurais juré qu’elle faisait une tentative de drague. Le sourire qu’il affichait quand il se tourna dans ma direction me le confirma. Un merci de Marvelous et lui avait croqué la lune et toutes les étoiles de la voie lactée… Alors oui, j’étais de plus en plus persuadé qu’il était sous le charme de Matsujun. Il repoussa la porte et me fit face. A ma vue, son sourire s’éteignit immédiatement. - Gomen, Aiba-senpai, j’avais juste quelque chose à dire à Matsumoto-san. Il sortit après s’être incliné et j’entrai à mon tour pour récupérer mes affaires. Ce sourire niais, je l’avais déjà vu sur le visage de Shigeru à chaque merci que je prononçai. Et si je savais que Jun pouvait ne pas être insensible à ce genre de propositions, est ce que… Aaaaaahhh, je sentais la migraine arriver. En parlant d’arrivée, c’était Lucie qui m’avait annoncé la sienne pour le prochain WE. Et comme j’étais libre, il fallait que je lui propose une sortie, non ? Je pris le script du prochain Tensai ; soudain en lisant ce dernier, l’évidence m’apparut ! Je savais où j’allais l’emmener. Il ne me restait plus qu’à lui proposer quand elle arriverait. - Masaki, qu’est-ce qui t’excite autant ? - Je vais aller au zoo ce week-end ! - Et… ? Ne me dis pas que tu n’as toujours pas ton content de kangourous et autres fauves ? - De ça si. Mais c’est la compagnie qui fait tout l’attrait de la sortie. - Tu y vas avec qui ? - Lucie-chan ! - Vraiment ? - Oui ! Enfin… dès que je lui aurais proposé. - Lucie ? La copine de … - … la femme de Teru-kun. Elle vient ce week-end. Elle m’avait promis que nous ferions une sortie ensemble à sa prochaine visite au Japon. Je vais lui faire tenir son engagement. Jun avait l’air inquiet. Pour moi ? Quelle idée. Cependant je voulus le rassurer. - Si tu ne fais rien ce week-end et qu’elle est partante, tu veux venir ?
Je vous invite ici, à lire la partie 7 de "La Genèse de Jinsei" (c'est la dernière partie) à partir de mercredi 20/11/2019 | | | Dim 24 Nov - 9:21 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
Age : 44
Localisation : Osaka!!! enfin!!!!
Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| Bonjour ! AUjourd'hui c'est dimanche et le Arashi ont du quitté Osaka hier (en même temps je les ai pas plus vu parce qu'ils étaient à Osaka que j'aurai pu les voir si il était à Tokyo (et moi toujours à Osaka) Mais bon, nous étions dans la même ville ... Revenons à Jinsei. Je n'ai pas grand chose à dire pour introduire puisque je n'ai pas de retour de votre part. Alors... Amusez-vous bien!! (j'espère) Rappel : Les parties : en ‘Tempus sans ITC’ sont en anglais dans le texte…En italique sont en français dans le texte- Chapitre 26:
++Lucie++
Ouf ! Arrivée ! C’était ce que je pensais en voyant le taxi ralentir devant l’immeuble de Cécile ; c’était ce que j’avais pensé hier soir en payant le taxi qui m’avait transportée depuis l’aéroport jusqu’à l’appartement de Cécile et Teru. Enfin, ce que je pensais être encore leur appartement mais qui n’est plus que celui de Cécile depuis trois semaines. Qu’elle ait réussi à me le cacher tout ce temps… je n’en reviens pas encore. En y repensant, il y avait pourtant des signes que j’aurais dû voir : l’augmentation de ses déplacements, son refus de me parler en vidéo sur msn, son hésitation infime quand je lui avais demandé si elle pouvait m’héberger le temps de ce séjour éclair… Bien sûr, elle ne me l’avait pas caché une fois arrivée ; elle me l’avait même annoncé comme s’il s’agissait d’une banalité. - Au fait, Teru et moi on est séparés depuis le 11. - Pardon ? - Il habite chez Satoshi pour le moment. Quand j’avais voulu en savoir plus son regard m’en avait dissuadé et j’avais décidé d’attendre qu’elle s’ouvre de nouveau à moi. - Tadaima ! Changeant mes chaussures pour mes chaussons, j’entendis la porte de la salle de bain se refermer et quelques instants plus tard, Cécile apparaissait devant moi. - Okaeri… Elle était d’une pâleur effrayante comme hier à mon arrivée. L’envie de la presser de questions se fit sentir de nouveau mais… Nous nous rendîmes au salon, et une fois assises elle me demanda : - Alors cette réunion ? - Ils me proposent un poste pour au moins un an… J’ai demandé quelques jours de réflexion. - Pourquoi ? C’était pas le poste dont tu rêvais il y a trois mois quand tu as envoyé cette lettre ? - Si… Mais… Elle a raison, mais c’était il y a trois mois, quand Arashi était simplement mon groupe de J-pop préféré. Ai-chan venait de nous apprendre qu’elle avait pu avoir des places pour leur concert et j’avais dit à Cécile que j’aurais aimé avoir une chance de travailler avec eux. Mi rieuse, mi sérieuse, nous avions envoyé mon CV à la J-Storm, et voilà… j’avais une proposition et pas n’importe laquelle : on me voulait pour bosser avec Arashi. - … Lucie ! C’est quoi le problème ? Lucie, réveille-toi ! - … c’est pour travailler avec eux, repris-je. - EUX ? … Arashi ? C’est pas ce dont tu rêvais ? - Si… bien sûr… mais,… qui dit Arashi dit surtout travailler avec LUI. Et… - QUOI ? Tu hésites à cause de Kazunari? C’est une blague ? Tu vas pas foutre cette opportunité aux orties à cause d’un sale type qui saute sur tout ce qui bouge ! Tu plaisantes, j’espère ! Cécile, de blême, avait repris des couleurs en m’engueulant. Quelque part ça me rassurait de la voir comme ça. Elle me regardait droit dans les yeux et moi-même me sentis rougir de honte et je baissai la tête. Elle avait raison. Je n’avais pas à mélanger vie professionnelle et vie privée. Il fallait juste pour ça que je règle mes comptes avec ce coureur de jupons et qu’après je me concentre sur le boulot. Me concentrer sur le travail, ce ne serait pas un problème en soi tant que je n’aurai pas à lui faire face et… - Tu as peut-être raison… - Pas peut-être. J’ai raison. Un silence suivit cette dernière affirmation et quand je décidai de le briser, ce fut pour annoncer ma décision. - Cécile, je crois que je vais accepter. - Enfin une parole intelligente. Et je n’ai même pas eu à utiliser mon argument ultime. - Lequel ? - Le fait qu’on n'habiterait plus à 9500 km l’une de l’autre… Je souris et enlaçai mon amie. - Et puis, ils sont cinq dans le groupe et je pense que certains ont plus besoin de tes services que lui… reprit mon amie alors que nous brisions notre étreinte. Une voix nasillarde et essouflée me traversa le cerveau brutalement, me faisant penser à l’un d’eux. C’était celle de l’amoureux de Chiba. Les sentiments que j’éprouvais pour Masaki avaient été et seraient toujours purement amicaux et je lui avais clairement fait comprendre en janvier, le lendemain du mariage de Cécile.
- Flash-Back- Aiba était venu frapper à ma porte ce matin-là, une tasse de café dans chaque main. - Ohayô Lucie ! Tu as pu dormir un peu ? - Mmmm …yô. Café. ...atou. Je plongeai dans la tasse, tentant d’émerger sans agresser le pauvre chanteur qui malgré une nuit courte semblait au mieux de sa forme. Je l’entendais soliloquer en bruit de fond et je remerciais le ciel de m’avoir donné la capacité de m’isoler auditivement quand j’en ressentais le besoin. Une fois que je me sentis légèrement plus d’attaque (après que j’eus terminé mon café et celui d’Aiba qui ne sembla même pas s’en apercevoir tellement il était embarqué dans son histoire) je rouvris mes oreilles à son bavardage et ce fut là qu’il se tut. Il m’observait fixement, me dévorant littéralement du regard, au point que je me sentis mal à l’aise et ouvris la bouche. - Aiba-chan ? - Lucie… Je sais que c’est peut-être trop tôt mais… tu me plais beaucoup alors… - Aiba-kun ! Je t’arrête tout de suite. Je dois te dire quelque chose et tu dois m’écouter attentivement. Je t’aime beaucoup mais je ne t’aimerai jamais tout court. Je ne te vois pas autrement que comme un ami et ce sera toujours ainsi. Je suis désolée, mais si tu espères qu’un jour mes sentiments changent, alors je préfère que l’on coupe le contact dès maintenant. J’avais vu le sourire de Masaki faner sur son visage. Il reprit les tasses et se leva sans un mot. Arrivé à la porte, il s’immobilisa et me déclara sans se retourner. - Laisse-moi juste un peu de temps s’il te plait, je t’appelle bientôt, promis. Il y avait des larmes dans sa voix, je les avais entendues mais je ne pouvais rien faire sans risquer de lui donner de faux espoirs et donc le blesser encore plus. Une fois la porte refermée, je m’étais mise à pleurer ; c’était trop, vraiment trop. Deux jours plus tard, mon portable avait retenti. Ce n’était pas le numéro de Nino alors j’avais décroché et j’avais reconnu la voix d’Aiba. - Lucie tu veux bien me retrouver ? m’avait-il demandé. Je veux te le dire en face. J’acceptai, un peu inquiète de le revoir après notre dernière conversation, mais quand nous nous étions retrouvés, il s’était d’abord inquiété pour moi. Il connaissait Nino et voulait savoir comment ça se passait. Ensuite il m’avait proposé d’être mon cavalier pour la soirée d’anniversaire de Sho, en toute amitié et rien que ça, m’avait-il précisé avec son sourire franc qui faisait briller son regard.
- Fin du Flash-Back-
Ma relation avec Aiba était ensuite devenue purement amicale. Nous nous parlions par internet plusieurs fois par semaine. Il me racontait son boulot, me donnait des infos exclusives sur les projets du groupe. Il m’avait aussi raconté début février la rupture du JunToshi. Cette fois-là, il s’inquiétait pour son cadet qui lui semblait profondément enfoncé dans son chagrin et cherchait des solutions pour l’en sortir. Il avait tenté de me demander des conseils mais je ne voyais pas bien quoi lui répondre… Après le 11 mars, je lui avais demandé des nouvelles de sa famille et depuis, il ne manquait jamais de m’en donner. Enfin, il essayait de me convaincre de répondre à l’un des multiples messages que continuait de me laisser le Geek. Je me souvins soudain de notre dernière conversation et demandai à mon amie : - Cécile, ça te dit d’aller au zoo demain ? - Hein ? Pourquoi le zoo ? Tu vas voir les Arashi après-demain, non ? Ça ne te semble pas suffisant comment animalerie ? Franchement j’aurai bien aimé me reposer un peu. Je cours partout depuis deux semaines et me sens fatiguée en ce moment. - Je te le propose parce que j’ai envie de passer du temps avec toi mais que Aiba-chan m’a annoncé par mail qu’il viendrait me chercher pour m’y emmener que je le veuille ou non. - Aiba-chan, tu parles tout le temps de lui... Je trouve que vous êtes bien proches. Il y a quelque chose entre vous ? - Non. Enfin rien de sentimental. Je me refuse de jouer avec ça, tu le sais non ? C’est juste un ami. - OK, OK. Bon pour demain, je veux bien aller visiter tout ce que tu veux si tu ne m'abandonnes pas comme une vieille chaussette pour les beaux yeux de Masaki. Je fronçais les sourcils. - Je blague ! Je suis pas si vieille que ça, fit-elle avec un clin d'œil. S'il te kidnappe pour la journée, j'aime autant être avec vous. Par contre, si on veut pouvoir se lever, il faudrait peut-être commencer par se coucher, tu ne crois pas, Miss…
(...)
Le lendemain, le lever fut rude. Comme toujours, nous avions eu les meilleures intentions du monde pour nous coucher tôt... et avions papoté jusqu'à pas d'heure. En fait, pour Cécile ce fut encore pire et je m’apprêtais à appeler Masaki pour annuler, mais elle m’en empêcha. Elle m’affirma que ça irait bientôt mieux. D'après elle, les événements qui avaient bouleversé sa vie ces dernières semaines l'avaient fatiguée et rendue plus sensible aux virus qui traînaient toujours en début de printemps. C'était bien possible après tout, même si à ma connaissance, c'était la première gastro ou assimilé qu'elle se payait depuis sa naissance. Elle achevait de se maquiller quand on sonna à la porte. Derrière celle-ci se trouvait non seulement celui que nous attendions mais aussi Matsujun. Devant mon air surpris, Aiba-chan m’expliqua qu’il l’avait embarqué comme il nous embarquait, Cécile et moi, pour une séance de zoothérapie. Après on se sentirait forcément mieux. Nous nous retrouvâmes dans la voiture et Aiba nous expliquait qu’il avait choisi ce parc parce qu’en plus du zoo classique, il y avait une maison à câlin… l’endroit idéal pour se relaxer selon lui. Assise à l’arrière de la voiture avec Cécile, nous échangeâmes un regard légèrement inquiet. - C’est ton ami, tu assumes… - J’assume mais j’appréhende. Nous éclatâmes de rire. Les deux garçons jouèrent aux parfaits chevaliers-servants, nous offrant popcorn, glaces et autres cochonneries alors que nous errions de cage en cage. En fait, je pense que désormais aucun des deux n'offrira plus de maïs soufflé à Cécile (qui déteste ça) : sa mâchoire a manqué de peu la main de Jun qui lui tendait le paquet. Mais les yeux effarés de celui-ci valaient le détour. - C'est pour t'apprendre à ne pas me confondre avec un singe ! - Tu as conscience qu'essayer de mordre un être humain te fait ressembler à un singe ? - Où ça, un être humain ? D'un discret coup d'œil et d'un commun accord, Aiba et moi attirâmes chacun l'un des sales gosses vers une cage différente, le temps qu'ils se concentrent sur autre chose. Après deux heures de balades, nous arrivâmes en vue de l’objectif d’Aiba. Il s’agissait d’une sorte de pouponnière où l’on pouvait jouer avec des chatons, des chiots, divers rongeurs, mais aussi quelques bébés singes et même un petit tigre qui avait été abandonné par sa mère et que les soigneurs élevaient donc en ce lieu jusqu’à ce qu’ils l’estiment suffisamment âgé pour vivre autonome dans le parc. Aiba m’apportait les animaux pour me les mettre dans les bras pendant que Matsujun et Cécile se chamaillaient pour savoir vers lequel d’entre eux le tigre allait se diriger, et pour cela ils tentaient de le soudoyer avec des biberons. Ces deux-là ne cessaient de se chercher depuis que nous étions sortis de voiture et je ne pouvais m’empêcher de les observer d’un œil à la fois amusé et inquiet.
Dimanche 3 Avril 2011 Cher journal,
Aujourd’hui j’ai été au zoo avec Cécile, Masaki et Matsujun. Nous nous sommes vraiment amusés et j’ai enfin appris la vérité sur les raisons du départ de Teru. J’éprouve des sentiments divers depuis. A la fois je suis en colère contre Teru et Riida, d’autant que ces deux-là n’assument pas complètement puisque Teru n’en a pas informé sa famille. Ensuite je suis inquiète pour Cécile, elle joue les fortes mais je comprends mieux pourquoi elle dit que ce sont les conséquences du tremblement de terre qui la rendent malade. Je suis vraiment contente d’avoir pris la décision de m’installer ici. Dans un mois je serai de retour et je pourrai être présente pour elle. En attendant Matsujun a l’air de pouvoir faire l’intérim. Jun… Leur relation me rassure mais m’inquiète en même temps. Je suis heureuse que Cécile ait pu trouver un ami pour la soutenir dans ces moments difficiles mais en même temps je reste dubitative. Quelque part ils sont là l’un pour l’autre mais depuis le début leur relation est biaisée selon moi. Je connais Cécile depuis plus de 10 ans et je sais parfaitement comment elle fonctionne quand un mec lui plaît. A tous les coups elle le provoque, elle cherche le contact à travers des affrontements verbaux et physiques qui finissent en combat de chatouilles par exemple. Alors j’ai peur qu’elle ne développe des sentiments pour Matsujun. Il faut que je lui en parle avant mon départ mardi…
(…)
Hier, j’étais retournée à la Jimusho pour signer mon contrat avec la J-Storm. Après avoir serré la main à Kitagawa-san en personne, j’avais rencontré mes futurs collègues. J’allais remplacer un collègue américain qui avait renvoyé sa famille au pays, suite aux derniers événements, et qui souhaitait les rejoindre. Je le trouvai devant son pupitre, et découvris que je le connaissais pour avoir travaillé avec lui presque trois ans plus tôt sur un projet. Mais il n’était pas seul dans son antre : Sakurai était à ses côtés et un rap caractéristique s’échappait des enceintes. Je les laissai terminer avant de me signaler. Sho fut de toute évidence surpris par ma présence, et demanda ce que je faisais là. Mon collègue se méprit sur son étonnement et commença par nous présenter. Dix minutes plus tard, je rencontrai trois des quatre autres membres du groupe, celui dont je redoutais le plus la présence étant en déplacement. Jun avait insisté pour me raccompagner à la porte de la JE. Evidemment, ce n’était pas pour le plaisir de ma compagnie. Déjà au zoo, j’avais senti par moment son regard sur moi, et je l’avais senti inquiet sans comprendre en quoi. - Lucie, c’était pour ça que tu es venue ? Parce qu’on t’a proposé de remplacer notre ingé-son ? - Oui et non. J’hésitai un instant à lui en dire plus. Après tout, je n’avais pas à me justifier auprès de lui quand même. Si ? Mais en lui expliquant, j’espérai qu’il comprendrait que je n’avais en aucun cas manœuvré pour arriver jusqu’à eux. - Ecoute, j’ai posté à tout hasard un courrier en janvier. Et en rentrant d’une mission juste après le 11, j’ai trouvé un courrier. Ce n’est qu’en venant au rendez-vous samedi que j’ai découvert le poste que l’on me proposait et après y avoir réfléchi hier, j’ai décidé d’accepter. Que ce soit vous a failli me faire refuser, si tu veux savoir. Et c’est Cécile qui m’a fait réaliser combien ce serait idiot de ma part de refuser. Je me tus et le silence régna entre nous jusqu’à ce que nous arrivassions dans le hall de la JE. - Alors à bientôt Lucie-chan. - A bientôt Matsujun, je repars demain mais je reviens dès que je peux. Tu sais, je suis inquiète pour Cécile. - Je veillerai sur elle. J’étais là quand toi non. Je sentis le reproche dans sa voix. - Je sais. Merci, Matsujun, murmurai-je en serrant la main qu’il me tendait en guise d’au-revoir.
(…)
C’était déjà le moment du départ et je regardais discrètement Cécile jouer avec son pain et tourner autour de sa tasse de thé sans réellement y toucher. Honnêtement je n’étais pas mieux pour ça, sauf que venant d’elle, cela me paraissait totalement surréaliste. - Cécile, mange. - Pas faim. - M’en fous. Le silence se rabattit sur nous. Je vidai mon bol et le rapportai dans la cuisine pour revenir avec un verre d’eau. - Cécile ? - Mmm - Je pars tout à l’heure mais… ça va aller ? - Oui t’inquiète. Tu reviens vite de toute façon et si j’en peux plus, j’appellerai Jun. - Justement… Fais attention avec lui. - C’est un ami. - Si c’est vrai, tant mieux. Je disais ça mais n’en pensais pas moins. Cécile avait-elle réellement conscience de ce qu’elle faisait ? Je l’espérais de tout cœur mais, dans l’avion, le doute continuait de m’habiter.
****************** ++Sho++
- Ça me parait pas mal comme ça, Sakurai-san. - La rythmique est pas mal, c’est vrai… mais est-ce-que… - … et si on demandait son avis à ma remplaçante ? Hey, Lucie ! Alors c’est toi qui prends la relève ? - Hey , John ! Je savais pas que t’étais ici. Alors c’est toi qui étais aux commandes ? - Hum. Hum… Excusez-moi de vous déranger mais… - … C’est nous. Désolé, Sakurai-san. Lucie, voici Sakurai Sho du groupe Arashi. On était en train de travailler sur sa partie solo quand tu es arrivée. Sakurai-san, voici Bergevin Lucie. Elle va me remplacer dès… - … Le premier mai. Très heureuse de travailler avec vous, Sakurai-san. En disant ces mots Lucie s’était inclinée à la japonaise. Quand elle se redressa, je lui tendis la main pour la lui serrer. Je vis à son sourire qu’elle était plus que satisfaite de lire la surprise que devait exprimer mon visage. C’était donc Lucie-chan qui allait remplacer Mr Smith. Ce dernier nous avait annoncé qu’il rentrait aux U.S.A il y avait à peine une semaine. Mais il y avait déjà une remplaçante sur les rangs ? Et pas n’importe qui… Lucie. Je me demandais dans quelle mesure cela allait compliquer ou simplifier les choses. Professionnellement parlant, la jeune femme connaissait son affaire, j’en eus rapidement la confirmation quand elle embraya sur la question que lui avait posée son collègue à son arrivée. Nous nous rangeâmes d’ailleurs à son avis et, dix minutes plus tard, je la guidai vers la salle de repos du groupe, où devaient être les autres, Nino en moins, puisqu’il avait posé un congé et ne rentrait que demain. D’ailleurs ce dernier risquait d’être déçu de son voyage puisque l’objectif de sa quête était ici. A son retour je lui rappellerai la règle n°1 de la JE : un Johnny n’a pas de problème personnel. Pas le temps de servir de tampon entre lui et le reste du monde s’il se prenait une nouvelle cuite, nos programmes étaient trop chargés pour ça. Avant de pénétrer dans la salle, je demandai à Lucie de ne pas s’annoncer avant que les autres ne lèvent la tête, et leurs réactions furent ainsi à la hauteur de mes espérances. Enfin surtout celle d’Aiba. - Tadaima. - Okaeri. Seuls Jun et Aiba m’avaient répondu et seul le second leva la tête de son magazine pour m’adresser un sourire. Sourire qui se figea quand il aperçut une silhouette derrière moi sans parvenir à savoir de qui il s’agissait. - Les gars, repris-je, je vous amène la remplaçante de Mr Smith… - UNE ingé-son ? J’avais pourtant dit que je voulais pas d’une femme, déclara Jun qui était de mauvaise humeur depuis ce matin. La main de Lucie se posa sur mon épaule et c’est en se mettant à mes côtés qu’elle répondit à mon cadet. - Je sais. Tu as déjà dit en janvier que jamais je ne serai à la hauteur. C’était donc parce que tu es complètement misogyne, Matsujun ! Enfin, ça m’est égal, ce n’est pas la première fois qu’il faut que je fasse mes preuves… - Lucie-chan !!!! C’est pour ça que tu es venue ? Je suis trop content ! On va pouvoir se voir souvent alors… Cette fois-ci, c’était Masaki qui, remis de sa surprise, avait interrompu la bataille verbale qui venait de s’enclencher entre Lucie et Jun en se précipitant pour enlacer la jeune femme. Ohno, lui, se redressa pour s’asseoir sur le canapé où il était jusqu’à présent étendu. - Jun, arrête ça, tu veux ! La Jimusho n’engagerait pas quelqu’un d’incompétent ou incapable de se tenir. Donc si Lucie-san a été engagée pour travailler avec nous alors qu’elle est fan, c’est qu’elle doit être plus que professionnelle. Lucie s’était dégagée des bras d’Aiba et s’était adossée à un mur pendant ces quelques mots. Jun avait baissé la tête un instant sous les reproches de Riida avant de planter son regard dans celui de notre nouvelle Ingénieure du son. Celle-ci lui rendit son regard avant de passer à chacun d’entre nous. - Merci Ohno-san. N’ayez crainte. Je n’ai effectivement pas l’habitude de m’immiscer dans la vie privée des personnes avec qui je travaille. Quand je ne peux pas faire autrement, sachez que j’essaye de cloisonner ma vie professionnelle et ma vie privée pour que l’une n’influence pas l’autre négativement. La seule fois où je l’avais entendue parler un japonais aussi formel, c’était quand elle avait dû saluer les invités de la noce au mariage de Teru. - Heu… t’es pas obligée de parler comme ça quand même, tu sais. On n’est pas des inconnus tout de même. - Je ne travaillerai pas qu’avec vous. Et puis, je sens bien que mon statut de fan dérange Matsumoto-san. - Laisse tomber, Lu-chan. Matsujun fait la tête depuis ce matin. A croire qu’il a eu une querelle d’amoureux. - Aiba-chan, tu n’es qu’un imbécile. En prononçant ces mots, Lucie faisait les gros yeux à notre ami puis lança un regard d’excuse à Matsujun. - Masaki, t’as pas une interview maintenant ? dis-je pour détourner l’attention générale. - Ah si ! J’y vais. Bye Lucie-chan. - A bientôt Aiba-chan. Quand ce dernier eut disparu, le sourire de Lucie s’évanouit. - Bon, eh bien, moi aussi je ne vais pas tarder à y aller. Ah oui ! Ohno-san… Pourras-tu dire à Teru que sa mère essaye de le joindre depuis hier soir… - Lucie ! Cette dernière s’arrêta net. Elle leva les yeux vers Jun qui me désigna de la tête. Jun se leva de son fauteuil et annonça à Lucie que, puisqu’elle partait, il la raccompagnait. Pourquoi Lucie demandait-elle à Riida de transmettre un message à Teru ? Pourquoi Jun réagissait-il aussi vite ? Je ne comprenais pas. Il y avait quelque chose que ces trois-là savaient et que j’ignorais. Quelque chose d’important de toute évidence. C’est Riida qui m’expliqua lorsque je parvins à le sortir de la somnolence dans laquelle il s’était enfoncé après le départ de Jun et Lucie. - Teru a quitté Cécile après le tremblement de terre. En attendant de trouver un nouvel appart’, il occupe ma chambre d’ami. - Héé ? Pourquoi il ne m’a rien dit ? demandai-je. Pourquoi il ne m’a pas demandé à moi de l’héberger ? - T’as qu’un deux pièces, moi trois. Et puis… Je sais pas moi. Je cuisine mieux que toi ? Je ne savais pas pourquoi mais cette excuse me parut encore plus pourrie que la première. Quoiqu’aucune des deux n’était fausse… mais je sentais bien qu’ils ne me disaient pas tout. - Ecoute, si tu veux plus d’infos, demande-les à Teru. C’est lui qui m’a demandé de ne rien dire. - Alors pourquoi Jun sait ? - Parce que Cécile me l’a dit le jour où je l’ai découverte en bas de chez moi, paumée. C’était Matsujun qui venait de parler en rentrant dans la pièce. Il retourna s'installer à la place qu'il occupait quand j'étais entré avec Lucie-chan sans ajouter un mot. Sauf, que je ne pouvais pas laisser passer ça comme si de rien n'était. - Paumée ? - Me fais pas répéter. Et je ne pense pas qu'elle aimerait que je raconte sa vie. T'as qu'à interroger Teru, c'est ton ami après tout. Maintenant, tu m'en voudras pas, j'ai des lignes à apprendre. Jun replongea dans son script et Riida en fit autant dans son carnet à dessin lorsqu'il se rendit compte que je le regardais observer son ex amant. Oui, il faudrait que j'interroge Teru-kun. Comment avait-il pu se séparer de sa femme si peu de temps après leur mariage ? Et surtout, pourquoi ? Il semblait si affolé en n'ayant pas de ses nouvelles le 12 mars... En pensant à Cécile-chan, en l'imaginant "paumée" comme l'avait dit Jun, je me pris à regretter de n'avoir pas pu être là pour elle. Teru avait-il seulement conscience de la chance qu'il avait eu de pouvoir l'épouser ? J'étais certain que trois Rinoka ne vaudraient jamais une Cécile. Je me promis de lui rendre visite sous peu, dès que j'aurais obtenu des explications de mon ami.
********************** ++Nino++
J’étais enfin dans l’avion après cette escapade désastreuse. Dire que j’avais bossé comme un cinglé pour obtenir ces 4 jours de totale liberté me permettant de m’envoler pour la France et tout ça pour des prunes. Parce que non seulement j’avais passé la majorité de mon temps en avion ou en train mais en plus, cerise sur ce gâteau branlant, Lucie n’était pas là. J’avais pataugé dans les joies du Japonais moyen dans un pays étranger. Sans interprète, il avait fallu que je me débrouille pour aller de l’aéroport à la gare qui, par miracle, était sur place. Mais le hic, c’était qu’il y avait deux gares et qu'elles étaient dans des terminaux différents et, évidemment, j’avais choisi le mauvais terminal. Dans tous les cas, après une dernière confrontation avec les employés de la gare pour acheter un billet, j’étais parvenu à monter dans le Shinkansen. Une fois dans le train, je ne savais plus si c’était mon anglais qui était plus nul que celui de Riida ou si c’était les Français qui ne savaient pas le parler mais je m’en foutais puisque j’étais parvenu à mes fins. Cela faisait déjà plus de vingt-quatre heures que j’avais quitté mon appartement. J’étais parti après ma journée de travail, et j’arrivai à Strasbourg éreinté et ne rêvant que d’un lit. J’entrai dans un hôtel en face de la gare et voulus y prendre une chambre. Le problème était que nous étions en fin de matinée et je dus négocier longuement afin d’obtenir une chambre avant 14h. Il était midi quand je pénétrai dans la pièce pour enfin pouvoir m’écrouler sur le lit. Dès la porte refermée, je me glissais sous la douche avant de m’enfoncer sous la couette. Malgré ma fatigue, je me réveillai deux couples d’heures plus tard. Comme nous arrivions en fin d’après-midi, je décidai une expédition jusqu’au grand studio où était basée Lucie et dont j’avais obtenu l’adresse grâce à Sho, qui l’avait demandée à Teru en février. Evidemment, elle ne travaillait pas là ce jour-là, mais avec un peu de charme à l’hôtesse d’accueil, j’obtins son adresse et un croquis avec les indications pour y parvenir. Vu le temps que j’avais perdu à trouver le studio, et le temps que je risquai de prendre pour arriver jusque chez Lucie, je décidai de remettre cette expédition au lendemain et regagnai mon hôtel avec pour objectif de surprendre la demoiselle peu de temps après son réveil. Le lendemain, je partais de bonne heure après avoir réglé ma note. Après une nouvelle balade dans le labyrinthe qu’était cette ville pour le touriste que j’étais, j’arrivais dans une zone de grands immeubles résidentiels et je fus arrêté par une porte et un interphone. … Je sonnais et une minute plus tard, un homme mesurant vingt centimètres de plus que moi, ouvrit la porte. - Ano… Is Lucie Bergevin here ? - No. She is gone in Japan. Japan ? Nippon ? Nan!!! Mais c’était pas possible ! J’avais vraiment pas de bol ! En janvier, j’avais loupé Lucie à quelques heures et maintenant, alors que je venais la retrouver chez elle, elle était chez moi ou presque ! J’avais vraiment la poisse. En me faisant cette réflexion, je réalisai qu’elle avait vraiment quelque chose qui me faisait agir différemment. Normalement, je n’aurais jamais couru après une fille comme ça. Maintenant, je n’avais plus qu’une chose à faire : rentrer chez moi. Ma tête dut inquiéter le géant blond qui avait ouvert la porte, parce qu’il m’invita à entrer. Je me demandais de qui il pouvait s’agir et lui me regardait avec un air indéchiffrable. Après m’avoir offert de partager son petit-déjeuner que nous avalâmes silencieusement, il prit la parole pour m’asséner quelques vérités dans un anglais efficace puisque je compris sans problème le fond de sa pensée. Soudain, je réalisai que lui savait qui j’étais alors que la réciproque n’était pas vraie. J’alignai les mots anglais dans ma tête pour former la phrase ad hoc et me lançai, lui demandant qui il était et pourquoi il habitait de toute évidence chez Lucie. Enfin je lui demandai comment il connaissait mon nom puisque je ne m’étais pas présenté. Il se présenta sous le nom de ‘Kusafie’ ou un truc comme ça, puis il ignora ma deuxième question pour me dire qu’il était ingénieur du son et que nous avions travaillé aux Etats Unis sur le même film il y a quelques années… mais à l’époque il était stagiaire. Vu le nombre d’assistants, stagiaires et arpètes en tout genre qu’il y avait sur ce tournage, il y avait peu de chance que sa tête m’ait marqué… Il me jeta hors de l’appartement quand lui-même s’en alla et nous prîmes ensemble un tram qui nous conduisit jusqu’au centre-ville où il m’abandonna un plan entre les mains. Je n’avais plus qu’à profiter du reste de ma journée pour faire du tourisme puisque mon train et mon avion n’étaient que le lendemain. Pour ma dernière nuit, je trouvais refuge dans un hôtel meilleur marché et ce fut les bras lourds de souvenirs pour mes camarades que je pris le train ce matin. Et maintenant, j’étais en plein ciel à ruminer ce voyage raté. Ce que j’avais de mieux à faire, c’était de dormir et c’est ce que je fis jusqu’à ce que je sois réveillé par un souvenir du tournage des lettres d’Iwo Jima.
- Flash Back - - Excusez-moi, Ninomiya-san. Accepteriez-vous de dédicacer cet album pour une de mes amies ? s’était incliné un mec, grand et blond, s’exprimant dans un japonais hésitant mais meilleur que mon anglais. - Fin du Flash Back -
Etait-ce vraiment lui ? Je me souvenais de m’être senti flatté qu’un non-Japonais nous connaisse et avais accepté de signer ce CD qui était le dernier que nous avions sorti. Mais pour qui l’avais-je dédicacé ? Je n’en avais plus la moindre idée… et soudain je réalisai que si c’était lui, il s’était fait un malin plaisir de se moquer de moi me laissant galérer en anglais alors qu’il était parfaitement capable de comprendre et s’exprimer en japonais. Ce type m’exaspérait vraiment !!!!
Voilà… la suite dimanche prochain… D’ici là laissez vos impressions. | | | Lun 2 Déc - 12:30 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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Humeur : en plein jetlag
| Coucou! Ça y est c’est déjà lundi et donc avec un peu de retard voici un nouveau chapitre de Jinsei. - Chapitre 27:
++Nino++
J’étais sur le siège passager de Manager-san, une feuille entre les mains qui était le programme de la journée. J’y avais jeté un coup d’œil et vu qu’avant les enregistrements des prochains VS, il y avait une réunion en fin de matinée avec le staff de l’émission dans les locaux de la chaîne. - Ohayô Ninomiya-kun ! Vous avez fait bon voyage ? L’enthousiasme de mon manager, qui était venu me chercher à la sortie de l’avion, avait quelque chose d’exaspérant pour quelqu’un qui, comme moi, venait de faire le tour du monde pour pas grand-chose. Mais je fixai un sourire fatigué sur mes lèvres, lui répondis vaguement et enfin je lui demandai l’heure. - 9 heures… - Alors, pouvons-nous passer par mon appart’ avant l’enregistrement, histoire de poser mon sac, de prendre une douche et de me changer ? - C’est prévu. Vous aurez une demi-heure pour… - Merci. Je rabattis ma casquette sur mes lunettes et fermai les yeux quelques instants jusqu’à ce qu’il m’annonce que j’étais arrivé. Je me douchai et me changeai en un temps record. J’envisageai de profiter du quart d’heure qu’il me restait pour allumer ma Wii quand je m’aperçus que mon répondeur clignotait. J’appuyai sur le bouton et la voix métallique pseudo féminine annonça un message datant de samedi. Bientôt une voix inimitable jaillit du haut-parleur. « Nino-chan ! T’es là ? Je parie que t’es vissé à tes jeux ! Je voulais te proposer de t’aérer demain. Matsujun, Cécile-chan, Lucie-chan et moi, on va au zoo. Alors si ça t’intéresse, rappelle-moi, autrement fais pas trop de folies ! » Quoi ? Non seulement Lucie était ici mais en plus elle avait rencontré Aiba ? Décidément, cette expédition avait été un désastre total. Quand j’avais la poisse, je ne l’avais pas à moitié. Dégoûté, l’envie de me jeter dans une partie pour oublier ce voyage inutile se faisait de plus en plus forte. Si forte que si j’y cédais, je serai incapable d’aller bosser après une malheureuse partie expédiée. Je décidai de rejoindre immédiatement mon manager et sa voiture afin de me consoler avec ma DS jusqu’à cette fichue réunion. - Vous avez été rapide Ninomiya-kun. Nous serons à l’heure et même en avance… - Ouais… super… marmonnai-je. Suzuki-san n’était vraiment pas bon pour sentir quand j’étais déprimé ou de mauvaise humeur, et il continuait à soliloquer. Soudain je captai dans son bavardage une information intéressante. - Manager-san, le nouvel ingé-son a été désigné ? - Oui, elle a accepté le poste hier et a déjà rencontré le reste du groupe. - Elle ? Si je ne me trompais pas, je venais d’additionner 2+2 et j’allais pouvoir retrouver Lucie dès demain à la JE. J’étais toujours aussi pressé que cette journée se termine, mais maintenant c’était parce que j’avais hâte d’être à demain pour me rendre à la Jimusho… Comme par magie, mon humeur s’améliora brutalement. ***********************
++Jun++ - Salut les gars ! Je levai les yeux de mon manga pour apercevoir un Nino guilleret pénétrer dans la salle d’attente. Ses quelques jours de congés avaient l’air de lui avoir fait du bien. Malgré les cernes qui prouvaient qu’il n’avait dormi qu’épisodiquement, il avait un sourire franc que je ne lui avais pas revu depuis… janvier ? Je replongeai dans ma lecture - Nino ? Ça va ? La voix de Sho était suffisamment sérieuse pour que je ressorte mon livre pour observer ce dernier. Il avait l’air surpris et ses sourcils étaient froncés alors qu’il observait notre joueur. - Oui ça va. Alors il parait que vous avez rencontré notre nouvelle ingé son ? - Ouais, c’est Lucie-chan ! C’est cool, ne ? Aiba était ravi, Nino grimaça légèrement et Sho tenta un changement de sujet. - Dis donc Nino ? Pourquoi t’as deux sacs aujourd’hui ? T’as pas eu le temps de passer chez toi en sortant de l’avion ? C’est vrai que normalement, Nino ne se baladait qu’avec une espèce de cabas contenant au minimum sa DS, un jeu de carte, une serviette et son téléphone. Mais aujourd’hui, il avait en plus un sac en papier avec des poignées en cordelette comme peuvent en fournir les boutiques chics. - Si mais… j’ai pensé à vous pendant mes vacances… - Tu nous as rapporté des souvenirs Neen ? - Mouais. Mais, je sais pas si toi tu le mérites… Ta vadrouille au zoo avec Lucie-chan, t’aurais pu me prévenir plus tôt quand même… - Ben j’ai eu l’idée vendredi et je t’ai quand même laissé un message. En fait, c’est mieux que tu sois pas venu, parce qu’elle t’en veut beaucoup… Je crois que t’aurais été dispo, elle aurait été capable de se défiler. Tu sais co… Ite ! Sho-chan… Sho-kun venait de couper la logorrhée masakienne à coup de journal, tout en roulant des yeux. Aiba-chan avait un don plus ou moins conscient, celui d’être capable d’appuyer là où ça faisait mal ; sauf que, avec Nino, c’était dangereux et, heureusement, Sho semblait en savoir suffisamment long pour arrêter notre collègue. Aiba changea alors de sujet pour poser la question qui me brûlait les lèvres. - Mais dis… T’es parti où ? - En France… En France ? Cet obsédé était allé en France ? Et je ne voyais qu’une seule raison pour laquelle il avait pu faire un tel voyage sur des jours de congés, et cette raison me paraissait incompatible avec le personnage de play-boy que Nino entretenait depuis des années. En réfléchissant, je réalisais que si je n’avais pas exactement été moi-même ces derniers mois, lui non plus. Je n’avais été en état de m’en apercevoir réellement, mais Sho semblait avoir pris les choses en main alors… - Tiens J, ça c’est pour toi. Je sortis de mes pensées pour ouvrir le sac que mon ami venait de me mettre entre les mains. Un tablier ! Il m’offrait un tablier avec dessus ce que je supposais être une recette et un piaf noir et blanc. La cigogne semblait d’ailleurs être le point commun de chacun de nos présents. Une peluche pour le baka, un T-shirt où elle disait : « Ich <3 Elsass » pour Riida, enfin Sho était en train de plonger dans un bouquin intitulé "les grands vins d’Alsace". C’est vrai que la passion de notre ami pour l’œnologie ne s’était jamais démentie et le prix qu’avait dû coûter le bouquin prouvait la gratitude du geek pour notre ami. Il avait même ajouté un crayon avec toujours le même volatile à bec rouge dessus. - Au fait, je suppose que Lucie loge chez Cécile ?[/font] - Elle y logeait oui, mais maintenant elle doit être dans l’avion, annonça Masaki après avoir regardé sa montre. Le sourire de Nino se fana lentement et il s’effondra à côté de moi sur le sofa. Puis il chercha sa DS et plongea sans ajouter un mot dans son jeu. - Allez Neen, courage ! Elle revient dans moins d’un mois et pour un an… lui chuchotai-je. ***********************
++Cécile++ Lucie partie, le reste de la journée occupée à l'ambassade à préparer une excursion dans un temple, cet appartement me paraissait si vaste, si vide... Je sentis mon estomac se révolter encore une fois. Mal, mal, je me sentais vraiment mal ! Pourquoi étais-je dans cet état ? Mon corps avait toujours réagi bizarrement au stress, à la contrariété, à mes sentiments en général. Mais là, quand même... Je voyais bien autour de moi que certains ne s'étaient pas non plus remis du 11 mars et des jours qui avaient suivi. Je savais aussi que l'éloignement de Teru n'y était pas étranger. Pourtant, je l'avais accepté. Alors que se passait-il donc ? Mon corps était-il juste en train de me hurler ce que ma tête ne voulait pas entendre ? Comme lorsqu'il avait bloqué ma respiration et toutes mes sensations quand je ne voulais pas comprendre que mon petit ami d'alors, malgré tout son amour, ne faisait que m'étouffer ? Toutes ces pensées, ressassées pendant le séjour de Lucie, tandis qu'elle dormait dans la chambre d'amis et que je contemplais hagarde la cuvette des toilettes, je n'en pouvais plus. Je voulais me les sortir de la tête. Et je ne connaissais qu'un seul moyen sûr dans cette ville étrangère. Une fois débarbouillée, l'air un peu moins cadavérique, j'attrapai mon téléphone en priant pour qu'il soit là, pour que je ne le dérange pas. - Allô ? Jun ?... Tu as prévu quelque chose pour les prochaines heures ?... Je peux passer chez toi ? ************************
++Sho++
Le tournage était terminé, l'émission dans la boîte, et nous enfin libres de nous occuper comme nous le souhaitions. Le retour de Nino, fraîchement débarqué de son avion, avait provoqué des suppositions sans fin de la part de notre baka favori. Evidemment, le gamer avait fait chou blanc, ou du moins pas obtenu ce qu'il voulait, et il était d'une humeur massacrante, même après avoir pu digérer son infortune pendant plus d'un tour de cadran dans l'avion. - Yosh ! gémit Aiba en étirant ses bras à l'horizontale. Bon, on fait quoi maintenant ? Je le soupçonnais de vouloir remonter le moral de notre voyageur. Et même si j'estimais que le sale gosse ne l'avait pas volé après tout, il avait fait des efforts, alors on pouvait bien le réconforter un peu. Vu sa tête quand il avait appris la présence de Lucie avec nous hier, je pensais moi aussi que la punition était suffisante. Pour l'instant. - Pourquoi pas une bonne petite soirée jeu. On va chez qui ? Légère hésitation dans la place. - Chez Nino, décréta Aiba. Y a tous les jeux qu'on veut là-bas ! Sacré Aiba ! Comptez sur lui pour empêcher les gens de fuir. Et comme son plan me paraissait bon... - Je suis d'accord. Au moins, si je perds, j'aurai moins de regrets. - Sho-chan, sourit Jun d'un air carnassier, tu VAS perdre ! Aiba approuva. Il avait gardé ses bras étendus et en profita pour attraper les épaules des deux silencieux, les poussant en avant. - Allez, on y va ! Vous, vous montez avec moi ! Jun, je te confie Sho. Comment ça, il me confiait à Jun ? J'étais parfaitement capable de conduire ! ...ah ! mais c'est vrai que l'ambiance n'était pas toujours au beau fixe entre le plus jeune et Riida. Et maintenant que j'avais été mis par hasard dans le secret des dieux quant à la raison de l'emménagement de Teru chez Ohno-kun, je pensais moi aussi qu'il valait peut-être mieux qu'il y en ait un qui soit en mesure de s'esquiver... Décidément, Aiba m'étonnerait toujours avec sa délicatesse. Une heure plus tard, Nino et Jun avaient chacun remporté deux courses sur Mario-kart. Aiba et Ohno eux se battaient pour la troisième place, le premier affichant ouvertement son bonheur à grand renfort de cris de victoire alors que le second arborait un sourire satisfait. Pour la première course, j’avais fini deux fois dans le ravin et à la dernière mon pauvre véhicule avait fondu dans les entrailles d’un volcan. Nino voyant ma tête s’allonger au fil des parties proposa de changer et de me donner une chance avec les jeux débiles de Wii party. Là, les chances se rééquilibraient et il le savait mais sa bonne humeur était revenue et sa compétition contre Jun n’en devenait que plus acharnée. Dans tous ces petits jeux, la moindre erreur était fatale pour nos deux gamins et c’était sans aucun remord que nous nous mettions à trois contre eux jouant individuellement. Un téléphone sonna. Le temps de mettre sur pause, et tout le monde sortit sa petite machine magique. Le gagnant était Ohno qui décrocha sans vraiment regarder. - Moshi moshi ?... Chez Nino... Hé !!!!!! Cette exclamation ne faisait pas partie de la conversation. Elle avait été provoquée par un Nino qui avait attrapé le portable et dont le sourire ne disait rien qui vaille. - Bonjour, je suis curieux de savoir à qui Riida parle de mon appart… Oh, Teru !! Salut vieux ! Alors qu'est-ce que tu deviens ? Ça fait un bail ! Tu bosses là, ou tu es chez toi avec ta petite femme chérie ?... Tu sors du boulot ? Super ! Viens te joindre à nous ! Sho en a marre de se faire rétamer par tout le monde. Il pourra peut-être se rattraper avec toi !... Bah ! de toute façon, ils squattent sans me demander mon avis. Il nous adressa l'une de ses plus belles grimaces. Mais ça ne me faisait pas vraiment rire. - Nino, il a sûrement plus envie de se reposer que de jouer ! - Mais nan !! Hein Teru, ça te pose pas de problème de jouer au célibataire pour un soir ?... Allez, on t'attend ! A toute'. Il raccrocha et rendit son téléphone à Riida. Je lui avais pourtant dis de clarifier un peu la situation vis-à-vis de Nino et Aiba-chan qui ignoraient tout. Histoire que son ex ne se retrouve pas dans ce genre de configuration imposée. Je glissais un regard vers Jun. Ce dernier, qui avait été chercher des boissons lorsqu'il avait compris que ce n'était pas son téléphone, avait posé sa bière sur la table et semblait légèrement déconnecté. Je fis un pas vers lui, prêt à tout. - Cool ! On va pouvoir faire des équipes de trois ! Ça va être encore plus drôle ! Aiba. Cher Aiba-chan. Tendre Aibaka. J'avais quelques doutes sur l'aspect comique de la situation que Nino nous avait concoctée. Mettre Ohno, Teru et Jun dans la même pièce en ce moment n'était pas vraiment l'image que je me faisais de l'humour. Ou alors, c'était de l'humour noir... Une nouvelle sonnerie se fit entendre. - Déjà là ? Waouh ! c'est un rapide. Aiba fonça vers la porte d'entrée. C'était effectivement Teru. J'avais oublié que son bureau se trouvait dans le même quartier que l'immeuble de Nino. - Salut vieux ! Ça faisait longtemps et ça fait plaisir ! Je posai ma main sur le bras de Matsujun. Il sembla reprendre vie à ce contact et me regarda. - Quoi ? murmura-t-il. Tu as peur que je fasse un scandale ? Je suis pas si stupide. Et puis... Il n'alla pas plus loin. Au moment où Teru entrait dans le salon, un autre téléphone sonna. Cette fois-ci, c'était celui de Jun. Comme il l'avait posé sur la table et que j'en étais plus proche que lui, je le pris pour le lui tendre. - Numéro inconnu. Peut-être une fan ? Tu devrais éviter de décrocher... Il haussa les épaules et ne tint pas compte de mon avertissement. - Moshi moshi ?... Oui ?... Ah! Hmm non, rien de spécial... Sans problème. A tout de suite ! Son visage s'était éclairé pendant le bref échange. J'ignorais qui c'était, mais au regard qu'il adressa à Teru, je vis qu'il avait pris ce coup de fil comme une bouée de sauvetage pour s'échapper. Et comme je le comprenais, je me refusai à l'obliger à rester. - Salut Teru ! Désolé, mais je dois partir. Vous allez être encore à cinq. Mais face à Nino seul, vous aurez peut-être une chance... Bye ! Tout en parlant, il avait attrapé sa veste et s'était dirigé vers la porte d'entrée. Je vis Ohno le regarder partir avec de la tristesse dans les yeux. **********************
++Jun++ C'est un rayon de soleil qui m'éveilla en taquinant mes paupières. Mon premier réflexe fut de me tourner pour me planquer sous mon oreiller. Mais mon corps reprenant conscience m'indiqua que je n'étais pas seul dans mon lit. Un autre corps s'accrochait doucement au mien. Et la mémoire me revint à mesure que j'émergeai. J'avais déserté la soirée chez Nino quand elle m'avait appelé. Je pensais bien que Sho l'avait compris comme un prétexte pour fuir Teru. Satoshi aussi sans doute. Mais peu m'importait. Quelle tête feraient-ils s'ils connaissaient le nombre de fois où, depuis un mois, nous avions passé la nuit ainsi, blottis l'un contre l'autre pour nous défaire de nos angoisses le temps de quelques heures? Mon réveil m'indiquant une heure qui me paraissait raisonnable, je passai une main dans son dos, doucement. Elle était toujours plus agréable quand on ne la tirait pas brutalement d'un sommeil pas toujours paisible. - Mmm ? Que... ? Elle replongea la tête dans mon épaule. - Nan ! Laisse-moi dormir encore un peu. - Eh !! Tu sais que ça chatouille ? Allez, parce que je suis de très bonne humeur ce matin, je vais te faire le petit-déjeuner de tes rêves. Tu veux manger quoi ? Elle échangea mon épaule contre mon oreiller et grommela : - Tartines. Beurrées. Thé. - C'est quoi ça ? demandai-je en me redressant. Ton goûter ? - Nan ! P'tit déj'. Si t'as pas, fiche-moi la paix !... Elle semblait près de se rendormir. Je sautai hors du lit. - Ok princesse, je vais voir ce que je peux faire pour satisfaire tes envies inconsidérées. Après une douche vite expédiée, j'enfilais des vêtements propres et sortis. Heureusement qu'il y avait une boulangerie française pas trop loin de chez moi ! Rapidement servi, je rentrai et lançai la préparation de ce qu'elle avait demandé. Puis je décidai d'aller la tirer du lit. - Ton thé, tu le veux à quoi ? lançai-je en poussant la porte de ma chambre. Le silence me fit croire qu'elle s'était vraiment rendormie. Mais le lit était vide. Et la chambre aussi. - Cécile ? Tu prends ta douche ? Tu veux de quoi te sécher ? demandai-je tout en me dirigeant vers la salle de bain. En revenant, j'avais vu que ses chaussures étaient toujours dans l'entrée. J'étais donc sûr qu'elle n'était pas partie. Et je ne voyais pas d'autre endroit où elle aurait pu se trouver. Sauf que depuis sa dernière visite, j'avais lavé les serviettes et qu'il fallait donc que je lui en donne une nouvelle. Collant mon oreille à la porte, je toquai doucement. - Cécile ? Tu es là ? J'ai fait une machine l'autre jour. Tu veux une serviette ? N'obtenant aucune réponse, j'hésitais un instant. J'allais reposer ma question quand j'entendis un bruit caractéristique. Quelque chose que j'avais souvent entendu après des soirées bien arrosées. Je ne tergiversai pas davantage et tournai la poignée des toilettes. La scène était bien celle que j'imaginais : elle était à genoux devant la cuvette, en train de vomir. Je me laissai tomber à côté d'elle et lui pris les épaules, ramassant ses cheveux épars. - Cécile ? Ça va aller ? Tu veux quelque chose ? Comment je peux t'aider ? Sa main lancée à l'aveuglette accrocha mes lèvres une première fois avant de se plaquer sur ma bouche. - Silence ! fut tout ce qu'elle put articuler avant que son estomac ne se soulève à nouveau. Son front était couvert de sueur et elle tremblait comme une feuille au vent. J'allai chercher un gant dans la salle de bain, le passai sous l'eau et m'en servis pour rafraîchir son front et sa nuque. Puis, voyant qu'elle semblait se calmer, je m'installai derrière elle pour pouvoir la prendre dans mes bras en appuyant son dos contre mon torse. Et je saisis quelque chose à ce moment-là. - Cécile, dis-je tout bas pour qu'elle ne le prenne pas pour une agression. Ça fait combien de temps que ça dure ? Je croyais que tu faisais un régime, mais ce n'est pas ça, n'est-ce pas ? Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Elle tremblait encore et se cala davantage dans mes bras. Comme pour y chercher de la chaleur. J'espérai qu'elle me répondrait sans que j'aie à insister. Parce que je ne savais pas si j'arriverais à rester calme longtemps. - Tremblement de terre. - Hm ?? Elle se tourna un peu dans mes bras, posant sa tempe sur mon épaule. Machinalement, je passai le gant sur son visage. - Depuis le tremblement de terre, dit-elle tout bas. Je sais pas pourquoi mon corps réagit comme ça. Il a toujours fait des trucs bizarres. Il a déjà bloqué ma respiration quand mon copain m'étouffait, fait tomber mes cheveux quand un autre me prenait la tête. Il coince régulièrement mes vertèbres quand j'en ai plein le dos. Il faut juste que je déchiffre ce qu'il me dit et que je règle le problème comme il faut. L'entendre faire des phrases me rassura un instant avant que je ne fronce les sourcils. Elle était vraiment persuadée que les choses s'amélioreraient comme ça ? - Mais ça fait un mois ! Tu es allée voir le médecin ? - Jun, le problème c'est que j'ai toujours poussé mon corps à faire ce que JE voulais sans tenir compte de ce qu'il était capable de faire. Alors il se manifeste comme il peut. Et c'est toujours un peu douloureux. Mais le médecin va faire quoi ? Régler les symptômes ? Et ensuite ? Ça reviendra, ou ça se manifestera autrement. Et ce sera sans doute pire. Il faut juste que je trouve où est le problème exact. Après, ça ira mieux. - Je préfèrerai que tu ailles voir un médecin en plus. C'est pas normal de perdre autant de poids. Je l'avais braquée, je le sentais bien. Mais j'étais vraiment inquiet. Je repensais à la couche de fond de teint qu'elle se mettait sur la figure depuis quelque temps. Je n'avais pas fait trop attention, habitué à voir des gens maquillés tout autour de moi. Mais je me rappelais maintenant que jusqu'à la Saint Valentin, je l'avais toujours vue avec quelque chose de très léger. Cela me fit songer à un autre aspect du problème. - Dis-moi, le tremblement de terre, ce n'est pas la seule raison. Teru en est une autre, non ? Elle frissonna. Bon, ça aussi, ça allait demander de la patience. - Cécile-chan, je veux juste t'aider. Fais-moi confiance, je t'en prie. Elle se recroquevilla dans mes bras. - Je te fais confiance Jun. Sinon je ne serai pas chez toi ce matin. Laisse-moi un peu de temps. Ça va aller. Je me suis imposé beaucoup de choses ces derniers mois. Oui, là-dessus, je voulais bien la croire. Je la serrai un peu plus fort, puis réalisai qu'être assise par terre sur le carrelage froid n'était pas nécessairement le meilleur traitement qu'elle pouvait recevoir. Je nous remis donc debout et pris son visage dans mes mains pour la forcer à me regarder. - Est-ce que tu veux bien me faire plaisir ? Elle pencha la tête sur le côté. - Tu vas rester chez moi aujourd'hui. Et te reposer. Je vais te faire une tisane et une soupe de riz. Ça devrait calmer un peu ton estomac. Elle sourit doucement. M'attrapant par la nuque, elle m'obligea à me pencher vers elle et déposa un baiser léger sur ma joue. - Tu es un amour, Jun. Mais là tout de suite, ce dont j'ai envie, c'est d'un petit-déjeuner normal. Tartines et thé. J'ai faim ! Je la regardai avec un gros point d'interrogation sur la tête. - Tu veux manger ça, tu es sûre ? C'est... - C'est bizarre pour toi, j'ai bien compris. Mais ça a toujours été mon menu du matin et mon appétit domine tout. Alors s'il te plaît, dis-moi qu'il y a des tartines qui m'attendent dans la cuisine. J'hésitais un instant, pas totalement convaincu que c'était ce qu'il lui fallait. Mais je savais déjà que ça ne servirait à rien de tenter de la raisonner. - Oui, tes tartines t'attendent. Tu veux prendre une douche pendant que je prépare le thé ? Elle acquiesça et me demanda le thé vert le plus basique possible. Cinq minutes plus tard, je la voyais débarquer dans la cuisine avec mon peignoir... J'avais oublié la serviette absente. Retenant une grimace face à mon étourderie, je lui versai un bol de thé odorant qu'elle huma avec un plaisir visible. C’est assis l’un en face de l’autre et en silence que j’entamai mon repas et qu’elle mordit dans sa première tartine. ***********************
++Nino++ Nous avions joué une bonne partie de la nuit. La désertion du Marvelous m'avait juste privé d'un adversaire à ma taille. Mais les affronter tous les quatre ensemble avait été un de mes plus beaux coups depuis le début de l'année. Malgré mon désir de les ratatiner encore un peu plus, j'avais dû abandonner l'idée quand la manette était tombée pour la troisième fois, sans que je m'en rende compte. C'était Sho qui m'avait secoué tout en me murmurant qu'il était plus que temps pour moi d'aller rejoindre le pays des rêves au fond de mon lit. Pas vraiment en état de protester, je m'étais laissé conduire jusqu'à ma chambre. C'est là que je me réveillai donc ce matin. Enfin, matin... j'ignorai l'heure qu'il était. Je n'étais qu'à moitié déshabillé, et soupçonnai le rappeur de n'avoir pas voulu aller plus loin que mes sous-vêtements. Oh-chan s'en serait bien fichu, et les autres aussi je pense. Sho restait quelqu'un de vraiment pudique malgré ses prestations plutôt sexy. Il allait falloir lui trouver quelqu'un pour qu'il se décoince un peu. Sur ces pensées un peu utopiques, je quittai mon lit en ramassant un pantalon et un t-shirt. Je les enfilai en comptant prendre une douche après le repas pantagruélique qui m'attendait forcément. Arrivé dans mon salon, je pus contempler une scène qui, bien que touchante, me garantissait une préparation personnelle de mon petit-déjeuner. Sauf si je m'arrangeais pour qu'ils se réveillent. Mais jusqu'à quelle heure avaient-ils joué ?... ************************ Je ne savais pas où j'étais. Ça n'avait pas vraiment d'importance, parce que de toute façon, il y faisait beau. Et j'étais en charmante compagnie. C'était une jolie jeune fille, souriante et pleine de vie, que Lucie-chan m'avait présentée. - Aiba-chan, voici Shigeru. Elle a toujours rêvé de te rencontrer. Elle aime la musique et les animaux, comme toi. Je te la confie ! Je ne savais pas où Lucie-chan avait disparu, mais Shigeru s'était blottie contre moi. Je l'entourai de mes bras rassurants et voulus la cajoler. Sa voix était un peu basse d'émotion, mais le contour de son visage arrondi et ses lèvres tendres sous mes doigts me donnèrent envie de l'embrasser sans discuter. Je me penchai donc vers elle doucement... ************************ Je trouvais que j'étais vraiment mal installé dans mon fauteuil. Si mon chef passait, j'allais me faire sermonner, et j'étais certain que mon dos n'apprécierait pas longtemps d'être autant affalé. Pourtant, je n'avais aucune envie de me redresser. Je me serais plutôt bien vu L'appeler pour lui faire quitter son émission et profiter d'un moment agréable tous les deux. Avais-je rêvé mon appel ? Comment avais-je osé ? Je n'en avais aucune idée, mais toujours était-il que nous étions tous les deux dans mon bureau, moi dans mon fauteuil et lui me surplombant. Sa main me déshabillait savamment tandis que sa bouche tétait ma peau. Ses longs doigts approchaient ma ceinture. Allait-il les faire passer dans mon pantalon ? Je le souhaitais de toute mon âme, même si je savais ce que nous risquions si nous étions surpris. **************************** Je sentais son souffle chaud errer sur ma joue puis mon nez. Ses lèvres s'approchaient des miennes avec une terrible lenteur. Mon corps se tendit dans l'attente. Etais-je prêt pour cela ? Si elle le voulait, je le ferai. Je ne la forcerai pas, mais j'étais d'accord pour tout ce qui la tentait. Si ça pouvait rendre le sourire à ses yeux las. Sa main caressa ma joue et je sentis son souffle s'approcher encore. Je crus partir au paradis quand ses lèvres effleurèrent les miennes. *************************** Je connaissais cette odeur. Je l'aimais. Elle me paraissait excitante. Douce. Forte. Musquée. Mâle. C'était Son odeur. Je savais que je ne pourrais plus m'en passer maintenant que j'y avais goûté. Il portait une chemise. Je la sentais contre ma joue. Sans ouvrir les yeux, je laissai ma main défaire les boutons qui m'empêchaient de passer ma langue sur sa peau. Mon forfait accompli, je tournai légèrement la tête pour poser mes lèvres sur son torse. Je sortis un petit bout de langue pour humidifier la peau qu'elles touchaient avant de transformer le geste en suçon. Pendant ce temps, ma main avait poursuivi son cheminement et glissé le long de ses côtes, caressant son ventre et atteignant sa ceinture. J'ouvris celle-ci sans plus attendre, m'attaquant ensuite au bouton et à la fermeture éclair de sa braguette. J'allais enfin plonger ma main vers son entrejambe quand elle fut attrapée par une autre. Contrarié, j'ouvris un œil fâché. ************************
++Nino++ Finalement, j'avais hésité en découvrant mes amis dans mon salon. Il semblait que tout était urgent, à commencer par mon estomac qui râlait, mais il y avait quelque chose que je ne pourrai pas gérer, j'en étais sûr. Et c'est donc cela que je choisis d'interrompre. - Hé !! Evidemment, Oh-chan n'appréciait pas d'être coupé dans son élan. Mais si nous l'avions tous surpris avec la main dans le caleçon de Teru, je pensai que la situation aurait été bien plus délicate. Et c'est ce que je m'employai à tenter de lui faire comprendre à mi-voix alors que je le redressai en l'écartant de notre ami. - Oh-chan, c'est pas Jun ! Et Teru est marié... Celui-ci reprit également pied dans le monde réel et se redressa sur son coin de canapé. Il sembla comprendre assez rapidement ce qu'il se passait et posa une main sur l'épaule de Riida. Je me tournai vers lui pour le saluer. Mais ne pus aller plus loin devant les yeux ronds qu'il affichait. Après un bref coup d'œil à l'autre, Ohno et moi regardâmes dans la même direction que lui. Je crus que ma mâchoire allait traîner par terre. J'avais vraiment pensé qu'ils se réveilleraient avant... Aiba, à demi couché sur Sho, était en train de l'embrasser langoureusement. Et le rappeur rendait le baiser avec chaleur. Et force petits gémissements. Enfin... jusqu'à ce qu'ils ouvrent les yeux l'un et l'autre. Et c'est avec un ensemble parfait qu'ils se reculèrent en poussant un cri semblable. - Non mais ça va pas ? Qu'est-ce qu'il te prend ? Sho, manifestement choqué, s'en prenait vigoureusement à Ma-kun. Celui-ci, encore ahuri de ce qu'il venait de se passer, n'arrivait pas à articuler un son. On aurait cru un poisson hors de l'eau. - Hey ! Sho ! Calme-toi mon vieux. Vous dormiez tous les deux. Il l'a pas fait exprès... Le rappeur se tourna vers moi, l'air encore plus furieux qu'Ohno quand je l'avais interrompu. - Et ça t'amuse de nous laisser faire des conneries pareilles ? Tu pouvais pas l'arrêter ? - Eh bien, disons que vous avez été trop rapides pour moi. Et puis, vous auriez pu aimer ça, après tout. - Oi ! Me confonds pas avec Jun ! - Sho-chan, je suis désolé. Je rêvais que j'étais avec Shigeru et... - Shigeru ? C'est qui ça ? Je ressemble à une femme ?? - Bah... non, bien sûr. Sho, qui s'était retourné vers Aiba pour râler, revint vers nous trois. Je crus voir une certaine colère dans son regard. Et un Sho en colère, c'était vraiment pas bon. Surtout si tôt après le réveil. - Dis donc Teru ! C'est quoi cette tenue ? Décidément, il avait beau avoir les cheveux noirs et les lèvres rouges, notre caster n'avait pas grand-chose à voir avec Blanche-Neige. Ou le baiser du Prince n'était pas assez efficace... - Hey ! Ça va hein ! Dans la mesure où vous avez squatté le canapé le plus large, c'est logique que Teru et Ohno se soient partagé l'autre. Riida a dû le confondre avec Jun et Teru-kun n'ayant pas l'habitude de dormir sans sa femme, il a cru que c'était elle. Je posai mon regard sur le torse du trader dévoilé par sa chemise ouverte et dit en souriant d'un air entendu : - D'ailleurs, elle aussi, elle doit être du genre hentai. T'as plein de marques partout mon vieux. Heureusement que tu ne fais pas de photos torse nu. Les deux nigauds en face de moi rougirent l'un après l'autre comme des fillettes. Mais Ohno semblait vraiment gêné. Me rappelant soudain de quelque chose, j'attrapai sa main et le mis debout avant de le tirer après moi jusqu'au studio, laissant les autres en plan. - Excuse-moi Riida, dis-je une fois la porte fermée. J’aurai peut-être pas dû parler de Jun… - Ça va, t’excuse pas. Tu n’avais pas complètement tort, sauf que je n’ai pas confondu Teru avec Jun. N’oublie pas, c’est moi qui l’ai quitté, et je ne sais pas jusqu’à quel point il m’en veut encore. Bon, et si on préparait quelque chose à manger ? Parce qu'un réveil aussi bruyant nécessite de prendre des forces pour pouvoir affronter la journée. Riida s'était dirigé vers la porte dans le but évident de sortir mais je me collai au panneau de bois pour l'en empêcher. - Riida... Toi et Jun, ça peut pas se recoller ? Il m'observa un instant et soupira doucement. - Nino... J'ai déjà répondu à cette question. - Mais tu l'aimes toujours, non ? - Pas de la manière qu'il faudrait pour qu'on reforme un couple. Je n'étais pas si convaincu. - Vous vous êtes engueulés le mois dernier, mais ça s'est recollé, non ? - Nino, arrête. J'aime beaucoup Jun, mais je n'entrerai plus jamais dans son lit. Peut-être qu'un jour il ne m'en voudra plus et que nous pourrons à nouveau rire ensemble, mais pour le moment, on en est loin. C'est ton ami, tu devrais savoir tout ça. Je grognai indistinctement que mon ami ne me tenait pas beaucoup au courant de sa vie ces dernières semaines. Mais, avant qu'Oh-chan n'ait pu me faire répéter, Teru avait frappé à la porte dont je m'écartai en râlant pour l'ouvrir. - Dis, Nino, pendant qu'Aiba-kun prend sa douche, Sho et moi essayons de préparer le petit-déj, mais on ne sait pas où tu as rangé les bols ? - Teru, je vous aime beaucoup tous les deux, mais je ne veux pas vous voir dans ma cuisine ! Riida, suis-moi, on va éviter le désastre! Il me suivit et nous commençâmes à préparer de quoi caler les estomacs de tout le monde dans un silence relatif.
Pouvez-vous dire de qui sont les POV lors de réveils...? XD A dimanche prochain | | | Dim 8 Déc - 4:28 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| Bonjour! On est dimanche!!!! bonne lecture - Chapitre 28:
Mardi 5 avril 2011 Cher journal, Je suis partie du Japon il y a une demi-journée mais nous sommes toujours le même jour : ce sont les joies du décalage horaire… et je suis maintenant de retour à l’appartement. A partir de maintenant les choses vont s’accélérer : il va falloir que je passe le relais à mes collègues, que je fasse mes cartons, que je trouve quelqu’un pour reprendre l’appart’ momentanément et enfin que je récupère mon dossier médical pour faire le suivi. Enfin il y a Matthias, je dois lui parler au plus vite. J’en avais déjà l’intention mais, je ne peux pas attendre plus ce ne serait pas juste pour lui.
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++Sho++
"Bonjour Rinoka, c'est Sho. Je me doute que tu dois être très occupée en ce début d'année scolaire, mais il y a quelque chose dont je voudrais te parler. Quand tu auras ce message, rappelle-moi, merci." J'avais choisi le biais téléphonique pour mettre un terme à cette histoire qui n'en était une que dans la tête de nos parents. Je savais très bien que je ne lui rendais pas une liberté qu'elle n'avait pas perdue mais utilisée à sa guise pendant ces quelques semaines... mois, deux mois et demi, on peut dire "mois". Nous ne nous étions pas vus souvent, et si nos rencontres charnelles étaient tout ce qu'il y avait de plus torride, nos discussions au réveil se résumaient en quelques mots rapides. J'avais parfois eu le sentiment qu'il ne manquait en fait que l'argent que j'aurais pu laisser sur la table de chevet. Mais je savais que cette impression n'était due qu'à mon romantisme trop poussé qui me faisait considérer nos échanges sans tendresse d'un œil réprobateur. Les autres avaient peut-être raison, finalement. J'étais sans doute coincé. Je voulais juste vivre une histoire d'amour vrai. Même si je n'étais pas sûr de savoir ce que ce terme recouvrait exactement. Quand Rinoka-chan m'avait rappelé, je m'étais forcé à m'asseoir pour me concentrer sur notre conversation et lui accorder l'attention qu'elle méritait. Ce fut donc assis sur mon canapé, face à la Tour de Tokyo qu'elle m'avait rendue si évocatrice, et après m'être excusé pour la façon dont j'agissais, que je lui expliquai de la manière la plus neutre et la plus douce possible que nous ne nous reverrions plus. Mais sans lui dire que c'était parce que mon corps n'aurait sûrement pas manqué de réagir à ses avances si elle avait été devant moi. - Et ? demanda-t-elle après quelques secondes pendant lesquelles mon malaise croissait. - Eh ! bien, je... je ne voudrais pas que tu sois trop affectée par... Son rire m'interrompit. - Voyons Sho-chan ! Il n'y avait que nos mères pour s'emballer. Toi et moi, ça n'a jamais été sérieux ! Tu m'as fait prendre mon pied, tu as pris le tien, et voilà tout. Tu ne devrais pas accorder tant d'importance à ce genre de bêtises et faire comme moi : profiter des avantages que t'offre ton corps de rêve. Allez, console-toi vite et trouve-toi un autre coup. Et si jamais tu te sens seul, tu peux toujours revenir me voir, tu as mon numéro. Bye ! Elle attendit quelques secondes encore avant de raccrocher mais j'étais trop soufflé pour lui répondre quoi que ce soit. J'étais à la fois soulagé que ça se soit passé si calmement, et en même temps, je me sentais un peu frustré. Je n'avais été que ça pour elle ? Un "coup" ? Une tête de plus accrochée à son tableau de chasse ? Mon ego s'en trouvait soudain bien égratigné. Mais quand, après avoir pris une douche et m'être préparé à sortir, j'avais rejoint mon manager, je m'étais fait la réflexion que : heureusement que j'avais clarifié les choses aujourd'hui. J'aurais pu tomber amoureux d'elle avec le temps. Et aimer une femme aussi frivole ne pouvait que mener dans le mur. Or, je n'avais pas de temps pour ça. Et bien qu'au début, quand je m'étais rendu compte que celle que j'estimais le plus se trouvait être l'épouse de mon meilleur ami, je m'étais senti très mal à l'aise, je me disais que finalement, je devrais peut-être remercier Teru d'avoir quitté sa femme, même si le fait qu'il l'ait fait pour vivre avec Riida posait d'autres problèmes. Comme le fait que n'importe qui venant rendre visite à Riida risquait de se retrouver comme moi face à la preuve de leur vie commune. Le lendemain du soir où j'avais découvert leur secret, j'avais suggéré à Ohno-kun d'au moins installer un lit pour son soi-disant invité. Dans son salon ou dans son atelier, ça n'avait pas d'importance, mais au moins ça. Et suite à cette découverte, je m'étais senti légitimement autorisé à chercher à joindre Cécile-chan dont je n'osais imaginer l'état, même si la petite phrase de Jun m'en disait déjà quelque chose. J'avais essayé de l'appeler, mais elle semblait très occupée, et j'étais moi-même pas mal pris par mon emploi du temps de dingue. Mais elle répondait à mes mails, même si c'était à des heures indues. Quand je lui en avais fait la remarque, elle m'avait répondu qu'elle travaillait mieux la nuit. Je m'étais excusé pour l'attitude déplorable de Teru et elle m'avait remercié poliment tout en me disant que je n'étais pas responsable. Ce n'était pas tout à fait faux, mais avec ces années de recul, je me disais que si j'avais poussé un peu plus Teru à se déclarer au lieu de rester spectateur, elle ne se serait sûrement pas retrouvée mariée à un gay refoulé. Même si ça, je n'étais pas sûr de pouvoir le lui avouer un jour.
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Mercredi 6 avril 2011 Cher journal, J’ai vu Matthias tout à l’heure et tout est terminé même si rien n’avait vraiment commencé. Avant de partir il m’a dit qu’il avait deviné la raison de mon appel hier soir et qu’il me souhaitait bonne chance. Bonne chance ? La chance n’a rien à voir avec mon boulot ou mon séjour au Japon je crois. Quant à l’autre Geek, je ne le laisserai jamais approcher assez près pour qu’il me blesse à nouveau. J’ai aussi commencé les démarches à l’ambassade. Un tas de papiers à remplir, voilà mon programme de la soirée et en triple exemplaire s’il vous plait… Ô Joie… Demain je me renseigne pour le transport des bagages. La bonne nouvelle c’est que je n’ai plus à mettre d’annonce pour trouver quelqu’un pour garder l’appartement pendant cette année d’absence. C’est Xavier qui reprend tout : boulot et l’appart’. C’est un souci de moins, et surtout, moins de bagages à faire. Ben et ses parents pourront continuer de vider tranquillement les affaires de Cécile, et moi je n’ai pas besoin de laisser au garde-meuble ce que je ne veux pas emporter. Je viens d’être sonnée, Cécile j’arrive.
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++Aiba++
- Ma-chan ? T’as eu des nouvelles de Lucie-chan ? Nous venions de terminer de tourner le nouveau segment des himitsu quand Nino m’avait posé cette question. Il venait de couper son téléphone et était visiblement contrarié. En même temps, il n’était pas le seul, ce matin j’avais discuté avec Lucie et elle me disait qu’elle en avait marre d’être envahie par les messages de celui qu’elle n’appelait plus que « le Geek ». - Nino… Tu devrais lever le pied sur les appels, Lucie est encore plus fâchée par ton insistance. Je suis sûr que si tu attends qu’elle soit là, tu pourras mieux t’expliquer avec elle. - Mais je voudrais juste savoir quand elle arrive. Je veux qu’on discute avant qu’on ne commence à bosser ensemble, pour pouvoir partir sur de bonnes bases… - Laisse-lui du temps, Nino. Là, elle en a pas. - Parce que nous on en a ? - Plus qu’elle en ce moment, oui. En plus de son boulot, elle prépare son arrivée et c’est fou ce qu’il y a comme paperasse à faire, et puis y a toute l’organisation, et… dis, je m’étais pas rendu compte que c’était aussi compliqué quand on déménage. - Peut-être parce que t’as jamais changé de continent ni même de pays, et que, quand on voyage, c’est toujours ou presque nos managers qui s’en occupent. Mais je te jure que c’est galère de se débrouiller sans assistant dans un pays étranger, crois-moi. Alors un déménagement… C’est vrai, t’as raison, je vais lui fiche la paix un peu, elle sera peut-être dans de meilleures dispositions ensuite. J’approuvai la décision de Nino d’un sourire et dix minutes plus tard nous nous séparions pour poursuivre nos emplois du temps personnels. J’avais maintenant un tournage dans un zoo à assurer. J’allais dire au revoir à Nino quand je vis qu’il était au téléphone. - … - S’lut ! Dis, t’es libre ce soir ? - … - Chez toi ou chez moi ? - … - Ok je t’attendrai ; à demain alors… et … merci. Il raccrocha et se tourna vers moi. - Tu pars ? - Oui je suis attendu sur le plateau de Tensai… et toi ? - J’ai une interview et j’ai fini pour aujourd’hui. - C’est pas tout à fait vrai… Tu sors avec qui demain ? En disant cela, je désignai d’un coup de tête le téléphone qu’il avait encore à la main. - Masaki… Alors pour Shigeru, t’as pris une décision ? - Co… comment tu sais ça toi ? - Tu as prononcé son nom l’autre matin avant d’embrasser Sho… Gokuro sama desu… Ce foutu gamin sortit de notre vestiaire en riant et je regardai la porte se refermer, encore figé par ce qu’il venait de débiter. Shigeru… comme si c’était simple avec lui… Je me passais les mains dans les cheveux, me frictionnant fermement le cuir chevelu pour me remettre les idées en place. J’avais encore du boulot ce soir.
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++Nino++
Masaki avait raison. Insister autant sur le téléphone de Lucie n’aurait que des conséquences négatives. Déjà, je risquais de la braquer, et puis je n’avais pas envie de recommencer à tripler ma facture téléphonique comme je l’avais fait en février. J’avais encore en travers du portefeuille le prix de mon dernier voyage… J’avais besoin d’un plan et pour cela de conseils sur comment entrer dans les petits papiers de quelqu’un qui semble hostile à cette idée. Mais à qui ? Jun ? En ce moment, il n’était pas disponible ; et en plus, je ne voulais pas l’ennuyer avec mes histoires alors que la sienne était aussi misérable. Sho avait eu sa chance et ses conseils n’avaient pas eu les résultats espérés. Aiba avait clairement choisi le camp de Lucie et puis, je n’avais pas envie de le faire souffrir en lui faisant évoquer les souvenirs qu’il avait eus avec sa chère Kotomi. Leur rupture lui avait suffisamment brisé le cœur comme ça, et dans quelle mesure ça avait influé sur sa santé et fait partie des petites choses qui avaient entrainé son pneumothorax… Restait Riida, mais ce dernier ne me semblait pas le mieux placé pour me conseiller parce qu’il n’avait jamais eu à faire d’effort pour gagner le cœur de son seul amour… c’était Jun qui avait fait tout le boulot. Et puis de toute façon, Oh-chan m’évitait depuis l’autre nuit chez moi. Il cachait un truc et ne voulait pas m’en parler. Une fois ces quatre-là éliminés de ma liste, il ne restait plus grand monde auprès de qui … mais je sus soudain très exactement à qui m’adresser. Lui aurait sûrement une expérience intéressante à partager. Je profitai du fait qu’Aiba soit occupé à se changer pour dégainer mon téléphone et l’appeler.
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++Ohno++
Où donc était passé Jun ? Deux minutes plus tôt, il était à côté de nous, discutant avec l'équipe du tournage de ce que l'on allait faire, et à présent, il avait disparu de la circulation. Ce n'était pas que je recherchais à tout prix sa présence. Depuis notre séparation, je sentais bien qu'il m'évitait plus ou moins, même s'il donnait admirablement bien le change devant les autres. Et je me sentais suffisamment mal vis à vis de lui pour ne pas chercher à le brusquer. Mais j'avais je crois de bonnes raisons de préférer le garder en vue sur ce tournage. Nous étions là pour faire un reportage sur le matsuri d'un temple qui aurait dû se dérouler le 12 mars et avait été reporté d'un mois. Nous, c'est-à-dire Aiba, Jun et moi. Le staff qui nous accompagnait était composé pour une bonne partie de personnes que l'on connaissait bien. Il y avait aussi une toute nouvelle coiffeuse qui avait tenté de convaincre Jun de se faire quelques boucles et un photographe avec lequel Aiba avait voulu engager la conversation. Mais le gars était étranger et ne parlait pas très bien notre langue. Jun avait réussi à échapper à la Figaro féminine grâce à l'assistant réalisateur que nous connaissions depuis quelques années, un certain Ginta. Et Jun étant souvent en relation avec le staff pour l'organisation des concerts et autres, il devait effectivement le connaître mieux que moi. Il était venu le chercher soi-disant pour lui demander son avis sur les scènes qui devaient être filmées. Je les avais suivis quelques pas en arrière et avais entendu le gars expliquer à Jun sur le ton de la confidence qu'il avait voulu le sauver des griffes de la petite nouvelle. Mon Matsujun étant ce qu'il était, il l'avait remercié avec un sourire adorable, et le type avait semblé aux anges. Mais je me souvenais très bien avoir déjà vu ce Ginta errer aux alentours de notre loge lors de certains de nos concerts. J'avais presque dû montrer les dents pour l'éloigner une fois et il avait affiché un petit air innocent, mais j'étais quasiment sûr de l'avoir pris en presque flagrant délit de matage de Jun en train de se changer. J'étais bien placé alors pour savoir à quel point il était plaisant à observer, mais il ne se montrait que lorsqu'il le voulait, et s'il le voulait. Et même pour moi, tout n'était pas toujours gagné. Alors, voir ce petit moustique oser prétendre à ce qui lui était interdit, m'avait mis en rogne. J'étais donc décidé, aujourd'hui où je ne pouvais plus le protéger comme avant, à le surveiller afin de lui éviter de trop se frotter à ce poison. Les premières prises s'étaient déroulées sans problème, Jun interrogeant un moine sur l'importance de cette fête et les raisons de cette date peu commune, Aiba voulant participer à la procession et moi admirant le cadre magnifique et les poissons multicolores qui ornaient les bassins du jardin. J'avais toujours au coin de l'œil la chemise bariolée et la casquette noire du gars Ginta. Jusqu'à ce que l'échafaudage de troncs destinés à être brûlés pour réchauffer l'atmosphère plutôt froide de la saison s'écroule pour une raison qui m'échappa. Cet effondrement ne fit heureusement pas de victime et l'équipe se regroupa pour décider de ce que nous allions faire. Les seules choses qui nous restaient à filmer étaient l'arrivée de la procession et l'allumage du bûcher. Mais l'un était par terre, et l'autre s'était éparpillée au fracas qui avait secoué le temple. Bientôt, quelqu'un vint nous annoncer que la structure de bois serait vite remontée, les machines étant encore sur place. Et le réalisateur venait de décréter une demi-heure de pause lorsque je me mis à chercher Jun du regard. Mais je ne le vis nulle part autour de moi. Ni parmi les gens du staff. Aiba, me voyant observer les autres, se rapprocha et me demanda ce que je faisais. - Tu n'as pas vu Jun par hasard ? J'ai l'impression qu'il s'est volatilisé. - Bah tu sais, je le surveille pas tout le temps non plus. Il est grand, il va pas se perdre. Et on a une demi-heure devant nous. Ça te dit pas d'aller voir comment ils remontent leurs troncs ? - Non, merci. Je préfère m'assurer qu'il va bien. Aiba me regarda avec curiosité et une certaine réserve. - Tu sais Riida, je suis pas sûr que ce soit une bonne chose, ce que tu fais là. On a l'impression que t'es toujours amoureux de lui. Tu regrettes de l'avoir quitté ? Je le fixais à mon tour, hésitant à lui répondre. Soudain je me remis à scruter les alentours avec attention et un peu d'inquiétude, cherchant à démentir l'impression désagréable qui me nouait l'estomac. Mais je dus me rendre à l'évidence. La chemise bariolée avait disparu aussi.
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++Jun++
- Désolé, j'ai pas vraiment de temps. Ça va être rapide. Mais on va faire ça bien quand même, hein ? Tu ne le regretteras pas, promis. Mon vis-à-vis hocha la tête, l'urgence du moment lui apparaissant visiblement tout autant qu'à moi. Les autres auraient pu nous tomber dessus n'importe quand. J'espérais juste qu'ils ne m'avaient pas vu disparaître derrière le temple. Ça me laisserait un peu plus de temps et de latitude. Depuis que Toshi m'avait quitté, je n'avais plus eu l'occasion de me retrouver dans ce genre de situation. C'était excitant même si quelque part c'était tout aussi inquiétant. Toshi savait comme moi ce que nous risquions et ce qu'il fallait à tout prix éviter de faire. Cette fois-ci, j'allais devoir gérer seul pour deux. J'entrepris de lui enlever le bas, puisque sa chemise était déjà grande ouverte. Ses mains s'attaquaient à mon pantalon, mais lorsqu'il fut ouvert, je lui attrapai les poignets pour les plaquer contre la cloison. - Je m'en occupe, chuchotai-je. Ne pense qu'à me plaire, oublie tout le reste. - Te plaire ? Comment fait-on pour plaire au Marvelous ? - En me laissant faire ce dont j'ai envie. J'écrasai ma bouche sur ses lèvres, les mordillant avant de lancer ma langue à la rencontre de la sienne. Elles s'enroulèrent l'une autour de l'autre avec avidité, manquant de nous couper le souffle. J'aimais cette sensation de fébrilité que faisaient naître l'urgence et le risque. Mes mains caressaient son torse, glissant jusqu'à ses fesses avant de plaquer son bassin contre le mien. Je maintins la position d'une main quelques instants, pendant que je baissais mon pantalon juste le nécessaire pour me libérer de mes prisons de tissu. Une fois ma virilité en évidence contre sa peau, je récupérai ce que j'avais mis dans ma poche de veste juste avant, tout en m'écartant légèrement. J'avais déjà ouvert le préservatif et l'étirai rapidement sur ma longueur puis étalai le gel dessus. Ceci fait, je me baissais un peu tout en relevant l'une de ses jambes que je calai sur ma hanche. - Pas de préliminaires, c'est ce que j'avais dit. Je n'eus pour réponse qu'un hochement de tête accompagné d'un marmottement de sons inintelligibles puisque j'avais replacé ma langue dans sa bouche. J'attrapais son autre jambe pour la mettre au même niveau que celle que j'avais déjà relevée. Je savais que même si je l'avais voulu, je n'aurais pas pu être plus soigneux dans ma préparation de son corps, trop excité pour me retenir encore. J'ignorais même si j'allais pouvoir durer assez longtemps pour l'entraîner à m'accompagner dans la jouissance. J'espérais que son excitation était aussi grande que la mienne. Je parvins toutefois à restreindre ma fougue pour me glisser dans son corps sans trop de brutalité. Mais lorsque je fus totalement engainé, je ne pus retenir ni le gémissement, ni le tremblement qui me saisirent. J'avais envie de commencer immédiatement des va-et-vient rapides et forts. Je voulais lui faire perdre la tête et la perdre en même temps. Et je m'y employai avec autant de délectation que de précipitation. Sa tête rejetée en arrière, son corps que je serrais contre moi m'était totalement abandonné. Je ne pus m'empêcher de poser mes lèvres sur cette peau offerte. Et mon baiser se transforma en quelque chose de plus sauvage. Ma main se plaqua sur sa bouche pour étouffer le cri de douleur que je venais de faire naître. J'allais laisser une marque... - Tu as de quoi dissimuler ça ? murmurai-je inquiet en cessant mes mouvements. - Je trouverai, fut la seule réponse que je parvins à lui arracher après plusieurs tentatives pour obtenir son attention. - Tu aimes ça, hein ? Je peux faire mieux encore si tu veux. - Tais-toi et bouge ! gémit sa bouche avant de fusionner avec la mienne, son corps se soulevant légèrement à la force des mollets croisés dans mon dos avant de se rabattre sur mon bassin. Ma main lâcha sa taille pour venir caresser son bas-ventre, lui tirant de nouveaux gémissements que j'étouffais autant que possible par mon baiser. Mes yeux entrouverts me laissaient voir un spectacle d'un érotisme qui me stimulait au plus haut point. Le désir que je voyais sur son visage, le plaisir que j'y faisais naître, tout concourrait à me rendre encore plus exigeant. Et je sentis la tension se rassembler dans mon périnée. Je ralentis mes mouvements, les rendant plus amples et puissants. Je voulais faire durer encore un peu ce moment unique. Et soudain, je sentis que je n'avais pas été le premier à atteindre le septième ciel. Son corps se tendit, ses mains s'enfoncèrent dans mes épaules et sa bouche voulut se séparer de la mienne pour crier. Mais je ne la laissai pas faire, la gardant presque enfermée dans mes lèvres. Et l'orgasme me saisit à mon tour, me faisant perdre toute notion du temps et de l'espace. Quand je revins à ce qu'il se passait autour de moi, ses bras étaient encore autour de mon cou, mais l'une de ses jambes était redescendue au sol, l'autre seule s'accrochant encore à ma taille. Mon corps plaquait le sien contre le mur auquel il était adossé. Quand je libérai enfin ses lèvres, son halètement me dit clairement le plaisir que je venais de lui donner, et ce fut avec un sourire victorieux que je pris possession de sa bouche une dernière fois avant de nous séparer intimement. Puis je réglai les derniers petits détails inhérents à une telle rencontre et vérifiai que nos vêtements étaient intacts, soulagé que personne ne soit entré dans ce débarras durant notre bref, mais intense, échange. Je sentais déjà que ma faim ne serait pas assouvie par ce court moment, son regard allumant déjà en moi un nouveau feu, mais nous n'avions pas d'autre choix. - Tu vas sortir avant moi, et fais bien attention à ce qu'on ne te voie pas revenir par le même chemin que moi. Quand tu seras dehors, vérifie qu'il n'y a personne et envoie-moi un mail pour me le dire. Compris ? - Mhmm. Je vis sa main se poser sur son cou. Là où j'avais marqué sa peau. - Et cache ça. Ça va paraître bizarre. - Ça n'a rien de bizarre. Tu es juste très possessif... - Cache-le quand même. Tiens, prends ça. Je mis la main à ma ceinture pour attraper le foulard que j'y avais accroché en sortant de chez moi.
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++Aiba++
- Hey, Riida! Ils ont presque remonté le bûcher ! Le tournage va pouvoir reprendre ! J'étais tellement content de pouvoir annoncer ça que j'avais cherché Oh-chan tout autour de l'esplanade. J'avais fini par le dénicher dans une allée arrière. C'est qu'il y avait du monde dans ce temple aujourd'hui. Pour la fête, pour le tournage et même des touristes étrangers. Et Oh-chan était tout sauf très repérable dans une foule. - Tu viens, la procession va se remettre en marche. Faut qu'on y aille, ils vont pas nous attendre. - Tu as vu Jun ? Encore ? Décidément, il faisait vraiment une fixation. Je ne comprenais pas pourquoi il l'avait quitté s'il tenait tant à lui. Autant quand ils s'étaient mis ensemble ça m'avait paru naturel, autant là, je ne comprenais pas ce qui avait pris à Riida. - Nan je l'ai pas vu. Mais le connaissant, il doit être déjà à son poste et se demander ce qu'on fabrique. Allez viens, on y va ! J'avais presque réussi à le convaincre quand nous vîmes débarquer un gars du staff au coin d'un bâtiment en fond de cour. Et je ne parvins pas à empêcher Riida de lui sauter dessus. - D'où tu sors ? exigea-t-il de ce ton qui nous inquiétait toujours. Et surtout, d'où tu sors ÇA ! Il pointait le foulard que le gars portait autour du cou. Le même que celui que Jun avait à sa ceinture un peu plus tôt. - Je ne vois pas en quoi ça vous concerne, Ohno-san. Ça ne vous appartient pas, il me semble. - Oh-chan, il a raison, ça nous regarde pas. Et puis, c'est Jun qu'on doit retrouver. Allez viens ! J'essayai de l'entraîner, mais c'était peine perdue. Quand il avait décidé quelque chose, rien ne pouvait faire changer d'avis notre chef. - Je veux une réponse ! - Je n'ai rien à vous dire. Houlà ! Son attitude n'allait pas arranger les choses. Et pour couronner le tout, Matsujun arriva de l'allée d'à côté. Quand il vit Ohno menaçant l'assistant, il se figea un instant avant de se décider à nous rejoindre. - Qu'est-ce que vous faites là ? La demi-heure doit être terminée, on devrait y retourner. - La question n'est pas ce que l'on fait là, Jun, mais plutôt ce que toi, tu as fait ici ! - Je te demande pardon ? - Tu m'as très bien compris. Et d'abord, explique-moi ce que ton foulard fabrique au cou de ce type ! Jun tourna les yeux vers le type en question, avisant le tissu qui ornait son cou, et haussa les épaules. - Qu'est-ce que j'en sais ? J'ai dû le perdre et il l'a ramassé. - Et il l'a mis à son cou ? En sachant que c'était le tien ? - Comment aurait-il pu savoir que c'était à moi ? Tu savais que c'était mon foulard, Ginta-kun ? demanda-t-il. - Bien entendu, Matsumoto-san. - Evidemment qu'il le savait ! Ce type te mate sans arrêt. Tu n'imagines pas combien de fois j'ai dû me retenir de lui mettre mon poing dans la figure... Jun se retourna vers Riida que je fixai moi aussi avec des yeux ronds. - C'est trop gentil de ta part, Riida, de veiller sur ma vertu de cette façon. Mais tu n'en as pas besoin, je me débrouille très bien moi-même. Ginta, puisque ce foulard a l'air d'énerver Oh-kun, tu peux le garder. Moi, je retourne avec l'équipe, à plus. Le Ginta en question nous regarda un instant avant de s'incliner, une ombre de sourire sur les lèvres, et de suivre Jun vers l'esplanade centrale. Un peu estomaqué, Riida ne bougeait pas d'un poil. Comme s'il avait été foudroyé. - Puisque ça... m'énerve... ?! Pourquoi ça m'énerverait, d'abord ? Il fait ce qu'il veut de ses fesses. Si ça lui plaît d'avoir un taré à ses trousses, c'est plus mon problème ! Et il fit demi-tour, marchant à grandes enjambées dans une direction qui le menait lui seul savait où, et encore, je n'en étais pas sûr. J'optai pour le plus simple : rejoindre l'équipe. Oh-chan finirait bien par revenir. En atteignant à mon tour la cour, je faillis me heurter à un groupe de touristes. Me confondant en excuses, je relevai la tête vivement en reconnaissant un rire familier. - Cécile-chan ! Qu'est-ce que tu fais là ? Ça me fait plaisir de te voir ! Je voulus la prendre dans mes bras mais elle se recula, levant une main en signe de refus. - Pardon Masaki, moi aussi ça me fait plaisir de te voir, mais je crois que j'ai pris froid, et je préfère garder mes microbes et mes crobes entiers pour moi. Elle était enroulée dans une sorte d'étole et se tenait à distance tout en me souriant gentiment. - On est là pour un tournage. A cause du matsuri. Et toi ? - Oh ! moi aussi. J'accompagne un groupe de familles de diplomates. Ces messieurs travaillent studieusement tandis que ces dames visitent avec les enfants. On a profité de ce matsuri décalé. D'ailleurs, il ne faut pas que je les fasse trop attendre. Tu ne m'en veux pas ? Comment aurais-je pu lui en vouloir ? Elle était toujours si aimable avec moi. Et je savais ce que voulait dire bosser. - Pas de problème. De toute façon, on se reverra bientôt. Je dirai à Jun-kun et Oh-chan que je t'ai croisée. Ça les distraira peut-être de leurs chamailleries. - Chamailleries ? demanda-t-elle en penchant un peu la tête. - Oui, des histoires de gosses. A leur âge... ! Enfin, tant pis pour eux. Moi au moins je t'aurais vue. A bientôt ! C'était chouette la sortie au zoo. Faudra qu'on remette ça ! - Prends soin de toi, Masaki. A bientôt ! Je me dépêchai de retrouver les autres juste à temps pour reprendre le tournage. Riida était revenu et semblait s'être composé un personnage plus calme. Mais je le connaissais trop bien pour ne pas savoir que ce n'était qu'un personnage.
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++Nino++
- Salut Nino. Ça faisait longtemps. - Entre… Je m’écartai de la porte d’entrée pour le laisser pénétrer dans mon domaine avant de reprendre. - Ben, forcément entre le boulot et ta copine… d’ailleurs t’as pas eu trop de mal à l’abandonner ? - Elle bosse… et puis c’est plus ma copine, c’est ma fiancée. - Omedetto. Bière ? - Oui merci. Shun se dirigeait vers le salon alors que je faisais un détour par le frigo pour sortir le pack de bière que j’avais acheté hier après qu’il ait accepté de venir. Quand je le rejoignis, il était en train de fouiner dans mes jeux et en sortit un. - On le fait ce duel ? C’était traditionnel entre nous, ça avait commencé pendant le tournage de Stand up et depuis on n’avait jamais arrêté. Toutes nos soirées en duo étaient sous le signe des jeux de combats et de la bière, ce qui ne nous empêchait pas de discuter. Et c’était bien ce que je comptais faire… Nous discutâmes donc entre deux combats, son futur mariage qui était prévu pour l’année prochaine si tout allait bien, ses projets devant et derrière la caméra, nos potes (et je découvris qu’il n’avait pas eu de soirées avec Jun depuis février), enfin de moi. C’est pendant le dernier duel qu’il lança une offensive traîtresse. - Alors Nino, c’est quoi la question à 100 000 yens ? Ça, c’était pas cool et j’en avais raté mon attaque, perdant des vies à son profit. Mais je savais une chose, c’est que ma réponse le surprendrait autant que sa question parce que j’étais à peu près sûr qu’il ne s’y attendrait pas venant de ma part. - Comment t’as su que Yamada était la femme de ta vie ? Il se figea sur sa manette et je l’estourbis en deux temps trois mouvements avant de couper la console et de me tourner vers lui le sourire le plus innocent de mon répertoire sur les lèvres. - Tricheur ! m’accusa-t-il quand il reprit une dizaine de secondes trop tard ses esprits. - Non… Sérieux Shun, ça m’intéresse… - Pourquoi ? Je baissai les yeux sous son regard et quand je sentis enfin ce dernier s’alléger et que je relevai la tête, je vis à son sourire qu’il en avait deviné beaucoup plus long que ce que j’avais voulu laisser paraitre. - C’est qui ? reprit-il. - Tu la connais pas. Et, elle est pas encore là. - Hein ? Explique. Ça j’en avais bien l’intention enfin juste ce qu’il fallait pour qu’il me donne des pistes pour débusquer Lucie. Et c’est ce qu’il fit. - En fait, le plus simple, c’est d’entrer dans son cercle d’ami. D’être ami avec les siens. Des amis à Tokyo, Lucie n’en avait pas des tonnes. A ma connaissance, elle n’en avait que deux et Aiba était mon ami bien avant de devenir le sien. Il ne me restait plus qu’à convaincre Cécile-chan que je n’étais pas un prédateur mais quelqu’un de bien.
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++Sho++
Le shoot allait reprendre pour Jun et Nino. Ce dernier attendait dans la loge en compagnie de sa DS bien aimée, mais Jun s'était volatilisé dès la fin de sa première prestation. Et à présent que tout le monde était passé, deux fois même pour moi et Aiba, il était souhaitable qu'il revienne. Je me dévouais donc pour vérifier où notre benjamin s'était caché. Personne dans l'escalier de secours, personne sur le toit, personne dans le parking souterrain. Evidemment, j'avais essayé le téléphone, mais je tombais à chaque fois sur son répondeur. Je tentai donc les toilettes un peu en désespoir de cause. J'en avais à peine poussé la porte que je reconnus sa voix. De ce que mon premier coup d'œil me permit de voir, il devait être dans une cabine, et au téléphone. Je ne voulais pas vraiment écouter sa conversation, mais je ne pouvais pas laisser la porte entrouverte, et il fallait que je lui fasse comprendre qu'il devait revenir. Or je savais pertinemment qu'il était bavard. Rester dehors aurait pu me transformer en statue avant qu'il ne lâche son précieux bijou d'électronique. - Tu me manques. Ça fait si longtemps... Je rêve de toi la nuit, tu sais... Ton corps, tes mains sur moi... J'ai envie d'être en toi... tout au fond de toi. Qu'on ne fasse plus qu'un... C'est trop long de devoir attendre encore !... Oh ! Mitsuki, j'ai envie de toi... Je sentis mes joues devenir très chaudes. J'ignorais à qui il parlait, ne connaissais aucun Mitsuki ; en fait je n'aurais jamais cru qu'il parlerait à quelqu'un d'autre que Riida de cette façon. Mais de toute évidence, il avait trouvé un nouvel amant. Et il lui disait des choses qui me mettaient mal à l'aise. Lorsqu'il se mit à décrire la manière dont il envisageait de fusionner leurs corps, je tentai de me signaler pour l'interrompre. Il avait vraiment beaucoup d'imagination... Je le vis sortir de sa cabine en m'adressant un large sourire, le téléphone à la main mais l'écran tourné vers moi. Et je constatai alors qu'il ne parlait à personne. Il se payait ma tête, sans doute depuis le début ! - Arrête un peu tes âneries et dépêche-toi, ils t'attendent sur le plateau ! débitai-je en hésitant entre énervement et malaise. - Oh ! ça va, ils doivent avoir encore du boulot avec les trois autres. Et puis, tu comprends, c'est long d'attendre. - Oui, c'est long, mais pas plus que d'ordinaire, tu devrais avoir l'habitude, non ? Il rit doucement en finissant de se laver les mains. Puis il se tourna vers moi. - Dis-moi, sexy boy, tu crois vraiment que je pense au boulot sans arrêt ? Quand je parle de temps long, il s'agit de celui qu'il faut attendre avant de revoir la personne qu'on a envie de posséder. Comment un mec aux lèvres aussi tentantes et au corps aussi chaud que toi, peut-il être aussi naïf ? Je le vis s'avancer vers moi en disant cela. Ils m'énervaient un peu, tous, à me considérer comme naïf. Je n'avais juste pas l'esprit aussi tordu et pervers qu'eux, c'était tout. C'était d'ailleurs ce que je comptais lui dire... s'il n'avait pas été aussi proche de moi. Le voir quasiment sous mon nez me fit reculer de quelques pas. Mais il en profita pour avancer d'autant, finissant par me coincer contre le mur à côté de la porte. J'avais l'impression que mes muscles refusaient d'obéir aux ordres que lançait mon cerveau. Je voulais bouger, m'écarter ou au moins lever les mains pour le repousser, mais je ne parvenais qu'à peine à respirer. Quand Jun et Ohno s'étaient mis ensemble, j'avais discuté à plusieurs reprises avec Ohno, vérifiant qu'il avait bien saisi tout ce qu'impliquait pour eux d'être un couple au sein du groupe Arashi. Et chaque fois, Ohno finissait en me disant que quels que soient mes arguments, je n'en aurais jamais d'aussi convaincants que ceux de Jun. Et là, dos au mur et fixé de très près par notre taupe séduisante, je ne pouvais que comprendre la raison pour laquelle le plus vieux avait cédé au plus jeune. Son regard était enjôleur, son léger sourire envoûtant et de tout son corps semblait émaner un appel au viol. Sauf, que j'ignorais auquel de nous cet appel s'adressait. Je n'osais plus esquisser le moindre mouvement tandis que son visage s'approchait du mien. Je pouvais voir différentes choses dans son regard, mais j'étais incapable de les déchiffrer. L'idée fugace me vint que Ohno avait été la rambarde de sécurité de Matsujun durant toutes ces années. Et maintenant qu'il n'était plus si proche de lui, il était difficile de savoir comment les choses allaient tourner. Bien que dans l'instant, le sort que me réservait Jun-kun me paraissait plus digne encore de mon attention. Son regard était plongé dans mes yeux et ses lèvres étaient à quelques millimètres des miennes. Je sentais son souffle chaud et rapide dessus, et je manquais fermer les paupières lorsqu'il ouvrit la bouche. Mais il se contenta d'exhaler doucement sur mon visage en étirant ses lèvres dans un petit sourire satisfait. - J'ai un shoot à terminer, dit-il avant de s'éloigner de moi et de se diriger vers la porte. Tu as sans doute toi aussi des choses à faire, non ? Il posa la main sur la poignée et sembla hésiter un instant. Alors qu'après avoir secoué la tête brusquement, je m'avançais pour le suivre tout en acquiesçant à sa question, il se retourna vers moi, m'attrapa par l'épaule et me glissa à l'oreille : - Tu es vraiment attirant, Sho-chan. Mais si tu te laisses faire aussi facilement, ce n'est même plus amusant. Apprends donc à te faire désirer encore plus. Sur ce, il ouvrit la porte et sortit, me laissant seul dans les toilettes, totalement perdu et presque frustré. Mais que venait-il de se passer, exactement ?
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++Nino++
- Je t'attends ? demandai-je à Matsujun. - Non, vas-y, je te rejoins dans deux minutes. Il se retourna vers le photographe et je me dirigeai vers la loge. C'était terminé pour aujourd'hui et j'allais pouvoir me consacrer à ce qui occupait mon temps libre depuis quelques semaines : la découverte de la 3DS et de ses jeux, j’étais en plein bouclage de Ridge Racer. Oh-chan avait dû m'attendre pour que je le ramène. Notre Riida avait toujours été lunatique, mais depuis qu'il avait quitté Jun, je le saisissais encore moins qu'avant. Certains soirs il semblait avoir l'éternité devant lui, et d'autres fois il rongeait visiblement son frein en attendant que le boulot soit terminé pour filer en saluant à peine. J'avais presque envie de croire qu'il y avait quelqu'un dans sa vie. Et j'attendais impatiemment qu'il m'en dise davantage. Même si j'avais déjà bien du mal avec la mienne. En poussant la porte de la loge, je vis qu'Ohno n'était pas tout seul. Assis en face de lui à le fixer sans ciller pendant qu'il dessinait, je découvris notre rappeur. Un peu surpris qu'il soit encore là, je lui demandai pourquoi il n'était pas parti avec Aiba. - Je voudrais l'avis de Riida sur une question, mais il est plongé dans son gribouillage. - Oi ! c'est pas parce que je ne te parle pas que je ne t'entends pas ! Ne dis pas gribouillage comme si j'étais un gosse de maternelle. - Mais tu m'ignores royalement, j'ai le droit d'en penser ce que je veux ! Comprenant que moi aussi j'allais être soumis au crayon de notre chef, je rejoignis la banquette d'en face et sortis ma DS chérie pour passer le temps. Quand Jun entra dans la loge à son tour, je crus deviner une tension nouvelle dans le corps de Sho. Trouvant cela curieux, je décidai de monopoliser l'attention que je ne portais pas à mon écran pour tout ce qui entourait le caster. - Vous êtes encore tous là ? Ah, non. Aiba est parti. - Et toi, tu vas faire quoi ? - J'ai de quoi m'occuper ce soir. Pourquoi, tu avais une proposition à me faire ? Eh ! bien, ça faisait un moment que je n'avais pas entendu la voix de velours du Marvelous. Sa réponse à Sho avait aussi fait dresser l'oreille de Riida. Je le savais parce que sa main ne bougeait plus. - Non, non, aucune proposition d'aucune sorte. Je veux dire, on-on aurait pu aller manger ou au ciné, mais non, je... Je pouvais me tromper, mais j'avais l'impression que Sho bafouillait de plus en plus et que ça amusait Jun. Celui-ci traversa la pièce pour récupérer ses affaires et je vis du coin de l'œil que sa main frôlait volontairement les épaules de notre bègue bien que le geste parût négligent. Sho sursauta et se redressa vivement, quittant sa chaise pour faire quelques pas sur le côté. Oh ! oh ! ce n'était pourtant pas le genre de geste rare entre nous. Jun farfouilla dans son sac pour y retrouver ses lunettes qu'il chaussa avant de se redresser, enfiler son manteau et prendre ses affaires. Il refit le chemin inverse vers la porte mais avant de sortir, il s'approcha du rappeur qui semblait plongé dans l'étude approfondie d'une photo encadrée et accrochée au mur. - A la prochaine Sho-chan, dit Jun à l'oreille droite de notre ami tout en saisissant fermement sa fesse gauche. Oh ! oh ! oh ! encore mieux ! Je crus que Sho allait faire tomber le cadre, tant il heurta violemment le mur devant lui. Ohno avait reposé son carnet sur ses genoux et regarda Jun partir avec des yeux étonnés. - Bye-bye, tout le monde ! - Bye-bye tout seul ! répondis-je en refermant ma console et en me redressant. Je lançai un regard interrogatif à Riida qui haussa les épaules et se tourna vers Sho. - Bon, c'était quoi ta question ? Le caster semblait encore sous le choc, mais il parvint à rejoindre sa chaise et à s'asseoir. - Ça ! C'était ça ma question ! Qu'est-ce qui lui prend ? - Euh, tu me pardonneras Sho-kun, mais là, la question c'est plutôt "qu'est-ce qu'il t'arrive ?". C'est pas la première fois que l'un de nous fait un truc comme ça. T'as pas de raison de flipper de cette façon ! - Pas d'accord, Nino. Moi aussi je trouve ça bizarre. Vas-y Sho, raconte tout. Je ne voyais vraiment pas ce qu'il y avait de bizarre là-dedans, mais si c'était Ohno qui le disait... Sho nous raconta où et comment il avait retrouvé Jun avant la deuxième séance photos. Il passa rapidement sur la conversation de Jun d'une manière qui me parut suspecte et bloqua sur la suite. Le voyant devenir rouge tomate, je tentai de le forcer à parler. - Qu'est-ce qu'il a fait ensuite ? Sho ! Faut que tu ailles jusqu'au bout ! Ohno ne dit rien mais ses yeux mi-clos parlaient pour lui. Il était très attentif. - Il a... il m'a... euh... - Il t'a ? C'est marrant, mais j'imagine pas Jun hésiter autant. Pas toi Riida ? - Il-m'a-repoussé-contre-le-mur-et-m'a-presque-embrassé-avant-de-me-laisser-en-plan ! Je fixai Sho d'un air ahuri cinq secondes avant d'éclater de rire en imaginant la scène. Je voyais trop bien la tête déboussolée de la victime. - Ça n'a rien d'amusant ! dit la fameuse victime, rouge de honte. J'aurais bien aimé te voir à ma place, tiens ! - Oh ! mais je l'aurais pas laissé me planter comme ça, dis-je en reprenant mon souffle, un sourire narquois au coin des lèvres. Le Marvelous qui fait mine de m'embrasser, je lui aurais sauté dessus ! - Nino ! T'es hétéro, il est gay ! Et célibataire. J'aurais pas envie qu'il se fasse de fausses idées. - Jun est un Do-S, il est persuadé que le monde est à ses pieds. Il se fait déjà de fausses idées, va ! - Il t'a fait marcher. Et toi, tu as couru et tu cours encore. Le ton de Riida était calme et sans appel. Nous nous tournâmes vers lui. - Comment tu peux sortir ça avec autant d'assurance ? - Mmm, voyons voir... Parce que je le connais depuis plus de dix ans... - C'est valable pour nous aussi. - ...parce que je bosse avec lui depuis plus de dix ans... - Ça fait même davantage pour Nino. - ...parce que j'ai couché avec lui pendant plus de dix ans. Là, c'était sûr qu'on ne pouvait rien répondre. La suite redonna de nouvelles couleurs au rappeur. - Sho, moi je te trouve sexy, attirant et très... consommable. Mais je peux te garantir que tu n'as jamais éveillé le moindre intérêt chez Jun. Donc s'il te fait ce genre de numéro, tu peux être sûr que c'est pour se payer ta tête. Et ça marche bien. Il aurait tort de se priver. - Mais pourquoi il a fait ça ? - Facile à deviner, répliquai-je. C'est trop tentant de te voir rougir comme ça ! Attends, au fait, tu rougissais déjà quand il papotait au téléphone, non ? Pourquoi ? Il racontait quoi ? - Pas moyen que je vous redise ce qu'il disait. - Donc il discutait sexe avec quelqu'un. Y a que ça pour te faire rougir. - Tu ne l'as pas entendu ! - Et toi Oh-kun, t'en penses quoi ? - J'en pense que c'est tout à fait son genre. - Dans des toilettes ? demanda Sho sidéré. - Il me parlait de ce qu'il comptait me faire au lit en plein enregistrement d'émission. Alors au téléphone dans des toilettes, ça n'a rien d'extraordinaire. Décidément, j'avais loupé beaucoup de choses sur mes amis. Beaucoup de choses croustillantes s'entend. - Ça te surprend pas plus que ça, mais tu as quand même dit qu'il y avait un truc bizarre... Ohno nous regarda attentivement l'un après l'autre. - Que disait-il exactement, Sho-chan ? - Je peux pas répéter ça ! Et puis de toute façon, ça n'a pas d'importance. Parce qu'en fait, il ne parlait à personne. Quand il est sorti de la cabine, il me montrait le téléphone et ce dernier était éteint. - Oui, parce qu'il t'avait entendu ou vu entrer. Il avait dû raccrocher à un moment donné, c'est tout. Il t'a vu et il a eu envie de jouer avec toi. - Mais à aucun moment il n'a prévenu son correspondant ! - Si c'est son amant, il est au courant que Jun peut avoir à raccrocher n'importe quand. - Son amant ? Nos deux voix s'étaient mélangées en poussant cette exclamation. Et nous fixâmes notre chef avec incrédulité. - Qu'est-ce qui te fait croire qu'il a un amant ? - Vous vous souvenez de cette histoire au matsuri, quand on a fait notre reportage avec Aiba et Jun et que le bûcher s'était écroulé ? - Le matsuri qui avait été reporté à cause du tremblement de terre ? Oui, bien sûr. Aiba-kun était assez surpris que tu te sois emporté comme tu l'as fait. - Je me suis énervé parce que je suis certain que Jun s'est fait quelqu'un pendant la demi-heure de pause forcée. Et je suis sûr que c'était ce Ginta, l'assistant du réalisateur. - Ah, non ! désolé mais il a appelé le gars Mitsuki au téléphone. - C'est ce que je disais ! - Pardon ? interrompis-je, pas sûr d'avoir bien suivi. Tu as parlé d'un Ginta... - Mitsuki, c'est le mot de passe pour dire en gros "y a du monde autour de moi, je peux plus te parler, je dois raccrocher". - Mitsuki ? Belle lune ? Vous auriez pu trouver encore plus suggestif... - Ça nous semblait bien suffisant. L'intérêt, c'est que c'est un prénom mixte. Pour tout à l'heure, ça veut dire qu'au début, Jun était bien en ligne avec quelqu'un, et que c'était bien son amant, et pas un ami quelconque. Je commençais à voir les choses sous un angle différent. En dehors du fait que Riida connaissait manifestement Jun par cœur, il semblait qu'effectivement le Marvelous avait fini par sortir la tête de l'eau. Sauf que, comme il ne m'en avait pas parlé, ça voulait dire que cette histoire n'était pas sérieuse ou, qu'au contraire, elle l'était beaucoup trop. Quant à la réaction d'Ohno face à cette situation... Aiba-kun avait eu l'air de la trouver vraiment exagérée. Ça me confortait dans mon idée qu'il n'aurait pas dû quitter Jun. Parce qu'il l'aimait toujours. Pourquoi tout le monde se compliquait-il la vie ? Ça n'existait pas, les histoires simples ? Bon, pour moi, Teru était hors-jeu puisqu'il ne vivait pas sous les caméras, mais d'une certaine façon, je l'enviais un peu. Même s'ils ne devaient pas être faciles à vivre tous les jours, lui et sa femme avaient une vie paisible. Evoquer Cécile fit revenir mes pensées à Lucie. Que faisait-elle en ce moment ? Pensait-elle un peu à moi, ou m'avait-elle totalement oublié ? Quelle place aurai-je quand elle reviendrait ? Je me pris à rêver d'employer des codes secrets connus de nous seuls pour lui parler de choses coquines à travers un combiné. Je l'imaginais rosissante, toussant pour se donner une contenance, me réprimandant pour avoir des idées aussi tordues. J'avais envie de la voir et de la prendre dans mes bras. Juste ça m'aurait transporté au paradis. Mais l'embrasser serait encore mieux. Dans un lieu public serait carrément le summum... Dans un lieu public ?! Attendez voir ! - Hé ! Riida, tu as dit que tu croyais que Jun avait couché avec l'assistant dans... un temple ?! Au milieu d'un matsuri ! Tu plaisantes quand même ! Il me regarda en souriant mais ses yeux semblaient tristes. - Ça te choque ? C'est pourtant rien à côté de ce qu'il est capable de faire. Mais ce Ginta ne me plait pas du tout. Quand on était encore ensemble, je l'ai pris plusieurs fois à mater Jun. Lui n'a rien vu, ou faisait comme si, mais c'était vraiment... déplaisant. - Mater Jun ? Ça veut dire quoi ? Oh-chan laissa son regard errer sur nos visages un instant. - Là, je vous regarde. Puis il baissa les yeux vers mon entrejambe et y resta fixé, semblant mesurer ou même... soupeser ce qu'il voyait. Je finis par me sentir mal à l'aise, légèrement oppressé par ces yeux qui semblaient me déshabiller avec perversité. Ce n'était même pas comme un jeu, mais plutôt comme si j'étais une marchandise. Et je sentais que Sho était aussi gêné que moi. - Voilà, dit Riida en relevant les yeux et en nous regardant à nouveau normalement. C'est ça, mater. En tout cas, c'était sa façon à lui de mater Jun. Vous comprenez pourquoi je n'aime pas ça ? Et pourquoi je n'ai pas aimé qu'il porte le foulard de Jun autour du cou ? En effet, ça devenait un peu plus compréhensible. Mais en même temps... - Tu sais Oh-chan, c'est sa vie, il en fait ce qu'il veut. - Je sais. Seulement s'il se laisse approcher par ce pervers, ça veut dire qu'il n'est plus le Jun que l'on connaissait. Et ça... je m'en sens responsable... - C'est un peu tard pour ça, tu crois pas ? Riida baissa la tête. Je n'aimais pas le voir si triste, même si je savais qu'il ne l'avait pas volé. - Bon, dites les gars, il commence à faire faim ! Ça vous dit une partie de Mario kart chez moi ? Qui ramène les bières ?
Voilà... c'est tout pour aujourd'hui. A dimanche prochain pour la suite et pour celles (ceux) qui veulent. | | | Dim 15 Déc - 11:12 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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Humeur : en plein jetlag
| Bonjour à toutes! (et à tous?) Alors, avant toute chose, je souhaite vous prévenir que dimanche prochain il n’y aura sans doute pas de chapitre pour cause de départ en vacances de Noël et je ne rentrerai que le 2 donc il est possible qu'il n'y ait rien de neuf avant le 5... Sachez que ce chapitre est un tournant de notre histoire d’une certaine manière. D’abord vous constaterez que ma co-auteur et moi avons choisi des visages pour les filles (OK on avait pas choisi les plus moches mais c’est avec ces visages là qu’on voudrait que vous imaginiez nos héroïnes. Pour la taille, ne tenez pas compte des tailles officielles des actrices puisque Lucie et Cécile mesurent toute les deux un petit mètre 65) - Chapitre 29:
++Teru++ - Teru ! La salle de bain n'est déjà pas très grande, mais si en plus on y est tous les deux... - C'est pour gagner du temps ! - On ne gagne rien du tout, là ! Tu m'empêches de me raser. - J'adore ta barbe, chéri. Je plongeai dans sa nuque pour y déposer mes lèvres. Il sentait bon le savon et ma faim de lui grandit encore. - Tu l'adores peut-être, mais ma mère a du mal avec. Alors je préfère la raser. ...et enlève tes mains de mon pantalon, je vais finir par me couper, avec tes conneries ! C'est qu'il aurait eu l'air fâché. Mais il venait de ramener mon esprit sur le sujet de la journée, et je repris mes mains qui caressaient jusque-là amoureusement son entrejambe, laquelle ne demandait pourtant que ça. Je m'adossai au mur à côté du miroir et contemplai mon amant concentré sur sa délicate activité. Je le trouvais de plus en plus beau, même avec ses grimaces pour tendre sa peau sous le fil du rasoir. Elles se superposaient à celles dont il m'avait fait profiter ce matin lorsque je lui avais fait l'amour avec toute la passion qu'il m'inspirait. Et, bien que lâche, mon pantalon de pyjama me semblait à présent un peu étroit. - Avoue ! - Mmm ? demandai-je en me secouant légèrement de ma rêverie. - Tes pensées inavouables. Il s'essuyait le visage tout en me lançant un regard en coin. Et quand il posa sa serviette, mon regard se fixa sur ses lèvres sensuelles. Celles-ci s'étirèrent en un sourire mutin et il s'approcha de moi doucement. - Avoue Teru. A quoi tu penses pour être déjà dur ? Il posa sa main à l'avant de mon pantalon pour l'y faire glisser doucement, et ma seule réponse fut un gémissement qu'il étouffa en accrochant ma nuque pour me pencher vers lui, sa bouche emprisonnant la mienne avec chaleur. Mes mains retrouvèrent leur place sur la peau douce de son sexe, lui rendant sa caresse avec une certaine impatience. Depuis que nous vivions ensemble, j'avais l'impression de m'être transformé en nymphomane. Peut-être était-ce parce que nos horaires fantasques nous empêchaient de nous voir tous les jours, mais presque tout le temps que nous passions ensemble était consacré à nous faire l'amour, parfois rapidement, parfois longuement, toujours amoureusement, et avec un plaisir sans cesse renouvelé. - Je t'aime. - Dis-moi quelque chose que j'ignore. - Hmm, difficile, tu sais tout de moi. Son sourire s'agrandit en entendant ma réponse. - Si je sais tout de toi, je sais que tu vas aimer ce qu'il y a dans le tiroir sous notre lit. Dans le ti... oh ! - Ça, chéri, je n'en suis pas si sûr... Les sex toys que j'y avais aperçu me paraissaient bien grands pour certains, presque menaçants pour d'autres. - Oh, si ! Crois-moi, Teru-chan, tu vas adorer. Mais ce ne sera pas pour aujourd'hui. Nous devons rendre visite à mes parents, ce n'est pas le moment de t'initier à ce genre de plaisirs. Ah, oui. Ses parents. Il voulait me présenter à eux officiellement. Et même si je ne pouvais pas me défausser, mon enthousiasme quant à cette rencontre était tout ce qu'il y avait de plus relatif. Je savais que ça faisait plusieurs années déjà que sa mère cherchait à le marier. Le fait qu'il ait été avec Jun n'avait pas modifié ce désir, persuadée qu'elle était que son homosexualité n'était qu'une lubie d'artiste. - C'est le moment pour quoi alors ? Je dois me raser aussi ? - Ce serait bien, oui. Mais avant... - Oui ? demandai-je avant de réaliser que ses yeux brillaient d'une lueur que j'avais appris à connaître. Il me voulait, c'était écrit sur tous les traits de son visage. Et même si j'avais été le premier à m'enflammer en venant lui tenir compagnie dans la salle de bain, je savais que c'était lui qui se glisserait en moi pour m'arracher des cris sauvages et me rendre fou, dans une position que je n'aurais même pas envisagée il y avait seulement trois mois... ***********************
++Ohno++ Il haletait encore, alors que je m'étais répandu en lui et qu'il avait couvert ma main de sa semence. Je ne voulais pas séparer nos deux corps en sueur, parce que je me sentais trop bien en lui et parce qu'il était magnifique ainsi, offert, abandonné, sexy et transpirant la luxure. Je me retirai malgré tout, à regret, pour ouvrir l'eau de la douche et me glisser sous le jet. Il vint se coller à mon dos et attrapa le savon en passant son bras sous le mien. - Teru, va falloir qu'on s'active, sinon on ne sera jamais à l'heure chez mes parents. - Tu es sûr que tu veux que je vienne ? - Oui. Tu es l'homme de ma vie, je t'ai dit dès le départ que je voulais te présenter à ma famille. Et puisque tu as décroché mon téléphone et t'es fait passer pour mon coloc', et que ma mère t'a invité à manger, on va en profiter. Je me retournai vers lui et plongeai mon regard dans le sien. - Je t'aime et je ne veux pas te cacher. Et après le test du "es-tu une bête de sexe ?", je suis curieux de voir celui du "es-tu le gendre idéal?". - J'ai réussi le premier ? - Brillamment. Je plantai un baiser rapide sur sa joue avant de terminer ma douche et de retourner dans la chambre. Une fois habillé, ne le voyant pas réapparaître, je pris mon carnet à dessin et esquissai mon projet de décoration de la table de chevet que je voulais offrir à mon neveu. Ma sœur devait être présente au repas chez nos parents, seule car son mari travaillait et ses enfants étaient à l'école, et j'en profiterai pour lui soumettre le dessin. J'étais presque satisfait de mon œuvre lorsque je sentis une présence dans mon dos. Son après-rasage me chatouilla le nez et je penchai la tête en arrière pour quémander un baiser avant de me relever et d'aller enfiler mon manteau. Nous étions prêts à partir. - Oh ! Teru-chan, y a quand même une chose que je voudrais que tu fasses avant qu'on parte. - Oui ? - Enlève ton alliance, s'il te plait. Il baissa les yeux vers sa main et je me demandai un instant s'il allait accepter. Il la gardait pour son boulot, et aussi le reste du temps pour éviter d'oublier de la mettre en partant de chez nous, mais même si je connaissais ces raisons, c'était un objet que je ne voulais pas que mes parents voient. Je comptais leur présenter mon compagnon, pas le mari de quelqu'un d'autre. - Oh ! pardon. Fais-moi penser à la remettre avant de repartir au bureau demain. Mon sourire dissimula le soupir de soulagement qui voulut m'échapper à son acceptation. - Teru ? demandai-je pour obtenir encore une fois son attention. Je t'aime. Il se pencha vers moi et effleura mes lèvres. (...) Toute la première partie de notre visite s'était bien déroulée : j'avais présenté Teru, et ma mère, favorablement impressionnée par son allure BCBG (il avait mis son costume) et son langage poli, semblait l'avoir adopté immédiatement. Elle et ma sœur nous avaient servi un repas que nous avions apprécié à sa juste valeur. Elles avaient disparu dans la cuisine lorsque tous les plats avaient été vidés, et Teru m'avait jeté un regard mi inquiet, mi interrogatif, auquel je répondis par un léger signe de tête. Tout allait bien pour le moment. Je me souvenais de l'attitude hostile qu'avait eue maman la première fois que j'étais venu chez eux avec Jun. Mais il est vrai que cette fois-là, j'avais annoncé que j'étais avec quelqu'un et que je voulais le leur présenter. Maman s'était évidemment attendue à rencontrer une jeune fille, et se retrouver face à l'un de mes collègues, en plus celui qu'elle trouvait le plus féminin, avait été un choc. Elle avait mis beaucoup de temps à accepter d'apprendre à le connaître et ne l'avait naturellement jamais adopté. (Même si le caractère de Jun n'avait pas forcément facilité les choses puisqu'il lui avait tenu tête et avait conclu leur première rencontre par un "vous pourrez me détester autant que vous voudrez, j'aime Satoshi et vous ne pourrez pas l'empêcher de m'aimer".) Aujourd'hui, j'avais voulu que ma famille apprenne à connaître Teru sans a priori, même si j'avais quand même la crainte qu'ils ne soupçonnent quelque chose avant d'avoir eu le temps de l'apprécier. Je ne ramenais pas grand monde chez mes parents. La preuve, même Nino n'était jamais venu. Et je tournais toutes ces pensées dans ma tête quand j'entendis Onee-chan, qui était revenue seule de la cuisine, poser une question à Teru. - Alors, la vie avec Satoshi-kun n'est pas trop difficile ? - Je n'ai pas à me plaindre, ça va. Et avec nos horaires décalés, on ne se marche pas dessus. - Et vous êtes ensemble depuis combien de temps ? - Je... Il avait commencé à répondre avant de comprendre la question de mon père. - Papa, tu ne suis jamais ! Ils ont dit que Teru-san était venu loger chez Satoshi-kun après le 11 mars. Sans doute parce que son appartement était devenu dangereux ? La naïveté de ma sœur était parfois rafraîchissante, mais là... - Non Mina, ces deux-là ne partagent pas qu'un appartement. Ce n'est pas parce que ton frère s'est séparé de Jun-kun qu'il va ramener une femme à ta mère. Même si elle rêve d'avoir des petits-enfants. - J'ai entendu parler de femme et de petits-enfants ? fit maman en revenant dans la pièce. En voilà une bonne idée ! Alors mon chéri, c'est pour quand ? Puis elle poursuivit en prenant Teru à témoin. - Vous ne pensez pas que ses enfants seront de beaux petits, Teruki-san ? - Hé ! Maman, s'indigna Onee-chan, tu as déjà des petits-enfants : les miens ! - Mais oui, Mina, se défendit-elle, et je les aime tes enfants ma chérie. Mais ce ne sont pas les enfants de Satoshi. Je n'hésitai pas longtemps sur le parti à tirer de tout ça. Je voulais être celui qui annoncerait les choses à cette femme que j'adorais mais que je ne voulais pas laisser diriger ma vie sentimentale. - Maman, je suis désolé, mais je ne te ramènerai jamais de petits-enfants. Pour la simple et bonne raison qu'il est physiquement impossible que deux hommes procréent ensemble. - Ne dis pas de bêtises mon chéri, tu vas effrayer ton ami. Teruki-kun, ne l'écoutez pas... - Ohno-san, répondit mon amant, Sato-chan ne m'effraie pas, je vous assure. Et l'homme qu'il a choisi d'aimer est le plus heureux du monde, croyez-moi. Je vis la compréhension éclairer doucement l'esprit de ma mère, et pour la compléter, je pris la main de Teru en entrelaçant nos doigts. (...) Au final, cette première rencontre ne s'était pas si mal passée. Bien sûr, l'annonce avait douché l'enthousiasme de ma mère, mais Teru m'avait dit sur le trajet du retour que mon père avait un sourire en coin pendant toute la scène. Et Onee-chan ne semblait pas mécontente pour nous. Quand, avant de partir, je lui avais montré mon projet pour son fils, elle m'avait glissé que j'étais bien tombé et avait même plaisanté sur le fait que j'avais échangé un canon pour un beau gosse. J'espérais qu'à eux deux ils parviendraient à faire accepter à la femme de ma vie que mon bonheur se trouvait dans les mains de l'homme que je leur avais présenté. *********************** 27/04/2011
Cher journal,
J’écris parce que j’ai mal, j’ai des crampes et je rêve de partir marcher ou de faire quelques longueurs dans une piscine. Les deux étant inenvisageables à l’heure actuelle j’ai sorti ce journal dans l’espoir de me changer les idées…
Me voici enfin dans l’avion qui m’emporte loin de la vieille Europe pour me déposer au pays du soleil levant. Dans moins d’une heure à présent je serai dans les bras de Cécile et Masaki.
J’ai hâte de les retrouver. Ces derniers jours, la voix de Cécile est étrange : à la fois plus calme mais aussi de plus en plus fatiguée. Quant à Aibaka, sa chaleureuse présence m’évitera de m’endormir. La fatigue commence en effet à se faire sentir, mais jusqu’à il y a peu j’étais trop énervée pour songer à fermer les paupières et maintenant il est trop tard. Résultat : Je suis réveillée depuis presque 24h. (…)
La signalétique se rallume, nous amorçons notre descente. Moi qui cherchais à oublier la douleur j’ai le sentiment que la méthode sera donc celle du marteau que l’on tape sur ses doigts pour oublier que l’on a mal au crâne. Je vais bientôt savoir quel est le plus insupportable mes oreilles ou mes jambes…
… - Mademoiselle ? On vous attend à l’arrivée ou vous souhaitez que je vous accompagne à la station de taxis ? - Mes amis m’attendent à l’accueil, merci. Le steward qui me poussait vers mes amis était plutôt encombré entre mon fauteuil et mon énorme valise mais ce n’était pas ce qui me préoccupait le plus. Ayant rallumé mon portable une fois la douane franchie, je venais d’éliminer, sans l’ombre d’une hésitation, le dernier message de l’insupportable geek. Et à présent, j’étais à la recherche de deux silhouettes : la première grande et élancée, la seconde incontestablement féminine. Quand je repérai enfin la première, ce fut pour m’apercevoir que la seconde ne correspondait en rien à ce que j’attendais. Que foutait ce type ici ? Masaki allait m’entendre… Arrivée à leurs côtés, je remerciai mon accompagnateur avant de saluer Aiba. - Bonjour Aiba-kun. Tu as laissé Cécile dans la voiture ? ***********************
++Nino++
Elle m’avait ignoré ! Elle l’avait fait exprès la sale peste. Bon, en même temps, avec ce qu’on allait lui annoncer, je n’allais pas l’enfoncer tout de suite. - Bonjour Lucie. C’est moi qui ai accompagné Masaki, pas Cécile, mais… - Tiens j’ai des acouphènes… ça doit être des séquelles de la desc… - Lucie ça suffit ! Écoute-nous ! Aiba avait attrapé la jeune femme par les épaules et la regardait droit dans les yeux. En voyant son regard inquiet, Lucie changea radicalement d’attitude. J’empoignai alors son fauteuil et nous dirigeai vers la sortie, Aiba tirant le sac. - Nino, Aiba, qu’est-ce qu’il se passe ? Pourquoi Cécile n’est pas ici ? Comme je continuais d’avancer et que je ne répondais pas, elle fit quelque chose que je n’avais pas prévu : elle bloqua une de ses roues, permettant au fauteuil de faire un demi-tour sous ma poussée. Je laissai échapper un grognement de douleur quand il me cogna dans le tibia. - OK. On va parler maintenant. Mais tu permets que je me pose là ? En disant cela, j’indiquai du doigt un banc libre qui longeait le mur du bâtiment. Elle hocha son accord et desserra le levier. Je l’arrêtai face au banc et m’installai dessus avec Aiba. - Lucie… on va aller voir Cécile, commença Masaki. - Aller la voir ? Où ? - A l’hôpital, précisai-je. Elle a fait un malaise ce matin à la Jimusho. D’ailleurs je te l’ai dit sur mon message… - Ah c’était ça… murmura la jeune femme dont le teint naturellement pâle avait encore blêmi sous l’effet de la nouvelle. Cécile… Je la vis prendre ses jambes entre ses bras et se recroqueviller dans son fauteuil. Un coup d’œil à mon voisin m’apprit que cet idiot avait aussi craqué. Je me levai du banc pour m’agenouiller devant le fauteuil. Là, je glissai mes bras sous ceux de la jeune femme et l’enlaçai. Quand je la sentis s’accrocher à mes épaules, je ne pus retenir un sourire de plaisir et après quelques instants, je lui proposai de reprendre le chemin de la voiture. Cette distance fut vite parcourue et alors qu’Aiba chargeait les bagages et le fauteuil, je l’aidai à s’installer avant de monter à ses côtés et, une fois ceinturé, je l’enlaçai de nouveau. Elle ne me repoussa pas. - Masaki, daijobu ? Tu peux conduire ? - Oui c’est bon. Il démarra et nous partîmes en direction de la capitale. Un appel à Sho m’informa qu’il nous attendait à l’entrée de l’hôpital. Nous l’y trouvâmes à côté de Riida et Teru. Ce dernier apprit-on guettait l’arrivée de ses parents. Pour moi cet instant fut le moment où je trouvai la pièce clé de ce puzzle étrange. La main de Teru était accrochée à celle de Satoshi. ***********************
++Lucie++ C’était de ma faute ! C’était la première idée qui traversa mon esprit quand Nino m’annonça où était Cécile. Depuis, je ne savais pas exactement ce qu’il s’était passé mais nous avions de toute évidence quitté l’aéroport et nous étions arrivés à l’hôpital. Et à présent, nous étions dans une petite salle du service de gynécologie de l’hôpital, attendant qu’un médecin nous donne des nouvelles. Les choses étaient étranges ici. D’abord parce que j'étais entre les bras de Nino, mais franchement c’était l’endroit où je me sentais le mieux pour le moment et ce, depuis janvier. Ensuite parce que c’était Matsujun, le premier qui tournait la tête vers l’entrée de la salle à chaque fois que des pas se faisaient entendre dans le couloir. Teru et Riida étaient là aussi, le premier enlaçant le second, ne laissant aucun doute quant à la nature de leur relation. Aiba était là lui aussi, il s’était installé auprès de Jun. Seul Sho manquait à l’appel. - Il attend un coup de fil des parents de Teru, m’informa mon dossier quand je posai la question. ***********************
++Ohno++ - C’est de ma faute ! murmura Teru dans mon cou. - Non c’est la mienne… Après tout, si cette jeune femme était ici aujourd’hui, c’était parce que son mari était dans mes bras ou plutôt (en cet instant) moi qui étais dans les siens. J'en étais persuadé. Quand Nino, Sho et moi nous étions précipités dans la loge, suite à l’appel au secours d’Aiba, nous étions arrivés en même temps que le médecin de la Jimusho. En entrant, j’avais repéré Aiba en pleine panique dans un coin de la loge et Jun était agenouillé devant une silhouette que je n’avais pas revue depuis le 14 mars dernier : Cécile. D’abord tétanisé, j’avais ensuite récupéré mon portable dans la poche arrière de mon jeans puis j’avais appuyé sur la touche de rappel. - Moshi moshi ? - Teru ? Faut que tu viennes. - Nani ? - Cécile-san est ici… par terre. - Sato, t’es où ? Pourquoi Céc… - Attends une seconde. Le médecin venait de se tourner vers nous pour nous annoncer que Cécile allait être conduite d’urgence à l’hôpital pour des examens plus approfondis et qu’il avait appelé une ambulance. Comme un automate, je répétai l’information à mon amant. Après un temps où je me demandai s’il était toujours au téléphone, il m’annonça qu’il me rappellerait dès qu’il aurait terminé son rendez-vous. Les secours partaient quand mon téléphone vibra. - Alors ? - Todai, rendez-vous aux urgences. Je raccrochai, alors que Sho m’entraînait à sa suite au parking. (…) Quand le trio Nino-Aiba-Lucie arriva, nous fûmes assaillis de questions par le second. Alors que je laissai Sho répondre, je m’aperçus que le premier avait le regard fixé sur nos mains nouées l’une à l’autre. Je pouvais deviner à sa tête les rouages de son esprit se mettre à tourner. Ce que nous avions caché jusque-là avait été découvert par une nouvelle personne. ***********************
++Teru++ Satoshi m’attendait comme prévu devant la porte des urgences. J’avais encore l’oreillette allumée, terminant la conversation avec l’un de mes clients, et quand il l’aperçut, sa grimace ne put que me faire achever cet appel. - Où est Cécile ? - Viens. Il attrapa ma main et me guida jusqu’à l’entrée d’une petite pièce où Sho-chan et Matsujun étaient en conversation avec un homme en blouse blanche. - Votre amie va être transférée en gynécologie-obstétrique… - Pourquoi là-bas ? Quel est le problème de ma femme ? Ma bouche avait prononcé ces mots sans que je m’en rende réellement compte. Le médecin s’était retourné, m’avait toisé et m’avait demandé : - Si vous êtes vraiment son mari, pourquoi n’avez-vous pas remarqué à quel point elle était affaiblie ? - C’est que… - Quoiqu’il en soit, le service est au 5ème étage, si vous souhaitez vous y rendre… Sans rien ajouter, il sortit, saluant au passage Satoshi qui était toujours dans la porte. - Qu’est-ce qu’on fait ? - Je monte, faites ce que vous voulez, déclara le benjamin des Arashi avant de quitter la pièce à son tour. Sho me regarda, regarda Satoshi et soupira. - Teru, j’ai appelé tes parents tout à l’heure, il faut les tenir au courant. - Tu veux pas le faire, s’il te plait ? - Non je dois prévenir Nino et Aiba pour qu’ils nous retrouvent. Lucie arrive. - Ô joie. Comme si les parents ne suffisaient pas… faut aussi prévenir les siens non ? - Les tiens ont dit qu’ils s’en chargeaient tout à l’heure… - Bon je vais repérer les lieux pendant que vous appelez. Je vous retrouve ensuite dans le hall d’entrée. Satoshi se dirigea à son tour vers les ascenseurs tandis que Sho et moi sortions nos portables respectifs. Quelques minutes plus tard, les oreilles bourdonnantes de reproches maternels et prié d’attendre une seconde salve, je me dirigeai vers l’entrée du CHU en compagnie de mon ami d’enfance. Satoshi nous rejoignit quelques instants plus tard et je sentis sa main glisser dans la mienne. Soudain la porte de l’hôpital s’ouvrit, laissant entrer trois silhouettes que j’identifiai immédiatement. Alors que Lucie semblait totalement terrifiée, Nino était indéchiffrable et Aiba plus bavard que jamais. J’avais instinctivement resserré ma main sur celle de Satoshi quand ils étaient entrés et maintenant que ce dernier s’apprêtait à les accompagner vers ma femme, je devais le relâcher. Sho vint à mon secours. - Allez-y, montez ! J’attendrai seul l’appel de tes parents Teru. Il vaut peut-être mieux que tu sois plus près de Cécile-chan, non ? Je lui tendis mon portable non sans un soupir de soulagement certain et suivis les quatre autres. Une fois dans la salle d’attente, où trépignait Matsujun, je m’assis sur l’un des fauteuils, tirant Satoshi sur mes genoux. Il n’était plus temps de sauvegarder les apparences. L’heure d’affronter la réalité était arrivée et pour cela j’avais besoin de faire le plein de courage en enlaçant celui qui avait volé mon cœur au détriment de ma femme. ***********************
++Jun++ C’était MA faute ! J’aurai dû plus insister quand j’avais constaté combien sa santé se dégradait, mais elle était tellement têtue. Je revoyais la scène qui s’était déroulée sous mes yeux quelques heures plus tôt. Je revenais vers la loge en bavardant avec Aiba qui s’apprêtait à partir. En ouvrant la porte, j’avais vu Cécile debout, blanche comme un linge avant qu’elle ne s’effondre sur le sol, évanouie. Alors que mon ami paniquait, je me précipitai vers elle et, devant son absence de réaction, composai le numéro de l’infirmerie sur le téléphone interne. Quand les ambulanciers étaient partis avec elle, je les avais suivis et étais monté derrière eux dans l’ambulance. Mon regard les avait dissuadés de me faire descendre. Je répondis au mieux aux questions que l’on me posait sur elle à l’accueil des urgences puis l’on me conduisit dans une petite salle où me retrouva Sho et, après l’arrivée du médecin, Teru et Satoshi. Nouveau service, nouvelle salle d’attente… nouveaux visages; Lucie était arrivée avec ses deux prétendants. A la voir se laisser cajoler par Nino, mon stress augmenta et quand je réalisai que Teru et Riida ne prenaient même plus la peine de cacher leur relation, j’explosai, les pointant l’un après l’autre. - VOUS ! C’est de votre faute si elle est là. - Oï !!! Calme-toi Jun. En quoi est-ce-que ce serait la faute de Lucie ? Hein ? Elle vient tout juste d’arriver, tenta le sale gosse. - Justement ! Pourquoi il fallait que Cécile y aille hein ? Tu savais qu’elle était malade. C’était déjà le cas y a trois semaines non ? - Oui… admit-elle dans un murmure. Mais… JE LUI AVAIS DIT QUE JE POUVAIS ARRIVER SEULE ! riposta-t-elle soudain. C’est elle qui tenait à venir… c’est pour ça que j’ai demandé à Aiba-chan s’il pouvait l’accompagner. Un peu calmé par ses arguments, je changeai de cible. - Quant à TOI, à VOUS ! Vous ne vous cachez même plus ! Faut pas chercher bien loin les raisons de la violence de ses nausées. Hein !? Tu vas faire quoi maintenant ? Teru baissa la tête, visiblement coupable. Et c’est ce moment que choisit le médecin pour entrer et nous annoncer son diagnostic. ***********************
++Sho++ Je refermai le téléphone et le contemplai un instant. Bien, Teru aurait un peu de répit avant l'arrivée de ses parents : je les avais quittés au moment où ils embarquaient à Fukuoka. Il me fallait maintenant rejoindre les autres. Je me rappelais des indications données précédemment et arrivai donc assez facilement dans le bon service. Hésitant sur le couloir à prendre, j'aperçus un homme en blouse blanche sortir d'une pièce en se pinçant l'arête du nez. J'allais l'aborder pour lui demander mon chemin quand j'entendis des voix échanger des paroles assez vives. Supposant que c'était celles de mes camarades, je me guidais sur leur provenance. - JE LUI AVAIS DIT QUE JE POUVAIS ARRIVER SEULE ! Euh... pour quelle raison la petite Lucie avait-t-elle besoin de préciser ça ? - OI... OUS... Là, je craignis reconnaître la voix du Marvelous. A qui s'en prenait-il de cette façon ? J'allais atteindre la porte de ce qui était manifestement la salle d'attente lorsque le médecin de tout à l'heure me dépassa et l'ouvrit sans ménagement. - Oï ! dit-il dans une sorte de murmure surpuissant qui emplit la pièce sans effort. Vous savez où vous êtes ? Je vis ceux que je cherchais rassemblés là. Nino tenait Lucie qui était quasiment dressée sur son siège et Aiba, assis sur la troisième chaise en partant de la porte, offrait l'image parfaite de notre baka de service : bouche ouverte et mains à demi-tendues en avant, comme pour agripper le vide. Devant lui se tenait Jun qui s'était avancé vers les derniers protagonistes de l'affaire. Je crus rêver en voyant le tableau offert par mon meilleur ami et mon leader. Je comprenais mieux l'énervement de Jun. Néanmoins, je poussai ce dernier vers les mains d'Aiba et à nous deux, nous pûmes le faire asseoir entre nous. - Calme-toi, dis-je de ma voix la plus basse. Ce n'est ni le moment, ni l'endroit. Aiba se révéla encore plus efficace en prenant carrément l'excité dans ses bras. Ces deux-là étaient les plus émotifs de nous cinq, mais finalement, la méthode était bonne. Assuré que notre benjamin ne s'agiterait plus, je gardai une main sur son épaule et relevai les yeux vers le médecin qui était venu se planter devant Teru. - Miura-san ? Ohno se dégagea des bras de mon ami et le força à se lever tout en s'asseyant lui-même sur le siège voisin. Mais Teru ne lâcha pas la main de Riida. - Oui, dit-il en s'inclinant légèrement. Oui je suis son mari, non je n'ai pas vu qu'elle était malade. Elle était beaucoup en déplacement ces derniers temps et mes horaires sont... Sous ma main, je sentis Jun se crisper. Je devais reconnaître que je partageais sa réaction. Heureusement, l'homme en blouse l'interrompit. - Je n'ai pas besoin de vos excuses, jeune homme. C'est avec votre épouse que vous devriez en discuter. Pour ce qui me concerne, je ne puis être que le messager... Je ne voyais pas bien le visage du médecin qui était de profil pour moi, mais j'avais une bonne vision d'Ohno, et je me rendis compte que le sentiment qui dominait en lui était une sorte de stupeur, un mélange d'étonnement et d'inquiétude. Il avait envie de poser une question, cela se voyait. - Messager de quoi ? Docteur, vous voyez bien que tout le monde est sur les nerfs. Dites-nous ce qu'il se passe. Sans le regarder (j'étais trop fasciné par Satoshi pour le lâcher des yeux), je pus deviner que Nino avait entouré la Française de ses bras et la gardait serrée contre lui. Le calme de sa voix me surprit. - Je préfèrerais m'adresser d'abord à Miura-san seul. Je vis les articulations de la main qui tenait celle d'Ohno blanchir à force d'être crispées. Mais la voix de Teru était claire quand il parla. - Je n'ai rien à leur cacher, ce sont mes amis. Et les siens. - Bien, soupira le praticien. Miura-san, ignoriez-vous vraiment que votre femme est enceinte? Teru se laissa tomber sur le siège derrière lui, ramenant son visage dans mon champ de vision. Je pus voir un mélange de sidération et de soulagement passer sur ses traits. Puis une larme se nicha au coin de son œil. - Un bébé... murmura-t-il. Un doute, que n'avait manifestement pas Teru, me traversa et je ne pus empêcher la question de franchir mes lèvres. - De combien ? Je sentis Jun tressaillir à côté de moi. Et Satoshi avait visiblement eu la même réaction. Que Ohno réalise que son amant ait pu retrouver sa femme depuis qu'eux étaient ensemble ne me semblait pas une mauvaise chose. Et j'espérais que ça avait été le cas. Parce qu'il me paraissait évident que Jun, lui, était toujours amoureux de notre leader. Malgré cette histoire d'amant. - Deux mois à peu près. Vue la réaction en face de moi, je devais tuer cette idée dans l'œuf. - Je vais être papa... Alors que son expression se muait en une sorte de ravissement, j'entendis le médecin soupirer légèrement. Comme il l'avait fait en se pinçant le nez dans le couloir. Il prit une profonde inspiration et se lança, ayant sans doute estimé qu'il valait mieux tout dévoiler d'un coup. - Je ne pense pas, non. Si elle était venue la semaine dernière, nous aurions pu l'avorter. Aujourd'hui, c'est devenu impossible. Miura-san, votre femme ne supporte pas sa grossesse. Elle s'est beaucoup trop affaiblie et nous ne pouvons plus rien faire. Les prochaines vingt-quatre heures seront déterminantes, mais honnêtement, je doute qu'elle voie le soleil se lever demain. Ses mots mirent quelques instants à faire leur chemin dans nos esprits. C'est en sentant l'épaule de Jun fondre littéralement sous mes doigts que je réalisai ce que je venais d'entendre. - NON !!!!!!!!! Le cri de Lucie aurait pu être celui de n'importe lequel d'entre nous. - Docteur... Teru ne put en dire davantage, mais le médecin n'avait pas tout à fait fini. - Elle n'a pas encore repris connaissance, mais vous pouvez aller la voir. Pas plus de trois à la fois. Et je vous déconseille fortement de lui dire quoi que ce soit sur son état. Elle devrait s'éteindre doucement et ne se rendre compte de rien. Je ne crois pas utile de faire de ses dernières heures des moments de désespoir. Teru hocha la tête et attendit que le médecin sorte. Puis je le vis se tourner vers Ohno, comme au ralenti, et bien que sa bouche s'ouvrit, aucun son n'en sortit. Mais Riida comprit le cri silencieux et attira son amant contre lui en posant une main sur sa tête.
Lâchez vos com' et à bientôt pour la suite ! | | | Sam 21 Déc - 23:47 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| Surprise!!! Malgré mon annonce de la semaine dernière, je suis en mesure de poster aujourd'hui car je me suis levée tôt et j'ai fini ma valise. Pour la suite... et bien je vous laisse lire et commenter ensuite... PS : Petites précisions de lecture : L'allemand en Berlin Sans FBLe français en italique- Chapitre 30:
++ Aiba ++
Lucie avait maintenant réintégré son fauteuil et était au chevet de Cécile. Mais depuis notre arrivée et jusqu’à ce que le médecin nous permette de visiter Cécile, elle était restée dans les bras de Nino. Rien n’était résolu entre eux mais rien n’était perdu non plus. C’était ce que j’en concluais en attendant mon tour pour pénétrer dans la chambre. Lucie m’avait appelé il y avait une semaine pour me donner son horaire d’arrivée et me solliciter pour accompagner Cécile à l’aéroport. Quand j’avais demandé pourquoi, elle m’avait déclaré qu’elle ne voulait pas que son amie vienne seule et qu’elle me faisait entièrement confiance pour cette mission. Bien entendu, j’avais accepté et j’avais donné rendez-vous à Cécile à la JE. Comme elle était en avance et moi à la bourre, je l’avais guidée jusqu’à notre loge, lui disant de faire comme chez elle. Au retour du shooting qui clôturait ma matinée, j’avais croisé Jun. J’étais en train de lui proposer de renouveler notre excursion au zoo quand nous étions arrivés à la porte, à temps pour voir Cécile s’effondrer. - Pourquoi elle était là ? m’avait demandé Nino en rangeant son téléphone alors qu’on la transportait dans l’ambulance. - On devait aller chercher Lucie à Narita… Lucie ! - Elle arrive à quelle heure ? - 14 heures. - On y va. Bouge Masaki. Je n’avais pas eu le choix. Nino avait attrapé les clés de la voiture dans ma poche et je l’avais suivi jusqu’à mon 4X4. - Lucie va pas être contente de te voir, lui avais-je prédit sur le trajet. - Pourquoi ? Elle trouve pas ça suffisant de m’ignorer pendant trois mois ? Si elle a quelque chose à me reprocher, elle devrait me le dire. Et puis comment ça se fait que tu sois au courant de ça toi. - C’est mon amie. C’est tout. - Vraiment ? - Oui… Je n’ai pas eu le choix de toute façon, ajoutai-je plus bas. Nino n’insista pas. A son sourire, je sus qu’il m’avait entendu mais je m’en moquais. Si ça pouvait le rassurer et lui faire prendre les bonnes décisions, je ne le regretterais pas.
(...)
Teru et Sho venaient de ressortir de la chambre, pour nous permettre d’y entrer à notre tour. - Lucie ? demandai-je, ne la voyant pas ressortir. Ils secouèrent la tête en signe d’impuissance. Cette dernière avait empêché Riida d’accompagner Teru. Quand ils s’étaient approchés ensemble de la porte de la chambre, elle avait attrapé la veste du plus âgé et quand il s’était penché vers elle, d’un simple geste, elle lui avait fait comprendre qu’elle ne souhaitait pas qu’ils entrent ensemble. Jun avait alors manifesté son désir de prendre la place mais Sho avait posé une main sur son épaule et lui avait murmuré: - Calme-toi d’abord…
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++ Lucie ++
Dans cette chambre éclairée par la lumière grise du jour, je mesure le temps au rythme des bipbips du moniteur cardiaque de Cécile et des mains qui se posent sur mes épaules. C’est Sho qui m’avait fait entrer dans la chambre, me conduisant jusqu’à elle avant de s’asseoir sur une chaise tout près, Teru, lui, s’était installé de l’autre côté. Après un regard à ce dernier, je m’étais concentrée sur mon amie, priant pour elle. Quand ils avaient voulu m’emmener, j’avais refusé. En aucun cas je ne la laisserais seule, tant que le médecin n’annoncerait pas de meilleures nouvelles. C’était l’une des deux décisions que j’avais prise en moi-même avant de pénétrer dans cette chambre. L’autre : ne pas pleurer, surtout ne pas pleurer jusqu’à… ce que l’on me dise que cette crise était terminée. - Lucie, tu veux pas sortir boire un café ? Pauvre Aiba, je ne pris même pas la peine de lui répondre. Mais en réalité, si j’avais entendu ce qu’il me disait, je ne réalisai que plusieurs minutes plus tard qu’il m’avait parlé. Et quand je voulus refuser son offre, je m’aperçus qu’il avait laissé sa place à Nino et que Jun avait remplacé Ohno. Je sentis la main de Nino recouvrir la mienne, celle qui n’était pas posée sur celle de Cécile. Je le laissai faire, ses doigts m’offraient une chaleur bienfaisante que j’aurais aimé transmettre à ceux si froids de mon amie. Soudain je la sentis frémir. Levant les yeux vers son visage, je vis la main de Matsujun qui remettait en place une mèche de cheveux avant de descendre saisir son autre main. Cécile frissonna de nouveau et quelques minutes plus tard nous vîmes ses paupières s’ouvrir.
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++ Cécile ++
Mon réveil avait un air de déjà-vu. Non, pas un air, un goût. Celui de la bile qui me remontait dans la gorge. C'était le même refrain tous les jours depuis le 12 mars. Ou depuis le 15 ? Je finissais par ne même plus savoir et par ne même plus avoir envie de savoir. Je me sentais chaque jour un peu plus fatiguée. Sans doute ne devrais-je pas m'abrutir dans le travail comme je le faisais. Les nuits où Jun et moi dormions ensemble, je me levais avant lui ou j'arrivais à attendre qu'il soit sous la douche pour rejoindre les toilettes. Pour ça, les configurations de nos appartements respectifs étaient bien pratiques. Quand Jun m'avait prise dans ses bras ce matin-là en me disant d'aller consulter, je n'aurais peut-être pas dû résister. Il parlait la voix de la raison. Et je le savais. Mais... c'était plus fort que moi, je n'avais jamais aimé les médecins. Et encore moins les hôpitaux. Le fait que ma mère ait été infirmière y était-il pour quelque chose ? Enfin, peu importait, Lucie arrivait aujourd'hui, et je savais déjà qu'en me voyant, elle voudrait m'obliger à aller me faire examiner. Allais-je lui répondre que c'était déjà fait, ou la laisserai-je me convaincre ? Nous verrions bien. En attendant, il fallait que je me prépare. La traduction que j'avais bouclée dans la nuit (sans doute le seul moment de la journée où je pouvais rester assise devant l'ordinateur sans avoir envie de vomir) me faisait des clins d'œil pour que je la relise avant de la renvoyer. Mais j'avais trop faim pour commencer par ça...
Je ne savais plus très bien comment j’étais arrivée à la Jimusho. Et si Masaki ne m'avait pas envoyé un mail à présenter à l'accueil, j'aurais certainement oublié que je devais l'y rejoindre avant d'aller chercher Lucie. Une fois entrée dans le bâtiment, je montrai mon laissez-passer électronique. La poulette endimanchée vérifia trois fois avant de daigner faire appeler Aiba-san (j'avais presque cru entendre "sama"...). Quand il arriva, aussi joyeux qu'à l'accoutumée, une vague de ressentiment que je préférai ignorer émana de cette jeune personne. Je n'osai imaginer ce que cela aurait donné s'il s'était fendu d'une bise. Heureusement pour moi, il était en retard sur son planning et me remorqua donc jusqu'à, ce qu'il me dit être leur loge, m'y laissant me mettre à l'aise et m'assurant qu'il reviendrait vite. - J'ai juste un truc à terminer et je dois vérifier à quelle heure est l'enregistrement d'Uta ce soir. On est les principaux invités, je peux pas être à la bourre ! - ...Masaki, souris-je, amusée par ce grand gosse, tu prendrais sans doute moins de retard si tu ne perdais pas ton temps à m'expliquer tout ça. Non ? Et tu aurais pu me laisser attendre en bas... - Ah ! non !! J'avais trop envie que tu voies notre chez-nous-au-boulot. On ne le montre qu'à nos amis ! Et Lucie l'a déjà vu quand elle est venue l'autre fois. Fallait que je t'y fasse venir ! Bon, allez, fais comme chez toi, je reviens bientôt. Il sortit en emportant ce tourbillon d'énergie qui l'environnait, et je regardai autour de moi. On aurait pu croire le salon de l'un de ces garçons. Enfin, si c'était celui de Jun, ce serait après une soirée de fête ou un jour de tempête où il aurait oublié de fermer la fenêtre. Cet homme est beaucoup trop ordonné pour son propre bien. N'ayant pas vraiment envie de m'asseoir, je fis un tour rapide, essayant de deviner à qui appartenait quoi. Une pile de journaux soigneusement pliés : Sho. Une DS : le casse-pied de service. Je me demandais d'ailleurs si Lucie parviendrait à résister à ce type. Mais vu à quel point il m'avait enquiquinée ces dernières semaines, je l'encouragerai de mon mieux. Pas envie de la retrouver avec un mec pareil ! Des documents reliés que j'identifiai plus ou moins rapidement comme des scripts. Ceux de Jun ? J'étais sûre qu'Airi aurait donné une montagne d'or, ou même son fils, pour pouvoir lire ces bouts de papier... Deux mangas sur un coin de canapé : tiens, ça faisait longtemps que je n'en avais pas lu... Et je me demandais soudain ce que Lucie avait bien pu faire de ma collection. Celle-ci était restée dans l'appartement à Strasbourg. Un bloc de dessin... Ah ! oui, je me souvenais que Teru m'avait dit une fois que Satoshi avait du talent pour cet art. Quand je lui avais dit que je trouvais ses mains magnifiques... Je n'avais pas vraiment grand-chose contre le leader d'Arashi. Je savais à présent que lui et mon mari étaient tombés amoureux il y avait bien longtemps. Et s'il avait cédé à la tentation lors du mariage, il avait rapidement mis les choses au clair avec Jun, sans même savoir ce que déciderait Teru. Je sentis mon estomac se soulever à nouveau. Ce n'était vraiment pas le moment ! Parvenant à calmer mon ventre, je me laissai tenter par le canapé et voulus lire un peu. Quelques minutes plus tard, j'entendis deux voix nasillardes approcher de la loge. Je souris et me levai pour les accueillir lorsque la porte s'ouvrit. Le monde se fit insonore et incolore puis devint noir.
Encore. J'ai encore la nausée. Je n'en peux plus. Cette odeur est immonde. Pourquoi faut-il qu'elle me remplisse les narines ? ...C'est chaud. C'est doux et chaud. Et léger. Mais ça passe trop rapidement sur mon visage. Qu'est-ce que c'est ? Je veux que ça revienne. Là... Cette sensation... Cette chaleur, double. Une de chaque côté de... de moi ? C'est moi, cette chose immobile et glacée ? Je voudrais que ces chaleurs m'enveloppent. J'ai mal. Je ne comprends pas bien où, ni pourquoi, mais j'ai mal. Et quand mes paupières se soulèvent, la lumière est trop forte pour mes yeux. Ils se referment aussitôt. Pourtant, je sens mon corps reprendre vie. Se reconnecter au monde qui l'environne. Sur ma gauche, il y a une chaleur douce et tremblante. Je la reconnais immédiatement. Je la reconnaitrais entre mille. Ma luciole, ma petite lumière, ma veilleuse. Je n'ai rien vu en ouvrant les yeux, mais je sais qu'elle pleure. En silence, comme souvent. Et sans doute sans le montrer. Et l'idée qu'elle pleure à cause de moi me fait mal. La chaleur à ma droite est plus forte. Pourtant, elle s'agrippe à ma main aussi fermement que ma luciole. Je retente une ouverture des paupières. En les soulevant tout doucement, pour m'habituer. Et je vois qu'en fait, ils sont trois autour de moi. Le casse-pied est derrière Lucie. Mais le sourire qu'elle lui adresse quand il lui serre celle de ses mains qui ne tient pas la mienne me fait lui pardonner tout ce qui a pu m'énerver chez lui. Puis, se tournant vers moi, elle me murmure en français : - Cécile ? Ça va ? Comment tu te sens ? Ma réponse la fait grimacer sans que je comprenne pourquoi. - Vivante. Une larme unique glissa sur sa joue quand elle me sourit...
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++ Nino ++
Je ne savais pas ce qu'elles se disaient. Je levai les yeux vers Jun pour lui demander du regard s'il avait compris. Mais je vis que ce baka avait les yeux totalement embués. Décidément, entre lui et Aiba... Me penchant un peu, je pus m’apercevoir que Lucie était tout aussi émue même si elle voulait le cacher. Bien. Avant que cette pièce ne se transformât en chapelle des larmes, je m'esquivai discrètement. Une fois dans le couloir, j'hésitais entre prévenir le sensei ou aller chercher mes petits camarades. La blouse blanche n'étant pas visible, je me dirigeai vers la salle d'attente. Ouvrant la porte tout doucement, je me glissais silencieusement à l'intérieur. Et constatai que j'avais raison pour les émotifs : Aiba était en train de pleurer dans l'épaule de Sho. Teru faisait les cent pas comme un condamné à mort conduit à la potence et qui a le choix de l'allure. Oh-chan le suivait d'un œil inquiet. - Hey, vous pouvez ne pas faire de bruit ? Riida me regarda d'un air bizarre. - Parce que tu nous trouves bruyants ? - Nan, dis-je en souriant. Parce que si vous pouvez rester silencieux, je vous propose qu'on aille tous dans la chambre. Cécile-chan s'est réveillée. Teru interrompit son chemin de pénitent et me fixa une demi-seconde avant de foncer vers la porte. Encore heureux que j'aie parlé de silence ! Nous sortîmes à notre tour et rejoignîmes Teru qui s'était arrêté devant la chambre. Il se retourna et nous chuchota : - Souvenez-vous de ce qu'a dit le médecin : ne lui dites pas à quel point elle ne va pas bien. Je ne veux pas qu'elle... Je haussai légèrement les épaules. Qui aurait envie d'annoncer une telle chose ? Une fois tous entrés, je refermai la porte le plus doucement possible et écartai légèrement Sho et Ohno pour pouvoir rejoindre Lucie.
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++ Jun ++
Ces dernières semaines, je l'avais vue se débattre pour surmonter sa peine. Elle avait réussi à relever la tête à force d'obstination. Au fil des nuits que nous avions partagées, je l'avais sentie s'apaiser. Elle ne se réveillait plus en pleurant depuis presque un mois. J'aurais pu me douter que ses nausées avaient une autre raison que le tremblement de terre ou l'installation de Teru chez Satoshi. Mais après tout, je ne m'étais jamais intéressé aux femmes en général, comment aurais-je pu deviner comment fonctionnait cette femme en particulier ? Elle avait été plutôt sûre d'elle quand nous en avions discuté au début du mois et ce n'était pas moi qui allais deviner des histoires de femme enceinte... D’autant qu’une femme enceinte grossit, non ? Et elle perdait du poids… Et maintenant, elle était là, allongée dans ce lit d'hôpital, encore plus pâle que lorsque je l'avais récupérée dans ma salle de bain. Quand le sensei avait annoncé son verdict, j'avais mis quelques secondes à le comprendre. Et pendant quelques secondes supplémentaires, j'avais cru que tous les bruits du monde avaient été supprimés. La main de Sho-kun posée sur mon épaule et le cri de Lucie m'avaient ramené. Lucie. Je savais que Cécile tenait à elle. Je n'aurais pas pensé que la réciproque était si vraie. Quand j'avais vu Toshi vouloir entrer en même temps que Teru, j'aurais voulu dire quelque chose, mais elle avait été plus rapide que moi, et plus efficace. Attendant mon tour, j'avais soigneusement évité de regarder les autres. Nino et Toshi m'énervaient, Aiba me donnait juste envie de pleurer avec lui. Quand les deux premiers étaient revenus, Sho m'avait jeté un rapide coup d'œil et avait dû m'estimer insuffisamment calmé car il m'avait pris le bras et gardé contre lui. Cher Sho-chan. Je crus saisir pourquoi Cécile appréciait les voix graves. Celle du caster bourdonnait des mots sans suite à mon oreille, mais leur seule tonalité suffisait à m'apaiser. Puis j'avais pu, enfin, entrer dans cette chambre. En les voyant l'une près de l'autre, j'avais eu l'impression d'être devant un tableau. Même Nino se plaçant à côté de Lucie ne semblait pas troubler les choses. Pourquoi l'aurais-je fait ? Je m'étais approché doucement, craignant de découvrir que les choses avaient été encore plus rapides que ce que le médecin avait prévu. Mais elle respirait et son cœur battait, comme l'indiquaient les machines qui ronronnaient autour de nous. Je ne savais pas si j'en avais le droit, toutefois ma main bougea toute seule jusqu'à la mèche de cheveux qui barrait son front. Je la glissai derrière son oreille et crut entendre un changement dans le rythme des bipbips. Lucie était son amie, je pensais avoir droit à ce titre également, je laissai donc ma main rejoindre celle de Cécile avant de la saisir. Je ne comptais pas quitter la pièce sans avoir vu à nouveau son regard. Quitte à ce qu'elle m'engueule en voyant l'eau qui se rassemblait dans mes propres yeux. Je voulais l'entendre râler. C'était ce qu'elle faisait de mieux. Mais quand enfin elle ouvrit la bouche après s'être tournée vers moi, je vis le soubresaut caractéristique d'un estomac en révolte. Et j'attrapai la bassine placée à côté du lit d'une main tout en posant l'autre sur son dos.
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++ Ohno ++
J'espérais que les nerfs de Teru ne le lâcheraient pas avant demain. Et je le regardais avec le sentiment atroce de ne rien pouvoir faire pour lui. Ma présence ne pouvait pas suffire à lui ôter ce poids que les paroles du médecin lui avaient chargé sur les épaules : sa femme, qu'il aimait malgré tout toujours, était en train de mourir parce que son corps ne supportait pas le bébé qui s'y développait. Et ce bébé, c'était le sien. Quand Sho avait demandé de quand datait le début de la grossesse, j'avais espéré, le temps d'une seconde, égoïstement, qu'elle soit tombée enceinte après leur séparation. Cela aurait voulu dire qu'elle avait trouvé quelqu'un d'autre pour veiller sur elle. Mais c'était bien Teru le père. Et il se sentait donc responsable de ce qui arrivait. Quand Nino vint nous annoncer qu'elle s'était réveillée, je suivis le mouvement. Entrant dans la chambre à la suite de mon amant, je compris rapidement la raison pour laquelle il venait de se stopper devant le lit. Cécile était penchée sur le bord de celui-ci, à l'opposé de Lucie. Jun avait une main posée sur son dos, dans un geste apaisant que je lui connaissais bien. Son autre main tenait la bassine sur laquelle Cécile se tordait, crachant tout ce que son estomac voulait faire sortir. Quand j'étais venu tout à l'heure avec Aiba, j'avais été frappé par son air maladif, sa pâleur et l'évidente perte de poids qu'elle affichait. Si ces dernières semaines avaient ressemblé à ça, je comprenais mieux les raisons de ces changements. Et si, comme je le soupçonnais, Jun avait agi à sa manière, il avait dû se rapprocher d'elle. Qui mieux que l'autre aurait pu les comprendre ? Jun était un peu vif, pas toujours très tendre, mais son grand cœur était toujours prêt à consoler ceux qui souffraient, d'autant plus si ça lui permettait de mettre de la distance avec sa propre souffrance. Quand je revins à ce qu'il se passait dans la pièce, je vis que Nino avait rejoint Lucie et lui enlaçait les épaules. Jun demandait à Sho d'aller mouiller une serviette dans la petite salle d'eau de la chambre et de la lui passer. Oui, mon Marvelous était plus attentif qu'une maman chat... - Cécile... murmura Teru. Cécile, pourquoi tu n'as rien dit ? Pourquoi tu n'as rien fait ? Si tu me l'avais demandé, je serais venu... La nausée semblait s'être apaisée et, après que Jun lui ait essuyé le cou, les épaules et le visage, Cécile se rabattit dans les oreillers. Elle regarda Teru et esquissa un pauvre sourire. - Tu n'es pas responsable de moi. Je suis une grande fille. D'ailleurs, fit-elle en regardant les appareils qui l'entouraient, qui a eu l'idée loufoque de m'installer dans cet hôtel ? J'aime pas du tout la déco ! Et je vous parle pas de l'odeur. Teru et Jun semblaient prêts à répliquer, mais Lucie fut plus rapide. - Arrête ! Tu as une idée de combien on s'est inquiété ? C'est quand même pas moi qui vais t'expliquer, à toi, ce que ça fait d'apprendre qu'une personne qu'on aime est à l'hôpital ! Cécile se figea avant de tourner lentement la tête vers sa voisine. - Gomen ma belle. Je... tu sais combien je hais les hôpitaux. D'ailleurs, on est où là ? - CHU, répondit Teru. - Gynéco-obstétrique, compléta Lucie. Cécile la regarda en clignant des yeux. - Gynéco ? Ils ont remarqué que je suis une femme ? Bon, alors tout n'est pas perdu ! - Cécile, lui demanda son amie, le fait que tu aies des nausées tous les matins, ça t'a pas paru bizarre ? - ... Nous vîmes Cécile changer graduellement de teinte. De vaguement rose, elle devint blanche puis grise. Puis ses mains se rejoignirent sur son ventre et ses yeux semblèrent se noyer.
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++ Cécile ++
La première fois que c'était arrivé, je devais avoir vingt ans, mais depuis que j'avais commencé à rechercher les sourires des bébés de mes cousines et amies, j'avais rêvé d'abriter une petite vie. Voir défiler ces années sans qu'il ne se passe rien n'avait pas toujours été évident. Et voilà que d'autres m'apprenaient ce que j'aurais dû être la première à savoir. Faisant un rapide calcul, je conclus que ce petit être "poussait" en moi depuis deux mois environ. Il y avait deux ou trois dates possibles. J'essayai de ressentir ce qu'il se passait au creux de mon ventre. Est-ce que cette petite vie se développait bien ? Serait-elle assez forte ? Et moi ? Je m'étais beaucoup affaiblie ces dernières semaines, je ne pouvais même plus le cacher. Pourtant, il allait me falloir, pour me préparer à son arrivée, l'énergie et l'enthousiasme que je voulais transmettre à ce bébé une fois qu'il serait dans mes bras. Et son père ? Comment prenait-il la chose ? Lorsqu'on s'était rencontré, nous avions évidemment parlé enfants. Je savais qu'il voulait être père, et je l'avais épousé avec la certitude qu'il était taillé pour ce rôle. Je savais aussi qu'avoir choisi Satoshi lui avait imposé le renoncement à ce désir. Je pensais encore que c'était ce qui avait pesé le plus en ma faveur dans la balance. Cela m'avait indiqué à quel point il tenait à lui. Je regardai Teru. Comme je m'y attendais, son visage ne reflétait pas le bonheur parfait. On aurait plutôt dit qu'il craignait quelque chose. Etait-ce en rapport avec le bébé ? - Teru ? Quelle horreur ! C'était ma voix, cette chose cassée et humide ? Depuis quand pleurais-je ? Assez longtemps à en croire le taux d'humidité de mes cheveux et de l'oreiller. Pas étonnant qu'ils aient tous ces mines d'enterrement ! - Hé ! repris-je en reniflant. Faites pas ces têtes-là ! Je suis juste furieuse de ne pas l'avoir compris toute seule. Y a pas mort d'homme ! - Cécile... Je savais que Lucie lisait en moi et qu'elle voyait que je me forçais. Mais, au point où j'en étais... - Pardon ma belle, mais on causera layette plus tard. Il y a quelqu'un d'autre à qui je dois parler d'abord. ...Teru, appelai-je pour le faire sortir de la stupeur dans laquelle il paraissait plongé. Teru, je sais que ça va poser des problèmes, pourtant... cet enfant, je le veux. Son regard était effrayé... Il avait compris ce que j'avais dit, mais... oh ! zut, j'étais si absorbée par ma petite personne que j'en avais oublié que la raison de notre séparation était encore un mystère pour plusieurs personnes dans cette pièce.
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++ Lucie ++
- Il me semblait que j’avais limité le nombre de personnes dans cette chambre ? gronda une voix derrière nous. - Mais elle est réveillée, sensei. Vous aviez dit tant que Cécile-chan était inconsciente, alors… déclara Aiba-chan. - Soit. Okaeri, Miura-san. Comment vous sentez-vous ? - Pas mieux mais pas pire que ces derniers jours. Mais au moins maintenant je sais pourquoi. - Bien, je vais vous examiner dès que vos amis seront sortis. Aiba ouvrit la porte, Sho le suivit. Je sentis la main de Nino se déplacer de mon épaule mais quand il voulut desserrer mes freins, je dis : - Désolée, je reste. Fais plutôt sortir Matsujun. Puis en allemand à Cécile. - Je dois rester, s’il te plait… - Les gars sortez ! conclut Cécile en soupirant. Une fois les garçons sortis, je me reculais jusqu’à la fenêtre où j’entrepris d’admirer le paysage le temps que le médecin examine mon amie. Le ciel était au diapason de mon cœur : gris et déchiré. - Dites-moi, vous me relâchez quand ? - Sûrement pas tout de suite Miura-san. Vous avez perdu connaissance, nous devons vous garder en observation... - Oui, oui, je connais la chanson. Mais je n'ai pas l'intention de rester ici plus que nécessaire. Votre hostellerie est fort plaisante, mais rien ne vaut mon garde-manger. - Nous étudierons la question demain. En attendant, pouvez-vous évaluer votre douleur sur une échelle de... ? - Pas besoin. Je ne veux rien. Rien qui puisse nuire à mon enfant. Et je vous préviens, je connais vos étiquettes et les effets de vos poisons. Je ne vous laisserai pas faire. Cécile était vraiment une tête de mule ! Le médecin soupira. - Bien. Alors, ne vous fatiguez pas et tout ira bien. Nous le vîmes reprendre le dossier qu’il avait posé au pied du lit le temps de l’examen puis il releva les yeux vers sa patiente. - Miura-san, j'ai tout de même une question à vous poser. Vous saviez-vous enceinte ? Mon amie lui lança un regard que je connaissais. Celui avec lequel elle jaugeait les gens avant de décider s'ils méritaient qu'elle leur dise la vérité, s'ils étaient capables de l'admettre ou s'il allait falloir justifier ses dires, ce qu'elle détestait faire. - Non. Si je l'avais su, je n'aurais pas attendu autant. Les nausées ont commencé après le 11 mars. J'ai attribué ça au tremblement de terre. C'est pas quelque chose de courant dans mon pays. Et quand j'ai vu que même des Japonais avaient du mal à s'en remettre, mes malaises ne m'ont pas paru si anormaux. Ses yeux exprimèrent sa compréhension. - Il n'y avait personne auprès de vous pour s'inquiéter pour vous ? - ...Votre sollicitude me touche docteur, mais en parler maintenant n'y changera rien. De toute façon, je n'ai pas écouté les gens qui s'inquiétaient. - Je vois... reposez-vous bien, Miura-san. Il inclina la tête et sortit. - Pourquoi tu voulais pas sortir, Lucie ? - Parce que… Cécile, ça va vraiment ? Je sais que les médecins, moins tu les vois, mieux tu te portes mais… Tu y as été fort là quand même... - S’il te plaît… pas maintenant. Quelques minutes plus tard, les six autres étaient de retour. Ils entrèrent bruyamment, trop bruyamment pour être honnêtes. Aiba s’employa à raconter nos aventures à l’aéroport. Quand Nino revint à mes côtés, je levai les yeux vers lui et soufflai un ‘alors’ interrogateur. Il jeta un coup d’œil vers Cécile, s’assurant qu’elle ne nous regardait pas, avant de baisser la tête et de la secouer doucement. Mon cœur se serra et j’agrippai sa main le plus fort possible. Ravalant un sanglot, je décidai de suivre les sketchs que nous jouaient les garçons en racontant leur dernier enregistrement de VS. Nino s’était assis à mes côtés. Je finis par poser quelques instants ma tête sur son épaule et décidai de suivre la conversation les yeux fermés.
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++ Teru ++
Endormie, elle avait eu l'air d'une malade comme il y en avait des dizaines dans cet hôpital. Réveillée, ses yeux presque éteints m'avaient poignardé. Non qu'elle ait eu l'air de m'en vouloir, elle ne m'avait toujours rien reproché. Elle ne considérait pas ce que je vivais avec Satoshi comme une aventure, mais bien pour ce que c'était, une histoire d'amour. Une histoire maladroite, qui avait blessé des gens que nous aimions, mais qui valait la peine qu'on la vive et qu'on la défende. J'avais su dès le premier regard que si je devais aimer une femme, ce serait elle. Je n'avais juste pas mesuré à quel point j'étais amoureux de Satoshi. Je l'avais épousée en souhaitant la rendre heureuse et lui faire plein de beaux enfants. Quand le médecin m'avait annoncé sa grossesse, je n'avais pas douté une seconde être le père. J'avais bien compris le sens de la question de Sho-chan, mais moi je ne voyais que le fait que, dans le ventre de cette femme que j'aimais, mal, incomplètement, mais tendrement, une petite vie avait pris racine. Une petite vie dont j'étais l'auteur. Qui aurait peut-être mes yeux. Ou mon nez. Et son rire. Quand Nakagawa sensei avait enchaîné, ma raison avait refusé de comprendre ce que mes oreilles entendaient. Sans Satoshi, sans sa présence, je crois que je serai devenu fou à ce moment-là. Puis nous avions pu aller la voir, et j'avais à peine reconnu la jeune femme au doigt de laquelle j'avais passé une alliance cinq mois plus tôt. Je n'avais pas eu le courage de rester très longtemps. Je sentais toute la réprobation de son amie qui s'ajoutait à mon sentiment d'impuissance. L'annonce de son réveil par Nino m'avait naïvement redonné espoir. Consciente, cela signifiait en vie. Je leur avais demandé le silence sur le pronostic du médecin, sans doute parce que j'espérais que ce que l'on n'évoquerait pas n'arriverait pas. Mais en la trouvant pliée en deux sur ce lit, j'avais compris que l'homme connaissait son art. Et voir ses yeux sans la lueur malicieuse qui m'avait séduit avait fini de m'achever. - Cécile... murmurai-je. Cécile, pourquoi tu n'as rien dit ? Pourquoi tu n'as rien fait ? Si tu me l'avais demandé, je serais venu... - Tu n'es pas responsable de moi. C'était vrai. J'avais abandonné ce privilège en choisissant Satoshi. Mais elle restait ma femme, et je serai pour toujours l'homme qui l'avait mise enceinte de cet enfant qui la tuait. Cet enfant qu'elle me dit vouloir, malgré tout ce qui nous séparait tous les deux. Puis le médecin était revenu et nous étions sortis, les laissant seuls. Dehors, nous nous fîmes renvoyer dans la salle d'attente par une infirmière rondelette et joviale. Le genre à consoler les bébés qui pleurent. Quand il nous rejoignit, je me figeai, ne désirant que lui extorquer des informations rassurantes et craignant ce qu'il allait nous dire. A mes côtés, Satoshi glissa ma main dans la sienne et je m'y accrochai de toutes mes forces. - Alors Sensei ? demanda Nino. Elle semble aller mieux que vous ne le disiez, non ? Je lui jetai un coup d'œil. Avait-il vraiment eu cette impression ? En regardant les autres, je vis que c'était une impression partagée, sauf peut-être par Jun-kun que Sho-chan gardait contre lui. - Elle semble, en effet. Je vis Sho sourire et Matsujun releva la tête. - Elle semble mais ce n'est qu'une apparence. Son corps est très affaibli et son cœur est épuisé. De plus, elle a refusé les antalgiques qui auraient pu la soulager un peu. Elle sera sans doute consciente plus longtemps que je ne vous l'avais dit, mais ne vous faites aucune illusion sur l'issue. Son sourire était triste et je vis dans ses yeux toute la compassion qu'il éprouvait. Je ne savais pas si c'était pour elle ou pour moi, mais je ne pus le remercier qu'en inclinant le buste. Après qu'il soit sorti, je cherchai du courage dans la main qui serrait la mienne et me tournai vers mes amis. - Merci d'être là, les gars. Vraiment. Mais... - Y a pas moyen qu'on vous laisse tous seuls ! s'exclama Aiba. On reste Teru ! Cécile-chan est notre amie aussi. Pas question qu'on l'abandonne maintenant. Nino-kun donna une légère bourrade à son ami et dit en nous regardant tous l'un après l'autre : - Ma-chan a raison. Et faut que vous arrêtiez avec ces têtes de déterrés. On devrait au moins pouvoir lui offrir un peu de bonne humeur, même si notre cœur n'y est pas. Il avait raison. On ne pouvait rien faire pour elle, à part adoucir les heures qui venaient.
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++ Jun ++
J'ignorais pourquoi le rappeur avait décidé de me garder contre lui. Mais je lui en étais reconnaissant. Son odeur m'apaisait. Je ne m'étais pas attendu à un miracle. Et le médecin ne nous en avait pas annoncé. J'avais pensé moi aussi, comme Aiba et Nino, qu'on ne pouvait pas lui montrer des visages pareils. Nous étions donc revenus en feignant la bonne humeur. Aiba parvint à se lancer dans une histoire qui semblait amusante, parce que c'était lui qui la racontait. Je n'écoutais que d'une oreille distraite, mon esprit saisissant un peu tout ce qui se passait dans la pièce. Nino qui avait rejoint Lucie-chan et s'était assis à ses côtés, semblait curieusement mimer une certaine béatitude en accueillant la tête de la jeune femme sur son épaule. Ce n'était pas comme s'il n'était pas content du geste, mais plutôt comme s'il se forçait à montrer à quel point il en était heureux. J'espérais que Cécile ne le connaissait pas trop et ne décèlerait pas ce qui clochait. Teru n'osait visiblement pas s'approcher trop près de sa femme. Mais il n'avait pas non plus de geste trop évident pour Riida, qui assez curieusement participait activement à la description de Sho et Aiba. Ils faisaient des anecdotes sur nos enregistrements des VS Arashi. Cécile souriait doucement aux tableaux qu'offraient mes camarades. Puis le téléphone de Teru vibra dans sa poche, le faisant sursauter et grimacer quand il regarda qui l'appelait. Il se leva et regarda Cécile-chan un peu gêné. - Je suis désolé, il va falloir que je parte un petit moment. Mes parents sont arrivés et exigent que je vienne les chercher. Je reviens le plus vite possible... - Pfff, c'était vraiment pas la peine qu'ils se déplacent pour si peu ! Enfin, je suppose que ta mère a poussé ton père à revenir à Tokyo en lui disant un truc du style "puisque ses parents sont trop loin, c'est nous qui devons y aller" ? - C'est exactement ça, répondit Teru avec un rire nerveux. Je t'avais dit qu'elle était du modèle mère-poule... - Vas-y, l'encouragea celle qui était encore sa femme. Mais dis-leur qu'ils n'ont pas besoin de venir tout de suite ici. Teru nous quitta donc sans plus de cérémonie. Lui parti, nous nous regardâmes un instant, nous demandant sur quoi enchaîner lorsque la voix de la malade se fit entendre. - Masaki... tu ne m'avais pas parlé d'une émission que vous deviez enregistrer ce soir ? Uta ! Trop pris par les événements, nous avions oublié que nous avions des engagements pour la soirée. Et nos téléphones aux sonneries éteintes devaient faire le désespoir de nos managers. Mais comment aurions-nous pu aller nous amuser alors qu'elle restait quasiment seule ici ? - Vous n'êtes pas en retard j'espère ? - Hey, la grande malade au fond de ses draps, tu n'es quand même pas en train de nous virer ? - Si mon cher Jun, c'est exactement ce que je fais. Je suis fatiguée et je vais dormir un peu. Comme est en train de le faire Lucie. Vous, vous avez du boulot. J'ai commencé à prendre l'habitude de regarder vos émissions. C'est plutôt divertissant. Alors ça me soûlerait que vous en ratiez une à cause de moi. Surtout si c'est pour que vous restiez à vous tourner les pouces. Alors, zou ! dehors. Nous échangeâmes des regards dubitatifs. Mais elle avait raison, en tant que pros, on ne pouvait pas se permettre de faire faux bond à une émission dans laquelle nous occupions une telle place. Nino commençait déjà à se lever en redressant doucement Lucie-chan. Cette dernière se réveilla à moitié, regarda autour d'elle et posa la tête sur le matelas du lit en prenant la main de Cécile. Elle lui tournait le dos mais était certainement moins mal installée comme ça. - Tu veux qu'on la fasse sortir ? demanda Sho. - Non merci, j'aime autant la savoir là. Amusez-vous bien. ...Oh ! Jun ! Je me figeai une seconde, de même que Riida et Nino, les deux autres étant déjà quasiment hors de la chambre. - C'est toi qui es monté dans l'ambulance ? - Oui. - Je peux te poser une question ? Je fis signe aux deux autres de partir devant et revint vers elle. Elle me prit la main, et m'obligea à me pencher. - Que veux-tu savoir ? murmurai-je en faisant mine de surveiller Lucie-chan endormie. - Regarde-moi en face et dis-moi franchement... J'obtempérai et croisai ses yeux, exigeants et brillants. - Qu'a dit le médecin ? Que fallait-il répondre ? Il nous avait dit de lui laisser ces quelques heures les plus paisibles possibles. - Jun, regarde-moi bien. Je te jure, tu m'entends ? Je te jure que si tu ne me dis pas la vérité, je ne te le pardonnerai pas.
Voilà... Malheureusement le délai pour semaine prochaine je ne peux rien promettre Mais je vous souhaite à tous de bonnes fête de fin d'année. N'hésitez pas laissez un comm' | | | Dim 29 Déc - 14:39 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| Bonjour à toutes! Voici le chapitre du jour! - Chapitre 31:
++Ohno++
Nino et Sho avaient quitté l’hôpital en premier pour les studios de la NHK. Ils avaient décidé de partir avant que Jun ne sorte de la chambre de Cécile. De toute façon, nous étions pour le moment à deux voitures et je n’étais pas franchement pressé de répondre à l’interrogatoire que Nino ne manquerait pas de me faire subir bientôt. J’avais donc été assez soulagé de voir que Sho lui avait d’autorité pris le bras pour l’entraîner à sa suite. - Où sont les deux autres ? - Déjà partis, informa Aiba. Nous on t’attendait puisque c’était moi qui avais la seconde voiture. - Allons-y alors. Nous sortîmes de l’hôpital dans un silence qui me parut presque surréaliste à cause de la présence d’Aiba. Une fois dans la voiture, je vis, dans le rétroviseur, Jun mettre ses écouteurs sur les oreilles et Aiba démarra. Devant mon mutisme, ce dernier éprouva le besoin d’allumer la radio et se mit à brailler en écho avec les chansons qui passaient. De mon côté, je profitai de ces instants de répit pour faire le point. Jusque-là seuls Jun, Cécile et Sho avaient été mis au courant de notre relation à Teru et moi. Pour les deux premiers, cela avait été une question d’honnêteté vis-à-vis d’eux, déjà parce que Teru quittait sa femme pour moi, ensuite parce que même si j’avais quitté Jun depuis deux mois, j’estimais qu’il avait le droit de savoir. Pour le troisième, cela avait été un peu comme aujourd’hui pour les autres : accidentellement.
-Flash-Back- Il avait débarqué chez moi le soir même du jour où je lui avais appris pour mon colocataire. Il avait eu un prétexte tout trouvé : celui de me remettre les dernières paroles d’une de nos chansons. Il avait supposé (assez justement si j’avais toujours été célibataire) que si je n’étais pas plongé dans un magazine de pêche, c’était que j’avais un fusain et mon sketchbook dans les mains. En tout cas, il me connaissait suffisamment pour savoir que m’envoyer par mail des paroles à mémoriser pour le lendemain était risqué, alors il avait décidé de me les apporter en mains propres, espérant sans doute croiser Teru par la même occasion. Il n’avait pas dû être déçu puisque j’étais sous la douche et c’était Teru qui lui avait ouvert. Ils discutaient au salon quand j’y débarquai en tenue d’Adam dans le but avoué d’exciter mon partenaire. Sho, qui était installé dans un fauteuil, s’était redressé, nous avait regardé l’un après l’autre durement avant de murmurer « c’était donc pour ça… ». Puis il avait voulu partir mais je l’avais arrêté d’un mot, lui demandant d’attendre un instant que je passe quelques vêtements. Quand j’étais revenu, il s’était rassis mais, alors que précédemment il bavardait joyeusement avec son ami, cette fois-ci il demeurait silencieux, le visage grave. - Vous avez pensé aux conséquences ? nous demanda-t-il une fois que je me fus installé aux côtés de Teru sur le canapé. - Oui. Le 11 a vraiment été comme un révélateur pour moi. C’est là que j’ai compris ce qui était le plus important à mes yeux et c’est pour ça que… - Et Jun ? coupa Sho en me regardant. - On était déjà plus ensemble mais je ne lui ai jamais caché. Par contre, c’est pas qu’on voulait vous le cacher mais… - C’est votre vie privée, coupa-t-il une nouvelle fois. D’ailleurs je ne veux rien savoir de plus. Maintenant, n’oublie pas que tu n’es pas Monsieur-tout-le-monde et que tu ne peux pas faire n’importe quoi. Quant à toi Teru, t’es marié alors ne fais rien qui pourrait la mettre dans l’embarras. Pendant qu’il parlait à Teru, c’était son alliance qu’il avait fixée, pas son visage, puis il s’était levé et je l’avais raccompagné à la porte. - Sho-chan, merci. - A demain. Et tâche de savoir tes paroles. Ah oui, j’ai failli oublier. Fouillant dans son sac, il sortit un porte-document dont il tira une feuille A4 où un texte était écrit. Puis il partit. -Fin du Flash-Back-
- Riida, on est arrivés ! J’émergeai de mes réflexions pour regarder autour de moi. Nous étions dans un parking et je reconnus la voiture à côté comme étant celle de Sho. Je m’extirpai du véhicule et nous nous dirigeâmes, Jun, Masaki et moi, vers la loge où devaient nous attendre les deux autres. A peine avions-nous pénétré dans le vestiaire qui nous avait été attribué que Nino referma sa DS, se leva et se dirigea droit sur moi. Instinctivement je reculai jusqu’à ce que mon dos rencontre le torse de Jun. - Quand est-ce que tu comptais nous l’annoncer ? Hein ? Et puis franchement, c’était n’importe quoi à l’hôpital ! C’est tout juste si vous vous êtes pas roulés une pelle dans la salle d’attente ! Et je suis quasi sûr que vous auriez été capables de le faire devant le toubib. - Hein ? De quoi tu parles Kazu-chan ? Qui Riida embrasserait-il parmi nous puisqu’il est plus avec Matsujun. Gomen Jun-kun, je… VRAIMENT ?? En prononçant ce dernier mot, Aiba mit ses deux mains sur sa bouche pour étouffer tardivement son exclamation. Il avait enfin compris ce que Nino avait capté au premier regard des heures auparavant. D’ailleurs je commençais à croire que ce dernier avait déjà des soupçons avant. Après tout, c’était sa grande spécialité : deviner (ou surprendre) les secrets des autres mais attendre pour leur en parler que ceux-ci les dévoilent. Jun éloigna la terreur des bacs-à-sable et l’entraîna vers notre baka. Ils s’installèrent tous les trois dans un canapé et je me réfugiais près de Sho qui m’ignora sans pour autant m’accabler. Heureusement, on frappa à la porte et nos managers entrèrent, suivis d’une équipe de stylistes, maquilleurs, coiffeurs… qui investirent l’espace et nous invitèrent à nous préparer.
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++Sho++
Ce que j’avais redouté à l’hôpital était arrivé dans la salle que l’on nous avait attribuée pour l’émission. J’avais pourtant demandé à Nino de prendre le temps de la réflexion quand nous étions dans la voiture, mais il avait quand même sauté sur Riida dès son arrivée dans la pièce. Je devais reconnaître cependant que même si l’envie de lui taper dessus le démangeait visiblement, son intervention était frappée de bon sens, et les reproches justifiés. Teru et Satoshi étaient un couple vraiment dangereux pour notre groupe quand ils se laissaient submerger par leurs sentiments car ils ne prêtaient alors aucune attention à leur entourage. Puis Aiba, qui précédait les deux autres de quelques pas, avait réalisé à ces mots ce que ses yeux avaient ignoré quelques heures plus tôt. Il s’était figé et c’est à ce moment que Matsujun avait récupéré Nino et Masaki et s’était assis avec eux dans le sofa mis à notre disposition. Après un instant d’hésitation et un regard gêné aux trois autres, Riida s’était installé à mes côtés. Je sus à ce moment qu’il avait réalisé les risques que lui et son amant avaient pris cet après-midi. Heureusement qu'il n'y avait pas eu beaucoup de monde dans le Service de l'hôpital et que le personnel était tenu au secret. Mais nous n’avions plus le temps de discuter, il fallait maintenant que nous nous préparions pour nos deux performances. Une répétition, deux chansons plus tard et notre passage de MC bouclé, nous étions tous les cinq de retour dans la loge et enfin seuls. Je m’étais décidé à bouger du canapé où je m’étais effondré pour récupérer mes vêtements de ville quand Jun m’en empêcha. - Attends ! Avant que l’on se retrouve à l’hôpital, je veux vous dire quelque chose. Je l’observai et vis son air grave et sa nervosité. A priori ce n’était pas une bonne nouvelle. - Qu’est-ce qu’il y a J ? Tu as eu des nouvelles depuis tout à l’heure ? demanda Nino. - Non… Mais… avant de partir… quand j’étais seul avec Cécile-chan… La difficulté qu’il avait pour nous dire une simple phrase me mettait en boule et je n’étais pas le seul. - Jun qu’est-ce qu’il s’est passé avec Cécile ? Le silence s’abattit sur nous quelques secondes avant que Jun ne lâche sa bombe. - Je lui ai dit ! Je lui ai dit pour son pronostic. - Pourquoi ? demanda doucement le gamer qui s’était collé à notre benjamin. - Elle voulait savoir… c’est pour ça qu’elle m’a retenu. Je… je ne pouvais pas mentir. - Tu as bien fait, dit soudain Masaki. Elle avait le droit de savoir si elle le désirait. Et puis si elle te l’a demandé, c’est qu’elle te fait confiance non ? - Nous sommes amis. Nino serra un peu plus fort l’épaule de Jun contre la sienne, avant de se relever pour se changer et chacun notre tour nous en fîmes autant. Les managers de Jun, Nino et Riida arrivèrent pour les raccompagner à la Jimusho ou chez eux et nous nous séparâmes pour nous donner rendez-vous deux heures plus tard dans le hall de l’hôpital.
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++Cécile++
Mes yeux fermés devaient donner l'impression que je dormais. Et c'était exactement ce que je recherchais. Teru était revenu avec ses parents, et ils étaient maintenant tous les trois assis près du lit, échangeant parfois quelques mots. Très peu car ma belle-mère avait rapidement rappelé à l'ordre ses deux hommes. - Faites attention à ce que vous dites, avait-elle chuchoté. Il parait qu'on peut se souvenir de ce que les gens disent autour de vous quand vous dormez. - Kaa-san, c'est valable pour les gens dans le coma ! Cécile ne fait que dormir là. Mais ils s'étaient tus malgré tout. Et ça m'arrangeait parce qu'ainsi j'avais du calme pour réfléchir. Jun avait tremblé quand j'avais posé mon ultimatum. Je l'avais senti à sa main. Ses yeux avaient brillé un instant, puis il s'était repris et m'avait tout dit. Sa voix était si basse, si atone, que le simple froissement des draps aurait suffi à me faire rater ses mots. Quand il s'était arrêté de parler, ses yeux avaient poursuivi le discours, versant des larmes silencieuses, du genre dont on ne s'aperçoit pas qu'elles coulent et vous inondent le visage. Ayant compris mais pas encore réalisé la portée de ce qu'il venait de m'annoncer, j'avais serré sa main autant que je le pouvais et il avait posé ses lèvres humides de l'eau qu'il pleurait sur mon front. Gentiment. Délicatement. Comme il l'aurait fait sur mon cadavre. J'avais fermé les yeux une seconde puis avais lâché sa main pour attraper son épaule et l'obliger à mettre son oreille à portée de ma bouche. - Je ne suis pas encore morte, Jun. Puis j'avais embrassé sa joue et l'avais relâché en me renfonçant dans mon oreiller, la tête tournée vers Lucie, les yeux fermés. Et je ne les avais pas rouverts depuis. J'essayais d'analyser ce que je ressentais. C'était difficile. Au début, quand j'avais entendu la porte se refermer et me laisser seule avec la respiration calme de Lucie endormie, j'avais juste eu envie de hurler. Comme on hurle quand on tombe dans un puits sans fond, à toute vitesse et sans pouvoir se raccrocher à quoi que ce soit. Le genre de sensation qu'on a parfois dans le demi-sommeil. Je connaissais les étapes par lesquelles les malades passaient quand on leur annonçait une maladie fatale. Le refus, la colère, le marchandage, la dépression, l'acceptation. Jun avait dit que le médecin ne me laissait pas jusqu'à demain. Je n'avais pas le temps. Pas de temps à perdre. Et je savais que ces étapes en demandaient, justement, du temps. Alors je décidai de choisir l'autre solution : espérer. Un bébé, c'est une vie, c'est LA vie. Ça ne peut pas tuer ! Je ne voulais pas mourir. J'avais une possibilité d'être heureuse, de vivre une vie pleine, enfin entière, enfin complète. Je n'avais pas envie de la laisser me filer sous le nez ! Le médecin connaissait son boulot, mais moi je me connaissais. Il avait toujours fallu des doses de cheval pour me remettre sur pied. Il en faudrait aussi à la faucheuse pour m'embarquer. Pas question que je me laisse faire. Et si la seule raison que je pouvais avoir était ce petit être sans autre défense que ma volonté, eh ! bien, ma raison serait la meilleure. Mais pour cela, j'allais avoir besoin du soutien de ceux que j'aimais. Et je ne comptais pas le leur demander en les apitoyant sur mon sort. Ils semblaient en être tout à fait capables tous seuls ! Sauf peut-être ma petite flamme, celle qui bien qu'endormie réchauffait ma main de la sienne. J'avais décidé de mettre sur mon état de femme enceinte le fait que j'avais envie de pleurer dès que je pensais à faire une phrase. Pour leur demander leur force, il allait me falloir donner de la mienne. Et les pleurs n'étaient pas le meilleur moyen. Je finis par en trouver un autre, soufflé par la passion de la jeune femme que je réveillai doucement en pressant sa main. Je l'entendis marmonner, puis sentis qu'elle relevait la tête. Je ne pouvais pas ouvrir les yeux, pas encore. Ils se seraient emplis de larmes, et je ne voulais surtout pas montrer ce visage. - Lucie-chan ? C'était ma belle-mère. - Miura-san ? Oh, vous êtes arrivés... Bonsoir. Je l'imaginais sans peine incliner la tête pour les saluer. - Comment allez-vous mon petit ? Vous devriez aller vous reposer. Ils doivent avoir ce qu'il faut pour ça. - Je vous remercie, mais ce n'est pas nécessaire. Je ne veux pas quitter Cécile. Elle avait serré ma main un peu plus fort en disant cela. Et je la serrai en retour. - Cécile ? Sa voix s'était dirigée vers moi. - Elle dort, ne la réveille pas s'il te plait, dit la voix basse de mon mari. Je lui trouvai une intonation lasse. Comme s'il avait beaucoup pleuré. Avait-il déjà abandonné ? Si je lui demandais la vérité, comme je l'avais demandée à Jun, me la dirait-il ? Je me rendis compte que je ne voulais pas connaître la réponse à cette question. Et je ne voulais pas sentir plus longtemps cette atmosphère de veillée funèbre autour de moi. J'étais un berceau, pas un cercueil ! Je priai un court instant pour que ma voix sorte assurée dès les premiers mots. Je voulais que Lucie reconnaisse la chanson tout de suite. - On est bien peu de chose, et mon amie la rose me l'a dit ce matin... Sa main se crispa violemment sur la mienne. - Cécile ? Je sentais que les personnes présentes s'étaient figées. C'était toutes des francophones. Mon message devait donc pouvoir passer, du moins je l'espérais. Ma voix s'affirmait davantage à mesure que je faisais miennes les paroles de cette chanson que j'avais toujours beaucoup aimée. - ...Mon cœur est presque nu, j'ai le pied dans la tombe, déjà je ne suis plus... Douce et mélancolique, mais sans vraie tristesse. Une chanson qui disait la vie telle qu'elle est, avec ce qu'elle a de sublime et d'éphémère. Et qui se terminait sur ce que je voulais à tout prix communiquer à ceux qui étaient là. - ...La lune cette nuit a veillé mon amie, poursuivis-je en ouvrant les yeux. Je vis à ma gauche Lucie cramponnée à ma main et à côté d'elle mon beau-père écoutant la chanson les yeux à demi fermés. A ma droite, Teru et sa mère me fixaient avec intensité. Et pour Teru, avec peut-être un petit peu de crainte. - ...Crois celui qui peut croire, moi j'ai besoin d'espoir, sinon je ne suis rien... La chanson finie, je dégageai ma main de celle de Lucie, me redressai un peu dans mes oreillers et ouvrit les bras, juste à temps pour accueillir mon amie qui s'était jetée sur moi. Elle tremblait, mais je compris que c'était dû à l'effort qu'elle faisait pour ne pas pleurer devant moi. Je savais bien qu'elle ferait tout pour que je puisse garder la tête droite, ma petite flamme. - Ma luciole, ma douce petite luciole, dis-je le nez dans ses cheveux en la serrant contre moi. Je n'avais pas encore la force d'en dire plus sans montrer mes émotions. Je caressais sa tête doucement, m'y appuyant légèrement. Ce faisant, je pouvais voir Teru. Il me donna envie de rire par une bizarre association d'idées : je pensai que la tête qu'il faisait actuellement, plus proche de celle de la carpe koi que du diplômé de Keio, ne pouvait que plaire à Satoshi. - Cécile... - Je sais. - Pardon ? - Je sais Teru. Ce n'est pas la peine de chercher à me le cacher, je sais ce qu'a dit le médecin. Lucie se serra davantage contre moi avant de s'écarter et de me regarder en face. - Comment tu le sais ? - Lucie ! - Quoi ? fit-elle en regardant Teru les sourcils froncés et le regard noir. Elle a dit qu'elle savait, ça te sert à quoi de le nier ?
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++Aiba++
Nous nous étions tous regroupés avant de rejoindre le cinquième étage, plus ou moins déguisés pour passer aussi inaperçus que possible. Nous avions eu de la chance cet après-midi que le Service soit quasiment désert, Cécile semblant être la seule patiente à être hospitalisée pour la nuit. Sho m'avait demandé de prendre Jun en revenant après un passage éclair chez moi. J'avais profité de celui-ci pour saluer Shigeru qui avait accepté de rester toute la nuit. Mes remerciements l'avaient fait sourire dans son demi-réveil ébouriffé et je m'étais sauvé avant que l'envie de l'embrasser ne soit trop forte. Peut-être que maintenant que Lucie était revenue, j'arriverais à voir plus clair dans mes sentiments ? Pour Matsujun, même sans la demande de Sho-chan, j'aurais trouvé moi aussi qu'il n'était pas possible de le laisser conduire encore. Je l'avais suivi jusqu'à chez lui en sortant de l'enregistrement avant de poursuivre mon chemin et je l'avais trouvé bien distrait. Aussi avais-je été rassuré qu'il m'attende sagement devant chez lui quand je repassai le prendre. Il était vraiment tard quand nous étions revenus à Todai, mais le personnel avait été prévenu par le médecin auprès duquel Sho avait obtenu que nous puissions passer la nuit sur place. Pauvre Cécile-chan. En plus, sa seule famille ici, c'était Teru, et il vivait avec Riida. Ça, je n'en revenais toujours pas. Est-ce que Jun était au courant ? Je n'avais pas osé lui poser la question dans la voiture, et maintenant que nous étions tous dans la salle d'attente, je ne me voyais pas le lui demander... - Jun ? La question de Riida me fit lever la tête. Et je vis que notre ami avait les larmes aux yeux. Nino s'approcha de lui et posa la main sur son épaule. - J, faut pas que tu pleures comme ça. T'imagines ce qu'elle va penser si tu fais une tête pareille ? - Je... Mais il ne put finir, secoué par une crise de sanglots. Sho-chan vint le prendre à nouveau dans ses bras, comme il l'avait fait plus tôt dans l'après-midi. Nino, après avoir fait comprendre d'un regard à Oh-chan que celui-ci avait intérêt à rester à l'écart, déclara qu'il allait aux nouvelles pour savoir si on pouvait entrer dans la chambre. Jun s'était calmé et c'était mon tour de pleurer, assis sur un siège au fond de la pièce. J'avais essayé de me planquer mais Sho était venu me tenir la main. Je me sentais un peu idiot, mais son gentil sourire m'apaisa doucement et j'étais en train de lâcher sa main lorsque Teru ouvrit la porte de la salle d'attente. - Toi ! grinça-t-il sourdement en pointant du doigt notre benjamin qui le regarda avec surprise. Pourquoi tu as fait ça ? Qu'est-ce que tu n'as pas compris dans "laissez-la tranquille pour ses dernières heures" ? C'était trop demander que de vouloir la laisser s'en aller paisiblement ? T'as pas pensé une seconde à ce qu'on allait ressentir ! Tu crois que je le prends comment, de savoir qu'elle meurt à cause de moi ? - Teru ! Riida était venu attraper la taille de Teru-kun pour le tirer en arrière et l'obliger à s'asseoir. Matsujun, qui s'était retrouvé collé contre le mur, avait dans les yeux une lueur de combat qui me fit craindre le pire alors qu'il toisait l'amant d'Ohno. - Comment TU le prends ?! C'est ça ta question ? Tu t'es pas demandé comment elle le prenait, elle ? Tu crois qu'elle est idiote ou quoi ? Tu t'imagines vraiment qu'elle ne se doutait de rien ? Mais qu'est-ce que tu sais d'elle, Teruki ? Est-ce que tu sais qu'après le 11 mars, elle n'a pas dormi pendant des jours ? Qu'elle a pleuré pendant des heures quand tu l'as quittée ? Qu'elle s'est réveillée en larmes pendant des semaines ? ...Que c'est à moi qu'elle a offert son premier sourire après ça ? Teru s'était figé sous la voix froide du plus jeune. Il ouvrit la bouche mais ne parvint pas à émettre le moindre son. Et Matsujun, qui frissonna en s'écartant du mur, jeta une dernière phrase au trader avant de sortir de la salle. - Je lui ai dit parce qu'elle me l'a demandé et que, contrairement à toi, je ne peux pas lui mentir. Jun parti, je lançai un regard vers Sho-kun qui avait repris ma main pendant la diatribe de notre ami. C'était à mon tour de le calmer. Je sentais bien depuis quelques temps qu'il me parlait parfois d'une chose qui lui tenait à cœur, sans jamais être très explicite. Je ne comprenais que maintenant qu'il devait s'agir de Cécile-chan. Et si moi j'étais scié d'apprendre toutes ces choses, j'imaginais sans peine que lui tombait de plus haut encore. Quand je tournais à nouveau la tête vers Teru, je vis que Riida s'était approché de lui et qu'ils se murmuraient des petites phrases pas forcément très gentilles. Le visage d'Oh-chan laissait voir ses sentiments à travers ses sourcils froncés et sa bouche tordue, puis son soupir et ses yeux fermés avant qu'il ne sourie à la fois doucement et tristement. Il se pencha vers Teru et je vis dans son regard combien il avait d'amour pour lui. Les bras du trader se serrèrent autour de la taille de son amant et l'instant d'après ils s'embrassaient tendrement. Je détournai la tête pudiquement. Je pouvais comprendre qu'ils aient besoin de se réconforter. C'était ce que nous faisions aussi, la méthode était juste différente. Et quand la porte s'ouvrit, je ne regardai pas tout de suite dans sa direction. - Teruki !! Cette voix... Une femme ? Ma tête pivota lentement et mes yeux s'écarquillèrent en découvrant dans l'encadrement de la porte... les parents de Teru.
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++Lucie++
- Mais… - Je sais, c’est tout. - POURQUOI ? - Teruki, moins de bruit. La mère de Teru venait d’intervenir. Ce dernier la regarda avant de balbutier : - Mais nous nous étions mis d’accord. Nous avions convenu de nous taire. - Si quelqu’un a parlé, c’est que Cécile l’a sûrement voulu. N’est-ce pas ? demandai-je à mon amie qui avait refermé les yeux depuis son aveu. Je savais qu’elle ne dormait pas, sa main était bien trop fortement agrippée à la mienne pour quelqu’un d’assoupi. D’ailleurs elle avait raffermi sa main un instant sur mes doigts en réponse à ma question. - Rendors-toi, Cécile. On est là. Je ne partirai pas et tu as besoin de te reposer pour te battre, lui chuchotai-je. Elle esquissa une grimace-sourire et bientôt sa respiration nous apprit qu’elle s’était rendormie. Teru avait entrelacé ses doigts avec les siens et le silence reprit bientôt ses droits dans la pièce, seulement entrecoupé par le bruit des machines, les pages que tournaient les parents de Teru et le va et vient régulier du personnel hospitalier. Je ne pouvais détacher mon regard de son visage, tentant de lui transmettre ma force pendant son repos. A un moment, je perçus des reniflements mais je me refusais de tourner la tête en direction de celui qui les émettait. Ce n’était pas que j’étais encore vraiment en colère contre Teru et Ohno. En fait ces trois dernières semaines j’avais eu le temps de me faire à cette idée étrange et si Cécile avait préféré abandonner et pardonner alors ce n’étais pas à moi de leur faire payer. Et puis la seule personne qui comptait vraiment était allongée dans le lit à côté de moi.
(…)
- Lucie, tadaima, souffla une voix dans mon oreille alors qu’un bras enlaça mes épaules. J’ôtai une de mes mains de celles de Cécile pour serrer les doigts de Nino en guise de salutation. - Des changements ? me demanda-t-il. - Elle s’est réveillée tout à l’heure et elle a dit qu’elle savait. - Oui. Jun nous l’a annoncé au studio, me souffla Nino. Mais dans le silence de la pièce, le chuchotement fut aussi bruyant qu’un coup de tonnerre et je perçus plus que je ne vis Teru sortir de la chambre. Quelques minutes plus tard, les mains de Jun prirent possession de celle que Teru avait lâchée plus tôt et j’eus le sentiment que Cécile se détendit davantage dans son sommeil. Quand je levai les yeux un peu plus tard, je m’aperçus que nous n’étions plus que quatre dans la chambre. - Les parents de Teru sont sortis boire un café, m’informa Nino.
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++Ohno++
Ses lèvres étaient fraîches sous les miennes. J'avais fini par l'embrasser après avoir manifesté mon mécontentement face à son attitude avec Jun. Il avait le droit de s'inquiéter pour Cécile-san, mais pas de s'en prendre à celui qui avait certainement dû être le plus présent pour elle ces dernières semaines. Mais je savais qu'il avait aussi besoin de réconfort. Ces dernières heures, seul avec une femme... mourante... et son amie hostile (vu comme elle avait été avec moi à la JE, il n'y avait aucune raison qu'elle soit plus conciliante avec mon amant), avaient dû être dures. Et mon baiser n'était que pour lui rappeler que je l'aimais et que j'étais là pour lui. Ce n'était qu'une caresse, l'essentiel de nos sentiments était transmis par nos mains, les miennes accrochées à ses épaules, les siennes agrippées à ma taille. Mais le cri de la femme qui interpela Teru nous figea et mes yeux qui s'ouvrirent aussitôt virent son regard affolé. Je m'écartai rapidement et, avant de me tourner vers la porte, je notai l'air ahuri d'Aiba au fond de la salle d'attente. Et j'en compris toute la raison en voyant les parents de Teru debout à l'entrée de la pièce. Nous voulions attendre avant de leur parler. Et s'il était clair que la pilule aurait de toute façon du mal à passer, le moment était le pire possible pour qu'ils le découvrent. - Comment osez-vous toucher mon fils ! Le regard qu'elle me lança me gifla plus violemment que ne l'aurait fait sa main. - Teruki, va rejoindre ta femme immédiatement. - Papa... Mais son père le foudroya d'un froncement de sourcils plus impressionnant que ceux de Jun. Et je crus un instant, quand il se leva, que mon amant allait obéir, ce qui était certainement la chose la plus sage à faire à ce moment. Mais il prit ma main droite et resta à côté de moi. - Je sais que ça vous choque, je sais que ce n'est pas le moment, mais Satoshi est l'homme que j'aime, et j'ai besoin de lui, sans doute plus encore maintenant que n'importe quand. Et vous ne me séparerez pas de lui. Je fermai les yeux en entendant ces paroles. Il avait osé. Il avait osé ! La bouffée de reconnaissance et d'amour qui monta en moi m'isola du monde le temps que je reprenne le souffle qu'il m'avait coupé. Et quand je revins à ce qui m'entourait, je vis que son père s'était rapproché de nous, et parlait avec une colère seulement retenue par le lieu où nous étions. - ...e te crois pas intouchable. Etre mon fils t'a ouvert bien des portes qu'il m'est facile de te fermer ! Je jetai un œil inquiet à l'homme qui serrait ma main. Sa mâchoire contractée ne me rassura pas. - Quant à vous, jeune homme, ajouta Miura-san en se tournant vers moi, vous n'imaginez même pas ce qui vous attend. Je vais... - Vous ne ferez rien du tout, Miura-san. La voix calme venait de ma gauche. Je n'avais pas besoin de le regarder pour comprendre que Sho était venu nous soutenir. - Ne te mêle pas de ça, Sho-kun, dit la mère de Teru en s'approchant. - Je n'ai aucune légitimité à me mêler de votre relation avec votre fils, c'est vrai, fit-il en s'inclinant légèrement. En revanche, je ne laisserai personne, ni vous, ni un autre, s'en prendre à Arashi. Et Ohno-kun est bien trop attaché à Teru pour ne pas être touché par ce qui pourrait lui arriver. Miura-san, mon père m'a si souvent vanté votre intelligence et votre capacité de décision que je ne doute pas un instant que vous saurez voir où est l'intérêt de chacun. J'admirais Sho quand il parlait ainsi, sur ce mode lénifiant, persuadant son interlocuteur qu'il avait forcément raison. Et je vis que sa menace avait porté. Les parents de mon amant firent deux pas en arrière avant de reprendre la parole sur un ton plus calme. Un affrontement avec la famille Sakurai ne devait pas une perspective envisageable pour les Miura. - Il n'est pas nécessaire d'aller si loin, Sho-kun. - Je ne le souhaite pas plus que vous, mais je n'hésiterai pas. Je vis Sho les accompagner vers la porte et me tournai vers Teru qui semblait figé, sa main serrant la mienne si fort que je ne sentais plus mes doigts. Je le fis s'asseoir et me rendis compte qu'Aiba était deux pas derrière nous. - Ça va ? nous demanda-t-il gentiment. - Non, Aiba-chan. Je ne pardonnerai jamais à mes parents d'avoir menacé Sato. Ils peuvent me faire ce qu'ils veulent, mais qu'ils ne te touchent jamais ! Il avait levé les yeux vers moi et j'y lus tant de résolution guerrière que je me demandai s'il n'allait pas faire une bêtise vis-à-vis d'eux. - Teru, Sho est en train de discuter avec eux. Je suis sûr que tout va se calmer. Et ce sont tes parents. - Et faut avouer que leur balancer ce que tu as dit dans ces circonstances, c'est logique qu'ils le prennent mal. Aiba avait raison. Nous restâmes silencieux, méditant sur ce qu'il venait de se passer. - Teru, demanda soudain Ma-kun, comment va Cécile-chan ? - Elle s'est réveillée pour nous chanter une chanson. - Pardon ? Nous le fixions avec étonnement mais avant que Teru n'ait pu développer, Sho était revenu. - Tes parents sont partis faire un tour à la cafétéria. Je leur ai promis qu'il y aurait toujours quelqu'un avec Cécile-chan et qu'on les appellerait s'il y avait du nouveau. L'homme de ma vie grogna pour faire croire que ça ne le concernait pas. - J'ai aussi croisé Nakagawa-sensei. Il m'a dit que nous pouvions utiliser une chambre vide pour nous reposer aussi. Ce sera plus confortable que la salle d'attente, et plus discret aussi. Demain matin, il devrait y avoir un peu plus de fréquentation et il a bien compris qu'un groupe d'idoles dans un service de gynécologie, ça pourrait prêter à confusion. - Je retourne dans la chambre. - Non Teru-kun, déclara calmement Aiba, tu restes avec Oh-chan. Vous avez besoin de vous reposer un peu tous les deux. J'irai tout à l'heure et tu me remplaceras quand tu auras dormi. J'étais d'accord avec lui, Teru était encore trop énervé. Nous suivîmes Sho jusqu'à la chambre dont il avait parlé, et je forçai mon amant à s'allonger sur l'un des lits. Sho nous apporta une couverture et je lui demandai d'un regard ce qu'il en était pour les parents de Teru. Il me fit signe que c'était réglé avant de repartir vers Aiba. - Elle a dit... Ils se retournèrent et fixèrent Teru que je regardai attentivement. - Elle ne veut pas qu'on l'enterre. Elle veut vivre. Elle... elle veut notre bébé... - Elle l'aura, Teru. Mes lèvres vinrent cueillir ses larmes et mes mains le forcèrent à se rallonger. Pour l'obliger à se reposer vraiment, je décidai de m'installer à côté de lui et le pris dans mes bras pour le bercer doucement. J'ignorais ce que faisaient les deux autres, mais je ne voulais plus m'occuper que de l'homme que j'aimais et qui me paraissait si fragile contre moi. Il n'y avait plus qu'une toute petite chose qui me hantait et que j'avais besoin d'exprimer, même si mon amant ne m'entendait plus, emporté par Morphée. - Teru, murmurai-je à l'homme dans mes bras, je me souviens de ce que tu m'as dit le 12 mars, sur le balcon de Jun. Je te jure que je pense la même chose : je ne lui souhaite aucun mal. J'ai bien trop de respect pour elle. Mais j'ai peur. Peur de ta réaction à cause de tes parents. Et aussi... Si elle vit, si ce bébé vient au monde... J'ai peur de te perdre, Teru.
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++Nino++
Quand nous nous étions retrouvés tous les cinq dans la salle d’attente que nous avions quittée quelques heures plutôt, et vue la tronche qu’ils tiraient tous, je décidai que j’étais le mieux placé pour prévenir les autres de notre retour. Si un malheur s’était abattu pendant notre absence, je serais sans doute le moins touché de la bande. Après un encouragement à J, qui semblait sur le point de s’écrouler, je me dirigeai vers la chambre où reposait Cécile. En ouvrant la porte, je découvris qu’elle était veillée par Lucie, Teru et ses beaux-parents. Les deux derniers m’accueillirent avec une mine étonnée mais amicalement. Je crus lire un certain soulagement dans les yeux de Teru-kun mais aussi comme une pointe de colère. Quant à Lucie, elle ne sembla percevoir mon arrivée que lorsque je me signalai à elle avant de l’enlacer. Je pris le temps de m’installer sur le siège à côté d’elle avant de lui demander des nouvelles de son amie. Cécile leur avait annoncé ce que Jun nous avait avoué avant de quitter les studios, à savoir qu’il lui avait dit la vérité quant à son état et quand je confirmai à Lucie que Jun nous en avait également parlé, le silence retomba quelques instants avant que la chaise de l’autre côté du lit ne se mette à grincer. Surpris, je levai les yeux à temps pour voir que Teru, les poings serrés, s’était levé et s’apprêtait à quitter la pièce. Quelques minutes plus tard, la porte se rouvrit et Jun s’installa à la place que Teru avait libérée un peu plus tôt. En entrant, il avait les traits crispés par la colère, mais à l’instant où il saisit la main de la femme étendue entre les draps blancs, la colère s’envola et je pus lire toute la tendresse qu’il accordait à cette dernière. Elle était du même ordre que celle qu’il éprouvait pour nous et que nous pouvions entrapercevoir les rares fois où il laissait tomber son masque de professionnel, ou alors quand je l’avais surpris à observer Riida hors de tous regards indiscrets. Depuis quand étaient-ils devenus aussi proches ces deux-là ? Depuis que leurs ex respectifs s’étaient accouplés ? Avant ? J’avais été tellement absorbé par mes propres soucis que j’avais oublié de veiller sur Matsujun, mais la dernière fois que j’avais analysé le regard de J sur Cécile, c’était plus de l’exaspération que de l’inquiétude que j’y avais lu, alors j’avais forcément raté une étape.
(…)
- Nino, je te remplace, va prendre un truc à boire. C’était Aiba qui venait de nous rejoindre. Je lui cédai ma place et me dirigeai vers la sortie. Alors que je passais devant la chambre adjacente, j’y fus tiré et y découvris le reste du groupe. Sho était face à moi et je pus distinguer une masse sur le lit le plus éloigné. - On nous a laissé cette chambre pour la nuit, enfin ce qu’il en reste, m’informa notre journaliste. Y a encore un lit et le fauteuil ; ce serait bien qu’on dorme tous au moins deux heures, non ? On devrait proposer le lit à Lucie non ? - OK, prends le fauteuil, je prendrai le tour suivant avec Jun et Aiba. Oyasumi. - Attends Nino. Je voulais juste te demander… T’as été mis au courant des derniers événements ? - Lesquels ? - Jun et Teru. Riida, Teru et ses parents ? - Nan… - OK. Ben en gros, voilà où on en est. Sho me raconta rapidement les différents événements qui s’était déroulés depuis que j’avais passé la porte de la salle d’attente. C’était assez fou, et je pouvais comprendre l’incrédulité des parents de Teru. J’avais du mal moi-même à mettre tous les événements en perspective alors que je n’étais lié à l’affaire que parce que Riida et moi faisions partie d’Arashi. Et je connaissais les préférences de ce dernier depuis toujours ou presque. Mais pour eux qui avaient toujours imaginé leur fils aimant les femmes, fils qui était en plus marié, la situation devait sembler totalement irréaliste surtout dans les circonstances actuelles. Tout en réfléchissant, j’étais arrivé devant la chambre. Inspirant profondément, j’ouvris la porte. Cette fois, Lucie tourna la tête dans ma direction quand elle m’entendit. Elle avait les yeux rouges de fatigue mais un sourire fugitif avait éclairé un instant ses traits quand elle m’avait reconnu. Tout allait s’arranger ne ??? - Lucie, il y a un lit qui t’attend dans la chambre à côté. Je t’accompagne ? - Même pas en rêve… se renfrogna-t-elle. - Masaki peut le faire si tu préfères. - Aiba-chan peut effectivement aller dormir, moi je ne bougerai pas de là, Nino. - Lucie… - Lucie-chan, je peux somnoler ici. Toi tu devrais aller te reposer tu es épuisée, si tu voyais ta tête… - Aiba-chan, tu bosses demain, enfin tout à l’heure, pas moi. Et d’ailleurs, vous deux aussi, vous devriez aller dormir… moi ça ira. Lucie avait raison. Je ne savais pas quand Aiba lui avait dit qu’il avait du travail mais c’était effectivement le cas. Par contre, Jun et moi étions de repos et avant même que je puisse la contredire : - Je bosse pas demain. Je reste, déclara J. - Moi non plus. Et j’ai l’habitude des nuits blanches, je dormirai un peu plus tard. Lucie, je te promets de venir te réveiller s’il se passe quelque chose. Alors, va t’allonger un peu… - Je reste. Aiba-chan devrait prendre le lit. Il me parut évident que nous n’arriverions à rien pour le moment. Nous n’aurions plus qu’à retenter notre chance plus tard. C’est ce que je chuchotai à Jun et Aiba avant d’envoyer ce dernier se reposer.
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++Jun++
Après avoir jeté un peu de ce que j'avais sur le cœur à Teru, j'étais revenu prendre la main de celle qui en avait besoin. J'avais gardé durant tout l'enregistrement, et jusqu'à ce que je revienne ici, la sensation de son baiser sur ma joue, celui qu'elle avait déposé avant de se rallonger. Sa tête s'était détournée de moi, et j'avais eu le sentiment que ce que je lui avais annoncé était trop lourd. Le médecin avait sûrement raison, et je n'aurais pas dû lui dire. Mais je ne pouvais pas lui mentir. C'était encore plus impossible que se taire. J'avais hésité un moment avant de sortir de la chambre, mais elle n'avait pas rouvert les yeux. Et à présent, j'étais là, plongé dans mes pensées en observant cette bouche que je voulais voir sourire. Elle remua légèrement dans son sommeil, et esquissa une ombre de sourire avant qu'un petit gémissement ne passe ses lèvres. - T'as l'air encore plus gaga que Ma-chan, J. Je tournai la tête pour découvrir Nino installé à côté de Lucie. Cette dernière somnolait contre son épaule. - Ce n'est pas gentil pour Masaki de dire ça, Kazunari. Nous reportâmes tous les deux notre attention sur Cécile. Elle avait les yeux ouverts et nous regardait en souriant doucement. Un petit sourire fatigué qui me fit monter les larmes aux yeux. Elle lâcha ma main pour à nouveau saisir mon épaule et m'attirer contre elle. J'avais tourné la tête et, heureusement, Nino ne vit pas mes larmes couler quand je sentis sa chaleur contre ma joue. Elle passa la main dans mes cheveux tout doucement avant de parler lentement, en choisissant ses mots. - Vous savez, j'ai pas souvent été comme ça, mais pour une fois, je voudrais être égoïste et ne penser qu'à moi. Et je voudrais que vous ne pensiez qu'à moi, vous aussi. Et de préférence, pas entre quatre planches de sapin. Vous voulez bien faire ça ? Ne pas m'enterrer avant que je ne sois froide ? Laisser une chance à ce bébé ? Et... à moi ? Son bras était passé au-dessus de ma tête et je devinai qu'elle avait posé sa main sur son ventre. Ce bébé, le bébé de Teru... Non ! Son bébé à elle. Peu importait qui en était le père, c'était elle qui allait devoir le mettre au monde. ...C'était ça qu'elle voulait ? Qu'on se projette dans l'avenir ? Dans un avenir où elle serait là ? Avec son bébé, et nous, et... Ma main chercha la sienne sur son ventre et souleva son bras pour que je me redresse. Puis je reposai nos deux mains enlacées sur son abdomen et la regardai en souriant au travers de mes larmes pas encore tout à fait séchées. - Et cette petite princesse, tu veux qu'on lui apprenne quoi ? La musique, la danse, le chant, la comédie ? ...La cuisine ? Je devinai sans le regarder que Nino s'était redressé aussi, réveillant sans doute Lucie. - Je me charge de la comédie et de la magie, dit le gamer à voix haute, confirmant mon idée que sa voisine était réveillée. Toi tu pourras t'occuper de la cuisine. - Mais pas de la mode ! intervint Lucie. Cécile en ferait une attaque. J'allais m'offusquer quand je vis le sourire qui illuminait le visage de Cécile. - Toi Cécile, tu lui apprendras à parler tellement de langues qu'elle pourra voir toute ma vidéothèque en VO. Et on lui fera faire un costume de princesse-papillon. - Mais Jun, rit-elle, et si c'est un garçon ? - Ne crois pas que ça va l'arrêter, affirma Nino. Il le déguisera en prince-papillon. ...Ça vient d'où, ce papillon au fait ? Mon regard croisa celui de Cécile et nous nous tournâmes vers lui pour lui tirer la langue en souriant.
(...)
Elle s'était vite rendormie après ce petit moment de projets, et si j'avais vu Sho et Teru revenir, je ne découvris la présence supplémentaire de Ma-chan et Riida qu'en ouvrant les yeux. Et je me demandai un instant ce qui avait bien pu me réveiller. Puis je sentis son pouce caresser doucement le dos de ma main, attirant mon attention. Remontant le long de son bras, mon regard accrocha le sien qui me souriait. Et je l'entendis me dire d'une voix basse mais distincte : - Regarde Jun, comme c'est beau, un soleil qui se lève.
Et maintenant, je pars très très loin en attendant vos com' et à dimanche prochain | | | Mar 7 Jan - 10:08 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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| Comment ça je suis en retard.... Oui je sais Gomen Autrement pas grand chose... ces derniers chapitres sont assez lents (on est toujours sur les même 36h on va dire afin de connaitre tous les sentiments des uns et des autres. Enjoy! - Chapitre 32:
++Ben++
J'allais partir sur un chantier lorsque mon patron avait débarqué dans mon bureau, le téléphone à la main. - Benjamin, le Japon, ça te parle ? Je l'avais regardé avec circonspection. La dernière fois qu'il m'avait appelé comme ça et parlé du Japon, c'était le 11 mars et obtenir des nouvelles de ma frangine avait pris du temps. - Pourquoi ? T'as un nouveau contrat en vue là-bas ? Je suis pas bilingue ! du moins pas franco japonais ! - Ce sont les parents de ton beau-frère au bout du fil. Plus que perplexe, j'avais pris le combiné. Le débit rapide de Mme Miura m'avait forcé à l'interrompre et lui demander de me passer son mari. Celui-ci avait réussi à m'expliquer un peu plus calmement et distinctement qu'ils avaient tenté sans succès de joindre mes parents et avaient trouvé la liaison avec mon boss via une de leurs connaissances. Puis il m'avait donné les quelques nouvelles qu'ils avaient de ma sœur, me disant que Teru était sur place et qu'eux-mêmes allaient le rejoindre. Ils avaient préféré nous informer tout de suite, même s'ils ignoraient la gravité du problème. Sauf que je connaissais Cécile, et que si elle s'était laissé hospitaliser sans résister, c'était qu'il y avait un os fameux. Je leur demandai leur numéro pour pouvoir les rappeler et les laissai prendre leur avion. Mon patron, qui était resté à écouter et avait vu ma tête s'allonger, m'avait dit que si je le voulais, je pouvais partir dès maintenant. Il avait encore en tête les horaires des avions et pensait que je devais pouvoir prendre celui qui partait cet après-midi de Paris. Il m'embarqua pour l'aérodrome de Rodez en faisant un crochet par chez moi et confia à la secrétaire la tâche de réserver les billets d'avion qu'on trouverait aux guichets. Sur le trajet, j'avais appelé mes parents qui étaient en vadrouille dans la famille en région parisienne et leur avait donné rendez-vous à Roissy, dans le hall d'embarquement. Quand je les avais retrouvés, j'étais content d'avoir eu la bonne inspiration de rappeler M. Miura avant. Ce qu'il m'avait rapporté des paroles du médecin m'avait fait un effet sibérien. Je décidai de ne pas en parler à mes parents. Pas avant d'être arrivés au Japon en tout cas. Deux ans plus tôt, Maman nous avait fait une grosse frayeur avec un accident cardiaque ; je préférai qu'elle ne sache rien avant d'avoir quitté l'avion. Nous lui annoncerions une fois l'atterrissage effectué. A l'aéroport, nous avions été récupérés par Teru et l'un de ses amis. Si ma mémoire était bonne, il s'agissait de celui qui avait fait pleurer Lucie pendant des heures... C'était lui qui nous avait conduits jusqu'à l'hôpital, mon beau-frère étant soumis aux questions de Maman. Pendant le vol, j'avais pu glisser quelques mots à Papa et nous étions donc chacun d'un côté de la Grande Inquisitrice, à l'arrière du véhicule, pendant que Teru était presque retourné sur son siège de copilote. Ce qui avait le don de stresser Maman, puisque le volant était à droite. - Teru, tu veux pas dire à ton pote de rouler moins vite ? Y a une main pleine d'ongles qui s'enfonce dans mon genou et un pied qui écrase consciencieusement mes orteils comme si c'était la pédale de frein... - Oh ! désolée mon chéri, c'est pas fait exprès... - Oui, M'man, je sais. N'empêche que ce sont mon genou et mon pied, et que j'en ai besoin ! - Bon, fit-elle sans me lâcher et en se tournant vers son gendre, Teruki, trêve de plaisanteries. Que se passe-t-il ? Cécile n'est pas tombée sérieusement malade depuis presque vingt ans et la dernière fois qu'elle est entrée dans un hôpital, elle avait 15 ans et c'était pour faire retirer le plâtre de son bras ; alors pourquoi a-t-elle été hospitalisée ? Il ferma les yeux un instant, semblant se concentrer. J'espérai qu'il n'allait pas servir un truc lénifiant en croyant endormir la vigilance affûtée d'une infirmière. - D'abord, il faut que vous sachiez que le médecin a été plutôt rassurant. Il vous expliquera tout ça mieux que moi, mais il a dit que son état s'améliorait. - Il a dit ça dans la chambre ? - Oui... mais ! poursuivit-il en voyant la grimace de Maman, il nous a redit la même chose dehors. Et croyez-moi, s'il l'a fait, c'est qu'il était sincère. Il ne nous a jamais dit autre chose que la vérité depuis hier. - Tu es bien sûr de toi, mon petit Teru. - Il ne lui donnait pas vingt-quatre heures, hier. Alors quand il a dit qu'elle allait mieux, je n'ai vu aucune raison de ne pas le croire. Et voilà, comment tout balancer sans le réaliser. Teru avait vraiment la délicatesse d'un éléphant pataud. Et ma frangine un goût certain pour les gars pas doués. - Pas vingt-quatre heures, hein ? Je jetai un coup d'œil à Papa qui avait visiblement pâli sous son hâle mais qui prit sa femme par l'épaule en tentant de la réconforter : - Il a aussi dit que ça allait mieux. C'est qu'il ne faut pas s'inquiéter. - Donc, ma fille est dans un hôpital que je ne connais pas, avec un médecin que je ne connais, dans un pays à plus de douze heures d'avion de chez moi, et mon mari, mon fils et mon gendre me prennent pour une petite chose fragile qu'il faut ménager. Vous vous fichez de moi là, les garçons ? Passé la surprise, je vis un sourire se dessiner sur le visage de Teru. - Je sais maintenant de qui elle tient son caractère, dit-il. Nakagawa sensei a dit que c'était grâce à sa volonté qu'elle avait tenu bon. Je souris à mon tour. Ça ressemblait bien à ma sœur, ça. - Fais attention, mon garçon, fit Maman en le regardant sérieusement. La volonté est une chose formidable quand elle tient, mais le jour où elle disparaît, tout s'effondre. - Vous avez raison, reconnut-il, mais elle a une excellente raison de continuer à vouloir. C'est une toute petite raison, mais qui va grandir au fil des mois. Et je suis certain qu'elle n'abandonnera pas. Je ne comprenais pas ce qu'il sous-entendait. Mais manifestement, ce n'était pas le cas de ma mère que je sentis devenir de plus en plus agitée sur son siège. Teru s'était remis en position normale et répondit par bribes aux questions que nous lui posions à tour de rôle. - Au fait, dis-je après un long moment de silence pendant lequel chacun réfléchissait. Lucie devrait être arrivée au Japon, si je me souviens bien. Elle est où ? - Elle n'a pas quitté Cécile depuis qu'elle est arrivée hier. Elle a refusé de la laisser tant que vous n'étiez pas là. Eh ! bien, pas une pour rattraper l'autre ! Elle devait être lessivée entre le voyage et la séance de garde-malade. Nous arrivions en vue d'un grand bâtiment en briques près duquel Nino gara la voiture. Oui, je me souvenais de son nom, même s'il m'avait fallu une demi-heure pour m'en rappeler. Je n'étais pas certain de pouvoir en faire autant pour tout le monde, mais ça n'avait à mon avis pas grande importance. Ce n'était pas comme si j'allais recroiser tous ces gens du mariage, non ? Le temps d'aller chercher le médecin, Teru nous confia à Nino. Celui-ci nous invita à le suivre dans un anglais qui faillit me faire rire. Nous montâmes au cinquième avec l'ascenseur et découvrîmes un couloir blanc aux portes peintes en pastel. Pour aller vers la chambre de ma frangine, nous passâmes devant une pièce dont la porte vitrée laissait voir la décoration très joyeuse et les jouets rangés. Quel genre de Service pouvait bien disposer d'un tel équipement ? Je jetai un coup d'œil à Papa qui avait vu la même chose que moi et me fit un sourire en désignant ma mère du menton, l'air de dire "Elle a déjà tout deviné, regarde comme elle est excitée". Maman ne coinça qu'un dixième de seconde en voyant la tête de ma sœur. Je ne l'avais jamais vue si maigre et si pâle. Mais elle souriait en discutant avec Lucie de chanson et de layette. Il y avait aussi un des potes de Nino dans la pièce, assis et en train de lire. L'un des gars qui était en couple avec un de ses collègues, le plus grand en taille. Il se leva quand il nous vît et Lucie tenta de faire de même, sans grand succès. Les parents serrèrent ma frangine dans leurs bras en écrasant une petite larme et... j'en fis autant. Pendant qu'on s'asseyait, Cécile parla avec les Japonais qui emboîtèrent la roue de Lucie lorsqu'elle se dirigea vers la porte.
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++Nino++
Les parents de Cécile investissaient l’hôpital à ma suite. Le médecin ayant demandé à les rencontrer dès leur arrivée, Teru était parti le prévenir. Pendant ce temps, je les avais guidés vers la chambre où reposait leur fille, espérant par la même occasion réussir à convaincre la demoiselle en fauteuil de quitter enfin cette pièce où elle s’était cloîtrée depuis qu’elle y avait pénétré la veille. Quand nous entrâmes, ce fut pour découvrir les deux filles en train de discuter… pas en japonais. Jun observait la scène assis de l’autre côté du lit, tout en lisant un script. En nous voyant arriver, il s’était levé et Lucie avait tenté de l’imiter mais ses jambes ne la portaient plus et elle se carra dans son siège en grimaçant. Après avoir embrassé ses parents et qu’ils se furent installés dans la chambre, s’asseyant sur les sièges libérés, la malade se tourna vers moi tout en désignant son amie. - Le Geek, tu voudrais pas l’emmener ailleurs ? J’en ai marre de voir sa tête. - C’est pas que je veux pas, c’est ELLE. Et… tu pourrais arrêter de m’appeler comme ça. Va insulter Jun plutôt. - Hé ! Me mêle pas à votre guéguerre. Lucie nous regardait entre amusement et exaspération. Finalement, elle débloqua ses freins et se dirigea vers la porte. - Les garçons vous venez ! Il est temps de laisser Cécile avec sa famille. A tout à l’heure… Subjugué par cette soudaine docilité, je suivis avec Jun la demoiselle hors de la chambre. Cependant, une fois dans le couloir, elle s’arrêta. - Je reste ici. Vous faites ce que vous voulez… - Lucie, tu devrais rentrer dormir, ou au moins prendre une douche, manger quelque chose. Peine perdue, quand cette tête de mule avait décidé quelque chose… Depuis cette nuit, nous avions tous d’une manière ou d’une autre tenté de la faire sortir de la chambre : la raison, la supplication, la menace, la ruse, la force. Tout avait échoué et nous avions renoncé après qu’elle ait préféré se jeter au sol et s’accrocher au lit plutôt que se faire embarquer avec son fauteuil que nous avions soulevé. Jun posa une main sur mon épaule. - Je vais chercher des cafés… Bon courage.
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++Jun++
Sur le chemin du distributeur, je croisais Nakagawa Sensei accompagné de Teru. Il se dirigeait droit vers la chambre de Cécile et je décidai d’accélérer mon pas pour revenir au plus vite. Cinq minutes plus tard, je tendais les canettes caféinées à Nino et Lucie. Si le premier me remercia avant d’ouvrir sa boisson, la seconde ne la remarqua même pas. Ce nouveau manque de savoir-vivre s’ajouta à la liste des points négatifs que je lui accordai. …Cette fille était incroyablement… chiante d’abord : sous ses airs timides et obéissants se cachait une peste bornée. Un exemple ? Elle était épuisée, la preuve, le fait qu’elle se soit encore assoupie tout à l’heure. Quand nous l’avions constaté, Aiba avait tout d’abord renfoncé la demoiselle dans son siège et elle n’avait pas ouvert un œil. Puis, délicatement, il avait desserré les freins pour la sortir de la pièce, mais à l’instant où il avait reculé le fauteuil elle avait rouvert les yeux, repris les rênes de son engin et était retournée à son poste. Ensuite elle était une source d’ennui en puissance. Entre Masaki qu’elle faisait marcher sur la tête et Nino que je ne reconnaissais plus. Si jamais elle mettait en danger la bonne entente du groupe… ou plutôt en péril cette amitié de quinze ans, meilleure amie de Cécile ou pas, elle le regretterait. Et comme dès la semaine prochaine nous allions devoir la fréquenter professionnellement parlant, cela n’allait pas simplifier cette histoire. Cependant je devais reconnaître son attachement à son amie. A peine sortie de l’avion, elle s’était précipitée à son chevet et son inquiétude pour elle était évidente. - Merci Jun. Nino venait de prendre la canette que j’avais achetée pour la demoiselle, et se mit à hauteur de la jeune femme. - Lucie ! Jun t’a apporté à boire. Elle sembla s’intéresser enfin à ce qu’il se passait ici, sourit à Nino avant de lever la tête vers moi. - Merci, Matsujun. Mais… je n’ai pas soif. Gomen. C’est cet instant que choisit le médecin pour ouvrir la porte. Il sortit, suivi par Teru qui le remerciait en s’inclinant. Trente secondes plus tard, Teru nous invitait à rentrer dans la pièce. - Je suis stable. Il a dit que ça allait aller. - Pas tout à fait Cécile ! corrigea Teru. - OK. Je dois me reposer… mais c’est pour ça que je suis encore ici non ? Lucie tu devrais aller dormir. File, je ne veux pas te revoir avant demain. Les gars vous n’avez pas du boulot ? Allez, partez tous. Je veux profiter de ma famille. Lucie alla embrasser Cécile, salua les parents, le frangin et sortit de la chambre.
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++Ben++
Je voyais bien que Maman avait une foule de questions à poser, mais qu'elle ne savait pas par laquelle commencer. Je me lançai donc. - Et alors, tu comptais nous l'annoncer quand, que les deux petits vieux allaient devenir grands-parents ? - Ben ! Un peu de respect pour les ancêtres ! me lança ma sœur en souriant. Déjà, je suis désolée que vous soyez venus ici en catastrophe et de cette façon. Vraiment. Ensuite, il y a vingt-quatre heures, je l'ignorais encore moi-même. C'était possible ça ? Bon, d'accord, les bonnes femmes, je n'y avais jamais compris grand-chose. Faut dire qu'avec les spécimens qu'on avait à la maison, ça n'aidait pas beaucoup. Et même quand on avait "adopté" la meilleure amie de ma sœur, ça n'avait fait qu'ajouter aux cas rares. - Ma chérie, réussit enfin à placer Maman, que s'est-il passé ? C'est prévu pour quand ? Tu t'es vue ? Tu vas finir par être aussi maigre que ton père, ce n'est pas bon pour le bébé ! Comment as-tu fait pour ne pas voir que tu étais enceinte ? C'est quoi cette histoire de vingt-quatre heures ? Pour... - Stop !! s'exclamèrent Cécile et Papa. - Comment veux-tu savoir quoi que ce soit, tu ne la laisses même pas te répondre, poursuivit ce dernier. Une mitrailleuse. Ma mère m'avait toujours fait penser à un engin de guerre quand elle était inquiète et qu'elle bombardait son entourage de questions. Je crois que c'était cette tendance qui nous avait conditionnés tous les trois à attendre la fin de l'averse en silence. Sauf quand il pleuvait des hallebardes et qu'il valait mieux l'interrompre. Cécile nous expliqua le tremblement de terre, le travail dans lequel elle s'était jetée pour dépasser l'angoisse que ça lui avait donné, le fait que les nausées n'avaient commencé qu'après ça alors qu'elle était déjà enceinte d'environ deux semaines. Je sentais qu'elle ne nous disait pas tout, mais je savais que même sous la contrainte, elle ne dirait que ce qu'elle voulait. Et elle avait quand même l'air vraiment fatigué. Puis Teru arriva avec le médecin. C'était un homme qui devait avoir atteint la cinquantaine, avec des gestes doux et un sourire gentil, mais à mon avis capable de se faire respecter. Tout à fait le genre à ne pas se formaliser des réactions d'une patiente sous hormones. Cécile commença par dire à son mari qu'il devrait nous expliquer les consignes en cas de séisme. Les répliques étaient encore quotidiennes, ce qui ne rassura pas Maman. Puis ma sœur se laissa examiner par le doc, Teru traduisant au fur et à mesure. Il poursuivit lorsque Nakagawa sensei, comme il l'appelait, livra son verdict : elle allait mieux, son cœur ne l'inquiétait plus autant, mais il faudrait qu'elle se ménage et prenne régulièrement les médicaments qu'il allait lui prescrire. De plus, pour être certain qu'elle était hors de danger, il voulait la garder plusieurs jours en observation. Maman posa alors plusieurs questions assez techniques au médecin et Teru et Cécile firent tous les deux la traduction, mon beau-frère ne s'y connaissant pas suffisamment en termes médicaux. Quand elle parut avoir tout compris, notre mère remercia le docteur et se tourna vers sa fille en lui disant qu'elle allait jouer la garde-malade. Cécile fit la grimace, ce qui nous fit sourire. Teru raccompagna le médecin et revint avec les trois autres. Ils s'échangèrent les dernières nouvelles et je vis le soulagement se peindre sur leurs traits avant qu'ils ne saluent et sortent de la pièce. J'ignorais à quel point ils étaient proches de ma sœur, mais je compris qu'ils s'étaient vraiment inquiétés pour elle durant ces dernières vingt-quatre heures. Elle n'était pas aussi seule que nous l'avions craint. Une heure plus tard, alors que nous bavardions presque tranquillement - presque parce qu'une conversation entre ma mère et ma sœur n'est jamais tranquille bien longtemps - le téléphone de Teru se mit à vibrer. Mon père le regarda d’un œil noir qui l'aurait fait se planquer sous le lit si mon beau-frère l'avait vu. Mais il avait aussitôt plongé dans la lecture du message reçu et ne leva le nez que pour regarder sa femme. - Cécile, mes parents annoncent leur arrivée. Je... Vu l'heure, si tu veux bien, je vais retourner au boulot. Ma sœur commença sa réponse en japonais avant de soupirer : - Enfin, fais ce que tu veux. Ah ! si quand même, est-ce que tu peux prendre mes clés dans mon sac et les passer à Ben ? Et avant d'aller bosser comme un dingue, est-ce que tu veux bien l'emmener à l'appart ? Elle se tourna vers moi. - Ben, ça te va de t'installer chez moi pendant que les parents vont chez les Miura ? Ils vous ont tous invités, mais je pense que tu te sentiras plus à l'aise comme ça. Et plus indépendant aussi. Et je te confie Nuit. Mais sois gentil, elle a interdiction de pénétrer dans les chambres, la cuisine et la pièce à tatamis. Masaki l'a dressée pour qu'elle utilise les toilettes, et elle se débrouille très bien comme ça. N'oublie juste pas de laisser la lunette baissée et le couvercle relevé. Sa réserve de nourriture est dans sa pièce, mais trop haut pour qu'elle l'atteigne. Et la clé est derrière la porte. Pour le reste, fais comme chez toi. Euh... en faisant la vaisselle, s'il te plaît! La chambre d'amis est prête pour Lucie. Tu peux prendre ma chambre, mais je te conseille de changer les draps. A part ça... - A part ça, je vais me débrouiller, t'en fais pas. Sauf peut-être pour Lucie. Elle est où ? - Teru, tu peux appeler Nino pour lui demander ce qu'il a fait de Lucie ? J'aurais peut-être pas dû la lui confier... Mon beau-frère partit à la pêche aux renseignements pendant que Maman expliquait à sa fille que ça leur irait aussi bien de tous habiter chez elle. Mais Cécile secoua la tête. - Non, c'est un peu compliqué, mais Teru s'est disputé avec ses parents et ne veut plus les voir pour le moment. Et ils m'ont dit qu'ils insistaient pour vous avoir chez eux. Sauf que j'aimerais autant que Lucie ne soit pas toute seule, et que la maison Miura va être bien trop loin pour son boulot, par les transports en commun. C'est la meilleure configuration pour le moment. - Bah ! y aura Teru aussi. Ça ira. - Non, Teru ne sera pas là. Il participe à un séminaire d'entreprise. Mais quand je rentre à la maison, vous viendrez vous occuper de moi, fit-elle avec un sourire. - C'est obligatoire son séminaire ? demanda Maman, pas convaincue. Il pourrait expliquer... - Non Maman, tu sais très bien combien son boulot est important pour lui. Et c'est une chose qui est réglée entre nous. Je suis à l'hôpital, il ne peut rien faire de plus pour le moment. Le futur crucifié, enfin, je pense que c'était l'image que ma mère se faisait des tortures qu'elle allait lui infliger, revint en disant qu'il avait eu Nino, que Lucie dormait et qu'il s'en occupait. Puis il nous salua tous l'un après l'autre en terminant par Cécile sur le front de laquelle il se pencha pour déposer un baiser. Ils échangèrent encore quelques mots avant qu'elle ne lui sourie gentiment. Il l'embrassa encore et se redressa, puis me fit signe de le suivre.
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++Teru++
Je me retrouvai devant le bâtiment de Todai et penchai la tête en arrière, observant le ciel. J'eus le sentiment que quelque chose glissait de mes épaules, un lourd manteau de plomb qui m'avait revêtu lorsque le médecin m'avait annoncé son pessimisme quant à la santé de Cécile, et que son sourire ce matin n'avait pas suffi à m'ôter. - Ça va Teru ? Je poussai un soupir qui finit de me débarrasser de mon malaise, avant de tourner la tête vers mon beau-frère. - Elle est vivante. Elle va aussi bien que possible et le bébé aussi. Oui ça va. En plus, vous êtes là, et même si ça la fait râler, je sais qu'elle en est heureuse. Je regardai ma montre et constatai que je serai dans les temps pour prendre la place de celui qui avait accepté de me remplacer ce matin... si je me bougeai maintenant. - Allez Ben, on y va ? Je te dépose à l'appartement et je file au boulot. - T'es vraiment drogué, toi ! - Je vais être papa, faut que je gagne ce qu'il faut ! J'avais dit ça en souriant, mais je savais que je ne plaisantais qu'à moitié. Entretenir deux foyers me coûterait cher. Et pendant que je démarrais pour sortir du parking et me faufiler dans la circulation tokyoïte, je repensai à ces dernières heures.
- Flash-Back - Je m'étais réveillé dans les bras de Sato, sur un lit d'hôpital. Tout m'était revenu rapidement, et je m'étais levé sans sortir mon amant de son sommeil. J'avais vu des traces de larmes sur ses joues et y avait doucement passé la main pour les effacer. J'étais sûr qu'il m'avait cru endormi quand il m'avait murmuré ce qui l'effrayait. Fallait-il qu'il soit inquiet et si peu sûr de moi pour craindre que je ne le quitte. Même si la raison était... logique. - Je t'aime, Sato-chan, avais-je chuchoté avant de remonter la couverture sur lui et de me diriger vers la porte. Sho s'était redressé dans le fauteuil en me sentant passer devant lui, et il m'avait suivi hors de la chambre en me disant qu'il était temps de relever nos cadets. Mais près de Cécile, Jun somnolent n'avait pas voulu lâcher sa main, et Nino se trouvait parfait en semi-dossier pour tête de mule. Quand quelque temps plus tard, après que Sato et Ma-chan nous aient rejoints, elle avait montré le soleil levant à Jun, les paroles de Nakagawa-sensei m'étaient revenues. Mais je n'avais pas encore osé espérer trop fort. J'avais attendu la confirmation du médecin que l'infirmière était allée chercher après avoir répondu à l'appel de Lucie. Je n'étais pas resté jusqu'au bout des vérifications qu'avait faites le docteur pendant que nous étions sortis attendre son verdict dans la salle d'attente. Mes parents étaient entrés peu après nous, et j'étais sorti, trop furieux encore de ce qu'ils avaient dit pendant la nuit. Je ne voulais pas leur pardonner si facilement. Et Sato, qui m'avait suivi, avait eu toutes les peines du monde à me convaincre d'y retourner. J'avais attendu dans le couloir que le sensei sorte de la chambre et y était entré juste après, demandant à Sato d'empêcher les autres de rentrer. J'avais voulu faire sortir Lucie, mais elle avait refusé, encore une fois. Lucie était encore et toujours là. Sa présence me gênait vraiment parce que je ne voulais pas parler devant elle. Je lui demandai de sortir à son tour et vis qu’elle s’apprêtait à refuser encore une fois. Mais Cécile avait compris que j'avais quelque chose d'important à lui dire, et quand elle le demanda à son tour à son amie, cette dernière sortit de la pièce non sans me lancer un « Je serai derrière la porte. ». Une fois qu’elle eut refermé cette dernière, je me lançai. - Cécile, je ne te laisserai pas seule avec notre bébé. Je veux que tu sois sûre que je serai toujours là pour veux deux... Elle m'avait regardé avec attention avant de sourire doucement malgré sa fatigue évidente. - ...mais tu ne serais pas heureux sans Satoshi. Rassure-toi, tu n'as pas besoin de vivre avec moi pour être père. - Cécile... Elle avait compris le fond de ma pensée avant que je ne m'exprime. Mais elle avait toujours fait ça, n'est-ce pas ? - Teru, tu as fait ton choix, tu n'as pas à revenir dessus. Et je ne veux plus de toi à mes côtés immédiats. Mais je ne te priverai pas de ton enfant. J'avais failli rappeler Lucie, mais une dernière question m'était revenue. - Cécile... Tu sais quand... ? - C'est important ? - Je... - Teru, peu importe quand au juste ce bébé a été conçu. Tu n'étais qu'à moi à ce moment-là, et mes je t'aime n'appelaient que toi. Par contre, ne t'étonne pas si je décide de t'annoncer un jour que je lui donne un petit frère ou une petite sœur. J'ai pas l'intention d'entrer au couvent ! Ses yeux riaient et je lui pris la main pour embrasser ses doigts. Peu après, elle avait été emmenée pour faire des examens complémentaires et les deux plus jeunes étaient allés dormir quelques heures dans la chambre qu'on nous avait laissé occuper. Aiba, Sho et Sato avaient dû partir travailler sans que j'aie le temps de parler à ce dernier et j'avais pu passer quelques coups de fil pour rattraper mon absence de la veille tout en demandant un échange d'horaires à un collègue conciliant. Puis, après un déjeuner rapide à la cafétéria avec les deux dormeurs qui n'avaient plus trop à craindre d'être reconnus vu leur air chiffonné, j'étais allé chercher mes beaux-parents à l'aéroport avec Nino. Le gamer m'avait sorti une phrase du style "tu pourras pas te concentrer sur la route et la discussion, et vaudrait mieux pas que tu sois seul avec l'ex de ton mec" pour m'imposer sa compagnie. Il n'avait pas complètement tort, et je le mesurai d'autant mieux sous le feu roulant de questions de ma belle-mère. Quand nous nous étions retrouvés dans la chambre de Cécile, toujours veillée par Lucie et Matsujun, et après avoir été réellement rassurés par le médecin (Cécile m'aidait heureusement à traduire. Elle ne connaissait pas beaucoup plus que moi les termes médicaux, mais elle comprenait nettement mieux ce que voulait savoir sa mère), je compris que tant que ses parents seraient là, ils pourraient veiller sur elle; et ensuite, je devrai m'organiser pour qu'elle soit plus ou moins surveillée. Cette entêtée aurait des examens réguliers à passer, et je ne pourrai pas toujours l'y accompagner, c'était sûr. Nous avions épuisé tous les sujets brûlants sauf un, notre séparation, lorsque mon téléphone m'annonça que mes parents revenaient bientôt. Et je ne voulais pas les voir. Je savais que les autres avaient rapidement informé Cécile de notre altercation de la nuit, et je lui avais su gré de ne pas chercher à s'en mêler. - Cécile, mes parents annoncent leur arrivée. Je... Vu l'heure, si tu veux bien, je vais retourner au boulot. - Teru... les fuir n'est pas une solution, tu sais. Enfin, fais ce que tu veux. Oui, c'était bien mon idée. Elle m'avait demandé d'emmener son frère chez elle et j'avais accepté avant de vérifier auprès de Nino ce qu'il avait fait de l'amie de Cécile et de prendre congé de tout le monde. Avant que nous ne partions, elle m'avait glissé encore quelques mots. - Teru, j'ai dit à mes parents que tu étais en séminaire, et je dirai aux tiens de maintenir cette version le temps que je leur dise la vérité. Mais ça ne tardera pas, je te préviens. J'ai juste besoin d'être un peu plus en forme. D'accord ? - Tu n'es pas obligée de me protéger, tu sais. Mais, entendu et merci. Je me sauve avant que mes parents ne se pointent. Prends soin de vous. Cécile... - Je sais. Vas-y ! - Fin du Flash-back-
Et c'est ainsi que je me retrouvai dans mon ancien chez moi pour la première fois depuis le 14 mars. Ben s'était occupé de Nuit pendant que j'aérais les pièces et découvrais par la même occasion les changements qu'elle avait apportés à l'agencement des meubles. Effectivement, elle avait tiré un trait sur moi dans sa vie. Je ne pus m'empêcher de ressentir un petit pincement au cœur. C'était ce que j'avais choisi, mais les paroles de Matsujun sur ses larmes et ses nuits sans sommeil me poursuivaient encore. Avait-il été là pour elle, lui? Ne voulant ni ne pouvant m'attarder davantage sur cette question, je pris congé de mon beau-frère qui était allé s'installer sur le canapé avec le chat et semblait prêt à faire une sieste de concert avec le moteur roulé en boule sur son ventre.
Ma journée passa en un éclair, la routine me permettant de reprendre pied tout en réalisant que j'avais été vraiment secoué par le malaise de Cécile. J'avais rapidement expliqué la raison de mon absence et ma collègue mère célibataire s'était mise à me poser toutes sortes de questions auxquelles je n'avais évidemment pas su répondre. Mais j'avais compris, en voyant les regards entendus des uns ou des autres, qu'il me serait désormais difficile de leur parler de nos vies séparées. Je m'étais condamné à continuer de porter mon alliance encore un long moment. Et je savais que sa vision blessait Sato, même s'il n'en disait rien et faisait comme si ça lui était égal. Depuis la visite à ses parents, j'avais trouvé le moyen de l'attacher à mon portefeuille pour être sûr de ne pas l'oublier, mais pouvoir ne pas la porter lorsque nous étions ensemble. Quand j'étais avec lui, la seule bague que je portais désormais parfois était celle qu'il me mettait pour retenir ma jouissance. Et sa simple évocation me donnait terriblement faim de lui. C'était donc avec l'envie de passer directement au dessert que je rentrai chez nous ce soir-là. J'avais pris des nouvelles de Cécile bien avant de quitter mon bureau, à une heure où il était encore raisonnable d'appeler une personne devant se reposer, et quand je tournai la clé dans la serrure, ma montre indiquait un horaire avoisinant les deux heures du matin. Sato devait dormir, et j'avais hâte de me glisser sous la couette près de lui. Mais en poussant la porte, je vis un sac dans l'entrée, et une fois à l'intérieur, je constatai que la lumière était encore allumée dans le coin salon et que Sato était assis dans le fauteuil, les bras sur les accoudoirs et les yeux grands ouverts. Je le rejoignis après avoir posé mes affaires et vins m'agenouiller devant lui. - C'est mon sac là-bas ? - Oui. Sa réponse se voulait atone, mais j'y sentis vibrer quelque chose. - Tu ne veux plus de moi ? - ... Il semblait ne pas arriver à parler. Et je devinai la douleur dans ses yeux. Je posai mes mains sur ses genoux et me rapprochai de lui. - Sato, tu avais dit que tu ne me laisserais pas partir, alors pourquoi tu me chasses ? - Ton enfant a besoin de toi. Et ne me touche pas ! Il disait ça, mais ne faisait aucun geste pour m'éloigner. Je me rapprochai encore, glissant mes mains sur sa taille pour les remonter ensuite lentement jusqu'à ses épaules. - Sato-chan, je serai là pour mon bébé, je veillerai sur lui et sur sa mère, mais j'ai besoin de toi. Je ne veux pas me séparer de toi. Tu ne m'aimes plus ? Ou tu veux juste t'effacer devant la femme enceinte ? Il détourna les yeux. Sa respiration était difficile et je voyais des larmes perler à ses paupières. - Elle a besoin de toi. - Mais je t'aime, Sato ! Elle n'a pas cherché à tomber enceinte pour me garder. Et d'ailleurs, elle ne veut pas de moi. Et je ne veux pas te quitter, moi. Je te veux toi, mon chat sauvage, mon maneki-neko, mon gribouilleur-pêcheur, mon sculpteur sur corps, mon... Ses bras s'étaient refermés sur moi. Et les miens étaient croisés dans son dos. Et quand enfin je pus m'écarter un peu de lui et le regarder, je vis que ses joues étaient mouillées. - Baka, tu es encore plus idiot que moi ! Regarde-moi, Satoshi. Dans les yeux ! Je t'aime. Je ne serai pas complet sans toi. J'ai besoin de toi près de moi. Quand je m'endors, quand je me réveille, quand je regarde les lumières de la ville. Je ne te quitterai pas, ni maintenant, ni jamais. Pour peu que tu m'aimes, je resterai toujours à tes côtés. Je serai juste... un père qui ne vit pas avec son enfant. Mais ce n'est pas comme si j'étais le seul. Je pris son visage dans mes mains et le fixai encore une fois. - Sato-chan, dis-moi que tu veux encore de moi, que tu ne me chasses pas. S'il te plait ! Il me regarda un long moment, cherchant sans doute à voir au fond de mon âme, ou peut-être à retrouver sa voix noyée sous ses larmes. - Je... je t'aime, Teru. Je te veux près de moi. Je ne veux pas que tu me quittes. Chaque phrase lui avait demandé un effort pour sortir, et la dernière se finit dans un sanglot. Je bus ses lèvres quand elles touchèrent les miennes et nous restâmes un instant, soudés l'un à l'autre, moi à genoux devant lui, lui penché sur moi, avant que je ne m'éloigne le temps de me relever, de retirer mes vêtements pour ne garder que mon caleçon et de me pencher vers lui pour l'attirer contre moi. Il passa ses bras autour de mon cou et me laissa l'emporter dans notre chambre. Nous passâmes le reste de la nuit enlacés, nos mains caressant doucement la peau de l'autre, n'échangeant que des baisers tour à tour légers ou gourmands, mais n'allant pas plus loin. Ne nous montrant pour une fois que la tendresse que nous avions l'un pour l'autre, réservant la passion pour une autre nuit. Quand j'aurai redéfait ma valise, et réinvesti sa vie qu'il avait semblé si prêt à me laisser quitter.
****************
++Nino++
Elle dormait enfin. Et pas n’importe où. Contre moi, dans mon lit. Trois mois que j’en rêvais. Enfin peut-être pas tout à fait dans ces circonstances, mais…
- Flash-Back- - Lucie, attends-moi. Elle venait de filer alors que nous étions en train de dire au revoir à la malade et sa famille. Je m’inclinai une dernière fois rapidement avant de me précipiter dans le couloir, vide naturellement. Où avait-elle pu passer ? Je tentai ma chance en direction des toilettes et passai devant la porte de la salle où nous avions attendu hier. Quelqu’un y sanglotait désespérément. Pris d’une soudaine intuition, je la poussai. Gagné ! Elle était là. - Lucie… - Fin du Flash-Back-
Je l’avais bercée un moment et quand ses pleurs s’étaient calmés, je lui avais annoncé mon intention de l’emmener. Elle avait acquiescé et nous nous étions dirigés vers le parking où se trouvait ma voiture. Le temps que je range son engin, elle avait sombré dans le sommeil et, arrivé chez moi, j’avais eu toutes les peines à la réveiller suffisamment pour la guider jusqu’à mon appartement. Une fois à l’intérieur, je lui avais demandé si elle préférait commencer par manger ou par prendre un bain. Une fois de plus, elle ne me répondit pas : Lucie dormait littéralement éveillée. Puisqu’elle n’était plus en état de prendre ses décisions seules, je l’avais fait pour elle. D’abord manger. En fouillant dans mes placards j’extirpai une soupe miso pour le zombie et un bol de ramen pour moi. Quand je m’aperçus qu’elle n’avait touché à rien, je tentai ma chance comme avec une enfant, prenant la cuillère et la portant à sa bouche, sollicitant son ouverture. Par chance elle obéit et avala la préparation. J’hésitai un instant sur la marche à suivre après. Devais-je la coucher ou l’emmener à la salle de bain ? Soudain elle marmonna et le mot douche sortit très nettement de sa bouche. Si elle voulait se laver soit… Et puis, ce n’était pas comme si je ne l’avais jamais vue en tenue d’Eve… Je l’avais conduite à la salle de bain, aidée à se laver avant de la porter jusqu’au lit le plus proche…le mien. Je l’y glissais, la couvrant de la couette. Décidant de m’accorder cinq minutes de pause avant de sortir le futon de l’armoire de mon studio, je m’allongeai à côté d’elle… pour être réveillé un instant après par des miaulements. Un instant ? Non. Trois bonnes heures plus tard, selon mon réveil. Les gémissements étaient émis par Lucie ; elle pleurait, marmonnant dans une langue qui n’était pas la mienne. Je lui caressai le visage, essuyant ses larmes, murmurant des paroles réconfortantes et doucement la langue changea, elle prononça mon nom et petit à petit s’apaisa. Trop épuisé pour préparer un autre couchage, je me contentai de mettre un pantalon de survêtement en guise de pyjama et me glissai sous la couette avant de l’enlacer et de fermer les yeux.
A vos comms! | | | Dim 12 Jan - 2:10 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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Localisation : Osaka!!! enfin!!!!
Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| A l'heure!! voici le nouveau chapitre. Enjoy - Chapitre33:
++Lucie++
La chaleur du soleil m’enveloppait tandis que mon flanc était chatouillé par l’un de ses rayons. Je posai une main par-dessus, puis frôlant de mes doigts son bras et son épaule, me mis à caresser son torse. Soleil ? Torse ? J’ouvris brutalement les yeux pour découvrir tout proche le visage souriant de celui qui hantait mes nuits depuis trois mois et que je maudissais le jour. Posant ma seconde main sur son torse, je l’éjectai hors du lit avant de remonter la couette sur mon corps nu. - HENTAÏ ! Sale type ! Qu’est-ce que tu fous là ? Je ne crois pas t’avoir autorisé à me toucher. Pas après ce que tu as fait au mariage de Cécile. J’ai cru en toi. Je te faisais confiance. Je voulais croire à tes mots quand tu m’avais dit tu avais envie de changer avec moi. Et cette nuit-là… avec… je sais pas qui ou quoi d’ailleurs… mais par contre, j’ai vu où ! Ça, je ne risque pas de l’oublier. Tu m’as trompée ! Non. Tu t’es trahi tout seul… Espèce de… espèce de sale… GEEK ! Lâchant à travers ces mots toute la colère que je ressentais envers LUI depuis CETTE fameuse nuit, je sentis celle-ci me libérer une seconde avant de me reprendre quand je constatai que mon éclat avait pour unique conséquence de le faire éclater de rire. J’attrapais le premier objet qui trainait sur le chevet tout proche et l’en menaçai. C’est à genoux, les deux mains en avant qu’il prit la parole.
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++Nino++
- Gomen. Honto ni gomen nasai. Je te jure que je ne me moque pas de toi. C’est… du soulagement. …Et je t’en supplie, repose doucement ma DS. Oui du soulagement de la voir vive et réactive, contrairement à hier soir… Et si j’aurais préféré un lever plus doux, je n’avais aucun droit de me plaindre face à ses reproches sur ma conduite. Et puis son final… Maintenant je savais d’où venait l’affectueux surnom que m’avait donné Cécile. - Tu t’excuses pour quoi ? Ton rire ? Vas te faire voir Ninomiya. Toi et tes excuses, allez au diable. - Non, Lucie écoute-moi. Je suis désolé pour cette nuit-là, tu as raison, c’est inacceptable. J’aurais pas dû… mais tu sais, j’avais bien bu et puis elle avait pas arrêté de me faire du pied pendant le dîner. - Ah non ! Pas de détail merci. Le souvenir de ton caleçon me suffit pour faire des cauchemars. - Pardon… Mais… Lucie, laisse-moi une nouvelle chance. Je te promets qu’il n’y a que toi qui compte. Depuis que je l’ai réalisé, j’ai… S’il te plaît Lucie, accepte au moins mes excuses.
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++Lucie++
Je laissai le silence planer un moment suite à ces derniers mots. Il les avait prononcés en me regardant bien en face, et j’essayai de trouver dans son regard une trace inexistante de tromperie. - Très bien. J’accepte tes excuses. - Yat… - …Tes excuses mais c’est tout. En aucun cas, je ne suis prête à revenir vers toi… J’ai une bonne raison pour cela : j’ai un petit ami. Puis, ramassant la serviette que je découvris à mon côté et m’y emballant, je titubai jusqu’à la salle de bain pour m’y enfermer. Mais que s’était-il passé la veille et la nuit précédente ? Je n’en savais strictement rien. Je ne me rappelais même pas avoir quitté l’hôpital. En fait, en y réfléchissant, mon dernier souvenir était celui où Cécile nous annonçait être hors de danger. Après, c’était un vaste trou flou où seule la sensation de l’omniprésence du gamer dominait. Qu’avions-nous fait ? Je m’étais réveillée nue, avais trouvé une serviette à mes côtés et les mains de Nino se baladaient sur moi. Mmmm… M… Mercredijeudivendredisamedidimanche et les deux autres jours de la semaine! J’avais failli replonger. C’était pas possible. Je n’apprendrais donc jamais ! Examinant attentivement mon corps, je constatai l’absence de marque indiquant une quelconque relation intime récente. Ouf ! Il ne s’était rien passé, j’en étais sûre à présent… Heureusement, l’idée du petit ami avait jailli. Et c’était le seul rempart que je pensais assez solide pour me sauver. Ce n’était pas un mensonge complet puisque il y a un mois, j’avais commencé à sortir avec quelqu’un. Sauf que… j’avais rompu. Déjà parce qu’à peine avions-nous débuté notre relation que j’acceptai le poste ici. Ensuite parce que je savais une chose, c’est que je ne l’aimais pas; pas comme LUI… et c’était bien ça le problème. Me glissant enfin sous la douche, je tentai de me débarrasser mentalement des frissons que provoquait le souvenir de ses caresses matinales.
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++Nino++
Elle avait disparu dans la salle de bain, s’enfermant à clé et ne me laissant plus la moindre chance après m’avoir assené son coup fatal. Je l’avais su quand j’avais commencé à discuter avec elle en janvier. Elle n’était pas de ces filles d’un soir, quand elle se donnait c’était parce qu’elle y croyait. Et moi, pauvre idiot, j’avais réduit sa confiance en cendres en me faisant prendre ce soir-là… pire juste en dérapant. Ce disant, j’enfilai un T-shirt et me dirigeai vers la cuisine ; à défaut de confiance, je pouvais au moins lui montrer que je connaissais ses habitudes et mis en route le percolateur. Ce matin, je n’avais pas pu résister. Elle était si tentante tout à l’heure que je n’avais vraiment pas pu résister. J’avais été réveillé par une douleur intense dans le bras, celui sur lequel elle reposait. Doucement j’avais récupéré mon membre engourdi tout en restant les yeux fixés sur elle. Les cernes qui mangeaient son visage hier s’étaient atténués pendant la nuit et la matinée. Sa moue enfantine et détendue contrastait avec celle de la femme butée et méfiante qui s’opposait à nous depuis son retour, ou celle hagarde que j’avais été le seul à connaître hier. Alors que je sortais de mes pensées, je réalisai que ma main la caressait et qu’elle s’y pressait, recherchant mes caresses. D’ailleurs, elle leva elle-même une main pour la frôler avant de remonter le long de mon bras suivant du bout de ses doigts un trajet mystérieux jusqu’à mon torse. Là, elle l’ouvrit, la posant à plat, et moins d’une minute plus tard, je croisai son regard qui vira du bleu lumineux au ciel d’orage en moins d’une seconde quand elle prit conscience de ma présence. Le réveil avait été difficile mais maintenant je connaissais les raisons de son comportement. Elle m’avait vraiment vu… enfin une partie de moi, et pas la plus reluisante dans ces circonstances. Pourquoi le sort s’était-il acharné ainsi? Parce qu’elle serait arrivée trois minutes plus tard, elle m’aurait vu m’enfuir loin de la fille dont je ne me rappelais même plus le visage. Je m’étais rhabillé rapidement et alors que je sortais des toilettes où j’étais allé me rafraichir, je m’étais fait alpaguer par les potes de nos universitaires. Je m’étais réveillé le lendemain avec la gueule de bois sur le canapé d’une chambre où ronflaient trois ou quatre autres ivrognes. Un téléphone retentit, me sortant de ses pensées. Il venait du salon, et ce n’était pas le mien mais celui de Lucie dans son sac.
****************
++Lucie++
- Ton téléphone s’est manifesté ! Je l’avais entendu mais le temps que je termine de m’habiller, enfilant après une hésitation le T-shirt et le sweat qu’il avait laissé en évidence sur le lit, il était trop tard. Je doutais que ces fringues lui appartiennent parce que sur moi elles étaient déjà grandes, alors sur lui… et puis je doutais qu’il s’amuse à porter un T-shirt Minnie même quand il était chez lui… enfin on ne savait jamais… - Nino, c’est pas à toi ces fringues, si ? demandai-je en sortant de la chambre. - C’était pour une cousine. Je les ai achetées en janvier. Mais tu peux les garder… - Trop gentil… Ma voix devait être un peu grinçante car il avait un sourcil soulevé quand il se tourna vers moi. Là, son sourire se fit éclatant et je le vis retenir un rire en se mordant les lèvres. - Bon d’accord, c’est un peu grand pour toi. Vexée, je tâchai de prendre mon air le plus détaché et partis récupérer ma prothèse auditive dans le fond de mon sac à main. Je rappelai l’ami qui avait repris l’appartement. - Xavier ? - Tu décroches enfin ! Dis, les plombs ont sauté… - …Le compteur est derrière la porte d’entrée. - Autrement t’es bien arrivée ? Et puis, je voulais savoir, les centaines de bouquins en tout genre, j’en fais quoi ? - Oui. Les livres ? Tu peux les lire. S’ils te dérangent, mets-les en cartons, je te dirai quoi en faire plus tard. C’est tout ? - Oui… - … A plus alors. Je t’embrasse.
Je raccrochai et levai la tête, apercevant Nino qui m’observait avec attention. - C’était Lui ? Je mis un instant à réaliser le sens de sa question. Lui, mon ‘petit ami’… - Oui. C’était lui.
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++Nino++
Kusafié ? Le grand blond qui squattait son appart il y a un mois ? Celui qui s’était moqué de moi, me laissant me ridiculiser en anglais alors qu’il était parfaitement capable de parler et comprendre le japonais ? Pourquoi ce type l’appelait-il ? Des dizaines de questions du même genre se succédèrent le temps de la communication de Lucie avec ce type et, quand elle raccrocha et qu’elle perçut ma présence, je posai le question qui me démangeait. - C’était lui ? C’était lui ce petit ami ? Celui qu’elle avait dressé en rempart entre nous. Parce que oui, si j’avais bien des défauts, je n’avais jamais piqué la copine d’un autre. Si je découvrais avant que nous ne sautions le pas que l’une de mes conquêtes avait déjà un partenaire, je la laissais tomber immédiatement. Si je le découvrais plus tard et que le pauvre cocu venait me demander des comptes, je m’étais toujours excusé. Si Lucie sortait avec son géant blond, alors je m’effacerai. -Oui. C’était lui… M****…
***************
++Ben++
Lorsque j'arrivai le lendemain à l'hôpital, il me fallut un certain temps avant de retrouver l'entrée que nous avions emprunté la veille. Quand je la trouvai enfin, je croisai le gars d'hier accompagné d'un de ses collègues. Ce n'était pas son amant, mais celui qui était le plus visiblement musclé et avec lequel il était le plus facile de parler anglais. Ils me saluèrent et l'anglophone m'expliqua que Lucie était encore dans le couloir, devant les ascenseurs. Je le remerciai et fonçai vers le lieu indiqué. Je ratai pourtant l'appareil dont les portes venaient de se refermer et dus prendre son voisin qui arrivait. Une fois en haut, je sortis rapidement et vis la jeune femme que j'interpelai avant qu'elle n'entre dans la chambre de ma sœur. Elle se tourna vers moi et m'attendit. - Lucie, ça va comment aujourd'hui ? - Mieux. J'ai pu dormir, je crois que j'ai presque récupéré. Donc ça va. Et toi? - Bien. L'appart est grand, j'étais à l'aise. T'as dormi où ? - ...Chez Nino... Mais j'ai fait que dormir là-bas. D'ailleurs, c'était pas ce qui était prévu, et je voulais pas le voir... - Ça va, te justifie pas, t'es une grande fille. ...Et si jamais il est trop insistant, tu sais où frapper ? Elle rougit en pouffant légèrement. - Merci du conseil. Mais j'ai trouvé mieux : j'ai un petit ami. - Ah! oui, ça c'est radical. J'étais rassuré de la voir sourire comme ça. Elle allait vraiment mieux qu'en janvier. Bon, en même temps, traîner du chagrin pendant si longtemps, c'est inutile à mon avis. - Lucie, j'ai trouvé que l'appart était sacrément plein de vide. - Pardon ? C'est une proposition pour me convaincre de dormir chez Cécile au cas où j'aurais voulu rester chez le Geek? - Oui, aussi. Mais là, je te dis juste que j'ai pas eu l'impression d'être dans l'appartement d'un couple de jeunes mariés. Je l'ai trouvé plein de l'absence d'un homme. Je sais bien que ma sœur est du genre à occuper tout l'espace, mais là, quand même... Je me trompe ? Elle hésita un instant avant de lever vers moi des yeux troublés. - Je comprends ta question. Mais je pense que c'est à Cécile que tu devrais la poser, parce que ce n'est pas à moi d'y répondre. Ok, je ne m'étais donc pas trompé. Il y avait un problème. - Dis, tu pourras faire en sorte que je reste seul avec elle pour lui demander?
(...)
Les cartes sont le jeu par excellence qui peut s'adapter à n'importe quelle situation. La preuve ? J'étais seul dans la chambre avec Cécile, elle redressée par ses oreillers, moi en tailleur au pied du lit, et nous nous affrontions plus ou moins pacifiquement au rami. J'avais voulu proposer autre chose qui ne l'oblige pas à tenir autant de cartes dans ses mains, mais c'était son jeu préféré et la petite dame était têtue. Les parents avaient émis le souhait de se restaurer, et avant que Cécile ne trouve un papier pour leur écrire le texte nécessaire pour se repérer, Lucie s'était proposée pour les accompagner, prétendant avoir elle-même besoin d'un café. Et maintenant je cherchais comment formuler ma question. J'avais proposé à ma sœur le deal suivant : si j'étais le premier à poser des cartes, je pouvais aussi poser une question, et si je gagnais, elle devait y répondre. Mes cinquante-et-un points devant moi, je tentai donc de trouver la question qui me permettrait d'obtenir une vraie réponse, et pas une démonstration d'anguille comme savait si bien les faire cette sale gamine. - Bon, Ben, mon bonhomme, soit tu causes, soit tu causes pas, mais de toute façon, tu jettes une carte. J'ai pas envie d'attendre ! Tu peux toujours poser ta question à la fin de la partie. Je jetai ma carte avec un soupir. Et je me mordis les lèvres quand je la vis la piocher avec un sourire ravi. - Juste ce qu'il me fallait. Mon frère, je t'aime ! Elle avait tout posé, se permettant de rajouter des cartes chez moi et de jeter un joker. Sa chance aux cartes était insolente. Et très frustrante pour moi, aujourd'hui. Cécile ramassa les cartes étalées et les posa sur la table mobile. - Benjamin, je veux bien répondre à ta question. Même si tu ne la poses pas d'ailleurs. Je lui lançai un coup d'œil surpris. - Je préfère de toute façon t'en parler d'abord. Parce qu'après, j'aurai besoin de toi pour les parents. ...Donc... je suppose que tu as remarqué que l'appart faisait un peu désert... Ok, elle avait bien deviné mon sujet d'interrogation. - Vous ne vivez plus ensemble ? Elle secoua la tête et me tendit une main que je pris machinalement. Je pensais qu'elle voulait un peu de réconfort, mais je compris quelques phrases plus tard qu'elle avait fait ça pour m'empêcher de bondir et de chercher mon beau-frère pour lui en mettre une. Ce type avait quitté ma sœur pour s'installer avec un mec! J'aurais pu imaginer n'importe quoi, mais pas ça! J'étais en train de débiter tout un chapelet d'injures en italien quand sa main serra la mienne pour me ramener au présent. - Ben, je n'ai pas fini, et j'aimerais autant pouvoir tout te dire avant que les parents ne reviennent. S'il te plaît ! A part quand il s'agissait de ma place devant l'ordinateur, j'avais toujours détesté la voir supplier pour obtenir quelque chose. Je me calmai donc pour écouter la suite. Je n'aurais pas cru qu'il serait à ce point indispensable que je sois assis.
***************
++Cécile++
Voilà, désormais, il y avait quelqu'un d'autre qui savait tout. Absolument tout. Même pour les dates, et pour le spa. Assez bizarrement, j'étais soulagée d'avoir pu tout avouer à mon petit frère. Peut-être parce qu'il ne les connaissait pas vraiment, ou parce qu'il vivait à des milliers de kilomètres. Aussi sans doute parce que j'avais confiance dans son jugement et son calme. - Et ses parents acceptent ça? - Mmm, pas vraiment, mais je crois qu'ils ont compris qu'ils n'avaient pas d'autre choix que de se plier à ce que nous déciderions.. - Et pour le bébé? - Le souci majeur pour le moment, c'est de le porter et de le mettre au monde. Pour après, on verra un peu plus tard. Je... Ils vous ont dit que j'aurais pu ne plus être là quand vous êtes arrivés ? Il hocha la tête en grognant. - Ça lui a pas fait prendre conscience qu'il devait rester près de toi ? Je lui répondis en souriant que c'était lors du tremblement de terre qu'il avait pris conscience de où il voulait être, et auprès de qui. - Ben, je vais avoir besoin de toi pour les parents. - Mouais... Tu veux un conseil ? Attaque sur le fait que le bébé sera bien et que vous ferez tout pour lui. ...Et laisse peut-être tomber pour le moment l'histoire de l'amant. - Ben ? Si je t'avais pas, je t'inventerai! Il me passa une main sur la tête en grommelant quelque chose sur les grandes sœurs impossibles. - Au fait, et Lucie, elle sait quoi au juste? Que je ne fasse pas de gaffe avec elle. - Elle sait que Teru m'a quittée, qu'il vit avec Satoshi, et... c'est tout. - Ok, j'ai compris, je garde le reste pour moi. Je l'obligeai à se pencher vers moi et posai un baiser sur sa joue piquante. C'est à ce moment-là que Masaki et Jun entrèrent dans la chambre. Et le premier voulut faire demi-tour illico. - Baka! fit Jun en le retenant. Où tu vas? C'est son frère! - Mais, mais... euh... non, mais... on va vous laisser... Je me mis à rire. Un rire aussi peu discret qu'il était sincère. Et qui redoubla quand je vis la tête embarrassée de mon frère. - Masaki, reviens! dis-je quand j'eus retrouvé mon souffle. Et toi, assieds-toi. J'attrapai le jeu de cartes et l'agitai devant le nez des deux Japonais qui s'étaient eux aussi installés. - Ça vous dit un rami? - Euh... - T'inquiète, Masaki, je vous explique les règles.
Quand Lucie et les parents revinrent, Jun avait le front sur le bord du lit, déprimé d'avoir perdu pour la troisième fois consécutive. Masaki s'acharnait à compléter les suites de tout le monde avec les cartes qui restaient dans la pioche juste pour lui prouver que c'était possible. Ben les regardait en secouant la tête. Quant à moi, j'étais renfoncée dans mes oreillers, et je les regardais tous les trois en souriant férocement, ravie d'avoir gagné et me promettant d'apprendre plein de jeux passionnants à l'enfant blotti au creux de mon ventre que je caressais doucement. - Dites donc les jeunes, Cécile a besoin de repos! - Maman! Laisse-les, ils s'amusent, et ils m'amusent beaucoup aussi. Et les laminer au jeu est pour moi une grande source de hausse de moral. - Hé! on n'est pas là pour que tu t'éclates à nous écraser! - Je sais pas ce que vous racontez, dit Jun qui avait relevé la tête, mais je sens que je dois approuver ton frère ! - Et pourquoi donc ? - Parce qu'il n'a pas l'air d'accord avec toi. - Argumentation débile. T'es juste vexé d'avoir perdu. Je me tournai vers Lucie. - Dis ma belle, est-ce que ça t'ennuie de tenir compagnie à ces deux-là? J'ai des choses à dire à mes parents, et... - Compris. Venez, vous deux ! - Attends ! Tu nous chasses là ou quoi ? Lucie eut l'air de vouloir dire quelque chose, mais je fus plus rapide. - Masaki, je veux expliquer la situation avec Teru à mes parents. Et je préfère le faire en famille. Oh ! Et... je peux vous demander quelque chose ? - A qui ? fit Jun en me fixant - A qui veut. Vous pourriez acheter des rasoirs jetables pour mes deux hommes des bois ? Je montrai mon père et mon frère qui se regardèrent sans comprendre un traître mot de ce que je racontais. - Ok, on va trouver ça. Et je te laisse mon portable, tu pourras nous appeler quand vous aurez fini. Le numéro d'Aiba-chan est enregistré. Elle poussa les deux hommes devant elle et quand j'entendis la porte se refermer, je sus que le moment difficile de la journée commençait.
(...)
J'avais fait comme me l'avait suggéré mon stratège et en arrivant à l'aveu de la raison de notre séparation, je me sentais plus confiante en moi. Benjamin était posté près de la porte afin d'empêcher toute sortie irréfléchie, mais ça ne paraissait finalement pas si indispensable. J'étais certaine que si Papa avait tenu une main dans la sienne, elle aurait été littéralement broyée tant il serrait les poings. Quant à Maman, je devinais les idées qui tourbillonnaient dans sa tête. Et j'attendais le déluge que la mousson ne tarderait pas à apporter. - Donc en fait, ton mari est homosexuel ? Dieu merci, le terme employé était le plus neutre. Même si le ton lui, ne l'était pas du tout. - Oui. Pas la peine de nier l'évidence, n'est-ce pas? - Et ce pé... - PAPA !! Il est toujours le même homme que vous avez rencontré, alors reste poli s'il te plaît ! - Tu le savais ? - Bien sûr que non ! Et je ne suis pas sûre qu'il le savait lui-même. - Et vous vivez toujours ensemble ? Ce fut mon frère qui répondit. - Y a pas d'affaires d'homme chez Cécile. - Ca ne veut rien dire, déclara catégoriquement ma mère. Où vit-il ? - Chez son amant. - Tu le connais ? - Oui. Et vous aussi, vous l'avez déjà rencontré. - C'est celui qui était là tout à l'heure ? me demanda Ben. Je soupirai. - Non, lui, c'est son ex. - Ton ex couche avec l'ex d'un gars qui vient te voir à l'hôpital? Vous êtes maso tous les deux ? Ah ! Maman et son art de la formule... - Ils sont amoureux l'un de l'autre depuis qu'ils se sont rencontrés il y a dix ans. C'est comme ça, c'est tout... Et de toute façon, c'est MON problème, pas le vôtre. Ce que j'ai décidé d'accepter ou non et pourquoi, ce n'est pas votre affaire. - Peut-être pas, mais ce sera l'affaire de votre enfant. Comment comptez-vous... - Ça aussi, ce sera à nous de gérer. Je comprends vos inquiétudes et leur légitimité, je comprends vos réticences, mais c'est nous les parents, c'est à nous de faire ce qu'il faut. - Cécile, ce bébé, tu es sûre qu'il est de Teru? - Il ne peut être de personne d'autre. - Ça pourrait pourtant simplifier les choses. - Très certainement, mais je peux t'assurer que je n'ai aucun doute là-dessus. - Et il en dit quoi? - Il est ravi d'être papa. - Si c'est ce qu'il voulait, il n'a pas choisi la bonne partie de l'humanité. - Certes, mais ça ne se discute pas. Il m'aimait. Il m'aime toujours, en fait. Il aime juste Satoshi davantage et c'est avec lui qu'il veut vivre. - Et ses parents? - Il s'est fâché avec eux. Parce qu'ils voulaient s'en prendre à son amant. - Non, je voulais savoir ce qu'ils pensaient du bébé. - Vous n'avez pas discuté avec eux? - Si, mais ils ne nous ont pas parlé de ce problème. - Ce n'est pas un "problème", c'est une donnée à prendre en compte dans l'équation, c'est tout. Je sentais que je commençais à fatiguer. J'étais lasse d'argumenter et j'aurais voulu qu'ils acceptent les choses telles qu'elles étaient et que nous les avions faites. Je ne savais plus quoi leur dire pour qu'ils cessent de me questionner. - Ecoutez, vous allez tous les quatre être les grands-parents du même enfant. Et vous vous entendez plutôt bien, non? Alors continuez. Ne vous préoccupez pas de ce qu'il se passe entre nous. - Cécile, tu dis n'importe quoi. - Possible... Je fermai les yeux un instant. Enfin, ce que je crus être un instant. Parce que lorsque je les rouvris, il y avait du monde autour de moi. Mes parents et mon frère, mais aussi Lucie, Jun, Masaki, Sho et M. et Mme Miura. Ils discutaient tous sur un ton à peu près normal, sauf peut-être Mme Miura et Masaki, et je ne me manifestai pas tout de suite. Et quand j'ouvris la bouche, ce fut pour dire en deux langues que si ma chambre devait devenir le dernier salon où l'on cause, j'aimais autant que ce fut un salon de thé et qu'on m'apporta à manger...
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++Aiba++
- Dis ma belle, est-ce que ça t'ennuie de tenir compagnie à ces deux-là? J'ai des choses à dire à mes parents, et... - Compris. Venez, vous-deux ! Avec ces quelques mots, j’avais retrouvé la Lucie de mes discussions sur msn. Celle qui vivait sa vie comme elle l’entendait mais qui était toujours prête à rendre service si c’était dans ses moyens. Là par exemple, elle rendait service à son amie en nous virant Jun et moi avant de nous traîner ou plutôt nous entraîner au combini le plus proche pour acheter les rasoirs demandés par Cécile. Quand nous revînmes un peu plus tard, Cécile s’était assoupie et le père de Cécile profita de la salle d’eau pour se débroussailler immédiatement. Les parents de Teru arrivèrent peu après et pendant que nous discutions, la malade s’éveilla, réclamant à manger. Lucie éclata de rire et décida qu’il était temps pour elle, et donc pour nous, de rentrer : l’infirmière n’apprécierait sûrement la présence d’autant de monde dans la chambre. Benjamin nous suivit et je raccompagnai tout le monde. Sur le trajet, Lucie me convainquit sans avoir beaucoup à insister, de faire une virée shopping alimentaire le lendemain. Une fois les trois autres déposés devant leurs hébergements, je rentrai chez moi et croisai l’étudiant vétérinaire qui s’occupait de mes animaux pendant mes absences. Depuis le tremblement de terre, où je l’avais retrouvé chez moi quand j’étais rentré, je lui avais demandé de passer tous les jours afin de s’assurer que les répliques quotidiennes que nous subissions ne stressent pas trop mes petites bêtes. Il en profitait d’ailleurs souvent pour aller les balader. - Bonsoir, Aiba-san. - Bonsoir, Shigeru-kun. Les petits vont bien ? - Oui ils sont en parfaite santé, même si Dai-chan a encore griffé Sora-kun. Dai-chan était mon chat, le père de Nuit, et il adorait tourmenter mon chien Sora. De toute façon, Sora allait avoir un répit dimanche puisque j’allais l’emmener à Chiba pour la journée. D’ailleurs… - Shigeru-kun ? le retins-je alors qu’il allait partir. Demain j’emmène mes chiens dans ma famille. Il n’est donc pas nécessaire que vous passiez. - Oh, d’accord. Arigato gozaimasu. A une prochaine fois Aiba-san. Cette fois il partit, et je me retrouvai seul avec mes bébés. - Tadaima ! Papa est rentré ! Je fus assailli par une partie de mes petites bêtes et après un moment de câlin, je m’en dégageai. Il ne devait plus me rester beaucoup de temps pour me changer avant l’arrivée de Riida.
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29 avril 2011 Cher journal, J’ouvre mon ordinateur pour la première fois depuis mon arrivée au Japon. Je sens que ce que je vais écrire va être décousu mais là j’ai surtout besoin de déposer certaines choses pour ne plus les avoir dans la tête et être plus opérationnelle dès demain. En arrivant à l’aéroport les mauvaises nouvelles m’étaient tombées dessus. Cécile nous a foutu une trouille pas possible. Enfin je ne suis pas honnête là maintenant tout de suite. Parce que même si elle a déjoué tous les pronostics, rien n’est terminé ou plus exactement tout peut se terminer à tout moment. C’est ce qu’a dit le médecin et s’il s’est planté une première fois c’est loin d’être un incompétent, c’est plutôt un miracle et la volonté de Cécile qui a contrecarré son pronostic. Je le sais au plus profond de moi et je sais que cette fois c’est à mon tour d’être là pour elle. Je suis dans ma chambre chez Cécile. Pas toute seule puisque Ben est là aussi. Au bruit il est en train de jouer avec la bestiole. Pour l’instant et pour les prochains jours nous allons cohabiter ensemble, les parents logeant provisoirement chez ceux de Teru. Mais quand Cécile sera de retour je suis sûre qu’ils préféreraient pouvoir loger chez elle, alors il va falloir que je trouve rapidement une autre solution. En début d’aprèm’, Nino m’avait enfin lâchée (ne pouvant plus retarder son boulot) et déposée devant les portes de l’hôpital. Ben et moi nous sommes retrouvés tout à l’heure devant la porte de la chambre de Cécile. Il m’a demandé si je savais que l’appart’ était quasiment vidé de la présence de Teru. Evidemment que je le savais mais je pensais que ce n’était pas à moi de lui dire… Maintenant il sait et il est dans le salon. Sur le chemin du retour j’ai senti son regard se poser plus d’une fois sur moi mais fidèle à son habitude il n’a rien dit, rien demandé, comme en janvier dans l’avion. Faut-il que je m’ouvre de moi-même à lui au risque de lui rajouter des soucis non je ne crois pas. Je crois mon cher journal que tu me suffiras pour faire le point à propos de l’autre Geek. Je le ferai d’ailleurs à un autre moment. Là je termine en faisant le point de mes prochains objectifs : 1/ Etre là pour Cécile 2/ Trouver un appartement d’ici la sortie de Cécile. 3/ Ne pas oublier d’aller bosser lundi prochain. Ouf !...
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++Ohno++
J’étais assis dans l’un des fauteuils chez Masaki. Il m’avait demandé si je pouvais venir dîner chez lui le matin où il m’avait accompagné à la JE juste après la nuit d’angoisse que nous avions vécue. J’avais alors refusé pour le soir-même mais accepté pour le suivant en imaginant que j’aurais bien besoin de la compagnie de Masaki suite à mon abandon par Teru. Je ne le souhaitais vraiment pas mais je savais aussi que je n’avais aucun droit de le retenir loin de sa famille ou d’être la pomme de discorde entre lui et ses parents. Je n’avais juste pas imaginé que Cécile-san serait aussi forte et ma reconnaissance devant son abnégation n’en était que renforcée. Après ma journée de boulot, j’avais donc pris un taxi pour aller grignoter chez Masaki. Teru ne devait pas rentrer très tôt, d’autant qu’il m’avait annoncé vouloir faire un crochet par l’hôpital. Ce soir j’étais donc carré dans mon siège, sirotant une bière et caressant le crâne poilu qui s’était posé sur mes genoux, attendant qu’Aiba m’expose le fond de sa pensée. J’avais vu dès mon arrivée qu’il était tracassé par quelque chose : son sourire m’était apparu bien terne. - Dis Satoshi-kun… Pour que Masaki m’appelle ainsi alors que normalement il ne m’appelait que Riida ou Oh-chan, c’était que sa question devait être vraiment importante. Je posai alors le verre que j’avais entre les mains pour le regarder attentivement. Il s’était arrêté dans sa phrase et regardait ses doigts qui entortillaient nerveusement les poils de son chat. Il me regarda soudain bien en face et je tentai un sourire d’encouragement. Je le vis prendre une grande inspiration, et il se lança un peu comme mon neveu la première fois qu’il avait sauté dans la mer depuis le bateau avec lequel je l’avais emmené pêcher : résolu mais mort de trouille. - Satoshi-kun ? Comment t’as su que tu préférais les hommes aux femmes ? Comment t’as su que c’était Teru-kun et pas Jun-chan ? Comment … - STOP ! Il fallait que j’arrête l’avalanche de questions là tout de suite. Il y a quelques années maintenant, Jun m’avait raconté comment il avait fait faire des travaux pratiques à ses compères de Kaze grâce à son tout nouveau savoir sur les capotes. Comment ces derniers l’avaient plus ou moins gentiment cuisiné sur nos fantaisies aussi, et je savais que les potes du Sobu-sen s’étaient réappropriés certains de nos jeux avec leurs partenaires féminines. Avec l’âge et la sagesse, Aiba-chan avait semblé moins intéressé que Nino qui pourtant n’avait jamais osé me poser ce type de question. - Aiba-chan, qu’est-ce qui te tracasse ? C’est pas ton genre de me questionner sur ma vie amoureuse ? - C’est parce que, tu vois, je m’étais jamais intéressé à autre chose qu’aux filles jusqu’à maintenant et comme tu le sais, j’ai pas vraiment été chanceux… - Ça, Masaki, je suis désolé de te le dire, mais c’est parce que tu as tendance à ramasser les restes de Nino. Et comme Nino ne cherche pas l’amour mais le bon coup…. - Ouais, je sais, vous me le rabâchez depuis des années, mais qu’est-ce que tu veux, après Ko-chan, moi, j’ai plus eu envie de m’engager. Et puis, y a eu Lucie, et c’est pas moi qu’elle a choisi… - C’est pas Nino non plus, je pense. - Si tu le dis… En tout cas, après cette dernière veste, j’ai rencontré Shigeru-kun. Il aime mes petits comme si c’était les siens, et puis il est toujours prêt à me rendre service. Quand je rentre à la maison, il est souvent là pour m’accueillir même tard la nuit. - STOP ! Ton Shigeru c’est… Je n’étais pas sûr d’avoir tout saisi. C’était qui ce mec qui avait les clés de chez Masaki ? - … mon dog-sitter. Riida tu m’écoutes ? - Gomen, tu me tues là Masaki. Tu donnes tes clés à un inconnu qui va jusqu’à squatter ton canapé… parce que rassure-moi, il ne dort pas ailleurs ? - Non… Je ne pus m’empêcher de soupirer de soulagement. Si ce mec était un fanatique ou un stalker, Aiba-chan l’aurait retrouvé au moins une fois dans son lit. Alors ce type était sûrement un admirateur, mais il ne devait pas être trop dangereux. Malgré tout, je ne pus m’empêcher de poursuivre mon investigation. - Tu laisses donc tes clés à n’importe quel type et il squatte ton canapé la nuit ? - Shigeru n’est pas n’importe qui. Il est étudiant en médecine vétérinaire et je l’ai engagé pour prendre soin de mes petits quand je suis absent. Il était en train de s’en occuper le 11 mars et il a veillé sur eux jusqu’à ce que je rentre chez moi le lendemain. Depuis je lui ai confié un trousseau de clés mais avant, il les prenait toujours chez le gardien. Mais Riida, tu veux bien répondre à ma question ? - Je peux avoir un thé, s’il te plait ? Aiba me sourit et se leva pour se diriger vers la cuisine. Ce n’était pas que j’en avais vraiment envie mais j’avais besoin d’un minimum de temps pour faire le point, et envoyer Aiba faire chauffer de l’eau était ce qui m’avait semblé le plus rapide. Alors cette grande asperge se posait des questions sur son identité sexuelle ? Je le connaissais depuis une dizaine d’années et j’étais certain qu’il n’était ni gay ni bisexuel, mais lui semblait avoir des doutes. - Tiens ! Aiba-chan était juste en face de moi, me tendant un mug. - Arigato. J’avalais une gorgée de thé avant de me lancer. - Masaki. J’ai toujours été attiré par les hommes. Les seules femmes qui font battre mon cœur sont ma mère, ma sœur et ma grand-mère, et cela s’appelle de l’amour filial. Les autres femmes me laissaient et me laissent toujours totalement indifférent. Je les respecte, mais ça s’arrête là. Alors quand tu me demandes comment j’ai su que je préférais les hommes aux femmes, eh! bien, j’avoue ne m’être jamais posé la question. J’ai toujours aimé les hommes plutôt que les femmes. Je crois qu’on a tous une préférence pour l’un ou l’autre sexe. Qu’il n’y a pas tellement de raison d’hésiter. - Mais… Teru-kun ? - Jusque-là je te parlais de sentiments. Le problème, c’est que Teru a longtemps agi avec son cerveau avant de se décider à se servir de son cœur. Et aujourd’hui ça a des conséquences... - Cécile-chan et le bébé ? - Entre autre. Alors écoute ton cœur, ne te laisse pas aveugler par des impressions ou des désirs superficiels ou la crainte d’être seul, et tu trouveras. Je me tus et terminai mon thé. En face de moi Masaki semblait en pleine réflexion. Un coup d’œil à ma montre m’apprit qu’il commençait à se faire tard et je décidai de me lever. Aiba-chan perçut mon mouvement et releva la tête quand je passai devant lui. - Riida, je peux te demander une dernière chose ? - Dozo. - D’après toi, je suis gay ? Je ne pus m’empêcher de sourire avant de lui donner ma réponse. Il m’accompagna à la porte et alors que j’allais partir, il me retint par le bras. - Oh-chan… - Masaki, je pense sincèrement ce que je t’ai dit mais je me trompe peut-être. C’est à toi seul de découvrir ton orientation sexuelle. Après tout, je m’étais trompé pour Jun. Enfin, ce n’était encore qu’un gosse et nous ne nous connaissions pas depuis si longtemps… - C’est pas ça Riida que je voulais te demander. …S’il te plait… Ne raconte pas ça aux autres… termina-t-il. C’est en éclatant de rire que je quittais son appartement pour prendre un taxi en direction du mien. Sacré Aiba. Il m’étonnerait toujours.
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++Jun++
Quand je disais que cette Lucie n’était pas claire ! Un jour elle était dans les bras de Nino, le lendemain, Aiba la suivait comme un toutou quand elle lui demandait de faire des courses. C’était tout juste s’il ne sautillait pas d’excitation sur le trajet qui séparait l’appartement de Cécile du mien. Et dire qu’il allait falloir travailler avec elle. Définitivement, nous serions collègues, mais il me paraissait impossible d’être ami avec une fille qui ferait à court terme souffrir au moins l’un de mes deux amis d’enfance. J’étais dans notre loge avec Nino. Ce dernier tapotait sa DS de la pointe du stylet quand Sho entra, suivi de Masaki-kun. - Les gars ! Lucie-chan va emménager dans son propre appart’ les jours prochains. Je vous ai proposés en tant que volontaires pour lui filer un coup de main. Il va falloir qu’elle achète plein de trucs, et même si elle se fait livrer le plus gros et qu’elle a pas encore reçu les affaires qu’elle a fait partir en container… on peut peut-être l’aider dans les prochains jours au moins pour ses achats ne ? - Je rêve ou t’as dit ‘vous’ Masaki ? grognai-je. - Heu… - Evidemment J ! Aurais-tu oublié qu’Aiba-chan file ce soir à Chiba avant de partir pour un voyage en famille les trois prochains jours ? C’est vrai Aiba et ses parents, son frangin et sa belle-sœur fermaient le restaurant pour partir dans un onsen pour la Golden Week. Pour ma part, j’avais prévu de passer voir ma famille mercredi mais c’était tout. Riida avait en général l’habitude de disparaitre en pleine mer mais cette année je ne savais pas ce qu’il avait prévu, d’autant qu’avec Cécile à l’hôpital, Teru semblait encore plus à l’ouest que d’habitude. M’abandonner deux jours ne le dérangeait pas ces dernières années, mais les premières, il s’était toujours assuré de rester avec moi. Qu’avaient-ils donc prévu ? Avais-je vraiment envie de le savoir ? - J? T’es libre, ne ? - Hein ? Pourquoi tu demandes ça Nino ? grinçai-je. - Parce que t’habites juste à côté et que tu peux aller chercher Lucie facilement. Ensuite on se retrouve dans les magasins ou ailleurs, mais c’est plus simple si tu peux lui servir de chauffeur, on perdrait moins de temps… Comment est-ce que j’avais pu me retrouver chauffeur de cette fille sans m’être porté candidat? Je ne savais pas bien, mais par contre, je vis que les autres comptaient à présent sur moi. Je n’avais plus le choix.
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30 avril 2011 Cher journal, Encore une journée épuisante mais cette fois, c’est en partie à cause de Cécile et de son caractère de… Cécile. Elle n’aime pas les hôpitaux, elle n’aime pas les médecins, elle n’aime pas la foule, elle veut rentrer chez elle... Du coup, je ne suis pas restée toute la journée avec elle aujourd’hui et grâce à cela il est possible que j’aie trouvé un appartement. Je dois aller le visiter tout à l’heure. En effet, j’ai parlé au gardien de la résidence ce matin en sortant de l’immeuble. Il m’a dit qu’un appartement au quatrième étage était disponible. Il m’a proposé de contacter le propriétaire pour nous mettre en relation. Et j’ai maintenant rendez-vous dans une demi-heure pour le visiter. … Tadaima ! Cet appart’ est juste parfait. Il est très exactement à l’opposé de celui de Cécile trois étages plus haut et son balcon offre une autre vue de la ville. Une vaste entrée, un double séjour et deux chambres. La cuisine s’ouvre sur le séjour, enfin il y a une salle de bain avec douche et baignoire. Si je prends le bail pour cette année, je peux emménager dès que le container arrive avec mon canapé, mon clavinova. En attendant, je peux acheter l’electroménager et un lit. Je donne ma réponse demain mais à priori elle sera positive. Je vais juste attendre le retour de Ben et lui demander s’il veut me donner son avis sur la question.
Je parcourais le chemin entre la Jimusho et l’immeuble abritant l’appartement de Cécile et le presque mien à pied en ce lundi après-midi. J’étais partie tôt car j’avais rendez-vous pour signer mon bail et j’en profitais pour faire le point de ces derniers jours. Après un dimanche passé en partie avec Cécile, en partie chez Cécile à me préparer, mon premier jour de travail était arrivé bien plus vite que je ne l’avais imaginé en montant dans l’avion mercredi dernier. A l’hôpital, ce weekend, j’avais croisé tout le monde sauf Mr courage en personne, cet imbécile de Teruki. Depuis qu’il avait accompagné les parents de Cécile, il s’était évaporé, et j’évitais d’en parler parce que son irresponsabilité me donnait envie de le claquer. Quand on sait que je n’ai jamais frappé qui que ce soit, même pas celui qui m’avait larguée quand j’étais tombée malade… ni même l’autre Geek ni en janvier, ni il y a deux jours. Mais là je crois que j’en serais capable… Bon en réalité j’avais surtout envie de lui demander pourquoi il avait fait ça à Cécile ? Pourquoi l’avoir épousée s’il était gay ? Essayer de comprendre pourquoi Cécile semblait à la fois si combattive quand il s’agissait de leur enfant et si fataliste à son sujet. Si elle n’avait pas été si malade, ces questions je les aurais posées à mon amie mais maintenant je ne voulais pas la bouleverser davantage et le seul interlocuteur possible était Teruki. Aujourd’hui était donc mon premier jour de travail et c’était avec un plaisir certain que j’avais pris possession de mon studio et fait plus ample connaissance avec les techniciens. Pour les artistes, Nino, Sho-kun et Aiba-chan étaient passés, ainsi que quelques autres Johnny’s avec lesquels mon prédécesseur travaillait et donc moi aussi, du moins pour le moment. Car les artistes travaillaient normalement toujours avec la même équipe sauf si la direction décidait de changer. Mon collègue avait été présent pendant la matinée pour le passage du bâton-relais. Le vrai travail ne débuterait réellement que vendredi et samedi avec la fin des enregistrements du prochain single des Jump. Je ne commencerais à travailler avec Arashi que la semaine suivante, enfin, sans compter les réunions préparatoires pour leur album. - Lucie ! Je me retournai et vis sortir Ben de la station proche de l’immeuble. Il m’avait proposé de m’accompagner et j’avais accepté. Après tout, il était toujours rassurant d’être accompagné par un ami et il était le seul vraiment disponible et proche à l’heure actuelle. Une heure plus tard, j’étais en possession des deux jeux de clés de mon appartement. Nous remontâmes chez Cécile, et, une fois dans ma chambre, j’envoyais un mail à Aiba-chan pour le lui annoncer comme il me l’avait demandé. Deux minutes plus tard, il m’appelait. - Moshi, moshi, Lucie-chan. - Aiba-chan, pourquoi appelles-tu ? - Ben… Avec les gars, on a pensé que t’aurais besoin de chauffeurs pour faire les boutiques et acheter ce qu’il te fallait pour aménager ton appart’. Alors c’est décidé. Jun viendra te chercher demain matin pour aller voir Cécile-chan et après vous irez où tu voudras. Nino vous rejoindra dans la chambre. - Heu… J’ai mon mot à dire, non ? Et Matsujun est vraiment d’accord ? - Oui oui. Il viendra te chercher à 11h. Bye Lucie-chan. A vendredi. Alors là, je n’en revenais pas. Mais bon… Je retrouvai Ben dans la cuisine et lui racontai ce coup de fil surréaliste avant de lui proposer de se joindre à nous, au moins pour rejoindre Cécile et l’hôpital puisque ce serait sur le chemin.
| | | Dim 19 Jan - 11:10 | | | Ann-Liz Modérateur Messages : 404
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Loisirs : lire, fansubber, checker, chanter...
Humeur : en plein jetlag
| Voilà le chapitre du jour!! Enjoy - Chapitre 34:
++Cécile++
- Miura-san, vu la taille et le développement de votre bébé, la conception doit se situer à cette date-ci. Nakagawa-sensei me montrait une case sur le calendrier de son bureau et je repensai à ce jour-là. Un jour où Teru m'avait fait l'amour avec tendresse et gourmandise. La date était tout à fait plausible et correspondait à mon rythme plutôt bien réglé. - Et dans ce cas, la naissance est prévue pour quand? - Eh! bien... Il fit un rapide calcul et retourna le carton pour me montrer une case vers la fin de l'automne. - Avant Noël donc. - Oh! largement avant, dit-il en ouvrant de grands yeux. Miura-san, vous passerez Noël chez vous avec votre bébé dans les bras. - Je suis ravie de constater que vous ne comptez plus m'enterrer si vite... souris-je. - Miura-san, votre état à votre arrivée était on ne peut plus inquiétant. Mais... peut-être souhaitez-vous être suivie par un autre médecin? Je le comprendrais, soyez-en sûre. - Oh! j'en suis certaine, sensei, mais vous avez commencé à nous accompagner, et je vous fais confiance. Pour nous suivre avec toute la connaissance que vous avez à présent de nous deux, dis-je en caressant doucement mon ventre, et pour comprendre aussi tout ce qui gravite autour de nous. Ce bébé n'est même pas né que sa situation familiale est déjà complexe. Et je sais que vous en avez vu une grande part. Teru m'avait rapporté ce qu'il s'était passé dans la salle d'attente avant mon réveil. L'attitude à la fois ferme et humaine du médecin n'avait fait que renforcer mon sentiment de confiance à son égard. Je ne voulais pas de quelqu'un d'autre. Mais je pensais préférable de l'informer de tout afin qu'il sache comment réagir ou ne pas s'étonner devant telle ou telle réaction. Il m'écouta avec attention en hochant la tête de temps en temps. Puis il me raccompagna jusqu'à la salle d'attente où mes parents attendaient en compagnie de Teru. Ce dernier se leva dès qu'il me vit et son regard se fixa sur le docteur dans une question muette. - Elle peut rentrer chez elle. Elle devra venir toutes les semaines faire une visite de contrôle et suivre les recommandations qui figurent sur cette ordonnance que j'ai faites traduire en français pour que Bianchi-san puisse les lui faire respecter. Et zut! Même ma mère allait pouvoir jouer les tyrans, pardon, les infirmières dévouées. Enfin... Je savais que ce n'était pas que pour moi que je devais faire attention, et je ne comptais pas désobéir. Nous prîmes congé de Nakagawa-sensei et Teru nous ramena chez moi. Ben était rentré en France depuis déjà quelques jours, après avoir aidé Lucie à emménager dans son chez-elle trois étages plus bas que mon appartement, et m'avait glissé avant de partir qu'il préférait garder des jours de congé pour venir me voir une fois qu'il serait tonton. J'avais répliqué que s'il voulait emmener avec lui une tata, j'étais tout à fait d'accord. Il avait haussé les épaules en souriant sans rien dire, comme d'habitude. Ce garçon était bien trop silencieux.
(...)
Dans les jours qui avaient suivi mon retour à la maison, j'avais été dorlotée par mon tyran préféré. Ma mère avait veillé à ce que je mange, dorme, boive, me drogue comme le médecin l'avait prescrit. Les visites que l'on m'avait rendues étaient plus rares qu'à l'hôpital même si j'avais eu le plaisir de voir débarquer Astrid avec ses deux cadets, bien qu'elle soit venue pour m'annoncer qu'elle et sa famille devaient rentrer en France suite au décès accidentel de ses parents. Elle voulait veiller sur ses deux plus jeunes frères qui étaient encore au lycée. A la maison, Lena m'avait fait la surprise de venir un soir après son travail et avait été gardée d'office pour le repas pour lequel Lucie nous avait ensuite rejoint. J'avais le sentiment que ces deux-là allaient bien s'entendre et en était ravie, parce qu'au moins, cela obligerait Lucie à vivre en dehors de cet immeuble et de son boulot. La veille du départ de mes parents était arrivé à toute vitesse, et comme je ne pouvais pas raisonnablement les accompagner à l'aéroport (mes beaux-parents le feraient pour moi), la scène des adieux s'était jouée la veille au soir à la maison. Lucie nous avait laissés tous les trois avec sa discrétion naturelle et j'avais eu l'impression de me retrouver plusieurs années en arrière, la veille de mon départ pour la fac à Paris, avec beaucoup d'émotion chez chacun, des recommandations à n'en plus finir et quelques vérités éternelles qui nous reviennent dans les grandes heures. Très vite, la conversation était venue jouer le thème de l'âme-sœur et même si je comprenais ce qui les motivait, je détestais ça. Parce que Maman en parlait de manière toujours aussi rationnelle, la voix grave de Papa se perdait dans des grondements qu'il fallait décoder sans lui faire remarquer qu'il avait le cœur frémissant au bord des lèvres, et moi je n'avais qu'une envie, remonter les murs de ma forteresse pour ne pas laisser voir mes blessures. Mes parents ne connaissaient qu'une partie de ma vie amoureuse, ils ignoraient pour la plupart les raisons qui m'avaient rendue au célibat à chaque fois. Et ce n'était pas maintenant que j'allais leur en parler. Toutefois, Maman me surprit cette fois en allant au-delà de ce que je disais. - Cécile, nous partons parce que c'est ta vie qui est ici mais pas la nôtre. Et parce que Lucie est juste à côté et ne te laissera pas si ça ne va pas. Mais nous sommes tout de même inquiets. Pourquoi ne pas exiger que Teru revienne vivre avec toi? Vous ne vous détestez pas, non? - On n'a pas déjà eu cette conversation à l'hôpital? soupirai-je. Il vit avec celui qu'il aime mais il n'abandonnera pas son enfant. C'est le principal. Et puis... il ne serait pas heureux avec moi. Pas complètement. Déjà qu'il était mal d'ignorer les appels de ses parents. Ceux-ci essayaient de se rapprocher de lui, mais Teru refusait de leur parler. - C'est le principe de la vie, faire des choix. Et s'il veut s'occuper du bébé, il ferait aussi bien d'être présent tout le temps. - Maman, je suis capable de me débrouiller seule. Teru sera là quand j'aurai besoin de lui. Ça ira. - Lucie a raison : tu es un chêne. Et un chêne, ça ne plie pas dans la tempête, ça se rompt. Ma chérie, apprends à t'assouplir, c'est ce qu'il vous faut, à toi et à ton enfant. - M'assouplir, mh? - Apprends à t'appuyer sur les autres. Trouve quelqu'un sur qui te reposer, et cette fois, fais-lui confiance. Parce que c'est bien ça le problème, n'est-ce pas? Tu ne fais confiance à personne d'autre que toi. - J'ai confiance en vous! - Oui, et en Lucie, en Ben, en toutes ces personnes auxquelles tu tiens. Mais aucune qui soit capable de vivre à tes côtés en partageant TA vie. - Cécile, il n'y a rien qui rende plus sûr de lui un homme que la confiance que lui témoigne la femme qu'il aime. Si ton compagnon n'est pas à la hauteur de ce que tu espères, c'est peut-être aussi parce qu'il ne peut pas savoir si tu comptes sur lui. - Mais... toi, tu es quelqu'un de fiable, Papa. C'est normal que Maman s'appuie sur toi! Je ne vais pas jouer la petite fille fragile juste pour rassurer Monsieur! Ils avaient souri et m'avaient laissé méditer sur le sujet en me souhaitant une bonne nuit. Tss, comme si on pouvait bien dormir après une discussion pareille! Même si au fond de moi, une petite voix insistante me disait qu'ils avaient raison.
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++Sho++
Les parents de Cécile-chan étaient rentrés en Europe un peu plus d'une semaine après qu'elle ait quitté l'hôpital. C'était Jun qui avait abordé le sujet à la fin de la réunion pour le bouclage du programme de la tournée. - Riida, je suppose que Teru est très occupé? Notre chef leva le nez de sa tasse et sembla chercher à lire l'expression de son ex-amant. - Il... bosse, oui. Pourquoi tu poses la question? - Parce que Cécile se retrouve toute seule maintenant que ses parents sont partis. Lucie-chan ne peut pas la surveiller tout le temps. - Et toi? T'habites à côté, non? - Oui, Ma-kun, et j'ai le même genre d'horaires que vous. Je vais aller la voir de temps en temps, mais je ne serai pas dispo tous les jours. - Et tu penses qu'elle va se laisser surveiller? - Bon, surveiller n'est peut-être pas le terme approprié. Mais Lucie-chan passe le matin voir si elle va bien et prend ses médicaments, et quand j'y suis allé hier soir, je l'ai trouvée dans son bureau en train de bosser. - Hier soir... murmurai-je. Mais Jun, hier soir, on est partis tous les deux vers une heure du matin! - C'est pour ça que je dis qu'il faut la surveiller. Je peux passer en rentrant chez moi, mais si quelqu'un peut la faire se coucher plus tôt, ce serait aussi bien. Et Teru me parait le plus indiqué. - Je lui dirai de t'appeler pour qu'il arrange son emploi du temps en fonction du tien. Je levai un regard étonné vers Oh-kun, et vis au passage que je n'étais pas le seul. Nino aussi semblait trouver cette réponse surprenante. Mais Jun parut l'accepter comme naturelle et le sujet ne fut plus évoqué. En tout cas, plus jusqu'à ce que je me retrouve seul avec Nino une fois que tout le monde était parti. - Toi aussi tu trouves ça bizarre? me demanda le gamer alors que je rangeai mon ordinateur dans sa sacoche. - Bizarre n'est pas le terme. Mais tu as fait la même grimace que moi. - Mmm. Tu sais Sho... J'ai vu Jun pleurer quand Ohno l'a quitté. Le mot désespoir n'était pas assez fort pour décrire ce qu'il vivait. Et avec le recul, je pense que le gars avec qui Riida l'a trompé, c'était Teru. Ça veut dire primo que cet enfoiré trompe sa femme depuis le début, secundo que Jun savait tout. Et j'ai du mal à l'imaginer pardonner si facilement. Même si ça fait plusieurs mois. Nous en étions bien arrivés aux mêmes conclusions. Sauf que j'avais des données qu'il ignorait. - On ne l'appelait pas encore Riida quand Teru m'a avoué qu'Ohno lui plaisait. - Eh? ...Peut-être, mais ça date! Il aurait pu se bouger avant! Oui, là, j'étais bien d'accord. - Il y a autre chose. D'après Cécile-chan, Jun savait depuis le début qu'ils se plaisaient. Et en les voyant ensemble, il ne se serait plus senti la force de les éloigner l'un de l'autre. Apparemment il se sentait coupable de les avoir empêché de s'approcher autrefois. Nino me fixa avec des yeux aussi ronds que je les avais eus en lisant ces mots que Cécile m'avait écrits. - T'en as parlé avec elle? Quand? Aïe! Evidemment, il ne pouvait pas ne pas faire le lien. C'était Nino quand même... - J'ai découvert qu'ils étaient ensemble fin mars, en allant chez Oh-kun. Après, j'ai commencé à lui écrire des mails, et elle m'a répondu. Elle est plutôt bien occupée, et moi aussi, alors c'était le plus simple. Et je savais pas quand aller la voir. - Mais tu voulais aller la voir. Je vois, je vois. Dis-moi, Sho, tu lui as rendu visite à l'hôpital? - Seulement avec Aiba. Deux fois. - Et depuis qu'elle est chez elle? - Je... Mais c'est qu'il me tirait les vers du nez, ce sale gosse! Et comme un idiot, je lui répondais, en plus! - C'est plus loin. Et puis, c'est pas évident. A la base, Teru est quand même mon meilleur ami. Je pense qu'elle me croit de son côté. D'autant que Ma-kun lui a raconté que je l'avais défendu contre ses parents. - Sauf que c'est pas Teru que tu as défendu, c'est Arashi. Et puis, ne noie pas le poisson, Sho-chan. Si elle te croyait "du côté" de Teru, elle te répondrait sans doute pas quand tu lui écris. Elle sait très bien m'esquiver ou m'envoyer sur les roses quand je lui parle de Lucie-chan. J'ai l'impression qu'elle ne m'aime pas beaucoup, et ça m'enquiquine, parce que... bon, bref, ça, c'est ma tambouille. Là, on parle de toi, mon vieux. Alors, raconte! - Mais raconter quoi? - Elle te plait, non? Je me sentis rougir et eus soudain très très envie de me retrouver dans ma voiture. Mais Nino était entre moi et la porte et ne me permettrait pas de la rejoindre sans lui répondre. - C'est la femme de mon meill... - On s'en fout, Sho! Bon sang, mon vieux, son mari est ton meilleur ami, ok. Moi aussi j'aime bien Teru, c'est un chic type même si parfois on dirait un poulain qui n'a pas encore compris comment tenir sur ses pattes pour ne pas tomber et qu'il plane à cent mille. Mais il vit et couche avec un mec! Donc techniquement, elle est célibataire. Et en plus, elle doit se sentir bien seule. Parce que même si Jun est devenu son ami, il ne pourra jamais lui donner ce qui va lui manquer avec ce bébé qui vient : une épaule, un appui, un homme quoi! Des tas de choses que tu es plus que capable d'incarner pour la femme de ta vie, non? Alors la seule chose importante, c'est de savoir si elle te plait. Je le fixai quelques secondes en essayant d'intégrer ce qu'il venait de me dire. - Réponds! Elle te plait ou pas? Mais pourquoi je me sentais au tribunal, là? - ...Oui, elle me plaît. - Ok. Et le bébé, ça te gêne pas? - ...Non... - T'es bien sûr? Parce que ça, a priori, ça va pas changer. - Nino, un bébé, c'est pas un bagage! - Ah! bien! Bien, bien, bien! Je suis fier de toi, Sho-chan! Donc elle te plaît et le fait qu'elle soit enceinte d'un autre ne te gêne pas. Eh! bien, fonce! - Nino... elle est mariée... - On s'en f... - Non, enfin, oui, moi je peux passer dessus. Mais si je présente une femme à mes parents, ils voudront tout de suite planifier le mariage. Et si elle n'est pas célibataire... - Ah!... Oui, je vois ce que tu veux dire. Et c'est cool, parce que ça veut dire que tu vois loin avec elle, c'est tant mieux. Mais t'as pas besoin d'aller si vite. On va déjà s'occuper de vous mettre ensemble. Qu... quoi??!! - Je te demande pardon? - Ben oui. Si on attend que tu te bouges, le gamin entrera à la fac que tu auras à peine osé prendre la main de sa mère. Donc on va t'aider. Compte sur moi, ça va aller. Mais il me prenait pour quoi, au juste? - Nino, je suis pas si coincé, t'exagères! - Mais oui, mais oui. Bon, laisse-moi juste quelques jours pour voir comment goupiller ça. Je pense qu'il faudra mettre les autres dans le coup, pour que toutes les chances soient de ton côté. Pour le moment, ne bouge pas. Enfin, si, continue à lui écrire, c'est un bon début. Il me regardait avec un air de chat devant sa jatte de crème. - Oh! dis, tu voudrais pas te proposer pour aller la voir? Je doute que Teru puisse suppléer réellement l'ami Jun. En tout cas, pas tout seul. - Nino, je suis plus occupé que Matsujun. - Mouais... Bon, ça doit être vrai. Mais c'est dommage, ç'aurait été un bon plan. Alors insiste bien sur les mails. Fais-en des petits un peu tout le temps, juste histoire qu'elle voit que tu penses à elle. OK? J'avais pas besoin qu'il insiste pour avoir envie de lui écrire. Je promis quand même. J'avais l'impression curieuse d'être un candidat en campagne. Mais l'idée de me rapprocher d'elle encore plus ne me déplaisait vraiment pas.
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++Ohno++
- Ohno-san, c’est bon. Vous avez terminé pour aujourd’hui. A travers la vitre de séparation, je pouvais voir Lucie sourire en prononçant ces mots. Cela faisait quelques jours que nous travaillions avec elle et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’effectivement elle connaissait son affaire. J’avais rarement passé aussi peu de temps en studio. Et Jun n’avait pas réussi à émettre une critique sur elle à ce sujet. Pourtant je savais qu’il ne l’appréciait pas plus que ça. Je sortis du studio après avoir salué le staff et je retournai à notre loge. Aiba-chan y était mais, à mon entrée, il ne leva pas la tête. Je le rejoignis et regardai ce qui captai toute son attention. Il s’agissait des paroles de la chanson. - Daijobu, Ma-chan. Tout va bien se passer. C’est Lucie-chan, elle est cool tu verras… - Riida ? T’es déjà là ? - Oui, j’ai fini. Mais pourquoi tu stresses comme ça ? - Parce que je continue de me planter à cet endroit… et… je sais pas pourquoi… - Arrête d’y penser. C’est pas en te prenant la tête à quinze minutes de ton enregistrement que ça va s’améliorer. Si tu faisais une pause? - Hai ! Bonne idée. Sur ces mots, Aiba repoussa la feuille le plus loin possible sur la table en face de nous et se leva. - Café ? - Volontiers. C’est avec un sourire qu’il me tendit l’une des tasses qu’il venait de remplir avant de se rasseoir à mes côté. Un doux silence s’installa dans la pièce. … Silence ? Aiba ? Etrange… Je lançai un coup d’œil dans sa direction et constatai qu’il fixait sa tasse une peu nerveusement. Comme au début du mois quand il m’avait questionné sur les hommes. Je décidai de crever l’abcès. - Alors, t’as pris une décision ? Il me regarda avec des yeux ronds. Il n’avait sans doute pas compris le sens de ma pensée. Je précisai. - Shi… Ton dogsitter ? - Ahh… lui ? Il a démissionné. - Pourquoi ? - Il s’est confessé à mon retour de congé. - Whaou ! Courageux le petit… Mais… - Mais… pendant les vacances, loin de lui, de Lucie, de vous tous, j’avais compris que ce que je prenais pour de l’amour était en fait de la gratitude pour tout ce qu’il faisait pour moi. Alors je l’ai rejeté. Il a continué à venir s’occuper de mes bébés, mais au bout de la semaine, il m’a annoncé qu’il souhaitait arrêter et m’a demandé de lui trouver un remplaçant au plus vite. Le fils d’une de mes voisines cherchait un p’tit boulot pour se faire de l’argent de poche, alors je lui ai offert le poste. Il vient d’entamer sa troisième semaine maintenant. Après avoir dit ces mots, Masaki se leva, son sourire de nouveau accroché à son visage. Et alors qu’il se dirigeait vers les toilettes, il s’arrêta et me regarda droit dans les yeux. - Merci, Oh-chan. Pour tes conseils et pour m’avoir écouté. - De rien. Alors qu’il refermait la porte derrière lui, je m’étendis sur le canapé et fermai les yeux en souriant. Quelques minutes plus tard, j’entendis des portes claquer et entre les deux Aiba marmonner qu’il était en retard.
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++Aiba++
- Stop ! C’est mauvais. Aiba-san on recommence ! - Onegaï, Lucie-chan une pause… - Quand vous ne vous tromperez pas dans les paroles. Allez, on reprend. - Lucie tu es pire que Jun et Nino réunis quand tu t’y mets ! - Ninomiya-san a bouclé l’enregistrement de son solo en trente minutes et Matsumoto-san en à peine plus de temps. Vous, ça fait déjà une heure et demie et ce n’est pas encore satisfaisant. - Et Riida ? - L’enregistrement d’Ohno-san a pris quinze minutes de moins que ce que j’avais prévu… …OK faisons une pause, dix minutes pas plus !
Je sortis en trombe de la pièce pour rejoindre le reste de l’équipe et Lucie, mais celle-ci était déjà le casque sur ses oreilles en train de travailler sur ce qui était déjà fait. Je le lui ôtai. - Tu as dit pause. - Pour toi, pas pour moi. Tout à l’heure les autres vont venir donner leur avis sur le mixage. - Tu me tutoies de nouveau ? C’est quoi cette manie de nous vouvoyer quand on bosse ? Elle s’arrêta enfin, me sourit et recula son siège de la console. Elle se leva et se dirigea vers la porte. - Un café, Aiba-chan ? Je la suivis et, arrivés en vue du distributeur, la dépassai pour me planter devant la machine à la recherche de mon portefeuille. Elle me rejoignit au moment où j’insérai les pièces dans l’appareil et je vis sa main appuyer sur un des boutons. - Lucie ? Heu… C’était ma monnaie… - Je sais, me sourit-elle en récupérant sa canette. Puis elle partit s’asseoir sur l’un des sièges du coin détente tout proche, attendant que je la rejoigne. Je ressortis de la monnaie et pus enfin choisir ma boisson avant de la rejoindre. - Tu sais que Nino fait pareil ? - De quoi ? - Ben de piquer les… Je m’arrêtai quand je remarquai son visage hilare. Bien sûr, elle le savait. Elle nous connaissait depuis tellement longtemps, quasiment nos débuts, et avait eu bien des occasions de regarder nos émissions. - Tu sais Lucie, j’ai compris maintenant. Même si je t’aime, ça ne pourrait jamais marcher entre nous. Je te rendrais folle en un rien de temps. Et j’aurais l’impression de devoir faire face à Jun, Nino et Sho en une personne - Et de quelles manières ? Là elle fronça les sourcils. - T’es une bordélique organisée comme Sho. Trop ponctuelle comme Jun. Et tu es toujours en train de faire deux choses en même temps comme Neen. Enfin quand quelque chose te passionne, tu te donnes à 200% comme eux. - Toi aussi. Allez, il est temps de s’y remettre. Tu peux jeter ça s’il te plait ? Sans plus me demander mon avis, elle me mit sa canette dans la main et se leva avant de repartir tranquillement en direction du studio. Alors que je me levai à mon tour, je sentis quelque chose glisser de ma main avant de rouler au sol : la monnaie pour la boisson.
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++Lucie++
J’étais assez fière de ma plaisanterie. Il était le second à la subir et la réaction du premier avait été à la hauteur de mes espérances. Ma première victime avait été l’habituel rançonneur du distributeur. Après l’enregistrement de son solo, il m’avait proposé de prendre quelque chose et j’avais accepté sans m’en rendre réellement compte. Avant d’arriver à destination, nous avions tous deux décidé de faire un détour et en sortant des toilettes, quand je l’avais vu devant le distributeur, cette histoire m’était revenue et j’avais agi comme lui avec Riida, appuyant sur le bouton de ma boisson juste avant qu’il ne le fasse. Il m’avait lancé un regard noir avant d’éclater de rire et de déclarer : - C’était pas mon premier choix mais tant pis. Puis il récupéra la boisson avant de s’installer sur le siège. J’avais alors sorti la monnaie de ma poche et sélectionné la boisson qui m’attirait tant. Quand je m’assis à ses côtés, il m’annonça que j’étais une enquiquineuse. Je lui avais rétorqué que s’il m’avait offert ma boisson, je lui aurais offert la sienne.
Perdue dans mon souvenir, je sursautai quand un bras se glissa sous le mien, m’invitant à m’y appuyer sur le chemin de retour au studio. - N’en fais pas trop. - J’en fais pas trop; rappelle-toi je suis bordélique, ponctuelle et multitâche. Tu as juste oublié que j’étais aussi bornée qu’eux trois. En fait, c’est quoi ça ? Un compliment ? - C’est un compliment si tu retires ce que tu as rajouté. Mais je peux te faire la même avec les défauts si tu préfères… - Non merci. Allez ! File derrière la vitre et concentre-toi. Les paroles sont sous ton nez, c’est quand même pas si difficile… Nous étions arrivés au sas entre des deux pièces composant le studio et alors que je pénétrais à l’intérieur de la cabine, je constatai la présence de Nino. - Qu’est-ce… Que faites-vous là Ninomiya-san ? - J’ai fini ma journée. Il ne reste que notre réunion. Je me suis dit que je pourrais te filer un coup de main. Nino étant tout à fait capable de me seconder (mon prédécesseur me l’avait affirmé et je m’en doutais déjà avant…), je pouvais difficilement le foutre dehors sans motifs et je n’avais pas de temps à perdre alors je lui trouvais une occupation. - J’ai fait deux versions pour votre solo, vous n’avez qu’à les écouter pendant que j’en termine avec Aiba-san. - OK. Je me concentrai alors sur le chanteur derrière son micro, oubliant celui qui bidouillait à mes côtés un paquet de carte entre les mains. Quand je relevai la tête, ayant enfin libéré Masaki, je m’aperçus que le nombre d’occupants de la pièce avait doublé, et quand ma dernière victime nous rejoignit, le technicien qui restait sortit, me laissant seule avec le groupe presque au complet. - Lucie, j’ai eu une idée pour ce WE, ce serait une surprise pour Cécile-chan, tu veux bien qu’on en parle ensemble ? - Heu… oui… pourquoi pas. - Alors les gars rendez-vous dans deux heures chez Lucie. Qui s’occupe d’acheter les bières et les pizzas ? Là, il m’apparut que je venais de me faire avoir…
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++Jun++
Je venais de sortir sur le balcon, jouant avec mon paquet de cigarettes sans pour autant en allumer une. Depuis qu’on les connaissait, j’avais quasiment arrêté. Déjà parce que Cécile agressait toute personne approchant avec une clope, et depuis qu’elle se savait enceinte, c’était encore pire. Du coup, trois d’entre nous avaient largement levé le pied sur leur consommation et je devais avouer que je ne m’en portais pas plus mal; mon paquet était le même depuis mars et j’en tirais une certaine fierté, les autres ne pouvant en dire autant. Nino nous avait déclaré avoir une idée pour distraire Cécile le week-end prochain et s’était débrouillé pour que Lucie nous accueille chez elle. Nous étions en train de réfléchir aux endroits où nous pourrions passer le week-end quand le téléphone avait retenti. Lucie était partie du salon pour répondre mais Nino continuait à réfléchir, entrainant Masaki dans ses délires. Quand enfin il nous avait avoué l’idée qu’il avait derrière la tête, j’avais ressenti le beoin d’en griller une sans pour autant me décider maintenant qu’elle était entre mes doigts. Nino voulait que Sho et Cécile sortent ensemble, c’était ça sa « merveilleuse » idée…
- Quelque chose ne va pas ? La voix féminine dans mon dos était un peu inquiète. Je me retournai, grimaçai un sourire à notre hôtesse alors qu’elle me rejoignait sur le balcon. Elle s’appuya à la rambarde, observant le paysage comme je le faisais quelques instants avant. - Nan, pas vraiment… Le silence entre nous réapparut. Elle tourna sur elle-même, s’adossa à la barrière. - Excuse-moi, tu voulais fumer… Je te laisse. Elle se lança vers la porte et au moment où elle s’apprêtait à passer la porte, je la retins instinctivement. - Lucie-chan ? T’es d’accord avec le plan de Nino ? - Je ne sais pas… Oui, si ça peut rendre Cécile heureuse. Et Sho semble avoir plus d’un atout pour lui plaire, non ? Il est célibataire, attentionné, et surtout… Hétéro ! - Ca veut dire quoi ça ? - Tu le sais parfaitement. Mais je vais te le dire : s’il te plait ne t’implique pas trop avec elle si tu l’aimes bien, parce que tu ne peux que la faire souffrir. - C’est pas ce que je veux. - Je connais Cécile depuis presque quinze ans et je peux affirmer que tu es un danger pour elle. En disant cela elle s’était retournée vers moi et avait planté ses yeux droits dans les miens. Les éclats dans son regard pâle reflétaient une inquiétude jumelle à celle de Cécile quand elle se faisait du souci pour son amie. - Pourquoi êtes-vous aussi protectrices l’une envers l’autre ? Elle revint vers la balustrade. - Vous êtes bien curieux Matsumoto-san. Pourquoi devrais-je te répondre? - Parce que tu pourrais me convaincre… - Si je te dis qu’elle est ma première amie depuis l’âge de 11 ans. J’avais 17 ans et j’étais dans ma bulle. Sortie des cours, j’avais la musique et c’était tout. Pour moi, qui suis fille unique, elle était la grande sœur qui me manquait.
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++Lucie++
Oui Cécile était la grande sœur que je n’avais pas eue les dix-sept premières années de ma vie. Elle m’avait remise sur le bon chemin, me sermonnant quelquefois, me protégeant souvent contre les autres et contre ma naïveté.
Cécile et moi nous étions rencontrées sur un banc de l’université, et nous chantonnions la même chanson. Suffisamment connue pour n’étonner personne. Suffisamment dure pour que les oreilles éduquées y prêtent attention. Nous nous étions regardées un moment avant que je n’ose ouvrir la bouche. - Tu as une belle voix. - Merci. Tu chantes bien aussi. Après un silence pendant lequel j’avais rassemblé mon courage, je lui avais demandé ce qu’elle faisait et, à ma grande surprise, elle ne faisait pas de la musique (comme moi) mais des langues. Elle en parlait couramment trois et son anglais était assez fluide pour prétendre réaliser son projet de devenir interprète. Quant à moi, je ne savais pas ce que je voulais à l’époque. Je savais juste que j’aimais suffisamment la musique pour obtenir une licence dans ce domaine.
- Lucie-chan ? Tu chantes quoi ? Revenant à la réalité, je m’aperçus que je fredonnai La Chanson. - ‘Vivo Per lei’ - Nani ? - C’est la chanson qui nous a permis de nous rencontrer avec Cécile. C’est pas de la pop, de l’électro ou du rock ; je doute que tu aimes. Arrgh. La conversation s’apaisait enfin et voilà que je remettais de l’huile sur le feu. - Qu’est-ce que tu en sais, qu’est-ce que tu connais de mes goûts, hein ? Je me décollai du bord du balcon et me mis bien en face de Matsujun pour lui redemander: - S’il te plait, ne fais rien qui pourrait blesser Cécile. Si tu l’apprécies, alors, vraiment, fais attention et rappelle-lui exactement tes limites. Lui la voyait comme une amie, c'était clair, alors que moi, je sentais que Cécile tombait doucement amoureuse de ce gars. Il était si attentionné envers ses amis, et elle tellement en demande d'affection, que ça ne pouvait qu'aller dans le mur. Et je trouvais qu'elle s'était pris suffisamment de murs comme ça. Et quand bien même elle s'en rendait compte, je la soupçonnais de faire exprès de se laisser entraîner dans une relation stérile, juste pour se protéger. - Ne t’inquiète pas. Je ne veux pas lui faire de mal. Mais pour ce qui est de Sho, je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. Je le regardai et vis dans ses yeux la sincérité. Il voulait lui aussi que Cécile soit bien et il semblait sûr que ce ne serait pas avec Sho-kun. - Alors dis-leur… - Pourquoi moi ? - Parce que tu as l’air d’avoir plus d’arguments que moi. - Lucie… Je traversai le balcon jusqu’à la porte fenêtre du studio et y pénétrai.
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++Jun++
- Lucie… gomen, murmurai-je alors qu’elle retournait à l’intérieur. Cette fille m’avait énervé bien des fois et je m’apercevais que je m’étais monté la tête contre elle tout seul. Pourquoi ? Je ne savais pas vraiment… Ah Si ! Sa relation avec Nino, celle avec Aiba aussi d’ailleurs, elles n’étaient pas claires. Il fallait que je sache. Je la suivis et entrai à sa suite dans ce qui s’avérait être sa pièce de travail. - Et toi? à quoi tu joues avec Nino et Masaki? Tu joues avec lequel ? - JE NE JOUE PAS ! Avec personne. - Chhhhhut ! Tu veux que les trois autres débarquent ? Elle se tut et nous guettâmes l’arrivée de l’un ou l’autre des gars, mais le chahut qui provenait du salon nous indiqua qu’ils faisaient plus de bruit que nous et que le cri de Lucie était passé inaperçu. - Si tu ne joues pas, c’est quoi alors cette relation ? Tu fais quoi avec Masaki? Parce que si j’ai bien compris, c’est Nino que tu aimes. Je la vis rougir quand j’évoquai le gamer. Au moins, j’avais tapé dans le mille pour ça. - Aiba-chan est un ami. Juste un ami. - Pour toi peut-être mais pour lui ? Je ne l’ai jamais vu aussi accro et ce dès le début. - Aiba-chan sait très bien ce qu’il en est et moi aussi; ne t’inquiète pas pour lui, et s’il va bien, ce n’est pas à cause de moi… - Et Nino ? - Nino… c’est… - Plus compliqué ? - Mmm. - Si tu l’aimes, pourquoi tu lui dis pas ? Tu le rends fou depuis que tu es là. - Et lui me rend folle, c’est de bonne guerre non ? - Mouais… enfin ça me rassure un peu. Il ne fait pas tout ça pour rien. - Fait quoi ? Je me tus. Après tout, c’était pas mon problème, leur relation; maintenant je savais que Nino finirait par aboutir même si elle n’en savait rien. Pour Aiba, il faudrait juste que je m’assure qu’il n’en souffrirait pas trop. - Lucie-chan ? T’es où ?... Ben vous faites quoi ici tous les deux ? Lucie on a besoin de tes conseils, viens ! Aibaka tira la jeune femme sur ses jambes et je suivis le mouvement. La soirée risquait d’être compliquée…
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++Lucie++
J’espérais qu’il avait compris le message à propos de Cécile. Il ne pouvait pas continuer ainsi à jouer au chevalier servant lui faisant espérer des choses impossibles. Mais en suivant Aiba-chan un peu contrainte et forcée, je réalisais une chose : c’était la première fois que Matsujun et moi prenions le temps de discuter à propos des personnes auxquelles nous tenions. Ce qu’il m’avait dit plus tôt se révélait selon moi tout aussi vrai pour lui que pour moi : nous étions prêts à tout pour protéger le bonheur de ceux que nous aimions. - Ils étaient dans le studio de Lucie en train de papoter. Nino grimaça à la remarque de Masaki avant de me fusiller du regard. Je me fendis d’un sourire à Jun avant de m’installer à côté de Sho, ignorant délibérément le siège que Nino me présentait manifestement. Jun s’y assit avant qu’Aiba ne prenne la parole. - Alors, voilà l’idée de Nino, et Sho n’est pas contre, mais on voudrait votre avis puisque c’est vous deux qui passez le plus de temps avec elle. - Je pense que Sho pourrait profiter du week-end prochain pour se rapprocher de Cécile. A nous de leur organiser des moments où ils ne seraient que tous les deux. Des occasions de passer du temps ensemble; et c’est là que vous intervenez… - Arrête Nino ! Je refuse de me mêler à ça. Je suis certain que c’est une mauvaise idée et que ça va nous retomber dessus. - OK, J. Tu nous lâches alors ? Je croyais que tu voulais le bonheur de Cécile-chan ? Et quel meilleur moyen de combattre une peine de cœur qu’en retombant amoureux ? - Nino, Cécile n’est pas comme ça, dis-je à mon tour. Alors même si tes intentions sont louables, je suis de l’avis de Jun-kun, et je n’ai pas envie de me lancer dans un tel projet si je ne suis pas certaine que Cécile soit disposée à se laisser faire. Alors le week-end prochain, si tu veux bien, je préfèrerais m’assurer de cela plutôt que d’adhérer à ton projet. Autrement je suis d’accord pour que nous passions du temps tous ensemble. Je vous annonce d’ailleurs que je sais où nous pouvons aller. - Et on va où ? - Chez les parents de Teru-kun. Ils ont appelé Cécile pour lui dire qu’ils laissaient la maison de Tokyo à notre disposition pendant leur voyage. Ils sont partis en France voir Ai-chan. Ils rentreront dans un mois. - C’est parfait ! On va pouvoir prendre du bon temps tranquillement sans s’éloigner trop du boulot. Les parents de Teru-chan ont toujours eu un timing du feu de dieu… cela se confirme une nouvelle fois. Ne, les gars ? - Mouais… Maintenant si vous voulez quand même vous jeter bille en tête là-dedans dès à présent, c’est sans moi et hors de chez moi. Jun-kun, peux-tu monter proposer à Cécile de nous rejoindre, comme ça je serai sûre qu’elle ne sera pas encore en train de bosser.
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++Jun++
Nous la regardions tous les quatre stupéfaits. Pas parce que ce qu’elle disait nous paraissait idiot. Au contraire, je trouvais sa position sage et cohérente par rapport à ce qu’elle m’avait dit avant. Par contre, ce qui m’avait scotché, et les trois autres aussi de toute évidence, c’était le Jun-kun. C’était la première fois qu’elle se permettait d’être aussi familière et ce, deux fois en moins de trois minutes. Mais ce qui m’étonnait le plus, c’était je n’en éprouvais aucun agacement. Notre conversation nous avait rapprochés bien plus que je ne l’avais imaginé. - Matsujun ? Tu vas chercher Cécile ou faut que je monte ? - Gomen, Lucie-chan, lui souris-je, j’y vais tout de suite. Au fait, maintenant que tu t’es décidée pour le Jun-kun, t’as plus le droit de revenir en arrière; donc oublie le Matsujun... ajoutai-je en me dirigeant vers l’entrée. Trois minutes plus tard, Cécile m’ouvrait la porte tout sourire. - Konbanwa. Entre, t’es là tôt ! Elle fronça soudain les sourcils avant d’ajouter. - Et ton camouflage ? Ton sac ? Décidément, c’était la soirée des surprises; parce que pour quelqu’un qui n’a en général aucun sens de l’observation, elle l’avait réalisé particulièrement vite. - Chez Lucie-chan, dis-je avant de me pencher vers elle. Mais elle m’évita, plantant son index dans ma poitrine. - Chez Lucie ? Qu’est-ce que tu fous chez Lucie ? - J’y dîne avec Masaki, Nino et Sho. Nous avions envie de faire quelque chose tous ensemble ce week-end. Lucie m’a demandé de monter te chercher afin de t’inclure dans nos projets. Alors tu viens ? J’avais débité toutes mes explications d’un trait sous son regard inquisiteur. Et pour faire bonne mesure, j’ajoutais un sourire, un de ceux qui la faisait normalement céder. - Toi, tu me caches quelque chose ! conclue-t-elle. Mais on verra ça plus tard. Parce que vu la population en-dessous, je vais pas descendre comme ça. Je la regardai et vis qu’elle était habillée d’un yukata. Avant qu’elle ne s’échappe, je l’attrapai par le bras pour l’attirer à moi et l’enlacer rapidement avant de la relâcher quelques secondes plus tard en lui murmurant: - Bonsoir... Nous descendîmes rejoindre les autres dix minutes plus tard, et nous mîmes tous à table.
Le reste de la soirée avait tourné autour des diverses activités que nous pourrions faire ce fameux week-end. Un barbecue fut notre première idée. C’est alors que Cécile souleva un point de détail que nous avions oublié : la seule chose qui était tombée au mois de mars chez les Miura était le barbecue. Aiba eut une de ses idées géniales : pourquoi ne pas leur en racheter un pour les remercier de leur invitation… Ne voyant pas de danger particulier dans cette idée, nous l’adoptâmes. La soirée se termina quand nous finîmes par nous mettre d’accord sur le choix du modèle. Lucie-chan s’était désintéressée de la question assez rapidement et avait commencé à faire la vaisselle. Nino l’avait rejointe et ils se chamaillaient devant l’évier pendant qu’Aiba, Cécile et Sho exploraient et supputaient sur les différentes possibilités qu’offrait internet, depuis le barbecue électrique (que Sho promouvait avec ferveur) jusqu’à celui en brique, que l’on montait soi-même et que l’on alimentait en bois manuellement, que semblaient préférer les deux autres pour des raisons d’authenticité et de convivialité. L’idée de fabriquer nous-même le barbecue m’inquiétait tout autant qu’elle me paraissait amusante, et quand Lucie et Nino se rallièrent au parti des manuels, Sho déclara forfait. La discussion s’éternisa sur des sujets plus vagues pendant quelques temps, jusqu’à ce que Cécile remarque Lucie somnolant sur son coin de canapé. Ce fut le signal du départ pour tous et, une fois que son amie l’eut convaincue qu’elle dormirait bien mieux dans son lit, nous sortîmes tous de l’appartement. Nous raccompagnâmes Cécile à son étage et nous récupérâmes chacun notre véhicule. Alors que je m’apprêtais à prendre l’ascenseur jusqu’à mon appartement, je reçus un mail de Cécile exigeant ma présence chez elle. Je décidais de faire à pieds le chemin en sens inverse et en route une idée pour ce WE me vint à l’esprit. J’envoyai un mail à mes camarades pour la leur soumettre. Pour Cécile, je comptai lui en parler de vive voix mais mes projets furent légèrement contrariés par son attaque brusque. - Alors, c’est quoi l’embrouille ? me demanda Cécile à peine eussé-je pénétré dans le salon. - Quelle embrouille ? tentai-je. - Jun… Tu m’as fait une promesse, Lucie n’a jamais su mentir, et plus d’une fois je l’ai sentie hésitante. - OK. C’est très simple… - Alors accouche ! - Lucie a des doutes… et Nino des projets délirants… Je rapportai dans les grandes lignes la conversation que nous avions eue un peu plus tôt dans la soirée. Au bout de mes explications, je sentis Cécile plus ou moins convaincue. Profitant d’un moment de flottement, je tentais de convaincre la future maman qu’il était plus que l’heure d’aller retrouver Morphée quand mon téléphone annonça l’arrivée d’un mail. C’était Aiba. Il était plus qu’enthousiaste à ma proposition. … C’est vrai, je voulais aussi lui en parler. - Cécile, tu le sais, après le prochain week-end, nous allons tous être surbookés entre le show au Tokyo Dome et la tournée qui débutera en août. Alors j’ai pensé que nous pourrions profiter que nous soyons tous ensemble pour fêter l’anniversaire de Nino. La vraie date est dans deux semaines mais… - … Alors il faut aussi fêter celui de Lucie ! me coupa-t-elle. - Hein ? - Si l’anniversaire de Nino est dans deux semaines, celui de Lucie était il y a quinze jours, et avec tout ça… j’ai totalement oublié. - … Il y a quize jours ? Un souvenir me revint ; un matin, en arrivant dans notre salle, nous avions trouvé sur la table un gâteau au chocolat et un petit mot de Lucie. Un petit mot ou plutôt un simple mot sur une carte de visite… « Enjoy ! » Quand nous l’avions retrouvée le lendemain pour travailler, nous l’avions remerciée et Sho lui avait demandé s’il y avait une raison particulière pour le gâteau. Après un instant d’hésitation, elle avait dit que c’était pour nous remercier de notre présence autour de Cécile et nous l’avions cru… Et si c’était… - Dis Cécile… Lucie est du genre à faire un gâteau pour son anniversaire et à l’offrir sans dire pourquoi? - Oui… si elle ne veut pas déranger. Elle m’a invité ce soir-là mais les parents venaient de repartir et nous avions déjà prévu la soirée DVD… alors je me suis excusée en zappant totalement la date. Je m’en suis souvenu deux jours plus tard. Elle m’a assurée que c’était pas grave mais je suppose qu’elle a fait de la pâtisserie ce soir-là et vous avez eu une partie de sa production le lendemain. - Je voulais lui parler de la fête-surprise pour Nino demain, mais si c’est aussi la sienne, est-ce une bonne idée ? - Mmm… je pense oui. Ce sera même peut-être plus facile à dissimuler. On dit à Lucie que c’est une surprise pour Nino et vice versa… - OK, on fait comme ça. J’en parlerai aux autres demain; …mais maintenant… Au lit, Princesse !
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